Coupée une nouvelle fois dans son élan, Madison avait fini par se résigner à l'idée qu'ils n'iraient pas plus loin cette fois-ci. Elle ne s'était pas énervée, ou du moins le cachait très bien. Elle était plus intriguée par ce qui le tracassait qu'autre chose. Pour que ça lui retourne les idées au point de ne pas avoir envie d'elle, c'est que ça devait plutôt être sérieux. Elle lui demanda ce qui n'allait pas, et proposa même de l'aider. « Je… je suis pas sûr que… Je sais pas si c’est une bonne idée… » Elle haussa les sourcils, attendant clairement la suite. Il ne semblait plus très à l'aise. Hésitant sur ce qu'il allait dire, ce qui ne faisait qu'augmenter la curiosité de la jeune femme. « Essaye toujours... dit-elle toujours sur le même ton, en essayant de ne pas se montrer trop pressante. » Il faut dire que la patience n'était pas sa plus grosse qualité et elle devenait se retenir de lui dire quelque chose du genre « crache le morceau bordel ». A la place, elle se montrait calme et attentionnée. Il était rare de voir la jeune femme comme ça, il pouvait en profiter... « J’ai… Y’a quelques trucs dont je ne t’ai jamais parlé, et euh… » Il avait le droit d'avoir ses petits secrets. C'était le cas de Madison après tout. Du coup, elle en était que plus impatiente de savoir. Qu'est ce qui pouvait bien l'avoir tant retourné ? Fort heureusement, elle n'eut pas longtemps à attendre, les mots toujours aussi hésitants de Pablo finir par sortir de sa jolie bouche. « Bonnie a été enceinte, à cause de moi… C’était au moment où on s’est remis ensemble là… Et… Elle a décidé de garder le bébé. Elle est née il y a quelques jours… » Oh. Elle ne se serait jamais attendue à ça. Pas du tout. Il lui avait déjà parlé de cette fille mais pas du fait qu'il l'avait mise enceinte. Quel petit cachottier... Elle baissa un instant les yeux car elle ne savait pas exactement comment réagir à ça. Elle n'était pas jalouse non, ça ça ne risquait pas d'arriver. Elle était surtout surprise qu'il ne lui en ait pas parlé plus tôt. « Ils nous l’ont enlevée… Enfin… On l’a faite adoptée parce qu’on n’aurait pas pu s’en occuper… Je crois. » Finalement, il avait raison, elle ne risquait pas d'être une très grande aide. Elle n'avait pas vraiment l'habitude de ce genre de situations. Ce n'était pas le genre de choses dont elle parlait souvent, les enfants... C'était loin d'être son sujet favoris. « Ok... Et hum... tu regrettes que vous l'ayez fait ? T'aurais voulu le garder ? » Elle avait du mal à l'imaginer avec un enfant. De même qu'elle avait du mal à s'imaginer avec un enfant elle aussi. S'il y avait bien une chose sur laquelle elle était sûre, c'est qu'elle ne s’embarrasserait jamais d'un tel poids. D'un, avoir son ventre qui deviendrait plus gros qu'une pastèque ne l'attirait guère et deuxièmement elle risquait bien de tuer l'enfant. Elle ne supporterait ni les cris, ni les plaintes, ni l'odeur. Elle préférait encore adopter un chien. Ou un chat. On avait pas besoin de s'en occuper. Enfin le mieux c'était de ne rien avoir du tout. Elle n'avait pas le temps pour ça, ni l'envie. Elle avait bien envie de dire à Pablo qu'il avait fait le bon choix mais il semblait visiblement le regretter alors elle ne voulait surtout pas le contrarier.

Aussi étrange que cela puisse paraitre, Madi semblait avoir oublié qu’il venait de la planter là, par deux fois, et de lui refuser ce qu’elle avait attendu au moins autant que lui. Subitement, la jeune femme était devenue douce, attentionnée, presque préoccupée par l’état du latino. Mais au-delà de la surprise, Pablo accueillait plutôt ce comportement avec énormément de soulagement. Il avait tellement eu peur de la vexer une fois de plus, de faire qu’elle lui file entre les doigts sans rien vouloir savoir, sans comprendre l’importance qu’elle prenait désormais dans sa vie. D’abord simple amie, Madi était rapidement devenue bien plus que ça aux yeux du latino. Sa personnalité, son caractère mais aussi son physique avaient fait d’elle une nouvelle conquête potentielle pour lui. Et pourtant, juste au moment où tout pouvait se concrétiser, Pablo avait renoncé. Au-delà de ses habitudes de coureur de jupons, tout ce qui lui importait en ce moment était sa fille… et ce même si elle n’était plus là depuis longtemps.

Même si ça lui faisait mal, et que le fait de remuer ces souvenirs douloureux n’était certainement pas la meilleure chose en faire pour en guérir, le jeune homme livra à Madison toute son histoire en quelques mots. Il ne lui avait fallu que quelques secondes pour lui faire connaitre les détails les plus importants, mais Pablo put immédiatement lire la surprise sur le visage de la jeune femme. Le croyait-elle maintenant lorsqu’il lui disait que personne ne pouvait lui venir en aide ? Les yeux rivés vers le plafond, il faisait tout son possible pour ne pas croiser le regard de Madi et ainsi fondre en larme comme une mauviette. Mais alors qu’il comptait sur le silence pour se remettre un peu de ses émotions, elle reprit d’une voix toujours aussi douce : « Ok... Et hum... tu regrettes que vous l'ayez fait ? T'aurais voulu le garder ? » Comme toujours, Madison avait vu juste. Sans même le savoir, elle avait mis le doigt sur les deux questions que Pablo se posait depuis la naissance de sa fille. Et il avait beau essayer de se faire une raison, de se dire qu’élever un enfant aurait été impossible pour lui, il y avait toujours cette petite voix dans un coin de sa tête. Celle-là même qui lui assurait qu’il aurait pu faire un bon père, et que si il l’avait voulu, il aurait pu prendre toutes les responsabilités nécessaires pour élever sa fille dans un environnement sain.

Lentement, Pablo pivota pour s’allonger face à la jeune femme et ainsi pouvoir la regarder dans les yeux. Au point où il en était de toute façon… ce n’était plus la peine de fuir. Du bout des doigts, le latino caressa la joue de Madi en silence. Pendant un long moment, il laissa glisser son regard sur son visage sans pour autant cesser de la caresser. Puis, après avoir poussé un nouveau soupir trahissant son désespoir, il se décida à répondre en murmurant. « Je… je sais pas. Je me disais qu’on ne pouvait pas l’élever… avant, c’était une évidence. Mais quand je l’ai vue… » Sous le coup de l’émotion, il dut s’arrêter un moment et même fermer les yeux histoire de reprendre ses esprits. « Elle était parfaite… » lâcha-t-il de façon presque inaudible. Puis, comme s’il se reprenait subitement en main, Pablo rouvrit les yeux pour les planter dans ceux de Madi. « Franchement… Tu crois que j’aurai pu être à la hauteur avec elle ? »

Pablo l'avait amené sur un terrain qu'elle était très loin de maîtriser. Les enfants. Rien que penser en avoir un un jour lui provoquait une grimace de dégoût. C'était bien que des gens fassent des enfants, il fallait bien perpétuer le renouvellement de notre espèce. Mais si Madison pouvait éviter de se voir le ventre déformé, les hormones déglinguées, puis surtout d'avoir un petit monstre braillard incapable de s'occuper de lui même, elle n'hésiterait pas. La contraception était sa meilleure amie. Elle n'aurait pas voulu se voir engrossé par un de ces vieillards, bien qu'elle ait déjà menti à ce sujet pour en faire chanter certains. Mais ce n'était pas d'elle qu'on parlait ici. Pablo avait eu un enfant. Si la tête de Pablo ne l'avait pas dissuadé de tenter une quelconque moquerie, elle aurait sûrement éclaté de rire. Elle était plutôt préoccupée par ce qui pouvait bien le chambouler comme ça et tentait de deviner ce qui n'allait pas – et pourquoi était-ce plus important que de profiter de ce grand lit avec elle, surtout quand il lui caressait le visage de cette manière. « Je… je sais pas. Je me disais qu’on ne pouvait pas l’élever… avant, c’était une évidence. Mais quand je l’ai vue… Elle était parfaite… » Elle doutait que cela soit possible. Un bébé ça ne faisait que pleurer et faire caca non ? S'il parlait juste de son physique, elle n'était cependant guère étonnée qu'il dise ça. Tous les parents trouvaient leurs enfants parfaits, rare étaient ceux qui grimaçaient de dégoût face aux horreurs qu'ils avaient créées. Mais elle ne pouvait pas vraiment plaisanter sur la situation. Pablo semblait vraiment perturbé. Elle ne se rappelait pas l'avoir déjà vu autant. Ou peut-être cette fois où il avait abîmé sa voiture mais qu'en fait ce n'était qu'une égratignure. C'était même plus sérieux que ça – pour dire. « Franchement… Tu crois que j’aurai pu être à la hauteur avec elle ? » Ça, c'était une question directe. Mais heureusement pour elle, Madison était une bonne menteuse, comment réussiraient-elles à arnaquer autant de monde sinon... Elle eut un petit sourire, réfléchissant pour trouver les bons mots. « Bien sûr que tu aurais été à la hauteur. Elle ajouta ensuite, fronçant les sourcils : je ne crois pas que ce soit très difficile d'élever un enfant C'était peut-être chiant mais la jeune femme restait persuadée que si les gens plus stupides de cette Terre arrivaient à le faire, n'importe qui le pouvait. Mais est ce que tu étais prêt maintenant ? Il faut du temps pour élever un enfant, un endroit sûr, puis si la mère ne voulait pas le garder tu t'aurais vu l'élever tout seul ? » Ce n'était sûrement pas Madison qui l'aurait aidé. Elle aurait plutôt fui comme s'il venait de mettre le feu à la maison. « Tu es encore jeune Pablo, tu as encore le temps. » De toute manière maintenant qu'il était parti, il ne pouvait pas vraiment faire revenir son enfant n'est-ce pas ? Les droits d'adoption et compagnie ce n'était pas vraiment sa tasse de thé...

désolée pour le retard .__.

Pablo avait beau être au plus mal, il savait qu’il devait à tout prix se reprendre. Tout d’abord pour sa propre fierté, son orgueil, mais aussi pour Madi. Après tout, la soirée qu’ils passaient ensemble leur avait laissé bien plus de promesses que ça, et la toute nouvelle sensibilité du latino était en train de tout gâcher. Il se savait bien plus fort que ça et pourtant, Pablo ne parvenait pas à se raisonner. Il ne parvenait pas à se faire violence comme il le faisait d’habitude pour passer au-dessus de ce qui le tracassait. Car cette fois, la source de ses tourments était bien trop importante et récente pour qu’il soit capable de se montrer impassible. « Bien sûr que tu aurais été à la hauteur. Je ne crois pas que ce soit très difficile d'élever un enfant » tenta alors de le rassurer Madison, laissant Pablo pour le moins perplexe. Il prit quelques instants pour considérer ce qu’elle venait de dire, puis laissa finalement échapper un long soupir. Quoi qu’elle dise, même si tout cela partait d’une intention louable, Madison ne pouvait clairement pas l’aider. Elle ne savait pas ce qu’il pouvait ressentir car elle n’avait tout simplement jamais eu d’enfant, et n’était a priori pas prête d’en avoir. Le latino haussa alors les épaules, ce qui eut pour effet de relancer la jeune femme sur sa conversation première : « Mais est ce que tu étais prêt maintenant ? Il faut du temps pour élever un enfant, un endroit sûr, puis si la mère ne voulait pas le garder tu t'aurais vu l'élever tout seul ? »

Même si elle ne s’y connaissait visiblement pas, Pablo dut avouer qu’elle n’avait pas tout à fait tort. Etait-il prêt à assumer la charge d’un enfant seul ? Car même si Bonnie était sa mère, ils n’étaient même plus en couple, et n’auraient très certainement pas vécu ensemble pour le seul bien-être de leur fille. « Tu es encore jeune Pablo, tu as encore le temps. » conclut alors Madison, au moment même où les yeux du jeune homme recroisaient les siens. Et bien malgré lui, Pablo se surprit à sourire. La voir ainsi tenter de le rassurer et de le réconforter lui faisait chaud au cœur. Car même s’il était un des rares privilégiés à s’être attiré les bonnes faveurs de Madi, il la savait bien plus sévère et insensible d’habitude. Mais ce soir, elle était aux petits soins avec lui et malgré la situation, le latino ne pouvait qu’apprécier son initiative. Et pour la remercier, quoi de mieux que lui offrir ce qu’elle attendait visiblement depuis qu’ils s’étaient rencontrés dans ce café ?

Pablo avant encore les idées un peu brouillées par la tristesse, mais Madison n’en restait pas moins désirable. En se retournant vers elle, il ne put s’empêcher de passer tendrement une main dans ses cheveux et lentement, il approcha son visage de celui de la jeune femme pour lier leurs lèvres dans un baiser bien plus doux que ceux qu’ils avaient déjà échangés ce soir. Mais bien vite, ses mains se firent plus baladeuses, ses caresses plus audacieuses, et Pablo finit par fondre littéralement sur elle, donnant ainsi raison à tous ses désirs les plus inavouables.