Un mois. Quatre semaines, une trentaine de jours, semblables à une éternité. Sans compter que Lynn n’avait pas été en mesure de donner la moindre nouvelle du fait de la dureté de sa mission. Infiltrer la mafia russe n’avait pas été une partie de plaisir, et à plusieurs reprises, elle avait été blessée. Rien de grave, du moins n’était-ce pas suffisant pour la rapatrier d’urgence sur le sol américain. Une chance qu’elle puisse compter sur son coéquipier pour assurer ses arrières sans quoi, jamais la mission n’aurait pu être terminée avant l’heure prévue. Mais maintenant qu’elle sortait de l’hôpital après examens et soins particulièrement pénibles, une folle envie de se défouler l’avait prise, soudainement, inexplicablement. En vérité, il y avait bien une explication : sa mère ne la jugeait plus aussi vive sur le terrain et avait donc décidé de la mettre à pied une bonne semaine avant de savoir quoi faire d’elle. Le simple fait d’avoir l’horrible impression d’être prise pour du bétail lui déplaisait ô combien. Résultat, elle avait traîné son coéquipier à la somme de muscles impressionnante dans un club où elle était certaine de croiser quelqu’un de proche, quelqu’un qui lui avait manqué au-delà des mots et vers qui toutes ses pensées étaient tournées, à n’importe quel moment du jour comme de la nuit. Lynn, discrète, n’en n’avait parlé à personne… mais le choix du club de boxe n’était pas innocent, aussi insista-t-elle pour que leur petit entraînement ne se joue là et nulle part ailleurs. Dieu sait qu’elle n’avait pas de don de voyance et ne pouvait donc prédire le moment où Mikaël allait finir par se pointer là bas, mais comme toujours, Lynn suivait son instinct. Elle y fut à l’ouverture, sur les coups de sept heures du matin, et s’adonna à un combat acharné en présence de son coéquipier jusqu’à ce que d’autres boxeurs ne viennent peupler l’atmosphère de ce club réputé.

« Je vous préviens les gars, ne vous frottez pas à la petite dame là bas, elle a l’air d’être en méchante période rouge ! Son adversaire déguste, j’vous dis qu’ça ! » En effet. On ne voyait qu’eux, en train de s’adonner davantage à du free fight qu’à de la boxe à proprement parlé, et Lynn menait très largement la danse malgré la force physique de son adversaire. Sans doute n’osait-il pas frapper aussi fort qu’il ne l’aurait fait avec un ennemi, mais toujours est-il qu’il finit par se retrouver à terre pour la énième fois, et qu’il finit par demander grâce pour qu’elle cesse de le frapper sans relâche. « Déjà fatigué ? » balança-t-elle, alors qu’elle était en sueur, presque tremblante sous le coup de l’adrénaline et pourtant incapable de s’arrêter. « Espèce de petit vieux ! Allez, debout !! » Finalement, il la fit tomber d’un croche patte tout à fait magnifique et un éclat de rire s’éleva dans l’atmosphère tandis que sa blessure sur le flanc la tirait horriblement. Ce fut Lynn qui descendit du ring, contre toute attente, moitié hilare, moitié grimaçante face à la douleur, bien que celle-ci soit légèrement apaisée par les endorphines courant dans tout son corps en surchauffe. « Je t’ai vraiment mis la branlée de ta vie, franchement, tu peux aller te rhabiller et m’offrir le dîner du siècle pour la peine ! » Mais Lynn le remercia du regard pour lui avoir permis de se défouler, également. « Je devenais cinglée. Merci. » Elle lui donna un petit coup à l’épaule après avoir enlevé ses gants, et ce fut à ce moment précis qu’elle le vit. Elle ne s’était pas trompée, il était bien coutumier de ce club et son flair ne lui avait pas fait défaut. A ceci près qu’elle ne savait pas quoi faire d’autre que de sourire de manière attendrie, infoutue de savoir si elle devait courir vers lui, l’inciter à s’approcher… quelle handicapée du sentiment cette Lynn !

Les jours avaient été longs. Longs n'était même pas assez long pour décrire la longueur du temps qui s'était écoulé. Mikaël n'avait fait que de rêvasser, attendant des nouvelles, attendant un message ou un e-mail ou quoique soit qui puisse venir d'elle. Il n'en avait parlé à personne, même pas à ses meilleurs amis. Que faire? Personne ne pouvait comprendre, et personne ne pouvait être dans la confidence. Il n'avait fait que de noyer son manque dans l'écriture et la musique. Rentrant chaque soir chez lui, prenant les mêmes chemins qu'il avait prit avec elle. Tout était fait pour lui donner des souvenirs douloureux. Et jamais il n'avait pensé dire qu'un petit mois, un simple tout petit mois, aurait pu être si horrible. Le manque c'était transformé en mauvaise-humeur, il avait passé les principales heures de son temps libre au club de boxe de son quartier. Habitué de l'endroit personne n'avait été étonné de le voir aussi souvent, tellement souvent qu'il avait prit un peu plus de muscle, et un peu de poids. Il avait même investi dans un nouveau short, et de nouveaux gants qu'il arborait satisfait à chaque fois qu'il s'y rendait.
Ce matin n'avait pas fait exception, le travail commençait en fin de matinée, c'est pourquoi il avait prit le temps d'y venir. Enlevant son T-shirt, enfilant son short et défilant dans le club ses tatouages au torse. Il adorait l'ambiance autour de lui, il adorait les gens de ce club qui n'avait qu'un mot d'ordre : passion. Mikaël était un ferveur de la passion, quiconque passionné pouvait faire tout ce qu'il voulait. Les codes étaient clair, l'honneur était aussi au rendez-vous, et personne n'était mauvais joueur, pas question d'avoir de la vermine dans un établissement aussi réputé. C'est en se rendant près de son sac habituel qu'il entendait plus de bruit que d'habitude, autour du ring principal. En général les membres se regroupaient de la sorte lorsqu'un match intéressant prenait place, alors il fallait impérativement aller contempler ce qu'il se tramait.

Un battement de coeur, un battement de coeur qui avait tout changé, qui avait non seulement changé la donne de sa journée mais aussi sa motivation. Le suédois avait sentit son rythme cardiaque accélérer d'un coup sec, comme si il avait perdu connaissance pendant une seule petite seconde. La voir était quelque chose de divin. Jamais il n'avait eu tel bonheur en croisant le regard d'une seule personne. Quel sentiment parfait, quel seconde parfaite qui définissait ce qu'était le bonheur.
Mikaël n'avait pas su comment réagir, un seul petit mois s'était écoulé mais il l'avait vu comme l'éternité. Il se contenta de sourire en retour, prenant une large inspiration, puis un énorme soupir de soulagement. Elle n'avait rien, elle était saine et sauve, plus belle qu'avant. Mikaël n'avait pas eu tort dans cette chambre d'hôtel, les sentiments grandissent de jour en jour, quand la personne en vaut la peine. D'excitation peut-être il donna un énorme coup dans un sac devant lui, et entreprit d'enlever ses gants.
« Je suis l'homme le plus heureux du monde !» C'est ce que l'européen cria en plein milieu du club, entraînant une nuée de regards questionneurs à son égard. « Ben Mikaël qu'est ce qui se passe? » Que faire des interrogateurs, il s'en alla prendre la brune dans ses bras, respirer son parfum, sentir son corps contre le sien et caresser ses cheveux. Voilà ce qu'il avait désiré depuis un mois, et voilà ce qu'il pouvait enfin faire maintenant qu'elle était à ses côtés. Il l'embrassa même, passionnément, bien que sa bouche soit légèrement balafrée des différents match qu'il avait fait durant les dernières semaines. C'est alors qu'un gros malin s'amusa de la situation : « Mikaël et la minette sur le ring !» Ce qui déclencha une réaction général, bien évidemment.

Lynn sentit son cœur rater plusieurs battements alors que Mikaël se dirigeait vers elle. Il la serra dans ses bras et alors elle sut que ce mois d’attente en avait valut la peine. Son corps entier se mit à frissonner et elle fut la première à accepter son baiser tout en entourant fougueusement le cou du jeune homme de ses bras. Son coéquipier les regardaient sans comprendre, n’ayant aucunement conscience qu’elle soit tombée dans le piège de l’attachement, de l’amour et de ses complications. La brunette n’y aurait jamais cru si on lui avait dit, quelques mois plus tôt, qu’elle ferait une aussi belle rencontre. Pour un peu, elle en oublia sa blessure, s’attachant davantage au visage marqué de Mikaël : « Tu t’es battu souvent dois-je comprendre ? » lui murmura-t-elle à l’oreille avant même que l’assistance ne les poussent sur le ring, sans doute pour mesurer leurs deux capacités au combat… oh diantre. Lynn était une excellente combattante, cela ne faisait pas l’ombre d’un doute, mais elle venait de se dépenser comme jamais contre son coéquipier, et était malheureusement diminuée par une blessure qu’il lui fallait surveiller. Elle sortait juste de l’hôpital, après tout… mais bien loin de rechigner à la chose, elle replaça ses gants contre ses mains et fut la première à y monter, encouragée par les autres boxeurs présents, y compris par le propriétaire du club. Mais quelque chose lui disait qu’elle allait avoir du mal à le frapper lui… impossible de l’imaginer avec une tête d’ennemi, pas alors que tout ce qu’elle voulait était de profiter de sa présence ! « C’est drôle, mais je n’ai aucune envie de te mettre la rouste de ta vie, soudainement ! » s’exclama-t-elle avant de laisser un rire cristallin et sincère peupler l’atmosphère sonore. Son coéquipier avait presque du mal à la reconnaître tant elle était différente de cette femme froide et rationnelle qu’il côtoyait sur le terrain.

Il ne fut guère étonnant de voir Lynn se rapprocher de Mikaël, n’ayant cure de l’impatience de leurs spectateurs. Sans le serrer contre elle ou même l’embrasser, elle se délectait simplement de pouvoir contempler son visage. Cette simple chose valait tellement à ses yeux qu’elle n’aurait pu le décrire par des mots. « Vas-y doucement dans tes assauts, je suis diminuée. Disons que mon flanc droit a pris cher, alors si tu me frappes dessus, je risque de hurler. Ça va nuire à ma réputation de dure à cuire. » Mais elle embrassa doucement sa tempe avant de s’éloigner, n’ayant cure du fait d’être en débardeur et culotte devant une foule de testostérone caractérisée. Elle attendait le feu vert de Mikaël, un léger sourire amusé pointant au bout de ses lèvres rosées.

Mikaël avait une certaine excitation à l'idée de se battre contre cette femme, cette femme qui l'avait toujours inspiré d'une certaine façon. Elle était forte et débrouillarde, rien à voir avec le genre de minette dépendante de leur homme, ce que le suédois ne supportait pas. Et puis, il savait bien qu'il avait toujours eu une sorte de fantasme enfoui en lui : celui d'avoir des relations sexuelles sur un ring de boxe, après un combat passionnel où les deux âmes se seraient poussées à bout. Bien entendu, pas question de faire ça ici, et bien qu'il ne soit pas contre l'exhibitionnisme il n'en était pas à s'adonner librement.

Je vais te mettre au tapis, ma belle.

Il se mit à trottiner sur ses jambes agiles, les bras contre le torse rythmant sa respiration comme un vrai professionnel. Bien sûr il jouait sur cette apparence presque comme une blague envers la brune devant lui, elle savait bien qu'il exagérait ses mouvements. Il commença par la laisser s'approcher, il esquiva de justesse la première droite de son adversaire, non pas sans bouger vraiment. Pas question de rester docile, il avait une fierté masculine à tenir tout de même. Mais c'était bien compliqué de toucher la jeune femme au visage, visage qu'il appréciait plus que tout. Mikaël n'imaginait même pas égratigner cette si belle peau. Alors il se contenta de donner un coup du gauche dans sa poitrine, modéré mais sûr.

Je sais que ce n'était pas fairplay, mais pitié, ne touche pas à mes parties génitales.

C'est vrai qu'il avait été au courant de la sensibilité féminine à ce niveau depuis qu'il avait accidentellement, frapper une fille à ce niveau alors qu'il souhaitait l'embrasser. Erreur de jeunesse, qui se transformait en atout dans ce genre de match improvisé. Mais Lynn riposta fort en lui donna un coup dans la mâchoire, qu'il sentit passer avec douleur et gémissement. Ah oui? Carrément? Le jeune homme tout émoustillé par le mal qui battait dans son visage s'improvisa catcheur et s'empara du corps frêle mais musclé de la femme pour la plaquer énergiquement contre le sol. Il la bloquait de sa masse corporelle alors que les spectateurs de leur combat amical s'exclamait à la faute. Personne ne pouvait comprendre ce qu'il se tramait, et il s'en contrefoutait royalement. Il passa sa tête dans son cou et chuchota à son oreille après l'avoir mordillée en guise de revanche :

Je vais te punir royalement pour cet affront, tu le sais ça?

Il l'aida à se relever et remercia son public comme une star de cinéma. Quel rigolo, ce Mikaël !

Sans doute Lynn était-elle une bien mauvaise perdante, quand elle s’y mettait, à moins que l’adversaire d’en face ne soit d’un fairplay à couper le souffle. Sauf que s’agissant de Mikaël, il était un tel showman que tous les coups pouvaient être permis… bien qu’elle ait parfaitement compris sa supplication au sujet de ses parties génitales. Vraiment, la brunette n’était jamais désespérée à ce point. Cela dit, elle avait de la force, et malgré sa blessure, n’hésita pas une seconde à lui décocher un crochet du droit d’anthologie, coup qui le fit gémir quelques instants avant qu’il ne reprenne, bien évidemment, du poil de la bête. Diantre, mais où allait-il chercher toute cette énergie ? « Essaye donc de te venger, petit bras ! » Elle n’était pas sérieuse une seconde. Ce combat n’était aucunement semblable à tous ceux qu’elle avait vécus sur le terrain, aussi s’amusa-t-elle à faire le show à son tour : à peine l’eut-il aidée à se relever qu’elle profita sournoisement d’une légère baisse d’attention pour le déséquilibré d’un coup très agile contre ses chevilles. Une fois à terre, ce fut à son tour qu’elle le tint fermement entre ses cuisses, s’assurant qu’il ne pouvait absolument rien bouger, avant de lui balancer un sourire carnassier cachant une large hilarité. « Tu as oublié que je ne suis pas n’importe quelle femme… de toute façon, tu ne m’aimerais sûrement pas si je ressemblais à n’importe quelle femme. Aussi, à mon tour de saisir ma revanche… » Lynn s’empara furieusement de ses lèvres, sous les regards proprement ébahis des spectateurs qui hurlaient ‘encore, encore !’ à tue-tête. Mais les deux semblaient complètement coupés de l’espace et du temps, comme à nouveau seuls au monde. Du moins jusqu’à ce que Lynn ne le relâche de son emprise et ne l’aide à se relever, non sans grimacer face à la douleur qui se réveillait.

Son coéquipier lui fit soudainement un signe, preuve qu’il s’en allait pour s’octroyer à son tour un repos bien mérité, et Lynn put à nouveau donner toute son attention au beau suédois. Certes, sa blessure la tirait et elle peinait à ne pas se cambrer histoire d’apaiser la douleur, mais elle faisait mine de pouvoir continuer encore et encore : pas question de paraître comme une faible femme, jamais. « Ne me regarde pas comme ça, je ne suis pas en sucre ! » se défendit-elle avant de reprendre position et de se mettre à le taquiner en donnant de petits coups contre la défense formée par ses bras. Ils sautillaient tous deux autour du ring, s’adonnant comme à une danse, tels deux grands guerriers n’ayant pourtant aucune envie de s’attaquer franchement. Derrière sa propre défense, d’ailleurs, Lynn était à deux doigts d’exploser de rire jusqu’à ce qu’elle ne parvienne à faire une percée qu’elle n’avait pas prévue et ne frappe l’abdomen musclé de Mikaël. Vu les abdominaux qu’il avait, aucun risque que la douleur ne soit intense, mais quand même. Une certaine inquiétude marquait désormais le visage de l’espionne, tant et si bien qu’elle en oublia complètement sa propre défense… « Fallait garder ta défense, aussi ! Rien de cassé ? » Elle s’était approchée et avait même posé sa main contre son épaule, mettant de côté le match pendant quelques secondes. Décidément, les spectateurs devaient avoir beaucoup de mal à les suivre…

Ce match n'avait rien de commun, aussi Mikaël pouffait de rire derrière ses gants de par leur ridicule. Deux pauvres personnes s'aimant qui essayait malgré tout de se faire un mal physique, non ça ne collait pas. Si le suédois voulait lui faire mal il s'y prendrait autrement. Pas avec la boxe, ça non, mais plutôt avec des objets dont il ne fallait mieux ne pas parler. Rien qu'en y pensant il jubila intérieurement et se remit à sautiller sur le ring. L'interface de quelques secondes alors que sa douce colombe s'intéressait à son état le rendit encore moins motivé. Il n'était pas réticent à l'idée de se battre, pas avec elle en tout cas. Mais à ce moment précis ce n'était pas ce qu'il désirait vraiment. En fait il voulait prendre Lynn avec lui, l'emmener manger dans un endroit insolite ou quelque part où ils n'étaient jamais allé. Alors avec une certaine désinvolture il quitta ses gants devant la huée de son public.
Je ne suis pas un mauvais joueur, je t'en conjure de ne pas le penser.
Il caressa la joue de la jeune femme en lui lançant un petit clin d'oeil.
Je vais prendre une petite douche, je ne te propose pas de venir, on fera ça ce soir. Retrouve moi dans 10 minutes.
Tout en la gratifiant d'un baiser furtif il se mit en quête de la propreté le sourire aux lèvres. Un sourire des plus sincère. Comment ne pas être des plus heureux? Il y avait si longtemps qu'il n'avait pas ressenti un bonheur pareil, une boule de joie qui berçait son coeur depuis qu'il l'avait vu. La magie de ce moment était encrée en lui pour toujours, c'était ce battement qui lui avait fait comprendre la véracité de ses sentiments. Tout était réel, tout était vrai. C'était presque comme s'il avait du se pincer, pour se rendre compte qu'il ne rêvait pas. Mikaël prit sa douche en deux temps trois mouvements, sortit du vestiaire aussi vite qu'il le pouvait et rigola aux remarques de ses différents camarades du club. Le suédois solitaire qui se faisait ramoné par une belle brune? Au final tout le monde finissait par se faire enchaîner tôt ou tard.

Il attrapa Lynn à la taille et plaqua son corps contre le sien : la sensation fut divine. Un mois qu'il avait attendu de pouvoir agir tel un homme aimant, publiquement!
Que dirais-tu d'aller manger quelque chose? J'ai une de ces dalle. Et puis, je suis sûr que tu as beaucoup de chose à me raconter et que ne m'épargnera aucun détail.
Il lui prit la main, tel un vrai couple, et l'entraîna en dehors du club. Heureusement celui-ci était bien situé, et trouver un endroit sympa pour prendre le petit déjeuner serait bien facile.
Qu'allons nous faire maintenant? Devenir un couple ennuyant, et ennuyé?
Il en rigolait, mais vraisemblablement cela serait sa plus grosse hantise. Après-tout, comment être ennuyé aux côtés d'une telle femme?
Non, oublie ça, jamais!

Lynn avait pris sa propre douche en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire et s’était habillée comme si l’empressement de terminer ne désirait pas la quitter. Un mois, c’était un temps bien trop long lorsque l’on se languit de quelqu’un. Et dire que la brunette s’était juré de ne plus jamais tomber dans ce genre de pièce… elle avait lamentablement faillit, mais s’en moquait comme de sa première chaussette. Aussi fut-elle la première à profiter de l’étreinte qu’il lui offrit dès son retour, savourant chacun de ses baisers comme si cette seconde devait être la dernière. Lynn avait appris à vivre ainsi, à ne plus se soucier du futur mais plutôt de l’instant présent qu’elle pouvait désormais partager en compagnie de Mikaël sans la moindre contrainte. D’aucun dirait qu’elle s’est ramollie, qu’elle n’est plus aussi dure que par le passé… et ces mauvaises langues auraient raison. Le suédois était parvenu à faire voler en éclat chacune des barrières qu’elle avait pourtant pris soin de mettre en eux. Il avait réussi ce que nul autre n’avait pu parvenir à faire avant lui. Et Lynn l’en remerciait tacitement, silencieusement, avant de lui dévoiler sa crainte d’un ennui mortel : avaient-ils l’air si vieux d’apparence ? Jamais de la vie ! « Tu as vécu une vie si trépidante en tant que VIP avec tes pass que tu as peur de t’emmerder avec moi ? » le taquina-t-elle sans l’ombre d’une méchanceté dans ses paroles. « J’ai bien l’intention d’oublier cette connerie que tu viens de dire parce que tu vas me suivre ! » Et comme lorsqu’ils s’étaient rencontrés, Lynn s’empara de sa main, l’emmenant vers l’infini et au-delà. Il s’agissait toujours de la même promesse qu’elle lui faisait, celle d’être plus surprenante qu’elle ne l’avait été la veille, sans compter qu’ils avaient l’intégralité de ce mois à rattraper. Il ne fut donc guère étonnant qu’elle parvienne à leur trouver un établissement à couper le souffle, en plein cœur de New York, offrant des petits déjeuners tout en haut d’un building immense, ainsi qu’une vue panoramique sur l’intégralité de la ville. Une merveilleuse façon de prendre le petit déjeuner autrement… surtout que le ventre de la jolie brunette s’était mis à gargouiller avant qu’ils ne parviennent à destination, en taxi.

« Alors ? Pas mal hein ! J’suis sûre que ça te change de tes cafés au journal ! » lui dicta-t-elle non sans tirer légèrement la langue, amusée. Ils furent très rapidement installé à la plus belle table de cette immense salle de restauration, et ce fut à ce moment précis que Lynn lança sa plus grande confession comme un boulet de canon : « Figure-toi qu’à cause de ma blessure, je suis mise à pied pour au moins une semaine. J’étais folle de rage contre ma mère, mais d’un autre côté… que dirais-tu de te réveiller à côté de moi tous les matins, de supporter mon caractère de merde, et de ne jamais savoir à quel sauce tu vas être mangé ? Dans tous les sens du terme bien sûr. » Elle ne parlait pas que de parties de jambes en l’air… mais également du fait qu’elle soit incapable de rester en place et aussi imprévisible qu’il est possible de l’être.

Qu'est ce qu'il était content, vraiment, qu'est ce qu'il était heureux! Il se laissait emmener, guider comme un gamin suivant la main de sa mère. Appartenir à cette fille était la plus belle chose qui puisse lui arriver. Il appréciait être soumit pour la première fois de sa vie. Cette tête brûlée ne pourrait jamais le lasser, comment s'ennuyer avec une personne comme elle? L'imprévisibilité était certes une sorte de défaut, mais pour le suédois qui avait une tendance à se lasser, ça ne serait jamais le cas avec cette sale brune! Mikaël aurait même mangé avec délectation sa petite langue qu'elle lui sortit en guise de moquerie.
« Je te préviens, si tu m'énerves je finirais par t'étouffer avec un oreiller. Personne ne me connait, personne ne prendra de tes nouvelles et je jubilerais de ton corps éteint, tout seul. »
Il souriait avec son infaillible regard tendancieux. Ces blagues d'humour noir et bien dégueulasse étaient bien faites pour qu'elle soit supportable à la jeune femme. Il prit la carte du petit déjeuner et ne se soucia même pas de l'heure avant de commander un filet de boeuf.
« Je suis un homme, un vrai. Le boeuf c'est à toute les heures, et avec une bière aussi! » Cria-t-il dans le restaurant pour se faire entendre, en espérant recevoir une bonne bière fraîche dès que le serveur repasserait. Il caressa son menton légèrement barbu, après tout il ne s'était pas douté revoir sa dulcinée avant quelques temps, et n'avait donc pas prit l'initiative de se raser tel un trentenaire imberbe.
Il cligna des yeux :
« Tu sais bien que tu pourras me manger à toutes les sauces que tu veux, tu pourras même me farcir, en fait. Mais bref, voyons voir ce que cette journée nous réserve. » Il tapota la table, incapable de s'arrêter de bouger comme à son habitude. « Je passerais au bureau pour demander ma journée plus tard, pas question de te laisser seule, j'aurais bien trop peur. Et si tu savais à quel point je me suis amusé pendant ton absence. J'ai enchaîné les soirées V.I.P, je me suis fait offrir des montres de luxe et des repas dans les plus grands restaurants. J'ai même couché avec la moitié des mannequins de New York. Enfin, ton absence ne pas absolument pas marqué, je t'avais même presque oublié! » Il n'avait même pas fini sa phrase qu'il se rua au dessus de la table pour l'embrasser langoureusement. Si elle savait à quel point la faiblesse l'avait gagner durant de dernier mois, à tel point qu'il n'avait même pas touché à ses coupons. Quelle importance? Sans elle il n'y aurait rien de bien plaisant.
« C'est plutôt à toi de me dire ce que tu as fait durant cette mission? Démanteler un trafic de lama en Roumanie? Ou plutôt aller au fin fond de la gloublinka pour attaquer des paysans russes? »

Son sourire ne le quittait pas, il était heureux.

Mikaël avait eu le bon réflexe en s’emparant des lèvres de la jolie brune, sans quoi elle aurait été capable de lui balancer une remarque on ne peut plus acerbe : s’il y avait bien quelque chose qu’il ne fallait surtout pas attiser chez la demoiselle, c’était sa jalousie. Lynn était capable des pires folies lorsqu’elle était jalouse, tant et si bien qu’elle finissait par en devenir imbuvable. Mais en présence du suédois, heureusement, elle apprenait le second degré : il valait mieux, sans quoi elle risquait une syncope toutes les deux minutes ! « Donne-moi leurs noms et leurs numéros de sécu à ces mannequins je me ferais un plaisir de t’apporter leurs têtes sur un plateau ! » lança-t-elle, non sans ponctuer ses paroles d’un sérieux qu’il valait mieux ne pas prendre à la légère. « Chose très importante à savoir sur moi : je suis très jalouse » commença-t-elle non sans prendre son couteau en main pour le faire virevolter entre ses doigts fins et agiles « et me titiller là-dessus reviendrait à signer ton arrêt de mort. N’oublie pas que je suis une femme violente, darling ! » Mais elle ponctua sa fin de phrase d’un sourire carnassier avant de se lever à son tour, de s’asseoir sur Mikaël et de s’emparer de ses lèvres avec une fougue dont elle seule avait le secret. Mais elle créait chez lui une sorte de sentiment de frustration, histoire qu’il soit toujours attentif, qu’il se languisse, qu’il espère, afin de mieux le combler des plus délicates attentions ensuite. Tout ceci était un immense jeu entre eux, et si Lynn avait un tempérament dur et incontrôlable, elle avait également tellement à lui offrir… bien plus qu’il ne pourrait l’espérer de n’importe quel mannequin sans aucune cervelle ni avenir. « J’ai démantelé un réseau mafieux russe avec mon coéquipier qui était au club de boxe tout à l’heure. J’ai pris une balle en me heurtant à quelques hommes de main et me voilà de retour pour te jouer un mauvais tour… désolée mon ange, mais c’est tout ce que tu obtiendras de moi : sinon, je devrais te tuer. » Lynn possédait des traits amusés, mais il va sans dire qu’elle n’aurait jamais confié de telles choses si elle n’avait pas eu une absolue confiance en Mikaël… il s’agissait de secrets défenses, après tout.

La brunette finit par se relever, félinement, lorsque le serveur fut à nouveau devant eux afin de prendre leurs commandes. Il avait même pensé à amener la bière pression ultra fraîche commandée par le suédois, tandis que Lynn reprenait le menu en main. « Pas de filet de bœuf pour moi, pas si tôt, en revanche je veux bien une avalanche de pancakes avec une montagne de sirop d’érable s’il vous plaît. » Ce n’est qu’une fois que le serveur fut éloigné qu’elle laissa échapper un petit rire : « Il faut bien que l’un de nous deux soit normal ! Ça me fait penser que je te dois toujours une ballade en hélico… et au fait, pourquoi tu as peur de me laisser seule ? Tu crains que l’on m’enlève ou que je trouve mieux en cours de route ? » Légère provocation. Mais légère seulement !

Mikaël rigolait bien de voir que son second degrés n'était pas encore totalement maîtrisé par la jeune femme. C'était un trait de son caractère inévitable, il allait falloir vivre avec, bien que le temps d'adaptation prenne peut-être quelques conflits inutiles. Quelle fierté il avait d'être assisté d'une femme comme elle. Il jetait même des regards hautains aux autres clients curieux qui se demandaient pourquoi cette brune sautait sauvagement sur lui pour lui décocher un baiser. Les provocations féminines qu'elle lui lançait avait même quelque chose de sympa pour lui, il se trouvait dans son élément. Et comme elle le disait : il n'avait rien à faire avec des midinettes superficielles. C'était bien sur de trouver mieux que Lynn pour sa personne, elle répondait à tout ses critères et encore plus, elle lui apportait des choses qui n'avait pas été primordiales jusque là.
« Je ne suis vraiment pas certain de penser qu'entre nous deux tu puisses être la plus normale! »
Avec entrain il s'empara de son énorme bière et la vida de son quart en quelques secondes. Boire une grosse bière par jour entretiens la santé pour toujours, pensait-il.
« Pour la ballade en hélico tu as intérêt à ne pas oublier, je pourrais être déçu tu sais. Ah, et franchement, trouver mieux? Comment pourrais-tu trouver mieux que moi? Je suis tout ce dont une femme pourrait rêver, et aaaaabsooooluuument pas narcissique. Autre chose? » Non il ne pourrait jamais se débarrasser de ce fidèle ton ironique. C'était bien même un de ces défauts autant qu'une de ses qualités. Et il s'était déjà retrouvé dans des situations délicates à cause de propos mal interprété. Au fond, le sarcasme était une forme d'intelligence, non?
« J'aurais aimé que tu m'en dises plus, tu pourrais me torturer avant de me tuer. On pourrait même instaurer un quota : à chaque informations que tu me délivreras, tu auras la liberté de m'infliger une punition. Deal? » Non Mikaël n'avait pas des tendances SM, mais jouer ce jeu qu'ils avaient crées ensemble était un doux plaisir. Vivre dans les scrupules et les sermons n'était pas de son désir, il pensait même être resté enfantin malgré son âge.
Le serveur s'engouffra dans leur conversation semblant presque gêner, il jetait des coups d'oeils apeuré aux fines mains de Lynn qui s'amusaient toujours avec le couteau et au grand suédois qui semblait vider les bières plus vite que son ombre. Ces personnes étaient dérangeantes de par leur étrangetés? Quel satisfaction que d'attirer les regards et les questions! Le jeune homme s'attaqua alors à son steak sans ne rien demander à personne, un homme qui a fait est un homme féroce.
« Une chose! J'espère que tu apprécieras mon appétit d'ogre, je suis une bouche à nourrir chérie. »

Lynn ne pouvait s’empêcher d’être amusée par cet appétit d’ogre lui faisant face : il descendait les bières à tout de bras, elle en était au verre de lait. Malade ? Non, tout juste sortie de la morphine, voilà pourquoi elle était hélas contrainte de mettre la pédale douce sur les excès. Pour l’instant du moins… mais cela ne voulait pas dire qu’elle n’allait pas se faire une overdose bien méritée de pancakes. « Ogre ? Tu ne m’as pas encore vue manger, darling ! Il vaut mieux m’avoir en photo qu’à table. » La preuve en fut dès lors que le serveur fut de retour avec sa commande, à savoir une véritable montagne de pancakes qui cachait presque le visage de Lynn tant celle-ci était gigantesque. Il faut dire qu’elle était une habituée de cet établissement et que le cuistot savait maintenant ce qu’elle entendait par ‘avalanche de pancakes recouverte d’une montagne de sirop d’érable’. « Bordel c’est divin ! » se permit-elle de dire à moitié la bouche pleine, mais pas sans une dose considérable de classe. Lynn parvenait à être sexy même dans un moment pareil, tant et si bien qu’ils n’avaient de cesse, l’un comme l’autre, de se dévorer du regard. Leurs œillades en disaient long sur leurs intentions communes, tant et si bien que la brunette s’imaginait déjà contrainte de devoir conseiller aux voisins du journaliste de partir pour toute la nuit durant tant ils allaient être expressifs. Un mois… autant dire une éternité lorsque l’on est dans la peau de ce couple si synchronisé que c’en était presque indécent. « D’accord, je ne suis pas normale. Et peut-être que ce sera à toi de me torturer pour que je parle, d’ailleurs. J’ai un grain, hein ? » Sauf que si Mikaël était une montagne de muscles, Lynn avait l’agilité et l’expérience. Ils se protègeraient mutuellement des aléas de la vie, elle en était certaine. Voilà pourquoi elle n’avait pas la moindre intention de lui cacher quoi que ce soit sur elle… non, jamais.

« Je suis une femme de parole, donc après avoir engloutit ta pièce de bœuf, je t’emmène au bout du monde. Tu verras, tu n’as jamais fait quelque chose d’aussi jouissif. Preuve que tu ne trouveras jamais mieux que moi : qui peut t’emmener dans un stand de tir, te tenir tête sur un ring de boxe, savoir conduire un hélico ET te faire prendre un pied d’enfer, hum ? » Légèrement vulgaire avec ça… mais Lynn était très double là-dessus, en vérité. Tantôt douce, tantôt impitoyable, parfois délicate, et parfois brutale. Son romantisme était nettement plus enfouit que celui de Mikaël, mais cela ne voulait pas dire qu’il n’était pas présent… sinon elle ne se serait pas imaginé faire un très long voyage aux côtés du beau suédois. « Tiens, j’ai une question à un million de dollars trésor : tu es capable de me supporter sans avoir envie de me refaire le portrait façon Picasso période déstructurée… un jour, tu auras le cran d’affronter un dîner avec mon père ? » Léger haussement de sourcil. Lynn voulait connaître sa réaction, sachant que son père n’avait strictement rien en commun avec sa mère : il était avenant, fou de sa fille et tout à fait agréable. De plus, il était ancien boxer au nombre impressionnant de tatouages… il avait tout pour s’entendre avec Mikaël ! « Pas forcément tout de suite, d’abord je te veux pour moi seule, mais un jour… » Et elle laissa cette pensée en suspend pour mieux se concentrer sur ses divins pancakes.

Mikaël déglutissait deux bouchées de son beuf accompagné de pomme de terre sautées, qui était, il fallait l'avouer, très savoureux. Les propos de Lynn s’éclaircissait de plus en plus et ne laissait aucune trace de mauvaise nouvelle. Comment une femme pouvait elle débiter autant de propos aussi parfait en quelque secondes? Elle venait de confirmer qu'elle était parfaite pour lui, et sa conclusion concernant la rencontre avec son père était la cerise sur le gâteau. Il était très avenant pour ce genre de chose, et rencontrer les parents des personnes auxquelles il tenait était toujours un très grand privilège pour lui. Ça n'avait pas été le cas avec les parents d'Erika puisqu'il les avait connus depuis son très jeune âge, ici il ferait preuve d'assiduité et le prenait comme un challenge.
« Ne dis plus rien, tu m'as eu au moment ou tu as dit "Picasso"! » Il rigola pour faire comprendre que sa phrase n'avait rien de très sérieux, hormis le fait qu'il acceptait sa proposition avec un entrain tout particulier.
« Si tu oses me présenter c'est que tu me trouves assez présentable alors. Tu sais très bien que je ne déclinerais pas une offre pareille.» Il prit une autre bouchée et mâcha en faisant passer le tout d'une gorgée de bière. Bien sûr il sera d'une tout autre classe face à la figure paternelle de cette brune. Vu le caractère trempé qu'elle se trimbalait pas question de jouer avec son père, qui devait être, un concentré de Lynn au masculin. Un cocktail de feu quoi!
« Si je ne risque pas d'être cuit au bûcher tel un tourne dos qu'on plante de la bouche à l'anus, ça me va. » Mikaël n'avait pas non plus sa langue dans sa bouche et n'était pas friand des politesses, du moins pas en la présence de sa Lynn adorée. Autant être naturel, non?

Il prit les mains de la belle brune : « Mais avant, comme tu dis, il va falloir que tu profites de moi à fond. Et je pourrais même te dire qu'une petite envie me prend soudainement. » Son appartement était bien malheureusement trop loin pour y accéder rapidement, peut-être pouvaient-ils trouver un hôtel pas loin, mais il n'était guère d'humeur à sortir sa carte bleue pour une chambre hors de prix que les deux tourtereaux saccageraient en deux temps trois mouvements.
« On devrait faire notre pacte pour ses retrouvailles. »
Alors que Lynn lui caressait sensuellement la jambe de son pied sous la nappe le garçon frémissa. Le boeuf et l'addition pouvaient attendre, il se leva et entraîna la jeune femme dans les toilettes de l'établissement.
« Tu ne peux pas me dire non. » Chuchota il alors qu'il entreprenait de lui mordre l'oreille.

Il ne fallait le dire deux fois à Lynn : s’il lui avait demandé de sauter sans parachute dans un ravin, juste pour lui prouver qu’elle était aussi folle que lui, sans doute l’aurait-elle fait. Qu’importe que leurs retrouvailles ne soient ni glamour ni placées sous le signe du romantisme, l’empressement et l’envie avaient raison de tout ces fantaisies habituelles. Surtout que Lynn n’avait eu de cesse de le titiller à l’aide de son pied, de manière si cruelle qu’il n’avait pas pu lui résister bien longtemps. Parfait… aussi parfait que le fait qu’il veuille bien rencontrer son père. La brunette s’était d’ailleurs attendue à plus de résistance, et avait même préparé tout un tas d’arguments au cas où il aurait freiné des quatre fers, mais il n’en n’avait rien fait. Pire, il semblait diablement enthousiaste face à cette future rencontre. Son père serait sûrement surpris de rencontrer quelqu’un de très important pour sa fille, lui qui était habitué à lui faire mille sermons sur le fait qu’elle ne s’attachait jamais à personne… comme quoi, tout arrive. Il serait le premier à accueillir à bras ouverts le journaliste, surtout face au nombre considérable de points communs qu’ils avaient tous deux même sans le savoir. « Pacte de retrouvailles, mais je n’attendais que ça… c’est moi qui vais te brûler sur le bûcher ! Et à ton tour tu ne pourras pas dire non… » Le serveur et les clients s’étaient demandé de concert ce que ces deux jeunes gens pouvaient bien trouver de si enthousiasmant dans le fait d’aller aux toilettes de l’établissement. Par chance, celles-ci pouvaient se fermer par la porte principale, aussi Lynn n’hésita pas à tourner le verrou avant que la fureur de ses sentiments ne se mêlent au trop plein de désir qui n’avait eu de cesse de croître depuis qu’elle avait croisé le regard de Mikaël au club. Leur petite bataille n’avait pas aidé en la matière, et même fait empirer les choses… aussi n’hésita-t-elle pas à faire sauter littéralement les boutons de sa chemise après en avoir pris les deux pans et les avoir violemment écartés. Ses lèvres brûlantes s’amusèrent à exécuter un suçon très prononcé à l’endroit du cœur du jeune homme, suffisamment visible malgré les tatouages, preuve qu’elle n’y était pas allée de main morte. Puis, tandis qu’elle plaquait le jeune homme contre la paroi de l’espace dédié au lavage des mains, elle lui murmura, la respiration haletante : « comme ça, je peux dire qu’il m’appartient » avant de clore ses lèvres d’un baiser.

Mikaël allait sûrement s’étonner de l’impressionnant bandage qui couvrait une bonne partie de son ventre à cause de sa blessure, mais Lynn avait envie de mettre la douleur de côté pour ne se concentrer que sur une chose : leurs retrouvailles. Elle entourait donc son cou de ses bras, collant son corps frissonnant au sien, incapable de ne pas trembler face à la foule d’émotions furieuses qui se battait en elle. Il lui avait bien trop manqué et les mots n’étaient pas assez forts pour pouvoir décrire tout ce qu’elle ressentait. Lynn se surprit même à planter ses ongles dans la peau du dos de Mikaël, n’ayant cure de l’état dans lequel ils allaient ressortir de là, l’un comme l’autre…

Il faut dire que la partie de plaisir serait encore délicieuse. Bien que ce ne soit pas un point important en amour, le désir sexuel avait quand même une part essentielle dans une relation. Au moins avec Lynn il ne risquait pas d'être en reste de ce côté là. D'abord elle était toute aussi excitée que lui, mais en plus aussi sauvage qu'il pouvait l'être dans ces moments. Sa peau frissonnait sous les ongles de sa partenaire qui se plantaient sans scrupule dans sa chair. Aussi il n'attendit qu'elle se déshabille finalement et lui ôta sa jupe et le reste d'un mouvement de bras. Sans ne jamais quitter ses douces lèvres il continuait de se dénuder, l'envie montante.
Mmh, tu resteras discrète.
Il ponctuait cette phrase en la retournant sur les lavabos, actionnant malencontreusement l'eau qui mouilla le dos de Lynn. Peu importe, Mikaël n'attendrait pas et s'aventura au creux de sa compagne. Leurs respirations se saccadaient en rythme alors qu'il mordait le cou de la brune pour étouffer des légers jouissements. Les endroits loufoques était décidément leurs spécialités, tellement que le garçon serait presque tenté de lui proposer de le faire dans chaque lieu qu'ils visiteraient. Pas mal comme carnet voyage, non?
Cette retrouvailles aurait le mérite d'être inoubliable, c'était sûr. Quoi de mieux à offrir qu'une partie de jambe en l'air incontrôlée suite à d'évasives discussions? Lynn savait faire plaisir à l'hormone masculine, il en valait de soi.
Enfin, après quelques minutes de plaisir intense le jeu cessa. Laissant les deux adultes dans une prise de conscience ultime après un acte dicté par des pulsions. Le suédois se rhabilla vaguement avant de constater le dos trempé de Lynn, ce qui le fit, injustement, beaucoup rire.
Qu'est ce que l'on va bien pouvoir faire de nous? S'exclama-t-il en déposant un baiser sur le front de la brune.
Le plus drôle restant tout de même la réaction des clients lorsqu'ils sortirent des toilettes. Certains attendaient même que la pièce soit libre pour aller y faire ce que des personnes normales faisaient, et d'autres lançaient des regards allusifs. Après tout, la vie de ce jeune couple devait être bien plus intéressante que leurs conversations de quarantenaires blafardes. La tête haute il se redirigea donc vers sa place, ne lâchant pas la main de sa brune préférée.
Je vais reprendre un encas je pense. C'est que tu me donnes faim, en plus!

De toute évidence, Lynn savait qu’ils ne résisteraient pas longtemps avant de se donner l’un à l’autre, comme si on pouvait appeler la jolie brune d’une seconde à l’autre pour l’obliger à se rendre à l’autre bout du monde. Ils avaient une délicieuse façon de se retrouver, avec empressement et plaisir bien loin de la discrétion. Mais le plus drôle, c’est qu’une fois qu’ils retournèrent à la table qu’ils occupaient précédemment, les regards n’eurent de cesse de se tourner vers eux, parfaitement conscients de ce qu’ils avaient fait dans ces fameuses toilettes. Mais ce qui rendait Lynn complètement hilare, c’était autre chose. « J’ai quand même réussi à déchirer tous tes boutons de chemise et à te faire un suçon visible… je ne suis pas peu fière de moi ! » Lynn lui lançait un regard attendrit, ponctué d’un clin d’œil, avant de poursuivre sa collation qui était plus que bienvenue après une telle dépense physique. Ils ne s’étaient pas absentés longtemps, mais ce simple moment avait suffit à anéantir le peu d’énergie qui lui restait… toutes proportions gardées, bien évidemment. Pour épuiser véritablement Lynn, il fallait déjà se lever tôt, bien qu’elle ait derrière elle un lourd décalage horaire et un mois particulièrement pénible de passé. Que n’aurait-elle pas donné pour ne plus jamais avoir à repartir… c’était bien la première fois qu’une telle sensation s’emparait d’elle, sauf qu’auparavant, elle ne laissait personne d’aussi important derrière elle en partant. « Après un filet de bœuf, je me demande ce que tu vas bien pouvoir t’enfiler, en toute sincérité ! » Lynn explosa de rire avant de finir fièrement son plat de pancakes sans que son sourire l’ait quittée une seule seconde. Elle n’avait pas non plus lâché Mikaël du regard, comme s’il allait disparaître, et se sentir aussi dépossédée de son habituel contrôle lui faisait… étrange. Il pouvait bien se vanter d’avoir su l’attendrir, c’était une certitude.

Maintenant que ses mains étaient libres et qu’elle avait pour ainsi dire fini de se restaurer, Lynn prit les deux mains du suédois, lui lançant soudainement un regard des plus énigmatiques. Elle se moquait de l’endroit où ils se trouvaient, de la foule de clients de plus en plus imposante dans le restaurant et même de finir par donner dans la guimauve, mais elle avait juste envie de le dire, point barre. Inutile de s’attarder là-dessus. « Tu m’as manqué. Je ne montre pas toujours mes sentiments et je suis longue à la détente, mais tu m’as manqué. »

Ses yeux fixaient sans arrêt ceux de sa compagne, et son aveu sentimental lui donna un sourire adorable. Pas un grand sourire hypocrite, juste un sourire touché, accompagné d'un mouvement tactile alors qu'il serrait les mains de la brune un peu plus fort dans les siennes. Les mots n'étaient pas assez pour dire qu'elle lui avait manqué, et ça serait banal de répondre un simple "moi aussi". C'était bien plus que ça, et maintenant qu'ils avaient tout les deux vidés leurs hormones ils pouvaient parler dans un contexte totalement sérieux. « Tu sais que tu es mignonne quand tu deviens presque romantique! » C'est vrai que Mikaël possédait à la base le rôle des répliques fleur bleue, et Lynn avait encore beaucoup de travail avant de le surpasser à ce niveau. Aussi il savait qu'elle se vexerait si il ne répondait pas plus convenablement à sa douce phrase.

« Ce n'est pas la même de préciser que je me suis emmerdé comme un rat mort pendant ton absence. Tu savais qu'un mois pouvait être aussi long toi? Je viens de m'en rendre compte, et je n'ai vraiment pas envie de supporter ça encore une fois. »
Mais le suédois savait qu'il y aurait une prochaine fois. Il ne pouvait empêcher sa douce d'avoir un instinct drogué à l'adrénaline. Elle avait choisi cette profession, elle avait choisi de faire ça et il ne pouvait pas lui en vouloir. Elle devait aimer son boulot autant qu'il aimait l'écriture et la musique. Comment lui reprocher? Accepter Lynn était accepter ce qui en suivait, et son métier en faisait partie.
Mais il ne pouvait mettre de côté le fait qu'il avait du mal à supporter son absence. Pas par tentation, non pas du tout. Seulement par manque d'amour, le manque de sa dulcinée alors que quand il aimait il se donnait à part entière à sa moitié.
« Mais revenons en à nos moutons. Tu ne m'as jamais rien dit de ton père. Comment ça se fait que tu lui parles déjà de moi tiens? »
En guise de collation il s'occupa de piquer un pancake depuis l'assiette de Lynn, affrontant son regard de lionne qui venait de se faire prendre sa nourriture sous le nez. Un sourire amusé se dessina sur son visage.
« C'est que tu deviendrais entreprenante dis moi!»

Un soudain sérieux vint prendre place contre les traits délicats de Lynn tandis qu’elle se heurtait à une dure réalité : il y aurait forcément une prochaine fois. La demoiselle ne pouvait pas dire adieu à la CIA si aisément, pas après avoir passé tant d’années sur le terrain et être aussi droguée à l’adrénaline. Mais au-delà de tout ceci, Lynn était redoutablement douée dans son métier. Elle n’était pas uniquement une tireuse d’élite remarquable et une combattante hors pair, elle avait une finesse d’analyse, une mémoire visuelle incroyable et un génie du hackage proprement indescriptible. Il lui était impossible de décrire tout ce que son métier lui procurait, et bien que Mikaël se soit doucement mais sûrement fait une place bien au chaud dans son âme, tant et si bien qu’elle ne se voyait plus se passer de lui, il n’empêche que son boulot avait, lui aussi, une part importante dans la vie de la demoiselle. Elle n’était pas de ceux qui peuvent se mettre en arrêt maladie intempestif, et ce bien qu’ils puissent jouir d’une longue semaine ensemble, temps de sa mise à pied en attendant la guérison de sa lourde blessure. « Si je pouvais t’emmener avec moi je le ferais volontiers, mais tu sais aussi bien que moi que ce n’est pas possible. Tu as ta vie ici, je ne peux pas me radiner et tout foutre en l’air ! Inenvisageable. » Même si elle en mourrait d’envie, autant qu’elle avait envie de l’emmener au bout du monde. Chose qu’elle fit, du reste… Lynn s’empara de ses deux mains, balança nonchalamment le montant de l’addition, qu’elle connaissait déjà, en billets sur le comptoir du restaurant avant d’embarquer Mikaël vers des cieux plus cléments. Hors de question de déprimer alors qu’ils venaient tout juste de se retrouver ! « J’ai été la cause de ton ennui… mais ton réconfort, c’est également moi qui en serai la cause. » Lynn s’empara passionnément de ses lèvres alors qu’ils arrivaient en bas de l’immeuble où ils s’étaient restaurés tous deux.

Direction un hangar appartenant à la CIA pour ôter l’immense bâche d’un hélico qu’elle avait piloté plus de fois qu’elle n’aurait pu le dire. Ce n’est qu’une fois qu’ils eurent pris place l’un comme l’autre à l’intérieur qu’elle se permit de répondre à LA question fatidique qu’il lui avait posée sur son père… « Je peux juste te dire que mon père va t’adorer. Avant d’être responsable d’un commando d’élite, il était boxeur. Et accessoirement… il possède trois fois plus de tatouages que toi ! » En deux temps trois mouvements, Lynn avait déjà décollé, casque sur les oreilles, non sans lancer de nombreuses petites œillades entendues à l’attention du suédois tandis qu’elle laissait en suspend la raison d’un discours le concernant avec son père… pourtant, la réponse était évidente. « Admire cette vue plutôt ! Quant à toi… je pensais que c’était évident. Tu comptes pour moi, mon père a toujours été un pilier dans ma vie il est donc logique que je lui ai parlé de toi. Cela te choque ? »

Que dire à cette femme qui après avoir résolument fait l'amour avec lui dans les toilettes d'un restaurant, l'emmène encore plus haut dans le ciel à l'aide d'un hélicoptère? Sérieusement, commen trouver mieux? Un rêve de gamin se réalisait, il pouvait admirer une vue de New York qu'il n'avait jamais vu auparavant. La ville dans la matinée, qui se réveillait et cette fourmilière géante qui commençait à se mettre en place. Tout un système quotidien qui était fascinant vu d'en haut. Apparemment la jeune femme avait encore beaucoup de cartes cachées dans son jeu, et elle venait de cloué le clapet du garçon par cette balade insolite. Ses yeux brillaient ne quittant pas la vue une seule seconde.
« Ce qui me choque maintenant c'est que je suis à quelques centaines de mètre du sol New Yorkais alors que ce matin je m'apprêtais seulement à aller au club de boxe! Tu viens de m'offrir le plus beau cadeau. » Mikaël aurait voulu l'embrasser en guise d'un petit remerciement, mais il avait crainte de la déconcentrer. Sérieuse comme elle était il pouvait savourer ses traits qui restaient tout aussi beaux dans toutes les situations. Ça avait été le cas même lorsqu'elle avait conduit cette voiture, le soir où ils avaient du fuir des mafieux prêt à leur trancher la gorge. Plutôt bon souvenir.
« Je suis seulement surpris que tu ai prit cette initiative aussi vite, et d'un côté je me dis que je dois vraiment en valoir la peine. Oublie, ça n'est pas étonnant du tout, en fait. » Le suédois souriait, satisfait une fois de plus de sa pointe de narcissisme ironique. Décidément, elle aussi allait devoir subir quelques épreuve si elle s'engageait à rester à ses côtés.

« Avec tout ce que l'on fait en quelques heures, je me demande bien on on sera ce soir à 18h... Des projets? » Le jeune homme se projetait déjà dans la soirée alors qu'il était encore dans les airs, à survoler au dessus des immenses gratte ciels, presque comme si ils étaient à deux doigts de les toucher.
« Tu es avenante, je suis avenant, ça colle plutôt bien. » Il réalisa même qu'il n'avait toujours pas allumer une cigarette depuis qu'il avait retrouvé Lynn, ce qui était bien surprenant venant de lui. Avait elle aussi l'effet d'un patch de nicotine? Cette femme était définitivement rentable.
« Mais si tu retournes au sol je pourrais déjà t'embrasser, ce qui sera tout de même super agréable pour toi. Je t'assure. »
Appuyant ses propos avec un clin d'oeil il laissa la jeune femme commencer la manœuvre d'attérrissage.

Des projets ? Lynn en avait des centaines et n’avait même pas besoin d’y réfléchir. Elle amorça donc l’atterrissage en douceur, à la manière de la vraie professionnelle qu’elle était, laissant tout le loisir à Mikaël de descendre en grande pompe suite à cette sorte de baptême de l’air qu’il venait de vivre, il fallait le dire, avec brio. Mais Lynn fut la première à s’emparer de ses lèvres avec un mélange de douceur et de passion dont elle avait le secret, ne lui laissant même pas le temps d’en placer une. Aussi vrai qu’ils devenaient avenants l’un comme l’autre, la brunette ne dirigeait pas toutes les opérations, il n’en n’était pas question. Après tout, si elle avait à le faire sur le terrain alors qu’elle n’était pas seulement Lynn mais l’agent Maryweather, dans la merveilleuse histoire qu’elle vivait avec le beau suédois, elle voulait qu’ils soient sur un même pied d’égalité. « N’aie crainte, tu ne rencontreras mon père que lorsque tu seras près. Avant, je ne te veux que pour moi. » Sans doute la peur de le perdre était là, quelque part dans son esprit, prête à surgir dans un moment inattendu, mais elle la reléguait agréablement à l’état de néant pour l’heure, alors qu’elle profitait du premier moment calme qu’ils vivaient l’un comme l’autre depuis leurs retrouvailles. Il n’y avait pas de mal à vivre un peu de douceur dans ce monde de brutes… « Tu sais quoi ? A toi de me surprendre avec tes projets ! On est une équipe toi et moi, je ne veux pas mener la barque toute seule. Je ne voudrais surtout pas être accusée d’émasculation ! Alors je te suis aveuglément jusqu’à ce soir. Je ne dis rien, je te suis, point barre. Après tout, je n’ai pas oublié que tu as encore une belle somme de bons de VIP dans ta poche… ou comment ai-je réussi à te fouiller tout à l’heure sans même que tu ne t’en rendes compte ! » Puisqu’il n’avait pas eu le cœur de les utiliser tout seul, Lynn allait se faire un plaisir non caché de les utiliser avec lui. Ainsi, ils étaient partis pour vivre une semaine… d’anthologie, il n’y avait pas d’autre mot.