Pandora aimait la psychiatrie - elle ne savait pas vraiment d'où ça lui venait, pourquoi, comment, mais elle aimait ça, ses cours étaient une partie de plaisir ludique et elle appréciait encore plus l'opportunité de pouvoir faire face à de véritables patients en travaillant pour le service du Dr Tate. Evidemment, il ne la laissait pas gérer, il existait un lien entre le psychiatre & ses patients qu'il ne devait briser sous aucun prétexte, & Pandora, en tant qu'élève modèle sur le sujet, ne pouvait que respecter ça, mais le simple fait d'être là, dans la pièce, de devoir apprivoiser elle aussi les sujets du jeune homme, était d'un intérêt dont elle n'était pas prête de se lasser.

Luca était un cas "différent" des patients qu'elle avait pu rencontrer jusqu'à présent dans le bureau du Dr Tate ; des dérangés mentaux, elle en avait observé un bon nombre depuis le début de ses études, et elle avait deviné comme son supérieur dès la première entrevue que Luca n'était pas si "troublé" que ça. Evidemment, il était empli de mystère ! Pourquoi faire usage de drogue après une victoire si étonnante ? Lors de leurs entrevues - Luca était le seul patient que Panda avait vraiment pu analyser, depuis la première fois que le Dr Tate avait eu un empêchement, elle avait insisté pour pouvoir faire plusieurs séances avec lui - , Luca parlait de son enfance, de tout & de rien, mais jamais de ce moment précis où il avait été pris prenant des dopants - ou bien étais-ce de la drogue ? Le mystère restait entier, et Pandora avait assez bien appris ses leçons pour savoir qu'il ne fallait pas le pousser ; c'était pourtant tellement difficile ! Panda était une personne qui, au-delà de certaines exceptions, aimait être frontale, confronter les choses, et la douceur... La douceur n'était pas vraiment son point fort, c'était surtout sur ça qu'elle devait travailler d'ailleurs.

Comme tous les mercredi désormais, Luca l'attendait patiemment dans la salle d'attente. Dès qu'elle le vit, le sourire de Pandora s'élargit et elle lui adressa un signe de tête avant de lui désigner le couloir menant au bureau du Dr Tate. Plus elle lui parlait, plus elle avait l'impression de le connaître, et plus ce qu'elle apprenait lui plaisait, mais elle savait qu'elle devait essayer de rester professionnelle le plus possible, c'est pourquoi elle resta silencieuse jusqu'à ce qu'ils atteignent le bureau, dans lequel ils pénétrèrent avant que Pandora ne ferme la porte. Reprenant ses habitudes, elle posa son manteau et prit place sur sa chaise en attendant que Luca se soit installé. Avant que le silence ne devienne pesant, la jeune femme avait cédé à la tentation & pris la parole. « Bonne semaine ? » demanda-t-elle sur le ton de la conversation en sortant de son sac son calepin, qu'elle utilisait autant pour ses cours que pour les séances qu'elle avait avec Luca & dont elle devait garder un semblant d'écrit pour le Dr Tate.

« T'en as pas marre de lire ce genre de trucs ? » lança Jamie à son colocataire en se laissant mollement tomber sur le canapé en face de celui où il était dors et déjà installé. Relevant les yeux du journal sportif qu'il était en train de lire, Luca haussa les épaules sans prononcer le moindre mot et fit mine de se replonger dans sa lecture, masquant parfaitement son trouble. Cela faisait des semaines déjà que les journaux s'emparaient de la moindre information relatée à ce terrible malentendu qui risquait de briser sa carrière. Et cette fois-ci encore, un article complet lui était dédié au nom de « Un destin prêt à s'arrêter ? » trônait sur deux pages d'un des magazines sportifs les plus célèbres. Pourtant, le comité des sports anglais n'avait fait qu'annoncer que le jeune homme suivait un semblant de thérapie en attendant de trouver une solution à tout ça, et que des analyses allaient être faites. Des analyses, ce qu'il redoutait tant. Car, qui disait analyse disait preuve qu'il n'était dépendant d'aucune drogue, d'aucune sorte de dopage et qu'il était simplement diabétique. Et ce détail là, il ne se sentait pas encore moralement capable de l'avouer aux yeux du monde entier. « J'dis ça pour toi Luca... » relança son colocataire pour le tirer une nouvelle fois de sa lecture. Finissant par plier le journal, Luca le lança sur la table basse trônant entre lui et son ami et planta son regard sur lui. « Je sais. Mais c'est plus fort que moi. » C?était ainsi : il souffrait inconsciemment de lire autant de mensonges sur sa personne, lui qui, au fond, n'avait commis que le considéré "meurtre" d'avoir pris ses médicaments afin de garder le contrôle sur la maladie qui le suivait depuis sa tendre enfance. « Tu la vois aujourd'hui non ? Ta future psychiatre sexy ? » À l'entente de Jamie qui parlait ainsi de Pandora, le nageur laissa s'échapper un léger rire. Il n'avait qualifié la jeune femme qui se chargeait de son cas de "sexy" -quand bien même il le pensait-, par simple respect pour elle. Elle était évidemment très attirante, mais toute leur relation restait basée sur ce qui lui semblait être du professionnel et rien d'autre. « Tu devrais p'têtre tout lui raconter. » Immédiatement, la mine de Micahel se renfrogna. Non, il ne pouvait pas en parler et encore moins à l'étudiante en psychiatrie qui remplaçait le réel médecin chargé de son histoire. C'était le conduire immédiatement dans la fosse aux lions et il ne se sentait définitivement pas prêt. Soupirant violemment pour montrer son agacement, Luca finit par se lever et lança à son colocataire un « Ouais, je la vois aujourd'hui, d'ailleurs je suis à la bourre. » bref, mettant ainsi un terme à leur conversation, avant de s'emparer de sa veste et de quitter l'appartement pour se rendre à son rendez-vous.

Il n'eut pas à attendre longtemps dans la salle prévue à cet effet pour que Pandora vienne le chercher, son habituel sourire aux lèvres. Le lui rendant, Luca se leva et la suivit jusqu'au bureau du Docteur Tale, le médecin chargé de son dossier. Depuis qu'il avait entamé cette thérapie jugée nécessaire par son coach sportif pour taire les bruits à son sujet, l'américano-italien avait déjà relativement exposé sa vie à Pandora : il était allé jusqu'à lui parler de la mort de sa petite soeur, événement qui l'avait terriblement marquer et qui était dangereusement lié au secret qu'il gardait profondément caché en lui et qu'il ne comptait pas exposer au grand jour de si tôt. Mais c'est bien connu : il ne faut jamais dire jamais.« Bonne semaine ? » le questionna l'étudiante après que Luca ait pris place dans le bureau. En guise de réponse, il haussa les épaules. Cette semaine était comme les précédentes : il était encore et toujours traqué par les journalistes sportifs, il ne pouvait rien faire de sa passion si ce n'est aller nager pour son propre plaisir. Alors il se retrouvait coincé, comme toujours depuis qu'il s'était fait passer pour un junkie aux yeux d'un inconnu. « Et toi ? » demanda-t-il naturellement à la jolie blonde, histoire de meubler ce début de conversation. Autant se montrer poli.

Depuis qu'elle assistait aux séances de Luca & du Dr Tate, et encore plus depuis que c'était elle qui s'occupait de "discuter" avec Luca, Pandora en avait appris beaucoup sur le jeune homme. Elle avait aussi lu - comment le manquer ? - quelques articles concernant cette histoire de drogue, après tout c'était bien pour ça qu'il devait être suivi, et pourtant... Pourtant, elle avait l'impression qu'il manquait une pièce indispensable au puzzle. Il avait eu du mal à lui dévoiler certains moments de son enfance, notamment la mort de sa petite soeur qui semblait l'avoir particulièrement affecté. Pandora savait qu'elle devait lui faire en parler, encore & encore, mais ce n'était pas chose facile lorsqu'on savait qu'il fallait également qu'elle fasse très attention à ne pas le brusquer.

Le Dr Tate croyait profondément que le fait que ce soit Pandora qui s'occupe de Luca ne pouvait être que bénéfique, et il n'avait pas hésité à le faire savoir à la blonde : ils avaient le même âge, et Luca avait d'abord été particulièrement sur la défensive. Avec elle, il avait beaucoup plus parlé qu'avec le docteur, et Panda savait que c'était pour cette raison qu'il la laissait faire ces séances à sa place ; elle n'allait pas s'en plaindre non plus, hein ! Elle était ravie d'être enfin "sur le terrain", si le terme était un tant soit peu approprié, et Luca était donc un mystère qu'elle était clairement décidée à percer.

« Et toi ? » répliqua le jeune homme. Aussitôt, Pandora haussa un sourcil & plongea un regard parfaitement entendu dans celui de l'italo-américain. Il ne répondait absolument pas à sa question - dans d'autres circonstances, ça aurait sûrement pu passer, mais ils étaient en séance, & le but n'était clairement pas de faire parler Pandora - qui, soit dit en passant, en aurait peut-être besoin, bien qu'elle refuse en tout point d'être comparée aux gens dont elle étudiait les cas. Entrant quand même dans le jeu du jeune homme, elle croisa ses mains sur son calepin, lui-même posé sur ses cuisses, et haussa brièvement les épaules. « Hm, fatigante, mais il y a eu des bonnes choses. J'ai acheté mon costume d'Halloween. » déclara-t-elle simplement avec rapidité avant d'enchaîner immédiatement pour ne pas lui laisser le temps de répliquer sur le sujet. « Est-ce que tu as nagé, récemment ? Dans une piscine quelconque, je veux dire. » demanda-t-elle, entrant dans le vif du sujet sans plus attendre.

Told ya !

Luca n'aimait pas particulièrement parler de lui, du moins, pas en profondeur. Les sujets qui le touchaient comme la mort de sa soeur, le départ de sa demi-soeur ou le divorce de ses parents étaient de ceux qu'il préférait éviter, et jamais, ô grand jamais, il ne parlait de sa maladie. Seuls sa famille, sa meilleure amie, son colocataire et son entraîneur étaient au courant pour son diabète, et il ne comptait pas en parler à plus de personnes que ça. Pourtant, plus les séances de thérapie se succédaient, plus le nageur craignait devoir finir par s'aventurer sur ce terrain. Cela faisait plusieurs fois déjà qu'il parlait de lui à Pandora, qu'il lui parlait des sujets douloureux de sa vie, et un jour, il risquait bel et bien de parler de sa maladie. Mais, à chaque fois que cette pensée lui effleurait l'esprit, il sentait ses muscles se tendre, son coeur battre plus rapidement. Il entrait dans un état de stress qu'il parvenait tout de même à dissimuler mais qui lui nouait l'estomac.

Il ne fallut qu'un simple échange de regard pour que Luca comprenne et grimace. Il n'était pas d'humeur bavarde aujourd'hui, et le fait qu'il évite la question de l'étudiante ne semblait pas lui convenir. Il était ici pour parler de lui, mais s'il n'était même pas capable de dire comment s'était passé sa semaine, il est clair que la suite risquait d'être pénible. « Hm, fatigante, mais il y a eu des bonnes choses. J'ai acheté mon costume d'Halloween. » Légèrement mal à l'aise par l'épisode haussement de sourcil et regard entendu, le jeune homme se contenta de lui adresser un bref sourire crispé et passa sa main dans sa nuque, machinalement, en essayant de se détendre comme il en avait pourtant pris l'habitude. « Est-ce que tu as nagé, récemment ? Dans une piscine quelconque, je veux dire. » Il avait réellement dû la froisser pour qu'elle lui rentre dedans comme ça. Restant silencieux quelques instants, Luca la regarda, la mine parfaitement neutre, le coeur pourtant battant la chamade. Oui, il était allé nager plus d'une fois, comme chaque semaine. Mais à nouveau, ce n'était pas ce qu'il désirait : nager pour son plaisir n'était plus suffisant, il avait besoin d'entraînements et de compétitions. Mais son coach sportif ne jugeait pas le temps écoulé suffisant pour le remettre dans le bain. Soupirant doucement, Micahel hocha donc positivement de la tête et répondit cette fois-ci par une phrase. « Oui, j'essaye de me tenir à trois fois par semaine minimum. J'en ai besoin. » Sa dernière phrase témoignait déjà trop, à son goût, de l'état d'esprit dans lequel il se trouvait et, il se doutait bien que Pandora l'avait senti et allait creusé dans ce sens là. Il s'apprêta donc à marcher sur des oeufs et à faire très attention à ce qui allait sortir de sa bouche.

Etre en cours & étudier des cas était totalement différent d'être dans une salle avec un patient, Pandora en avait pris conscience depuis qu'elle avait commencé à "suivre" Luca, bien que son cas soit très différent de ceux dont elle avait entendu parler par le passé. Luca n'était pas vraiment "malade", du moins pas de la façon dont on pouvait l'entendre lorsqu'on était étudiant en psychiatrie, mais ça n'empêchait pas Panda de prendre son travail avec lui à coeur. A vrai dire, elle était intriguée par l'attitude du jeune homme, encore plus aujourd'hui que les autres jours. Il avait eu beaucoup de mal à se confier, et Pandora doutait, malgré le fait qu'il lui ai parlé de moments douloureux comme la mort de sa petite soeur, d'avoir acquis sa confiance. Pourtant, elle savait que c'était essentiel, il devait lui faire confiance si elle voulait qu'il dévoile enfin cette partie de lui qu'elle savait présente mais qu'il gardait irrémédiablement cachée.

Aujourd'hui, Pandora voyait Luca mal à l'aise, et elle avait conscience qu'au contraire de ce qu'elle devrait faire, elle ne l'aidait pas vraiment à se sentir plus confortable. Ce n'était pas tellement qu'elle perdait patience, juste qu'elle voulait lui faire comprendre - elle se doutait qu'il le savait déjà, cependant - que tout ça pouvait se terminer très vite & très bien si il y mettait du sien, se doutant qu'il ne devait pas particulièrement apprécier de devoir venir ici toutes les semaines. Après tout, elle n'avait qu'une heure, et c'était aussi pour lui qu'elle faisait ça, n'est-ce pas ? Alors elle avait parlé de la nage, c'était finalement tout à fait naturel puisque lui-même lui avait brièvement avoué que ça avait une importance toute particulière, et puis elle n'avait pas eu besoin de lui pour le savoir, les journaux le disaient pour lui depuis qu'il était entré dans la compétition. « Oui, j'essaye de me tenir à trois fois par semaine minimum. J'en ai besoin. » lui répondit-il après un moment. Bon, il lui répondait, c'était déjà une victoire en soi. Hochant pensivement la tête, Pandora griffonna quelques mots sur son calepin avant de relever les yeux vers Luca. « La compétition te manque. » déclara-t-elle, s'abstenant de lui poser la question en voyant que tout chez lui en témoignait, se contentant de lui faire savoir qu'elle avait compris ça. « Je me suis permise de regarder tes performances aux Jeux Olympiques de cet été... C'est évident que c'est ce qui te fait vibrer. » continua-t-elle en se redressant légèrement, croisant ses jambes en cherchant à analyser toutes les expressions que pouvait avoir Luca. « Tu pourrais me décrire ce que tu ressens, quand tu gagnes une compétition ? » demanda-t-elle en baissant de nouveau les yeux vers son calepin, préférant ne pas l'assaillor de son regard inquisiteur et le laisser répondre à son rythme.

Si Luca s'était d'abord senti sur la défensive lorsque l'étudiante aborda le sujet de la natation, il sentit comme un poids s'envoler de ses épaules quand elle déclara « La compétition te manque. » après avoir relevé les yeux vers elle. Elle visait juste. Il n'avait pas participé à une seule compétition depuis l'incident des Jeux Olympiques alors que cela faisait normalement partie de sa vie de manière hebdomadaire. Depuis le deux août dernier, il n'avait retrouvé les bassins d'eau que pour ses entraînement personnel, sans même que son coach ne vienne l'entraîner comme à son habitude. La solitude le pesait, le manque de la compétition également. Se contentant d'acquiescer d'un simple signe de tête pour appuyer les paroles de Pandora, laissant ensuite son regard témoigner du manque évident qu'il ressentait.

« Je me suis permise de regarder tes performances aux Jeux Olympiques de cet été... C'est évident que c'est ce qui te fait vibrer. » Quand il entendit les mots Jeux Olympiques sortir de la bouche de la jeune femme, Luca tressaillit très légèrement. Si les jeux de cet été lui rappelaient le succès qu'il avait eu auprès du public et surtout la performance qu'il avait faire durant les compétitions, ils lui rappelaient également sa douloureuse chute qui n'était toujours pas terminer. Sentant son coeur se crisper, il passa une main maladroite dans sa nuque et adressa un sourire crispé à Pandora, espérant qu'elle ne s'étale pas sur le sujet des Jeux Olympiques de Londres. Heureusement pour lui, elle dériva sur une autre question qui fit vite de le rassurer. « Tu pourrais me décrire ce que tu ressens, quand tu gagnes une compétition ? » Personne ne lui avait jamais posé cette question, pas même les journalistes qui, de leurs, côtés, attendaient plus à ce que le nageur vante ses performances en se félicitant. Plutôt content d'entendre la future psychiatre le questionner sur son état d'âme de vainqueur, il baissa la tête quelques secondes, le temps de réfléchir. Puis il redressa le visage pour planter son regard sur la jeune femme alors qu'un léger sourire détendait enfin ses traits. « C'est difficile à décrire... j'ai toujours de la peine à me dire que c'est moi qui ai gagné. » Il est vrai qu'une victoire était toujours difficile à croire pour lui. Et, pour mieux expliquer sa réponse, il se mit à donner plus de précisions, imitant presque les gestes qu'il avait lorsqu'il nageait sur les derniers mètres du bassin. « Tu as tout donné sur les derniers mètres, tes doigts finissent par enfin effleurer le rebord du bassin, et ce n'est qu'en relevant la tête que tu constates que les autres sont en retard par rapport à toi. Il faut quelques secondes pour réaliser, et ensuite, c'est l'euphorie. » Parler ainsi lui rappelait principalement le temps de réaction incroyablement long qu'il avait eu en remportant trois compétitions de nage aux Jeux Olympiques. Une poignée de secondes ralenties pour réaliser, puis plusieurs minutes d'allégresse. « Mais... ce n'est pas vraiment ce que je ressens en gagnant qui est important. Ça n'a rien à voir avec ce que je ressens quand je nage, tout simplement. » Il se doutait que Pandora allait lui demander des précisions, mais pour ne pas partir dans un long monologue, il préféra lui laisser le droit de le questionner à ce sujet.

Apparemment, Pandora visait juste lorsqu'elle analysait Luca & son manque de compétition ; pour sa part, la jeune femme n'était pas particulièrement sportive, mais elle avait tout de même cette notion par rapport aux cours. Bien qu'elle ne soit pas SI travailleuse que ça, lorsqu'il était question d'avoir de bonnes notes, de bonnes appréciations ou de se faire bien voir d'un professeur, Pandora était la première à se montrer volontaire pour participer aux cours, donner son avis - qu'elle voulait toujours particulièrement poussé - ou rendre des papiers tellement documentés & recherchés qu'elle en obtenait des A+ avec une facilité déconcertante. Finalement, c'était cette compétition avec les autres dickheads de sa classe qui la rendait si motivée, bien qu'il y ai aussi le fait que la psychologie & la psychiatrie l'intéresse tout particulièrement.

Luca hocha la tête alors que Pandora lui décrivait ce qu'elle pensait de ce qu'il ressentait, et il la fit légèrement sourire : c'était indéniable, Panda adorait avoir raison. Et alors que Luca semblait chercher ses mots & avait ses émotions pratiquement écrites sur son visage, Panda essayait de garder le contrôle le plus possible, tentant de rester neutre & laissant le jeune homme s'exprimer autant qu'il le voulait. « C'est difficile à décrire... j'ai toujours de la peine à me dire que c'est moi qui ai gagné. » Raté ; la jeune femme ne put s'empêcher de pouffer légèrement en entendant ses paroles, mais elle fut discrète et à vrai dire, ce n'était pas vraiment péjoratif. Elle trouvait juste original que quelqu'un qui s'engage dans une compétition éprouve une quelconque peine alors qu'il gagnait cette compétition ; elle le nota donc brièvement dans son calepin. « Tu as tout donné sur les derniers mètres, tes doigts finissent par enfin effleurer le rebord du bassin, et ce n'est qu'en relevant la tête que tu constates que les autres sont en retard par rapport à toi. Il faut quelques secondes pour réaliser, et ensuite, c'est l'euphorie. » Il était complètement plongé dans son explication, et ça conforta Pandora dans l'idée qu'il ne pouvait pas vivre sans la nage et la compétition ; en revanche, il la contredit légèrement par la suite. « Mais... ce n'est pas vraiment ce que je ressens en gagnant qui est important. Ça n'a rien à voir avec ce que je ressens quand je nage, tout simplement. » Restant un instant silencieuse pour assimiler les paroles du jeune homme, elle tapota le bout de son stylo sur sa feuille. « Si la compétition te manque, c'est que ça a tout de même son importance... C'est la preuve que tu vaux la peine, c'est la récompense pour ton travail. » déclara-t-elle avant de plonger son regard dans celui de Luca. « Alors, qu'est-ce que tu ressens, quand tu nages ? Maintenant que tu es dans cette situation particulière, est-ce que ça te conviendrait de seulement nager sans faire de compétitions ? »

Quand il commençait à parler de son métier, Luca avait tendance à s'emporter dans ses explications. C'était en réalité bien plus qu'un métier, c'était une passion qui l'avait suivi depuis sa plus tendre enfance, bordant ses journées jusqu'à aujourd'hui. S'il n'avait commencé que par prendre des cours dans le simple but de faire du sport -élément essentiel pour un enfant-, il avait vite fait d'avoir un penchant certain pour l'eau et la nage, ce qui l'a inévitablement poussé sur le chemin de la compétition très jeune, jusqu'à ce qu'il devienne le champion olympique connu dorénavant des États-Unis. Un parcours long et pourtant si rapide qui l'avait forgé, qui avait fait de lui l'homme qu'il était devenu du haut de ses vingt-trois ans. La natation était sa vie, et cela expliquait largement l'engouement qu'il mettait dans ses explications.

Après avoir exprimé son ressenti, Luca fit fasse au silence de l'étudiante qui l'observait en tapotant son stylo contre son calepin. Elle semblait réfléchir à ses paroles, comme si elle ne les comprenait pas dans leur totalité. Haussant les sourcils, le jeune homme s'apprêta à reprendre la parole, mais elle le fit pour lui. Il referma donc ses lèvres et l'écouta attentivement. « Si la compétition te manque, c'est que ça a tout de même son importance... C'est la preuve que tu vaux la peine, c'est la récompense pour ton travail. » Elle avait raison. Gagner, c'était une réelle récompense pour l'effort fourni, pour tous les entraînement qu'il avait subi, le nombres d'heures qu'il avait passée, assisté de son entraîneur ou non, à faire des longueurs avec les différentes nage de compétition, se surpassant et essayant sans cesse de dépasser ses limites. Mais dans le fond, gagner, cela ne lui apportait qu'une satisfaction de plus ainsi que le succès qui suivait. Ce qui importait réellement, c'était le fait de concourir, qu'importe la place qu'il remportait. « Alors, qu'est-ce que tu ressens, quand tu nages ? Maintenant que tu es dans cette situation particulière, est-ce que ça te conviendrait de seulement nager sans faire de compétitions ? » Luca prit le temps d'y réfléchir. Il adorait nager, c'était indéniable, et, avec le temps, c'était devenu une nécessité. Il ne pourrait pas continuer de vivre si on le privait de plonger dans l'eau. C'était une dépendance. Quant à la compétition, il se verrait mal s'en priver pour toujours. Depuis l'explosion médiatique qui avait chamboulé sa vie, il n'avait plus concourut et il était évident que cela lui manquait. « Pour moi, nager c'est une nécessité, une dépendance. Un peu comme la cigarette pour un fumeur. Une semaine sans nager et je suis en manque, presque au bord de la dépression. » Un léger rire franchit la barrière de ses lèvres et il exerça un bref signe de la main comme pour lui indiquer de ne pas noter sa dernière précision. « J'exagère. Mais j'en ai vraiment besoin pour me libérer, pour me sentir vivant. » Il n'aurait pas pu mieux exprimer son ressenti. La natation le rendait vivant, cela faisait partie de lui et le priver de ça équivaudrait à l'enfermer dans une prison pour l'empêcher de vivre sa vie comme bon lui semblerait. « Et la compétition... pour l'instant, j'en ai besoin aussi. Cette adrénaline que ça me procure, ce dépassement de soi, j'en ai besoin aussi. » Prononçant ces mots, il adressa un sourire retenu à Pandora. La compétition, il voulait la retrouver, mais il savait pertinemment que cela ne serait pas pour tout de suite. Et ça le blessait légèrement.

Pour Pandora, Luca était une énigme. Ils parlaient de compétition, & Pandora comprenait ce que Luca voulait lui expliquer, mais pour elle il était plutôt question de challenge, & le nageur professionnel en était un. Elle n'arrivait tout simplement pas à comprendre ce qui avait poussé ce jeune homme plein d'ambition & de talent à se compromettre dans la drogue. Parce que clairement, il ne semblait pas en manquer, ni d'ambition, ni de talent. Alors pourquoi ? Il devait forcément être conscient des risques qu'il prenait en se droguant, pourquoi être prêt à tout envoyer balader pour si peu ?

« Pour moi, nager c'est une nécessité, une dépendance. Un peu comme la cigarette pour un fumeur. Une semaine sans nager et je suis en manque, presque au bord de la dépression. » Pandora fronça légèrement les sourcils, toujours dans son travail de tentative de compréhension du jeune homme qui se trouvait en face d'elle. « J'exagère. Mais j'en ai vraiment besoin pour me libérer, pour me sentir vivant. » Ca, elle l'avait saisi, et elle se contenta donc de hocher simplement la tête en attendant que le jeune homme continue, espérant qu'il irait jusqu'au point qu'elle voulait atteindre sans qu'elle ai à le pousser plus. Bien sûr, elle savait qu'à un moment donné ou à un autre, elle allait devoir y aller fort, parce qu'elle savait qu'elle avait déjà été trop conciliante avec lui, le laissant tourner indéfiniment autour du pot sans jamais atteindre la raison précise de sa présence dans ce cabinet. Nager était sa passion, c'était évident, mais qu'en était-il de la compétition, avait-il la même passion pour ça aussi ? Où devait-elle situer la drogue dans tout ce schéma ? « Et la compétition... pour l'instant, j'en ai besoin aussi. Cette adrénaline que ça me procure, ce dépassement de soi, j'en ai besoin aussi. » Pandora haussa un sourcil : enfin, ils touchaient le point sensible, et sans qu'elle sache si c'était particulièrement volontaire ou pas, le jeune homme venait de lui tendre une perche qu'elle ne manquerait pas de saisir. Elle resta silencieuse un instant, se laissant le temps d'assimiler les paroles un instant, et baissa les yeux sur ses notes sans rien y ajouter cependant, tentant encore une fois de donner un sens à ce schéma qui ne semblait pas vraiment en avoir. « Et pourtant, tu as été attrapé avec une seringue dans le bras juste après une compétition... » dit-elle, laissant à peine le temps à Luca d'assimiler ses paroles avant de continuer. « Pourquoi ? Est-ce que c'est quelque chose dont tu as besoin aussi, une dépendance comparable à celle de la nage ? » demanda-t-elle, allant tout de suite au point sans être particulièrement désireuse d'entrer tout de suite dans les détails, bien qu'elle sache que si le jeune homme se droguait, elle allait devoir aller creuser dans ses antécédents avec lui, savoir comment ça avait commencé, avec qui, pourquoi... Tenant tout de même à se justifier pour que Luca ne se braque pas totalement, elle termina rapidement. « On doit aborder ce sujet, Luca... » souffla-t-elle doucement en plongeant son regard dans le sien.

Les réactions de Pandora ne laissaient rien présager de bon. Son froncement de sourcils voulait tout dire : elle n'était pas satisfaite de ses réponses. Ou du moins, elle sentait que quelque chose clochait. Et que cela se lise aussi évidemment sur son visage déstabilisa Luca qui sentit immédiatement son ventre se tordre sous l'effet d'un léger stress qui prenait naissance en lui. « Et pourtant, tu as été attrapé avec une seringue dans le bras juste après une compétition... » Ça y est, le sujet épineux était lancé. Sursautant légèrement en entendant cette phrase d'introduction, le nageur eut bien vite fait de détourner son regard. Cette fois, impossible de rester stoïque : la jeune femme devait lire en lui comme dans un livre ouvert et voir donc sans mal que le sujet le faisait réagir d'une manière qui était bien loin d'être insignifiante. « Pourquoi ? Est-ce que c'est quelque chose dont tu as besoin aussi, une dépendance comparable à celle de la nage ? » Il mourrait d'envie de lui hurler que non, que cela n'avait rien à voir avec de la drogue et qu'il était simplement malade depuis sa tendre enfance. Mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge, comme si quelqu'un lui interdisait simplement de parler. « Ce n'est pas... » commença-t-il d'une voix ferme, avant de se raviser. Il ne voulait pas s'étendre sur le sujet, il ne voulait pas en parler, par peur de se risquer sur un terrain trop dangereux. Il n'était pas encore prêt à dévoiler la vérité, il ne voulait pas que Pandora sache, car cela signifierait que le reste du monde le saurait presque aussitôt après. Croisant les bras contre son torse en s'affaissant dans son siège, il évita le regard de la jeune femme, espérant qu'elle n'insiste pas plus sur le sujet. « On doit aborder ce sujet, Luca... » Les mains se crispant sur ses bras, Luca ferma les yeux et expira lentement. Peut-être bien. Elle avait raison : après tout, il était ici pour en parler. Mais il ne s'en sentait pas capable. Il ne voulait pas raconter sa version, la pure vérité, comme quoi cela n'avait rien à voir avec une quelconque drogue. Mais il n'avait pas non plus envie de lui mentir à elle, lui raconter un tissu de mensonges. « Non, je... » commença-t-il misérablement alors que son coeur frappait de toutes ses forces dans sa cage thoracique. Finissant pas enfin reposer son regard sur l'étudiante, il passa sa langue contre ses lèvres pour les humidifier, réfléchissant à ce qu'il pourrait dire pour éviter d'avoir à tout raconter. Et pourquoi ne pas se montrer simplement franc ? « Je ne me sens pas encore prêt à en parler... » Et c'était la pure vérité. Il n'était pas encore capable de mettre tout à plat, de relever le voile qu'il gardait fermement posé sur ce qu'il s'était réellement passé le jour de la remise des médailles. Il espérait simplement que Pandora comprendrait et le laisserait tranquille avec ça, se doutant tout de même qu'elle allait insistait.

Pandora savait qu'elle tapait en plein dans le mille en abordant le sujet de la sorte, et pourtant elle devait faire savoir à Luca qu'ils n'étaient pas là pour parler de la pluie et du beau temps. Ils étaient bien partis, pourtant ! Elle se souvenait parfaitement du jour où il lui avait parlé pour la première fois de la mort de sa petite soeur, et pourtant il semblait désormais se refermer comme une huître lorsqu'elle voulait aborder le sujet de sa prise de stupéfiants ; ne s'était-il pas attendu à ce qu'elle finisse par mettre le sujet sur la table ? C'était pourtant évident, et elle se devait de le lui rappeler.

Il sembla être pris au vif, et Pandora se demanda un instant si sa précipitation n'allait pas devoir lui faire tout reprendre depuis le début. « Non, je... » Alors qu'elle s'apprêtait à répliquer, Pandora s'arrêta dans son élan comme pour laisser le jeune homme continuer, haussant les sourcils en attendant qu'il se décide. « Je ne me sens pas encore prêt à en parler... » déclara-t-il finalement. Il n'était pas prêt à en parler... Un léger sourire étira les lèvres de l'égypto-australienne qui opta pour une approche totalement différente ; être elle-même. Ce n'était pas comme ça qu'elle devait agir normalement, elle le savait parfaitement, mais Luca n'était pas non plus le genre de patient pour lequel on l'avait préparée. « Parce que tu veux absolument passer plus de temps avec moi dans une salle fermée à clef ? » demanda-t-elle avec un sourire amusé, désignant le bureau du Docteur qui, elle devait bien l'avouer, représentait ni plus ni moins qu'un véritable fantasme. « Ecoute... » Pandora s'humecta les lèvres avant de se redresser sur son siège, fermant son calepin & y accrochant son stylo avant de laisser tomber le tout à terre près d'elle. Elle retira ses chaussures et remonta ses jambes sur les fauteuil, les glissant sous ses fesses avant de se rasseoir plus confortablement. « Plus de notes, plus de psy. Je suis pas là pour te juger, Luca, je suis là pour t'aider. Et ose me dire que ce qui s'est passé aux Jeux Olympiques ne te hante pas. » déclara la jeune femme en cherchant de nouveau le regard de son nouvellement-non-patient.

Ohohoh affreusement court, pardon mais mate l'heure quoi x)

La situation commençait à lui échapper, Luca le sentait. Il perdait le contrôle, déstabilisé par les questions de l'étudiante en psychiatrie. Trop de questions pouvaient amener à des réponses et il ne voulait pas se risquer à dire la vérité. Le coeur battant rapidement, il sentit ses mains trembler et dût croiser les bras contre son torse puissant pour en masquer les légères secousses, son regard fuyant celui de la jeune femme. « Parce que tu veux absolument passer plus de temps avec moi dans une salle fermée à clef ? » Si seulement c'était ça la vraie raison... le nageur serait prêt à beaucoup pour n'être simplement qu'en train de jouer la comédie afin d'éterniser le temps passé avec Pandora dans le bureau du Docteur. Mais il n'y avait rien de cela. La vérité pure et dure était bien plus pénible à vivre, et il s'en serait vraiment passé. Ne réagissant pas à la tentative d'approche de la jolie blonde, il garda son regard détourné, mettant tout en oeuvre pour ne pas craquer et rester le plus calme possible. « Ecoute... » Ce n'est qu'en entendant Pandora bouger sur son siège qu'il reposa enfin ses yeux sur elle. Elle venait de délaisser son calepin de notes et son stylo au sol pour s'installer en tailleur, une position loin de celle qu'elle devrait adopter en tant que future-psychiatre. Interloqué par un tel changement de situation, Luca la fixa d'un regard interrogateur. « Plus de notes, plus de psy. Je suis pas là pour te juger, Luca, je suis là pour t'aider. Et ose me dire que ce qui s'est passé aux Jeux Olympiques ne te hante pas. » Immédiatement, l'américano-italien fronça les sourcils. « Je n'ai jamais dit ça ! » commença-t-il par répliquer. Jamais il n'aurait pu mentir sur ce fait en disant que toute cette histoire lui passait par-dessus. Il y pensait sans arrêt, espérant que cela finisse par s'arrêter. Soufflant doucement, il décroisa ses bras pour aller se pincer l'arrête du nez à l'aide de son pouce et de son indexe. Tentant de garder son calme alors que son coeur battait trop rapidement dans sa cage thoracique, il finit par regarder à nouveau Pandora, le visage à présent neutre, masquant toute émotion. « Qu'est-ce qui me ferait croire que tu n'iras pas immédiatement tout rapporter au Docteur ? Ou à n'importe qui ? » demanda-t-il calmement. Non, il n'avait confiance. Rien ne lui certifiait que ses confessions resteraient entre eux, qu'elle n'irait pas le hurler à quiconque voudrait l'entendre. « Tout ce que je peux te dire c'est que, même si je n'ai rien démenti depuis le début de ces putains d'accusations, il n'y aucune histoire de drogue là-dedans. » rajouta-t-il, la mâchoire crispée. Il en disait déjà trop et il se maudit intérieurement, levant les yeux au ciel avant de détourner une nouvelle fois son regard de la demoiselle.

don't worry ♥ on avait dit court de toute manière x)

Voila, ils étaient entrés dans le vif du sujet. Il avait fallu une bonne douzaine de séances pour y arriver [lol, je crois x)] mais ils y étaient enfin. Malgré le temps qu'elle avait passé à écouter le jeune homme, Pandora ne savait néanmoins toujours pas comment le prendre & dans quel sens l'apprivoiser. Parfois, elle avait l'impression qu'il était sur le point de se confier, de se confier vraiment comme il l'avait fait lorsqu'il avait évoqué la mort de sa sœur, des années plus tôt, mais elle finissait par être déçue ; ce n'était pas pour autant qu'elle se décidait à abandonner, loin de là. Plus qu'un boulot, c'était presque devenu une obsession ; Luca était à proprement parler son premier patient, et si elle devait y passer des heures et des heures pour l'aider, alors elle le ferait. Mais il y avait un moment où il fallait commencer à se confier, et elle sentait qu'aujourd'hui, ce moment était sur le point d'arriver. Elle devait juste persévérer.

« Je n'ai jamais dit ça ! » s'était-il d'abord exclamé, sur la défensive. Seulement, ses gestes et son attitude – il avait décroisé ses bras pour se pincer l'arête du nez – montraient que s'il ne l'avait pas à proprement parler dit, ça ne l'empêchait pas de le penser. Le laissant continuer, Pandora s'abstint néanmoins de lui faire part de cette remarque. « Qu'est-ce qui me ferait croire que tu n'iras pas immédiatement tout rapporter au Docteur ? Ou à n'importe qui ? » Alors c'était de ça, dont il avait peur ? Maintenant qu'il le disait, c'était évident. Il était cerné par les médias. Les sourcils froncés, Pandora s'humecta les lèvres ; elle devait le rassurer, apparemment, c'était ce dont il avait besoin, et elle était pour le coup en mesure de le faire avec sincérité. « Je te l'ai dit, tout ce que tu dis ici ne sort pas de cette pièce. Dr Tate reçoit un compte rendu de nos rendez-vous sur papier – il a un problème avec les ordinateurs, ces bestioles sont tellement faciles à cracker que je le suis sur ce coup – mais on est soumis au secret professionnel. » déclara-t-elle avec calme et logique. « Et si il y a quelque chose que tu veux me dire, là, il me semble que je n'ai pas mon calepin. » continua-t-elle en penchant la tête sur le côté, essayant de comprendre ce qu'il pouvait bien cacher pour qu'il ai si peur d'être découvert. « Tout ce que je peux te dire c'est que, même si je n'ai rien démenti depuis le début de ces putains d'accusations, il n'y aucune histoire de drogue là-dedans. » Oh... Ca alors, pour une surprise, c'en était une. Soufflée, Pandora eut besoin d'un instant pour se remettre de cette confession. Aucune histoire de drogue ? Pourtant, c'était partout dans les journaux, à la télé... Et le temps n'arrangeait rien. Plus il refusait d'en parler, plus les médias s'excitaient comme de la crème fouettée. « Si ce n'est pas de la drogue, alors quoi ? » osa-t-elle demander, déglutissant devant l'énormité de ce qu'elle venait d'apprendre. Le patient, le patient... Elle devait se concentrer sur le patient, pas sur les faits. Enfin, en soi, ça ne changeait pas grand chose. « Luca, garder tout ça secret ne t'aide pas, ça se voit. Tu veux que ça reste seulement entre nous ? Bien, Tate ne sera pas au courant. Mais ne reste pas enfermé dans ton cocon comme ça... » souffla-t-elle en dépliant ses jambes pour retrouver une posture plus ou moins normale.

Luca perdait littéralement pieds. Plus il parlait, plus il avait l'impression de se dévoiler et plus il sentait que Pandora tirait sur le voile qui dissimulait le secret de sa vie. Le coeur battant, il tentait vainement de réfléchir à un échappatoire, un moyen de ne pas en dire plus et de clore la conversation. Il aurait très bien pu se lever et quitter le cabinet, en tant que patient, c'était son droit. En aucun cas le psychiatre -ou la future psychiatre dans le cas présent- était en droit de forcer les pensées de son client, il avait donc le droit de mettre un terme à cette conversation dès qu'il le souhaitait. Mais, malgré toute la peur qui cisaillait ses entrailles, quelque chose en lui le clouait sur place, comme pour le pousser à enfin lâcher ce qu'il retenait en lui depuis des semaines. « Je te l'ai dit, tout ce que tu dis ici ne sort pas de cette pièce. Dr Tate reçoit un compte rendu de nos rendez-vous sur papier – il a un problème avec les ordinateurs, ces bestioles sont tellement faciles à cracker que je le suis sur ce coup – mais on est soumis au secret professionnel. » Le secret professionnel, encore et toujours. Mais sur ce coup, il allait en falloir plus pour le convaincre. Le secret professionnel pouvait exister, cela n'attestait pas du fait qu'elle n'allait pas en parler au Docteur qui, lui, allait prendre la situation en main pour que Luca avoue tout aux médias et au comité sportif. « Et si il y a quelque chose que tu veux me dire, là, il me semble que je n'ai pas mon calepin. » Luca fronça les sourcils. Elle n'avait peut-être pas son calepin en main, mais elle avait un cerveau doté d'une mémoire intacte d'après ce qu'il savait, elle allait donc très facilement se rappeler de la vérité dévoilée -si vérité dévoilée il y avait- et rien ne l'empêcherait d'aller trouver le médecin pour tout lui dire. « Ça ne me prouve rien... » grommela-t-il, très peu convaincu. Il ne se sentait pas encore suffisamment en confiance et, plus Pandora appuyait sur ce sujet sensible, plus il sentait l'envie de prendre ses jambes à son cou l'envahir.

Le visage décomposé de l'étudiante suite à sa petite révélation aurait presque pu amuser le nageur si ce dernier ne s'était pas retrouver sur la sellette, presque poussé à bout pour raconter la vérité. Mais il ne cilla pas, se contentant de la fixer en gardant ses dents serrées, comme pour s'empêcher de prononcer un mot de plus. « Si ce n'est pas de la drogue, alors quoi ? » Évidemment, il fallait s'attendre à ce qu'elle pose cette question. Et pourtant, Luca tressaillit en l'entendait. Il ne pouvait pas le lui dire, pas maintenant, c'était trop tôt, il n'était pas prêt... « Luca, garder tout ça secret ne t'aide pas, ça se voit. Tu veux que ça reste seulement entre nous ? Bien, Tate ne sera pas au courant. Mais ne reste pas enfermé dans ton cocon comme ça... » Elle le suppliait presque, lui promettant de ne rien dire au Docteur Tate. Pouvait-il lui faire confiance ? Ou bien allait-elle trahir sa promesse en allant tout raconter au médecin officiel une fois qu'il aurait quitté les lieux ? Luca était incapable de trouver une réponse à cette question et tout le trouble qu'il ressentait finit par le rendre dingue. Se penchant en avant pour poser ses coudes contre ses genoux, il prit son visage dans ses mains en soupirant longuement, essayant de s'éclaircir les idées. Il se rappela des paroles de son colocataire qui, ce matin même, lui avait conseillé de tout raconter. Il repensa au discours d'Azure qui lui aviat conseillé de ne pas mettre ses rêves en péril simplement pour garder sa maladie secrète. Alors finalement, et presque sans qu'il ne puisse contrôler sa voix, il souffla « De l'insuline. » Son coeur bondit, comme s'il était électrifié du fait que la vérité soit enfin sortie de sa bouche. Prenant quelques secondes pour prendre sur lui, le nageur finit par se redresser et fixa Pandora avec une neutralité assez folle, compte tenu de l'exploit qu'il venait presque de faire. « Ce que cet homme a vu que je m'injectais, c'était de l'insuline... » continua-t-il, conscient que la jeune femme ne l'avait peut-être pas entendu la première fois. Sa voix restait tout de même sur la défensive, conscient qu'il prenait un risque en osant tout raconter à l'étudiante. Et pourtant. « Je suis diabétique. » termina-t-il dans un souffle alors que, déjà, son regard devint brillant à l'évocation de sa maladie. Cette fichue pathologie qui le suivait depuis son enfance et qui avait eu raison de sa plus jeune soeur.

« Ça ne me prouve rien... » lui avait répondu Luca presque du tac au tac lorsque Pandora avait argumenté sur le fait qu'elle ne comptait pas répéter à la presse ce qu'il pouvait bien lui dire. D'un côté, elle comprenait son inquiétude : il semblait prendre avec beaucoup de sérieux cette histoire de secret, si bien qu'il ne voulait même pas le dire à son propre psychiatre, alors la presse... C'était sûrement beaucoup trop pour lui. Mais même le secret médical ne lui suffisait pas, alors quoi ? Elle ne pouvait pas lui promettre plus que ce dont elle était capable, et même le simple fait de lui dire qu'elle ne répèterait pas ce qu'elle pourrait entendre au Dr Tate pourrait éventuellement la mettre en danger par rapport à sa future carrière. Mais si elle gardait son secret, ils seraient quittes, n'est-ce pas ? Elle ne pouvait pas imaginer mettre en danger son futur, mais en même temps, n'étais-ce pas la bonne chose à faire justement en tant que psychiatre de respecter les limites de son patient ?

Luca semblait particulièrement mal à l'aise, Pandora était-elle allée trop loin ? Pourtant, tout ce qu'elle voulait était l'aider, et il lui semblait bien que c'était plus qu'évident. Alors quoi ? Il plaça de nouveau sa tête entre ses mains, et Pandora eut soudainement envie de prendre ses doigts dans les siens pour le rassurer, prenant bien vite conscience que ce ne serait absolument pas professionnel ; mais n'avait-elle pas déjà dépassé les limites du professionnalisme en lui promettant de ne pas répéter leurs propos au Dr Tate ? Et soudainement, enfin, une réponse. « De l'insuline. » entendit-elle subitement le jeune homme lui dire. Interdite, Pandora resta un instant silencieuse, pas certaine de ce qu'elle venait d'entendre, de même que Luca qui eut besoin d'un moment avant de reprendre. « Ce que cet homme a vu que je m'injectais, c'était de l'insuline... » Eberluée, Pandora ouvrit la bouche mais la referma instantanément ; elle était tellement surprise que Luca lui ai enfin avoué la vérité qu'elle n'arrivait pas à penser clairement ; elle le devait, pourtant. Elle devait rester professionnelle, du moins le plus possible qu'elle pouvait, & perdre ses moyens de la sorte n'était vraiment pas la meilleur des choses à faire. « Je suis diabétique. » déclara-t-il finalement. Et soudainement, ça fit tilt dans sa tête ; évidemment, qu'il était diabétique, comment avait-elle pu ne pas y penser avant ? Il lui avait dit que sa petite sœur était morte de ça, lorsqu'ils étaient jeunes, alors... Forcément, elle avait été comme tous les autres & avait été tellement persuadée que Luca s'était injecté une sorte de drogue ou de stéroïde qu'elle n'avait pas pensé un seul instant à faire le rapport avec sa petite sœur & sa maladie. « Oh... » ne put-elle d'abord que répondre, avant de tenter de se reprendre de toutes ses forces. Elle devait penser à son patient avant tout, à Luca. « Tu vois, ce n'était pas si difficile... » déclara-t-elle doucement en lui adressant un sourire qu'elle voulut rassurant. Elle s'humecta les lèvres, cherchant désespérément son regard, avant de reprendre. « Mais... Pourquoi est-ce que tu tiens absolument à garder ça secret ? Je veux dire, tu passes par beaucoup pour cacher ça, et tu es accusé de te droguer, tu peux plus faire de compétitions à cause de ça. Est-ce que garder ce secret en vaut tant la peine ? » demanda-t-elle, ne comprenant vraiment pas.

La bombe était lâchée, et Luca aurait dû se sentir plus léger suite à cette confidence qu'il avait mis tant de temps à parvenir à faire à sa "psychiatre". Mais il ressentit tout sauf du soulagement, au contraire ! Des larmes étaient immédiatement venues lui barrer la vue, larmes qu'il tentait de dissimuler au mieux en gardant le visage le plus neutre possible -ce qui était évidemment léger compte tenu de la douleur qui creusait ses traits. Et si encore il n'y avait que des larmes ! Son coeur battait la chamade dans sa cage thoracique, si bien qu'il craignait qu'une crise ne se déclenche. Mais il était capable de se contrôler, il se fit alors violence pour ça. Il avait peut-être avoué ce lourd secret qu'il traînait avec lui depuis sa tendre enfance et que seule une poignée de personnes lui connaissait sur cette planète, mais ça ne lui donnait pas le droit de se montrer faible. Il devait continuer à se battre contre sa maladie, contre son handicap, sa faiblesse, comme il l'avait toujours fait. Il devait en faire une force et pour ça, il ne devait pas craquer.

Si la surprise se mêlait à la prise de conscience d'une évidence sur le visage de Pandora, cette dernière mit un certain temps à prendre la parole. Le temps pour l'italien de prendre le dessus sur les émotions qui le submergeaient. Parler de sa maladie était quelque chose de douloureux dont il n'avait pas l'habitude. Les seules personnes étant au courant de son diabète se résumant à sa famille et à ses amis réellement proches, il n'avait pas pour habitude de débattre du sujet, particulièrement depuis la mort de Speranza. Le décès de sa petite soeur avait comme laissé tomber un voile sur le mot "diabète" et depuis, les membres de la famille évitaient d'en parler, sauf si nécessaire. Luca avait comme habitude, et ceci depuis son plus jeune âge, de se faire passer comme une personne tout à fait normale, suivant son traitement caché du regard des autres et maîtrisant parfaitement sa vie afin que personne ne soit mis au courant. Ce jusqu'à ce fameux jours où il s'était fait coincé avec une seringue plantée dans son bras, l'événement qui avait tout fait basculer. « Oh... » Enfin un mot. Ce n'était pas grand chose, mais au moins, elle prouvait par la parole sa surprise. Appuyant son coude contre l'accoudoir de son siège, Lucas appuya sa main contre le bas de son visage, le regard détourné de la jeune femme. Il n'en faudrait pas beaucoup pour que ses larmes s'échappent, il mettait alors toutes les chances de son côté pour éviter cela. « Tu vois, ce n'était pas si difficile... » À ces mots, il ne put cependant se retenir de reposer son regard larmoyant sur Pandora. Oui, c'était extrêmement difficile, et le scintillement des larmes dans ses yeux devait le lui prouver. « Mais... Pourquoi est-ce que tu tiens absolument à garder ça secret ? Je veux dire, tu passes par beaucoup pour cacher ça, et tu es accusé de te droguer, tu peux plus faire de compétitions à cause de ça. Est-ce que garder ce secret en vaut tant la peine ? » La débat qu'il avait déjà eu avec le peu de personnes le sachant atteint de diabète. Pourquoi prendre le risque de perdre sa carrière de professionnel qui ne faisait que débuter ? Pourquoi briser ses rêves alors qu'il lui suffisait d'annoncer sa maladie afin que les accusations soient retirées ? La réponse était évident pour lui, mais bien loin d'être compréhensible pour le monde extérieur. Le regard planté dans celui de Pandora, le jeune homme sentit une larme glisser finalement contre sa joue. Il ne prit pas la peine de l'essuyer avant de répondre, la voix cassée. « Ma soeur en est morte... alors oui, ça en vaut la peine. » Détournant la tête à nouveau, il souffla lentement pour tenter de garder son calme. La mort de sa plus jeune cadette était le sujet le plus délicat le concernant et pour cause : il avait certainement été le plus touché par ce décès, preuve étant qu'il ne s'en était toujours pas remis, des années après. Le fait de partager la pathologie qui avait ôté la vie à Speranza y était certainement pour beaucoup. « Je veux qu'on me voit comme une personne normale... je n'ai pas envie d'être faible aux yeux des gens, je ne veux pas de leur pitié. » Et ça avait toujours été ainsi. Luca fuyait la peine que ressentait déjà sa famille du fait qu'il soit malade, il ne voulait donc surtout pas que le monde entier soit au courant. Il voulait rester simplement Luca Spencer, le nageur américain doté d'un grand talent pour son jeune âge. Il ne voulait pas devenir Luca Spencer, le jeune nageur prodige capable d'exploser des records mondiaux malgré la grave pathologie qui le suit depuis son enfance.

Il était évident que, bien qu'elle sache désormais la vérité sur l'injection qu'il s'était faite le jour où il s'était fait attraper par quelqu'un, aux Jeux Olympiques, Pandora ne comprenait toujours pas les motivations de Luca. En même temps, pouvait-elle vraiment se mettre à sa place ? Il était de son devoir d'essayer de le comprendre & d'imaginer les choses de son point de vue, mais si elle était particulièrement compétente en ce qui concernait les maladies mentales, elle manquait clairement d'informations sur le diabète : en tout cas, elle en savait assez pour savoir que ça pouvait être mortel. La preuve, la petite sœur du jeune homme en avait péri.

« Ma soeur en est morte... alors oui, ça en vaut la peine. » Pandora n'était pas sûre de voir le rapport. Pour sa part, elle n'avait jamais vraiment connu le fait d'avoir un frère ou une sœur pour qui elle serait prête à tout ; il y avait bien son cousin, Josh, avec qui elle avait grandi, mais il restait toujours plus son « cousin » que son frère. Quoiqu'il en soit, elle resta pensive en attendant la suite, plus peinée qu'autre chose maintenant qu'elle savait la vérité. Il serait tellement plus facile de l'avouer aux autorités & aux médias ! Il pourrait reprendre les compétitions, & vivre de ce qu'il aimait vraiment, et aux yeux de Pandora, il compliquait tout. « Je veux qu'on me voit comme une personne normale... je n'ai pas envie d'être faible aux yeux des gens, je ne veux pas de leur pitié. » reprit le jeune homme. Pandora fit une légère moue, comprenant un peu mieux ses motivations. Elle finit néanmoins par hocher la tête, pensive, et détailla encore une fois Luca du regard : il était évident que le jeune homme était plus que perturbé par sa révélation. Voulant une nouvelle fois le rassurer, Panda mit néanmoins un petit moment avant de s'avancer pour poser doucement sa main sur celle du nageur, cherchant à capter son regard qu'il avait détourné sur tout ce qu'il pouvait trouver à part elle. « Ton secret sera bien gardé avec moi... » souffla-t-elle en lui adressant un sourire encourageant lorsqu'enfin, leurs regards se croisèrent. Elle aurait pu s'arrêter là, après tout ça ne faisait pas vraiment partie de son job de s'impliquer dans les affaires de Luca plus que ça, elle était là pour l'écouter et un point c'est tout. Cependant, en voyant le trouble dans son regard et l'état de sa vie aujourd'hui, alors qu'il devait laisser une partie de sa passion de côté, Panda avait l'irrémédiable envie de lui venir en aide, même si elle ne savait pas exactement comment s'y prendre. « Est-ce qu'il y a un autre moyen pour toi de retourner dans la compétition, alors ? Autre que d'avouer que la drogue dont tout le monde parle n'est que de l'insuline ? » demanda-t-elle en fronçant légèrement les sourcils, franchement concernée par le sujet.

En l'espace de quelques minutes seulement, Luca avait basculé d'un état à l'autre. S'il était arrivé à la séance confiant et plutôt de bonne humeur, il se retrouvait à présent déstabilisé et en proie à une douleur qu'il avait enfouie en lui des jours durant. Depuis l'événement qui avait changé sa vie aux Jeux Olympiques de Londres, il n'avait que très peu évoqué les réels événements, n'expliquant la vérité qu'à ceux qui le savaient malades. Pandora était la première qu'il mettait au courant des deux choses à la fois et il faut avouer que c'était un véritable choc émotionnel pour l'américano-italien. Se montrer à nue devant l'étudiante en psychiatrie relevait d'un énorme effort de sa part et le fait d'avoir forcé l'entrée à Pandora afin qu'elle connaisse la vérité l'avait complètement chamboulé. Le voilà à présent au point où il n'osait même plus affronter le regard de la jeune femme, le sien étant bien trop larmoyant. Il détestait se montrer comme une personne faible et c'était le sentiment qui lui collait à la peau en ce moment. Avoir levé le voile sur son état le rendait vulnérable et en proie à un tas de souvenirs qui vinrent l'assaillir sans pitié. Il revit ainsi quelques-unes des nombreuses fois où ses parents devaient s'occuper de lui administrer ses injections d'insuline, il se revoyait faire de même avec sa soeur à l'école, loin des regards indiscrets afin de ne pas faire savoir à tous les enfants qu'ils étaient tous les deux malades. Mais le souvenirs le plus lourd et qui l'attaqua de plein fouet fut évidemment ceux concernant la mort de sa soeur. Il revécut la scène, entendant à nouveau la voix de Theodora qui hurlait son nom depuis le salon, l'obligeant à couper court à sa conversation Skype qu'il avait avec Azure afin de se ruer dans la pièce du rez-de-chaussée pour retrouver sa plus jeune soeur au bord de l'inconscience. Il se revit également se rendre à l'hôpital pour la voir, mourante, puis à l'enterrement durant lequel il avait retenu les larmes qui lui brûlaient la vue pour ne les laisser couler qu'en présence de Theodora, loin des regards des convives. Autant de souvenirs douloureux qui le rendirent totalement affabili face à Pandora. Et il se rendit bien compte qu'il était inutile de lutter compte tenu des larmes qui venaient lui piquer les yeux.

Un silence pesant suivi les paroles de Luca, silence durant lequel il garda son regard le plus éloigné possible du visage de la jeune femme. Il s'était déjà trop dévoilé, il ne pouvait pas supporter l'idée qu'elle le voie aussi vulnérable. Et pourtant, au moment où il sentit la main de Pandora venir se poser sur la sienne, ce fut comme si le regard du nageur se voyait magnétisé : ses pupilles se posèrent immédiatement sur la main de l'étudiante pour y rester quelques secondes avant de remonter lentement jusqu'à croiser son regard. Ce contact visuel l'électrifia et il fut tout bonnement incapable de dire si c'était positif ou négatif. « Ton secret sera bien gardé avec moi... » Ses paroles et son sourire le rassurèrent. Il lui faisait confiance, elle n'irait pas répéter son secret à tout le monde. Et tout à coup, cette évidence le fit légèrement sourire au milieu des larmes qui ternissaient son regard. Bougeant légèrement la main de sorte à pouvoir prendre celle de Pandora dans la sienne, il ne put s'empêcher d'en caresser le dos avec son pouce, sans la lâcher du regard. « Merci. » souffla-t-il à son tour, sincère. Ce n'est qu'à cet instant qu'il ressentit le bien que lui apportait le fait de s'être confier. Le coeur quelque peu allégé, il sentait une confiance réciproque le lier à Pandora et cette réciprocité lui fit un bien fou. Il s'était enfin confié à quelqu'un d'autre que sa famille ou ses amis les plus proches qui connaissaient déjà son état et il ne s'était jamais attendu à ce que ça le soulage à ce point. « Est-ce qu'il y a un autre moyen pour toi de retourner dans la compétition, alors ? Autre que d'avouer que la drogue dont tout le monde parle n'est que de l'insuline ? » Elle semblait réellement se soucier de son cas et Luca se demanda s'il était réellement de son devoir de future psychiatre d'agir de la sorte. Mais qu'importe, le fait de se sentir plus proche d'elle émotionnellement parlant le rassurait beaucoup trop pour qu'il impose à nouveau de la distance entre eux. « On essaye de trouver une solution... mais je ne crois pas qu'il y en ait d'autres que celle-ci. » répondit-il en soupirant. Ils avaient tous cherché : lui, son coach sportif, ses parents, ses soeurs, ses amis. Mais aucune autre solution n'avait été trouvée. S'il voulait récupérer ses titres et reprendre la compétition, il devait se montrer tel qu'il était, un nageur atteint d'une fichue maladie depuis son enfance.

En venant au cabinet, le matin même, Pandora ne s'était certainement pas attendue à ce que pour une fois, elle en revienne si « victorieuse ». D'un point de vue purement éducatif, Panda faisait pour la première fois seulement face à l'un des plus profonds secrets de Luca et elle avait déjà l'impression de ne pas bien s'y prendre. Elle voulait rester stoïque & professionnelle comme l'était le Dr. Tate à chaque fois qu'elle avait eu l'occasion d'assister à l'une de ses consultations, mais elle avait déjà l'impression que le lien qu'elle avait construit avec Luca depuis le début des séances était déjà trop important pour qu'elle puisse vraiment avoir un œil objectif sur la révélation qu'il venait de lui faire. Alors évidemment, alors qu'elle aurait déjà du être ferme quant à l'idée de donner au Dr. Tate une fois leur entrevue avec Luca terminée, elle n'arrivait pas à se convaincre que ce qu'elle faisait en gardant le secret était profondément mal. Dans un sens, ça aidait Luca, n'est-ce pas ?

« Merci... » l'entendit-elle souffler, sincère. Elle releva les yeux vers lui et lui adressa une nouvelle fois un sourire rassurant, chassant les derniers doutes qui l'habitaient pour se rallier définitivement à la cause du jeune homme. « On essaye de trouver une solution... mais je ne crois pas qu'il y en ait d'autres que celle-ci. » reprit-il. Pandora fit une légère moue ; même si elle aurait souhaité le contraire, elle n'avait pas vraiment de solution miracle à proposer à Luca, et elle savait que si quelqu'un pouvait faire quelque chose, ce n'était que lui. C'était à lui de faire le choix de dévoiler ou pas sa maladie, au risque de perdre ce qui rendait sa passion de la nage si motivante.

Pensive un moment, Pandora ne put s'empêcher d'apprécier le fait qu'elle avait l'impression que Luca lui faisait enfin confiance, pour lui avoir confié son secret, et elle accordait une grande importance au fait qu'elle ne voulait surtout pas le décevoir. En fin de compte, elle ne pouvait vraiment pas dire que le résultat de leurs séances était un échec simplement parce qu'elle allait aller légèrement à l'encontre de ce qui était écrit sur son contrat d'origine. « Alors... j'imagine qu'il ne te reste plus qu'à prendre ton temps... Et, quand tu te sentiras prêt et si ça te motive toujours autant, sacrifier quelque chose pour quelque chose de plus grand, ton secret pour ta passion. » lui répondit-elle avec une réelle lueur d'encouragement dans le regard.

Elle fut interrompue par son téléphone qui sonna pour les avertir de la fin de la séance. Pandora se recula, légèrement gênée de se montrer aussi compatissante envers son patient, et lui adressa un léger sourire avant de détourner les yeux. « Voila, de quoi méditer ! » déclara-t-elle en se levant, invitant Luca à faire de même. « J'imagine que je te verrais mercredi prochain, alors. Et... » Elle prit dans son calepin une page vierge qu'elle déchira avant d'y griffonner l'adresse du Nil et son numéro de téléphone. « Si il y a une urgence, et que... enfin, que tu préfères ne pas en parler avec le Dr Tate, tu me trouveras sûrement ici. » reprit-elle en tendant le papier à Luca.