Harlem. Sleepy Hollow Garage. Il était dix-sept heures, le soleil rayonnant et la chaleur commençait à devenir doucement lourde. Quelle température pouvait-il faire à cet instant même de la journée, à vrai dire aucune idée et nous n’étions pas ici pour faire la météo. Désolée pour vous, miss météo n’est pas parmi nous. Le garage, lieu dans lequel nous nous trouvons, était des plus silencieux. Tout du moins en apparence. Nous étions mercredi, et rare était les employés qui travaillaient ce jour-ci. A vrai dire, elle était seule. Seule à y travailler. L’unique femme du garage et sûrement pas des plus fainéante, oui, je parle bien, de Zahara.

La jolie demoiselle à la taille de guêpe venait de refermer bruyamment le capot d’une des voitures qu’elle venait de chouchouter. Le bruit se fit entendre dans tout le bâtiment. Son visage crevé par le dur labeur, le corps recouvert d’une sueur, il était certain, Zahara n’avait pas chômé aujourd’hui encore. Quelques traits de fatigue, d’autres de cambouis recouvraient son doux visage juvénile. La fatigue se fit comprendre dans les gestes de la comorienne et la chaleur devenait étouffante pour son petit organisme. Seule, dans le garage, elle décida alors de tirer la fermeture éclaire de son bleu de travail, laissant apparaitre son soutien-gorge, mais après tout peu importe : aucune visite n’était attendu.
Fatiguée, endolorie par sa soirée de la veille et assoiffée, la jeune mécano se dirigea vers le petit réfrigérateur. Petite caverne d’Ali-Baba pour les assoiffés et autres personnes en quête de beuverie. De sa petite caverne personnelle, Zahara y sortit une bière. La fraicheur s’échappa furtivement du frigo et à vrai dire c’était sensation ne déplaisait pas notre jeune femme, bien au contraire, elle était en quête de divers moyens pour se rafraîchir. La bouteille de bière à la main qu’elle décapsula avec un geste irréfléchi et habitué, elle apporta le goulot de cette fameuse bouteille à sa bouche. Adossée au mur extérieur du garage nommé Sleepy Hollow, elle continua sa douce beuverie à dorer au soleil. A cette époque de l’année comment ne pas profiter des premiers doux rayons généreux de l’astre chaleureux ? Nous étions tous dans ce même état d’euphorie lorsqu’ils apparaissaient à vrai dire. Euphorique, certainement qu’elle l’était.
Délicatement sa main se glissa dans la poche de son jean qui se cachait sous son bleu de travail et y sortit son portable. Merveilleux outil qui nous permettaient de rester en contact avec qui l’on souhaitait où l’on voulait. Ah, les nouvelles technologies. Après quelques minutes de réflexion à contempler l’écran de son portable, elle pianota sur quelques touches à une allure déconcertante. Certes sûrement pas aussi rapide qu’elle ne l’est sur la piste, mais tout de même. C’était un détail qu’il ne fallait pas éviter. Tout comme son petit sourire qui se dessinait au bout de ses fines lèvres gourmandes. Nous ne savions pas quelle était la cause de ce petit rictus, peut être ce texto ou la personne à l’origine de ce message. Non, nous ne savions pas. Le portable d’une main, la bière de l’autre, voilà là, une tenue bien indécente et ne parlons pas de la pose que la jeune africaine d’origine venait de prendre. Rapidement, elle ne resta pas en place et son visage se referma et devint plus sérieux. Ses yeux rivaient sur son écran de portable à balayer le mot, et sa main tremblante que pouvait-il bien y avoir.

de Sebastian – 17h18
Je passe au garage
Bise. Seb.

Comment un simple message envoyé par le biais d’un autre portable pouvait-il vous faire changer d’humeur d’un instant à un autre ? Et qui était ce fameux Sebastian. Ce mystérieux inconnu qui est l’expéditeur de ce message. Ces neufs lettres qui composèrent ce prénom resteront un mystère pour nous, mais ce qu’il était sûr, il n’était pas si inconnu que cela aux yeux de la jolie Zahara. Cette dernière venait justement de répondre à ce Sebastian , sûrement un « d’accord » ou un message avec une note positive.

C’était sûrement le cas. La jeune femme remonta la fermeture éclaire de son bleu de travail, ne laissant apparaître un joli décolleté. Sa bière n’était pas finie et elle l’abandonna au sol et la donnant à de charmantes guêpes qui vinrent plonger telles des alcooliques dans la boisson. Zahara rentra alors dans le bâtiment en compagnie de quelques voitures qui étaient devenues ses nouvelles amies le temps d’une journée. Une journée qui n’allait pas s’arrêter à là.

Rapidement, Zahara s’adonna ses activités habituelles au garage. Chouchouter une voiture, ranger le garage ou se reposer à vrai dire, notre demoiselle avait le choix. C’est la première option pour laquelle la jeune femme opta, une roue réparée presqu’à état neuf pouvait-on dire n’attendait plus qu’on la rattache à sa bien aimée, la voiture. Il faut dire que l’une ne pouvait pas rouler sans l’autre, c’était un lien assez fort qu’il s’établissait entre les deux éléments physiques. C’était sans réfléchir que Zahara entreprit alors son activité en oubliant presque le sms qu’elle avait reçu quelques minutes auparavant. Ceci allait sûrement être la dernière tâche qu’elle avait exécuté au garage pour sa journée de travail. Avouons-le ce n’était pas non plus la chose la plus compliquée qu’elle entreprit. Une simple roue à remettre en place.

Alors que la jeune comorienne termina avec brio sa mission, un bruit de moteur et de roues se fit entendre sur le parking du garage. Qui cela pouvait bien être à cette heure de la journée ? Un client qui avait besoin d’une réparation rapide, le patron de Zahara qui venait voir si tout se passait bien… ou alors, c’était lui. Lui, notre mystérieux inconnu au nom de Sebastian. Une porte se claqua puis des pas : un, deux, trois, quatre pas et puis d’autre. La marche se stoppa et le silence pesant devenait alors maître des lieux. Enfin les lieux n’étaient pas si silencieux que cela à vrai dire, entre les soufflements de fatigue de Zahara et les bruits de ses outils qui roulèrent à terre, on eut croire à un concerto improvisé. Un concert de mauvais goût à vrai dire. Notre jolie mécano ne prêta pas attention à ce nouvel arrivant tout du moins jusqu’au moment où sa voix retentit dans les locaux.
Cette voix vint se déposer au creux des oreilles de la jeune femme. Une voix assez rauque, masculine certes, mais peu déplaisante à écouter avec ce petit accent particulier. Accent russe qui ne trahissait pas ses origines. Alors, la jolie Zahara leva les yeux en direction d’où la voix provenait et se releva doucement. C’était bien, lui, Sebastian. Tout du moins tout y ressemblait. Calé contre la porte, l’homme avait son regard posé dans celui de la mécano. Les rayons du soleil qui venait de la même direction que lui donnèrent ainsi un petit côté magique à la vision qu’avait Zahara. Phoebus aurait bien pu être le prénom de ce bellâtre de russe, il aurait bien porté son nom dans cette situation. Phoebus, ce fameux personnage de Notre-Dame de Paris, ce beau chevalier qui faisait tourner la tête à bien des jeunes filles. Certes, ce nouvel arrivant n’était pas un chevalier, mais il était beau et ne devait pas laisser indifférentes de nombreuses demoiselles voire dames. Il était vrai qu’il ne laissait pas indifférente la jolie métissée.
Un sourire se dessina sur ses fines lèvres gourmandes et resta un instant figée sur place silencieusement avant de prendre la parole.

– Bonjour, vous cherchez quelque chose ? dit-elle, un petit sourire amusée au bout de ses lèvres.

Rapidement une gêne, un malaise se fit sentir sur le visage de Zahara. Les yeux baissés, un petit sourire marquant sa gêne et une petite rougeur rosâtre sur ses joues, on ne pouvait pas dire le contraire, la demoiselle n’était pas toujours à ses aises lorsqu’il s’agissait d’encaisser des compliments. Toutefois, elle essaya de reprendre de l’assurance et alors avança d’un petit pas déterminé vers Sebastian. Petit à petit, la silhouette masculine se détacha de l’halo lumineux. On pouvait alors distinguer parfaitement chacune ses formes. Oui, c’est vrai, il était beau, très beau même. On aurait dit l’un de ces mannequins sortit directement d’un magasin : le fantasme de toutes les femmes à vrai dire. Le premier détail que l’on remarquait était son regard, ou plutôt ses yeux dotés d’un magnifique bleu. Un bel homme aux yeux bleus, on croirait presque être dans un rêve, non. Et pourtant…

– Hmm… je dois dire « merci » à cet instant-là, je suppose ?!

Alors, Zahara se retrouva à quelques pas de Sebastian, face à lui, presque nez à nez. Un sentiment de malaise et de joie s’ancra dans son sang, l’un de ses sentiments dominés l’autre c’est vrai.