Une fois dans la voiture, Lynn se surprit à laisser son esprit vagabonder tandis qu’elle observait l’extérieur défiler devant ses yeux concentrés et sérieux. Mais la fin de tirade de Mikaël lui arracha un air proprement horrifié : elle était loin de trouver la comparaison cachée d’avec sa mère flatteuse il faut dire. Elle détestait être comparée à Marjorie Maryweather, pour la simple et bonne raison qu’elle ne trouvait strictement aucun élément de comparaison entre elles deux. Voilà pourquoi elle fronça les sourcils et balança, à juste titre : « et qui a déjà dit la phrase magique, hum ? » Le fait est que Lynn avait été la première et pour l’instant la seule à dire « je t’aime » à l’autre. Cela ne la choquait pas, mais elle n’avait pas pu s’empêcher de le défier de cette manière… une façon plus douce de dire qu’il était sur un terrain glissant et que la comparer à sa mère n’était pas le meilleur moyen de lui conter fleurette. « Tu seras toujours plus sensible que moi, je pense. Question d’éducation mais surtout de vie. Tu sais, avant de faire ta connaissance, j’étais un brin suicidaire comme nénette… je me jetais à corps perdu dans mes missions en espérant toujours qu’il s’agirait de la dernière, que je n’aurais pas à en revenir pour continuer à « subir » ma vie plutôt que de la vivre. Puis tu es arrivé. C’était la première fois qu’un soir je discutais aussi simplement avec une personne. Je t’ai trouvé infiniment humain… et peu de temps après, je me suis énormément renseignée sur toi, avant même que ma mission te concernant ne soit mise entre mes mains. Il y avait quelque chose d’intriguant dans ta personne… je savais que j’allais te revoir, d’ailleurs, je le voulais. Il m’est arrivé à plusieurs reprises de t’observer au loin alors que tu quittais l’immeuble du New Yorker. Je sais, ce n’est pas glorieux et c’est bien pour ça que tu n’en n’as jamais rien su avant aujourd’hui ! Je pense qu’à ce moment là je le savais déjà… » Lynn savait qu’il la rendait meilleure et que même à ce moment précis, elle ressentait déjà quelque chose pour lui. Mais quant à le décrire ou à le dire clairement, c’était une autre paire de manche.

« Ça me fait penser à quelque chose, d’ailleurs. » Délicatement, elle sortit de son sac en bandoulière un cliché, alors que Mikaël se garait juste devant son immeuble et qu’elle pouvait donc obtenir toute son attention. « La nuit de notre dispute si violente… je suis allée à l’hosto pour savoir si tout va bien, j’étais très flippée à ce moment là, et même à la limite du malaise. Ils m’ont fait une échographie et… je pensais t’offrir le cliché pour une occasion spéciale, mais on va dire que c’est aujourd’hui l’occasion spéciale. » Elle lui tendit le cliché sur lequel on pouvait distinguer la tête minuscule de leur fils, ainsi que sa main n’étant pas moins rikiki. Lynn le lui avait tendu avec une certaine émotion dans le regard, attendu qu’il ne le prenne avant de descendre de voiture. « Tu viens ? »

Mikaël fut surprit par les quelques révélations de Lynn, mais aussi touché. Comme si elle venait simplement d'avouer le fait qu'ils étaient prédestinés à finir ensemble bien avant de vivre tout ce qu'ils avaient vécu ensemble. Il y avait aussi une notion assez perturbée en pensant que la jeune femme avait très bien pu savoir tout de lui, alors qu'il connaissait presque son nom. Presque comme si elle avait même pu être courant du temps qu'il passait aux toilettes, à être avec des femmes ou encore pire : à se... Non rien. Il coupa court à cette pensée à peine naissante et jeta un coup d'oeil à l'échographie que Lynn avait sortit tout droit de nul part. C'était attendrissant, de savoir que cette petite chose vivait déjà, avait un coeur formé qui battait le rythme dans le ventre de sa compagne. « A chaque fois que tu reparles de cette nuit j'ai envie de me tirer une balle. J'avais oublié à quel point un homme pouvait être bête, en l’occurrence, j'avais oublié à quel point JE pouvais être con. » Qu'aurait-il fait s'il n'avait pas pu se faire pardonner auprès de la brune? Les cinq jours qui avait suivit cette dispute avaient étés les plus atroces de son existence, et il mettrait tout les moyens en oeuvre pour que ça n'arrive plus jamais. Le suédois accéléra le pas vers l'immeuble, et aussitôt sortit de l’ascenseur il avait ouvert la porte de l'appartement rapidement. La discussion continuait pendant qu'il fourrait avec désinvolture quelques fringues dans une valise : « Et cette rencontre, cette nuit là, au bar, elle était totalement aléatoire hein? Spontanée à cent pour cent? D'un côté, ça ne m'étonnerait pas qu'elle ne le soit pas. De toute façon peu importe, je crois que je ne remercierais jamais assez le ciel, et dieu sait que je ne suis pas croyant, de t'avoir rencontré. (il rigola). » Un passage express à la salle de bain pour prendre le nécessaire niveau hygiène et il ferma la fermeture éclaire en un 'zip'.
« J'avais oublié que tu parlais suédois aussi, ça sera utile tu pourras te faire bien voir directement. Je me demande même si ils ne vont pas finir par t'aduler et de faire un temple ou une connerie dans le genre. » Il avait son habituel petit sourire en coin, balançant des touches d'humour sans subtilité par ci par là.

C'est vrai que Mikaël n'avait pas encore retourné les deux mots magiques à Lynn, et ce n'était pas que ses sentiments ne soient pas réciproque, pas le moins du monde. Il ne fallait pas en douter. Doucement il s'emparait dans sa main pour entrer dans la voiture une nouvelle fois. Traverser l'océan prendrait la nuit entière, mais il avait plaisir à ce dire qu'il serait dans son appartement natal bientôt. « Mon dieu, dis toi que tu vas redécouvrir mes parents en même tant que moi. Ça fait quoi... 3 ans que je n'y suis pas retourné? A croire que le pays ne me manque absolument pas. Mes souvenirs sont bons, mais il y en a trop là bas pour que je puisse y retourner souvent. Je veux que tu saches que si j'y vais, c'est grâce à toi. Parce que je n'ai plus de raison d'être nostalgique aujourd'hui, pas depuis que tu es là. Et puisqu'on fait la minute confession, tu as tout changé dans mes traits de caractère, à croire que mes vieux ne me reconnaîtrons pas! » Il parlait du fait d'abord que l'enfant était devenu sa priorité, ce qui serait confirmé par la surprise de son père quand il apprendrait le fait. Lynn était une petite lumière qui était venue illuminé son existence, et il adorait le sentiment de l'avoir à ses côtés. « Je prévois même de t'emmener dans des endroits branchés de la capitale, des coins de repères que j'ai, rien qu'à moi. Je vois déjà la tronche de mes vieux potes, il vont en baver en te voyant, j'en jubile d'avance.» La voiture roulait tranquillement sur l'autoroute, la bonne humeur dans l'atmosphère.

Lynn n’avait pas encore répondu à la question de Mikaël : ils auraient tout le temps de le faire dans la voiture voire même dans le jet pendant leur voyage, qui risquait de s’étirer en longueur d’ailleurs. Si la brunette y était habituée, elle savait que ce n’était sûrement pas le cas du beau suédois. Et en parlant de suédois, le jeune homme lui arracha un rire amusé face à toutes les tirades qu’il lui débitait sans discontinuer, et surtout sans qu’elle n’éprouve elle le besoin de l’interrompre ou de répondre à son tour. A vrai dire, elle aimait entendre le son de sa voix, cela l’apaisait. Ce qu’elle n’irait pas jusqu’à avouer, c’est qu’elle avait enregistré sa voix à un moment précis qu’ils avaient passé tous les deux, et se l’était repassé à de très nombreuses reprises en mission… juste histoire de ne pas laisser son humanité complètement de côté, et de penser sans arrêt à lui en écoutant le doux son de sa voix non dépourvue d’un charmant accent. « Tu veux la vérité sur notre rencontre ? » Lynn haussa un léger sourcil, un sourire amusé ponctuant ses paroles tandis qu’elle le laissait conduire pour la troisième fois… une grande première dans son existence, elle qui adorait prendre la tête des opérations ! « Je n’étais même pas armée cette nuit là. C’est comme si je n’étais même pas espionne, pour la simple et bonne raison que je sortais de l’hôpital après trois semaines de cauchemar. Mon retour de Birmanie… j’avais besoin d’un verre, d’un moment de paix, ne serait-ce que pendant quelques minutes. J’ai croisé ton regard, et c’est parti de là. Si cela avait été une rencontre non fortuite, ma façon de t’aborder aurait été moins directe. J’aurais analysé avant. Là, c’était un peu en mode McGuyver… et je me suis sentie complètement ridicule parce que ça faisait un lustre que je n’avais pas fait ça. Le naturel m’a un peu fait défaut jusque très récemment. » Lynn haussa les épaules avant de regarder la route et de soupirer. Ah, la Suède ! Elle aussi y avait beaucoup de souvenirs, plus qu’elle n’aurait bien pu le dire. Il n’était pas question d’en faire une liste précise au jeune homme, mais plutôt de lui faire comprendre que ce voyage était justement ce qu’il leur fallait : se retrouver loin des intrigues, des dangers, dans un environnement plus familial, et qui aiderait sûrement Mikaël à renouer avec ses parents de façon plus franche qu’au téléphone. « Tu n’es pas le seul à avoir changé. C’est beaucoup plus flagrant chez moi, tu peux me croire ! Tu ne me connaissais pas avant, c’est pour ça. Tant mieux d’ailleurs… »

Quelque part, Lynn avait grande hâte de rencontrer les merveilleux parents de cet homme non moins merveilleux. Une telle excitation ne l’avait plus prise aux tripes depuis si longtemps qu’elle ne pouvait même pas s’en souvenir. Certes, rien ne l’aurait empêchée d’emporter quelques armes au cas où une tuile leur arrivait sur place, mais elle avait l’intention de laisser l’espionne soigneusement de côté pour se concentrer sur une toute nouvelle donnée : sa famille, celle qu’elle choisissait et qu’elle était sur le point de fonder avec Mikaël. « Tu as dû beaucoup leur manquer… je crois que si je disparaissais pendant trois ans, mon père serait le premier à sauter dans un avion pour venir me flanquer la rouste de ma vie ! D’ailleurs, c’est ce qu’on fait quand on n’est pas d’accord… sur un ring, c’est nettement plus efficace et on se perd moins en discussion ! Mais bref ; j’ai hâte de les rencontrer, je suis sûre que je vais les adorer. » Ce qui n’empêcha pas Lynn de plisser légèrement les yeux face à l’aveu du suédois concernant ses potes : il comptait fanfaronner avec elle à son bras ? C’est drôle, mais Lynn n’était pas arrogante au point de se comparer à une œuvre d’art, c’était même tout l’inverse. Elle connaissait sa valeur, son sex-appeal, mais n’était pas du genre à en jouer à tour de bras, pas si elle n’y était pas contrainte par une mission. « Ah ouais, tu en jubiles ? Et si on me fait du gringue pendant que tu fanfaronnes auprès de tes potes, tu vas faire quoi Casanova ? » Lynn éclata de rire face à sa propre question, tout en lui indiquant la route à suivre vers le hangar réservé à la NSA où leur jet les attendaient bien sagement. Une route bien en dehors de New York, évidemment, afin de ne surtout pas être dans le radar de qui que ce soit et que personne ne puisse tomber dessus, même par hasard. « A vrai dire… sans dire que je connais la Suède comme ma poche, je crois que j’ai eu plus de missions là bas que dans tous les autres pays réunis. Voilà pourquoi j’en parle aussi bien la langue. Je pense que tu connais toujours davantage ce pays, vu que tu y es né, mais j’y suis allée souvent, y compris récemment. Considère ou pas que c’est un private joke du destin, mais j’aime beaucoup ce pays, et sa langue aussi. Pour ça que je t’ai parlé dans ta langue maternelle lors de notre deuxième rencontre. C’était pour te mettre en confiance, tiens ! » Lynn se permit de caler délicatement sa tête contre l’une des épaules si larges de Mikaël avant de pousser un soupir d’aise plutôt évident. « Tu es heureux là, tout de suite ? N’aie crainte, j’ai planqué tout ce qui pourra te donner envie de te flanquer une balle. Tu peux dormir tranquille. » Lynn ne lui en voulait plus au sujet de cette fameuse nuit. Elle avait ressentit une large rancune, il est vrai… mais elle était la première à se rendre compte des œillades attendries qu’il jetait à son petit ventre s’arrondissant de jour en jour.

A croire que même une fois la routine amoureuse commencée, les révélations pouvaient encore pointer le bout de leur nez. Que le total hasard ne soit pas le fruit de cette rencontre importait peu pour le suédois, deux âmes destinées s'étaient trouvées, il ne pouvait pas en ajouter une de plus. Un enfant en route, un projet d'union qui ne saurait tarder et une affection sans bornes qui n'avait même pas été imaginable lorsqu'il l'avait rencontrée. Mikaël l'avait trouvé dur lors de leur deuxième rencontre et jamais il n'avait pensé pouvoir finir heureux et complètement gaga de cette fille. Celle qui portait un tailleur et qui se faisait passer pour une rédactrice en chef!
Ce n'est pas comme si j'avais disparu des radars. Ils ont toujours eu des nouvelles, mais si j'étais à l'hôpital par exemple, ils n'en auraient rien su. Si ma mère est quelqu'un d'adorable et d'ouverte, c'est une vraie couveuse, j'ai pensé qu'elle ne me lâcherait jamais le bras dans le hall d'embarquement la dernière fois. Il souria. Il t'adoreront n'en doute pas, je crois même que ça va super bien se passer. Quant à mes potes? Tu ne connais pas mon surnom là-bas, à croire que tu n'avais pas tout dans ton superbe dossier béton Mikaël! Je leur collerais une rouste, tu n'en imagine même pas l'ampleur. Le jeune homme avait beau être raide dingue de sa brune, et transformé en gros nounours prêt à câliner des journées entières, il restait tout de même un colosse bien monté. Et il n'aurait pas de scrupule à utiliser ses larges poings, si l'occasion s'en profilait. D'un côté ça me soulage que tu saches la langue, j'ai l'impression que tu es née avec moi, là-bas. En fait, tu es la représentation de mon changement, je peux retrouver en toi tout ce qui me concerne. Il resta interloqué, l'oeil posé sur Lynn alors que la voiture était garée. Wouaw, je viens de réaliser que tu es absolument tout ce que j'adore. Parfois il aurait été ingénieux de savoir arrêter la réflexion, mais ce moment n'était pas de ces fois là. Il se contenta de lui donner un gros baiser avant de sortir du véhicule. La piste était dégagée, bordée d'arbres comme un camouflage. Un endroit paisible, et de nombreux bolides préparés sur un parking géant. Il y avait un homme de main, qui attendait au pied d'un escalier reliant le sol et la porte de l'avion. Mikaël ne pu s'empêcher de lâcher un gros soupir d'émerveillement. Difficile de ne pas prendre son pied dans cette situation, difficile de ne pas profiter d'un tel privilège. Pour une fois il allait être le servit et non le serveur, et bien qu'il n'ait jamais été pauvre il n'avait jamais été riche non plus.
Putain Mike, 28 ans d'existence et tu découvres enfin les véritables plaisirs de la vie.
Le sourire aux lèvres comme un gamin il embarqua dans la cabine, laissant ses bagages au premier volontaire pour aller les ranger en lieu sûr. Les sièges étaient en cuir, un cuir qui brillait, et une brillance qui donnait une lumière superbe. Exaltation divine! Il allait passer sa prochaine journée dans une vraie boîte de luxe.
Tu sais que feras de moi un gamin everytime. On a pas le droit à un lit aussi? Je vais pas réussir à dormir. Oh purée! Une télévision, sérieusement? Il y a des films? Et oh... Un mini-bar, sérieusement?! On peut genre, s'en prendre plein la tronche dans les airs? Ahhhh! Le jeune homme s'affala dans un siège, laissant Lynn prendre place en face de lui. Il ne pouvait s'arrêter de regarder partout de lui, découvrant à chaque fois des gadgets différents, comme s'il n'avait jamais prit l'avion.

La tout de suite, je suis plus qu'heureux! Ne te méprends pas, je ne te parle pas de l'avion et des privilèges que tu m'offres, mais de me dire que je suis avec toi, là, maintenant. Et tu sais ce que c'est le mieux? C'est que dans quelques heures tu seras toujours avec moi.

A croire que la jolie brunette venait d’offrir à Mikaël son cadeau de Noël en avance… il semblait avoir des pétales de rose dans les yeux et ses yeux brillaient comme autant d’étoiles dans le ciel. Quant à Lynn, elle laissait planer une délicate expression malicieuse ainsi qu’un sourire en disant long quant à sa façon de penser : c’était presque émouvant de le voir s’émerveiller de tout ce qu’il ne semblait pas connaître… il s’agissait d’une chose tellement commune pour elle que celle de se déplacer en hélico ou en jet privé ! Ce n’était pas tant qu’elle soit fille de riche, mais plutôt dû à son boulot la laissant côtoyer les milieux les plus luxueux… et accessoirement les plus dangereux. Ceci étant, elle n’était aucunement blasée au point de trouver tout ce qui l’entourait normal. Au contraire, elle était la première à sautiller de joie comme une véritable gamine dès qu’elle pouvait faire de la plongée, du jet-ski ou encore un saut en parachute. Ce qui sortait de l’ordinaire n’en n’était que plus délectable, mais ce qu’elle côtoyait régulièrement n’était pas moins intéressant… pas alors que cela lui permettait d’organiser un voyage impromptu en Suède en compagnie de son cher et tendre ! « Dois-je comprendre que si je devais partir demain, je te manquerai ? » le défia-t-elle non sans marquer son hilarité d’un léger haussement de sourcils. « Enfin, en tout cas, je suis vraiment curieuse de voir ce que tu serais capable de faire si l’un de tes potes me colle… suis sûre que ça doit valoir son pesant de cacahuètes en plomb ! » Lynn cessa de s’exprimer pour lui montrer que le siège permettait de s’allonger complètement, tout en continuant de regarder son film sur l’écran du plafond de l’appareil. Elle se releva cependant, attachant soigneusement sa ceinture après avoir donné le plan de vol au pilote, attendant que le départ soit effectif et qu’ils ne soient en l’air pour bouger. A vrai dire, la ceinture la serrait atrocement : à sa décharge, elle qui était aussi fine qu’un cure-dent, elle avait pris quelques kilos depuis la dernière fois qu’elle avait été en présence de Mikaël. Une chance qu’il ne l’ait pas vue nue ! Ce fut donc une délivrance que de pouvoir ôter cet engin de torture, tandis qu’elle soupirait à nouveau d’aise. Cela n’empêchait pas ses propres vêtements d’être affreusement serrés, en vérité…

« Si tu es heureux, alors je le suis aussi. » Lynn alla jusqu’à se lever pour s’emparer de ses lèvres avec une délicatesse que l’on ne lui connaissait que peu, non sans lui sourire de façon franche et éclatante en se relevant. « Ne prends pas peur, mais je vais essayer de trouver un truc autre à me mettre : je suis serrée c’est une horreur… et je vais te traîner dans un shopping ! Je n’ai pratiquement plus rien à me mettre, même si je ne ressemble pas encore à une baleine échouée. Tu seras mon conseiller en matière de classe… tu penses pouvoir faire ça pour moi ? » Lynn se permettait de rire par avance et par principe de cette fameuse séance de shopping à venir : cela ne risquait pas de manquer d’intérêt… « Je me change et après j’ai une question de la plus haute importance à te poser. » Exprès, elle laissa planer le doute tandis qu’elle reprenait en main le sac de voyage qu’elle avait mis en place juste au dessus d’elle : impossible pour Lynn de ne pas avoir accès à une arme facilement, ou à un vêtement de rechange ‘au cas où’. Mais le Stuart de l’appareil commençait justement à leur servir quelque chose à grignoter et à boire au moment où la demoiselle enlevait son chemisier ET sa jupe, pour se retrouver en sous-vêtements sans aucune gêne. Elle cherchait son bonheur parmi ses affaires, et autant dire que si elle était magnifique, ses petites rondeurs de grossesse étaient bien plus visibles ainsi. Chose qui ne sembla pas déranger le Stuart outre mesure, puisqu’il était planté comme un piquet, deux flûtes de champagne en main, à quelques centimètres de Mikaël. Discret l’observation ! « Oh non je ne bois pas d’alcool, merci. Je vais plutôt prendre un jus d’orange frappé s’il vous plaît. » La pudeur n’était pas l’un des attributs de Lynn, en vérité… et tant qu’elle n’avait pas trouvé son bonheur, elle ne mettrait pas quelque chose sur sa personne.

Le petit couple avait transformé la cabine en leur chambre de noce, enfin presque. Il n'y avait pas de gêne connue par Mikaël lorsqu'elle se déshabilla avec bon coeur, cherchant une tenue. Elle était même magnifique, comme à son habitude. Le suédois avait eu tendance à avoir un tableau de chasse assez prestigieux, et les femmes qui s'y trouvaient n'étaient pas bas de gamme, et vu que la société le voulait, elles n'étaient pas non plus des plus rondes. Pourtant, il avait toujours aimé les formes, et la chair, et bien dommage qu'il ne puisse pas en profiter plus que de ses yeux. Et le stuart planqué derrière lui telle une sentinelle n'était pas ferveur de la discrétion, alors doucement il osa le sortir de sa planque quand Lynn fit de même. « Allons mon bon homme, il y a certes du monde au balcon mais ce n'est pas une raison pour rester planqué derrière le rideau. » Il invita ensuite le jeune homme à lui laisser sa coupe de champagne, et à partir remplir la demande de sa compagne. Les heures de vol n'allaient pas être longues, mais si il ne profitait pas de se temps dans les airs pour dormir pas de doute sur son futur état une fois arrivé à bon port. « Tu trouveras quand même quelque chose à te mettre sur le corps! A moins que tu préfères te trimbaler à poil pendant les quelques heures à venir, je peux même demander au stuart de rester dans la cabine, hein!» Une pointe de jalousie sans sa voix? Pas le moins du monde. Après-tout il fallait un signe ou un claquement de doigt pour condamner le passage dans leur petit cocon privé. Alors le personnel passerait le reste de son voyage dans leur compartiment, ou dans le cockpit s'ils le souhaitaient. « Parce que si tu restes comme ça, tu attises le lion! Et le lion a faim de viande fraîche. » Mikaël avait la coupe à la main, la tête légèrement penchée pour mieux admirer la belle brune, un petit sourire aux lèvres et ses yeux illuminés qui ne l'avaient pas quittés depuis le décollage.

« Tu sais qu'aucun autre lion n'aura le droit de toucher à ma lionne, hm? Et je suis sûr que tu ne veux pas me voir à l'oeuvre, à moins que tu trouves le fait de frapper quelqu'un au sang est quelque chose de romantique. Je ne pourrais pas le comprendre, mais je l'accepterais, et vu que je suis une fleur bleue invétérée je ferais en forte de te faire plaisir. Madame!» Il ne cachait pas sa fatigue, et laissa un soupir traverser sa poitrine, le soupir de quelqu'un qui avait passé des journées bien remplies, et c'était le cas. Lynn devait être dans le même état que lui, en plus ce qu'il se tramait dans son ventre. Dans un petit marmonnement et une feinte, il s'approcha d'elle pour lui coller les lèvres sur la joue, puis l'embrassa de plein fouet : « Mmmh, tu mettras du rouge à lèvre une fois là-bas? Vu qu'on va arriver en fin de journée, je pensais passer une nuit à l'hôtel avant de passer aux choses sérieuses. On pourrait faire un peu de shopping, je te montrerais quelques lieux bien placés et ce sera l'occasion de boire un petit verre, non? » Le verre était pour lui, sûrement pas pour la jeune femme enceinte, et il veillerait là-dessus, quoi qu'il arrive. D'ailleurs devoir se retenir de fumer était assez compliqué, et il s'attendait encore à une remarque bien placée de sa mère quand il sera sur place. « Après si tu préfères que l'on passe une longue nuit dans les bras, à simplement dormir, si je ne ronfle pas, je dis oui aussi tu sais. »

Lynn laissa échapper un éclat de rire tandis qu’elle captait la remarque de Mikaël : à moins qu’elle n’y fasse vraiment attention, la jolie brune n’avait guère cure des regards que l’on lançait sur sa personne. Avant, elle n’y prêtait pas attention à cause de son travail et de son manque d’envie à s’impliquer dans une quelconque relation, mais maintenant, c’était à cause d’un beau suédois lui faisant face, ne tardant d’ailleurs par à la rejoindre pour l’enlacer de ses grands bras puissants. Pour un peu, elle se serait presque sentie faible, ne serait-ce que pendant une seconde. L’envie d’être protégée et non plus d’être celle qui protège autrui était… grisante et tentante. Mikaël n’aurait jamais à gérer des situations aussi complexes que les siennes au cours de sa carrière d’espionne pour la CIA, mais il n’empêche que s’il se battait pour elle, son blason allait se redorer de lui-même. Après tout, il est logique d’être jaloux dès que quelqu’un approche ou lorgne un peu trop sur l’être aimé… bien que le journaliste soit sûrement nettement moins violent que la brunette, semblable à une furie à la moindre œillade caractérisée de la gent féminine. Ses nerfs ne tenaient jamais bien la route sur ce sujet précis, à vrai dire… mais ça n’en n’était pas moins sexy. « Je rêve ou tu as été à deux doigts d’être jaloux ? Deux doigts seulement. N’aie crainte, je serais toujours bien pire que toi sur le sujet. Et… même si tu refaisais la tête de quelqu’un qui m’aurait lorgné dessus, je suis bien plus capable de toi de massacrer quelqu’un avec un cure-dent pour seule arme. » Aux yeux des autres, ce discours aurait pu paraître choquant, démesuré, bref, à l’image de la jolie brune. Mais Lynn avait toujours eu le sens de la formule, et ce qu’elle énonçait n’était rien de plus que ce qu’elle ressentait. Comme si elle lui faisait à nouveau une déclaration d’amour qui porterait son visage, que lui seul pourrait comprendre et apprécier à sa juste valeur. Quiconque l’approchait, que ce soit pour le draguer ou lui faire du mal, risquait fort d’avoir à faire à la jeune femme.

« Je vais désespérer à te voir boire sans pouvoir en faire autant ! Mais très joli programme, je suis partante évidemment. Cela dit… je sais que si je m’amuse à me trimballer en sous-vêtements à l’hôtel sans arrêt, tu finiras bien craquer, petit lionceau. » Pour la forme, elle n’hésita pas à lui mettre une petite claque sur les fesses, l’incitant à retourner à sa place alors qu’elle venait juste de mettre la main sur LA seule robe un brin extensible qu’elle soit en mesure de mettre et qui soit seyante par-dessus le marché. Cela n’empêchait pas à ses formes nouvelles de grossesse d’être particulièrement voyantes, mais elle était bien plus à l’aise que précédemment. « Pour l’instant, plutôt que de te voir défoncer la tronche de quelqu’un, bien que ce serait atrocement romantique, je pense que c’est mieux pour toi si tu dors… je vais faire mon insomniaque probablement, comme d’habitude, mais tu peux être sûr que quelqu’un veillera sur toi pendant le voyage au moins. » Lynn esquissa un bref clin d’œil avant de s’asseoir quelques minutes sur ses genoux. Elle lui offrit plusieurs baisers tous plus tendres les uns que les autres, tout en caressant délicatement son visage, comme si elle le bordait avant qu’il ne s’endorme. Le regard qu’elle lui lança en se détachant de lui en disait long… notamment sur le fait qu’il était devenu le point central de sa vie. La brunette prenait soin de lui comme elle n’avait jamais pris soin de personne… aussi s’éloigna-t-elle après avoir embrassé son front et l’avoir incité à fermer les yeux. De son côté, elle se rassit docilement, verre de jus d’orange en main, à observer le ciel sombre au travers du hublot, sans pour autant parvenir à trouver le sommeil de tout le voyage…