Un cours d’origami, voila à quoi se résumait leur journée, à apprendre à plier du papier, dans le genre fascinant on ne faisait pas mieux. Après avoir marchés quelques minutes pour atteindre enfin cet atelier où ils allaient passer quelques heures, Ziggy regardait sans grand intérêt les œuvres faites uniquement à partir de papier qui se suivaient sur les étagères, pas que cela ne l’intéressait guère, il aurait juste pu trouver un autre truc pour occuper sa journée durant cette après-midi ensoleillée, mais il était avec Hafsa donc ça rattrapait un peu la chose. Pendant que son amie admirait ce qui se trouvait devant ses yeux, il alla prendre place autour de la table, quand petit à petit, elle commençait à se remplir, il appela Hafsa pour lui dire de venir à côté de lui et après un lourd silence à regarder les autres dans le blanc des yeux, un asiatique au nom imprononçable fit son apparition et le cours débuta.

Pendant qu’il tentait de suivre les explications du vieux maitre sur comment faire une grenouille avec une simple feuille, ses pensées dérivèrent sur la façon dont il était s’était retrouvé là parmi plusieurs personnes à l’écart d’âge assez important. Puis il se souvint que c’était leur faute à tous les deux, après avoir rigolé de l’annonce de ce cours dans le journal, ils avaient tout simplement décidé d’y aller. Les explications de l’homme s’achevèrent et la partie pratique commença. Ziggy resta un moment à fixer les gens qui s’afféraient à former une petite grenouille avec leur feuille, il n’arrivait pas à se souvenir d’un seul mot qu’il avait pu dire. Tant pis, il haussa les épaules et commença à son tour à plier sa feuille de couleur rose. Après une ou deux minutes à la plier dans tous les sens, il se mordit la lèvre pour s’empêcher de rire, pensant que ça pourrait être mal vu devant tout le sérieux qui régnait dans la pièce et poussa son chef d’œuvre qui ressemblait plus à un attribut masculin qu’à un petit animal vert qui saute vers Hafsa. « J’ai dû être artiste dans une autre vie. » lui chuchota-t-il alors pour ne pas attirer l’attention sur lui.

Hafsa s’appliqua à la tâche, pliant avec grand soin chaque rebord de papier. Elle leva la tête de temps en temps afin de suivre avec une certaine application les consignes dictées en boucle par le grand maître asiatique. Elle tourna la tête discrètement afin de voir si ses voisins de tablées étaient bien plus ingénieux qu’elle. A droite, elle pouvait remarquer un vieil homme d’origine africaine –elle émit cette hypothèse dû à sa peau noire– qui semblait peiner autant qu’elle. Elle soupira silencieusement de soulagement. A sa gauche, Ziggy… lui semblait bien concentré dans son pliage. Etonnant. Un petit rictus de satisfaction se dessina dès lors sur les lèvres de la jeune Palestinienne. Ziggy semblait être appliqué et prendre très au sérieux cette activité, qu’ils avaient choisi tous les deux. Elle passa ses doigts sur ses lèvres, tentant de réfléchir à quel pliage faire afin de pouvoir donner naissance à une fictive grenouille. Elle recommença son pliage du début, sûrement s’était-elle trompée dans l’une des étapes ou n’avait-elle pas faite l’une d’entre elles. Mystère. Malgré cela, elle y arriva, la petite grenouille commençait à prendre forme entre ses mains minutieuses. Dans ce lourd silence, la voix sourde de Ziggy retentit. Elle fronça aussitôt les sourcils, tournant son regard vers lui. «J’ai dû être artiste dans une autre vie. ». Elle arqua de plus bel un sourcil. Elle regarda ce que Ziggy lui présenta, et le compara avec sa mignonette grenouille. Cela ne ressemblait pas du tout à ce que le professeur leur avait montré juste avant qu’ils se lancent tête baissée dans le rôle des petits élèves assidus. « Mais… lâcha-t-elle échapper de sa bouche. Ca ne ressemble pas du tout à une grenouille… ». Elle fronça un peu plus les sourcils. Elle secoua alors doucement la tête, elle ne voulait même pas savoir ce qu’il venait de faire. Sûrement un truc grossier, pour ne pas changer. « … si le professeur voit ça, je pense qu’il te grondera. » rétorqua-t-elle dans un murmure. Puis elle se concentra de nouveau sur le petit amphibien afin de le terminer. Une fois cela achevé, elle se tourna fièrement vers son ami. « Ca c’est une grenouille ! murmura-t-elle en lui présentant ce qu’elle venait de faire. Ca par contre… ça ne ressemble à rien. » lui dit-elle en montrant du menton ce qu’il venait de faire. Lorsque Ziggy se mit alors à rire, elle lui donna un petit coup de coude dans les côtes, afin de le faire taire. Et surtout pour qu’ils ne se fassent pas remarquer…

« Mais… Ca ne ressemble pas du tout à une grenouille… » Une espèce de bruit étrange sortie de la bouche de Ziggy qui se retenait encore une fois d’exploser de rire. Il avait toujours trouvé la naïveté et l’innocence de son amie chou, mais il ne pouvait s’empêcher d’en rigoler à chaque fois. Elle avait surement aucune idée de ce que sa pseudo grenouille représentait, après tout, elle venait d’un pays où le sexe n’était pas le centre de la conversation de certains jeunes. « … si le professeur voit ça, je pense qu’il te grondera. » Il ne put cette fois s’empêcher de lâcher un petit rire discret, ‘le gronder’, sa façon de parler aussi était drôle et il n’hésitait pas un seul instant à s’en moquer, gentiment évidement. « Hafsa, j’ai plus cinq ans, on ne va pas me ‘gronder’ pour ce que je viens de faire. » Elle repartie alors dans son pliage, tel l’élève studieuse qu’elle était, et aux bouts de quelques minutes à plier minutieusement sa feuille, la petite grenouille prit forme. Elle lui montra alors, précisant que ça c’était une grenouille contrairement à ce qu’il venait de faire, comme s’il n’était pas au courant que son pliage ressemblait plus à un pénis qu’à un amphibien, malgré tout, Ziggy était fière de ce qu’il avait fait et son petit rire lui valut un coup de coude dans les côtes de la part de sa voisine, il lança un ‘aïe’ assez fort et envoya paitre d’un regard les quelques personnes qui venaient de se tourner sur lui. Si on avait même plus le droit de parler maintenant.
Le blond leva une main pour demander une nouvelle feuille que l’asiatique lui remit avec un grand sourire. Ziggy se tourna vers Hafsa « Bon, montre-moi, avec son accent je comprends rien à ce qu’il dit. » La brune se mit alors à lui expliquer lentement, étape par étape ce qu’il fallait faire pour arriver au même résultat qu’elle et enfin après une vingtaine de pliage, une petite grenouille trônait sur la table à la place de la feuille de papier. Ziggy souriait à pleines dents comme un gamin devant un cadeau de noël, il chiffona son premier pliage dans son main pour effacer toute preuve de sa bêtise et poussa du bout du doigt sa grenouille vers Hafsa. « Tiens, je te l’offre. Murmura-t-il. Ah attend.. » Il la reprit et sortit un stylo de sa poche et après quelques secondes, reposa le bout de papier sur la table. Ziggy venait de faire un visage à sa grenouille avec une petite mèche. « C’est un petit moi grenouille. » Il ria de nouveau, ignorant alors les ‘chuut’ qu’on pouvait lui lancer.

Se faire discrète avec Ziggy se révélait être une mission impossible pour la jeune fille. Il n’avait rien de l’élève sage et studieux, silencieux et attentif. Ziggy était le parfait contraste de Hafsa. Elle qui était si studieuse, attentive et réfléchie. Après un coup de coude dans les côtes, le blondinet semblait avoir perdu toute envie de s’amuser, tout du moins le temps de quelques minutes –ou plutôt secondes. Il lui demanda alors qu’elle lui réexplique, parce qu’il n’avait pas très bien compris ce que leur professeur leur avait dit. C’était ce que Hafsa en avait conclu en fait avec ces quelques mots prononcés. Elle hocha la tête, montrant son accord pour lui expliquer une nouvelle fois comment faire cette piètre grenouille. Après quelques chuchotements et quelques démonstrations, elle posa son regard sur Ziggy. Le regardant attentivement se mettre à l’œuvre. Il semblait peiner un peu, avant de finalement réussir à donner naissance à ce crapuleux amphibien. Un sourire de satisfaction se dessina alors sur les lèvres de Hafsa. A croire qu’elle avait fait cela toute sa vie d’enseigner… non, peut-être pas non plus. Le blondinet se tourna alors vers elle, lui tendant gentiment son petit œuvre d’art. Il se rétracta bien vite, la reprenant en main et sortant un stylo de sa poche. Hafsa le regarda quelque peu intrigué, se demandant bien ce qu’il comptait bien faire avec. Un autographe ? Peut-être bien, Ziggy était si stupide qu’il se serait bien pris pour une star vedette d’un show crétin. Il reposa alors la grenouille la table, la poussant vers la jeune fille à l’aide du revers de sa main. « C’est un petit moi grenouille. » lui dit-il alors. Hafsa secoua légèrement la tête, un moi grenouille… Il n’y avait vraiment que lui pour dire un truc pareil. Elle put s’empêcher de sourire à cette mignonette attention. Elle comptait le remercier, s’il ne s’était pas à rire si bêtement. Un chœur de « chut » résonna dans la salle et Hafsa lui lança son plus noir regard afin de le faire taire. Lorsque les rires de Ziggy s’estompèrent, elle se tourna une nouvelle fois vers lui, avant de lui murmurer quelques mots. « J’espère qu’elle n’est pas aussi bruyante que toi, ta grenouille. » lui fit-elle remarquer. Et c’est à ce même moment qu’un des élèves leva la main afin de trouver un peu d’aide auprès du grand maître chinois. L’homme asiatique, assez impressionnant en largeur, mais plutôt ridicule en longueur, s’approcha de son élève en détresse. Après quelques minutes d’explication, il décida de faire un petit tour, hochant la tête à chaque grenouille qui se trouvait en face de lui. A croire que cet homme était bien trop respectueux avec ces feuilles de papier… ne l’oublions pas, ces grenouilles n’étaient que de banales feuilles de papier, au début.

Il retourna sur l’estrade où il expliqua qu’il était fier d’eux, qu’ils allaient pouvoir passer au niveau au-dessus, etcétéra. Tout du moins, c’était qu’Hafsa avait réussir à comprendre du flot de paroles que débitait l’homme. Il reprit une nouvelle feuille de papier et montra comment faire un canard à ses élèves. Après la grenouille, le canard… cet homme devait nager comme un poisson dans l’eau dans son univers. Hafsa écouta sagement d’une oreille chaque étape, cela semblait se corser un peu. Enfin sûrement cela était le but de ce cours. Elle se mit alors à l’œuvre lorsque le professeur leur dit qu’il pouvait enfin commencer. Après un ou deux pliages, elle se tourna vers Ziggy, légèrement intriguée. « Tu vas faire encore un truc qui ne ressemble à rien ? » lui demanda-t-elle dans un murmure, en faisant référence au premier pliage de son ami.

On pouvait lui dire ‘chut’, Ziggy n’en avait rien à faire, il aimait rire et le montrait, rien ne pouvait l’en empêcher, sauf peut-être le regard noir que lui lança Hafsa et qui le fit taire du le champ. « J’espère qu’elle n’est pas aussi bruyante que toi, ta grenouille. » lui dit-elle alors en regardant une nouvelle fois son chef d’œuvre. « C’est que du papier. Elle fera du bruit que si je suis à côté. » Il se voyait déjà à côté de son amie, croassant bêtement avec la grenouille dans les mains rien que pour l’embêter jusqu’à ce qu’elle lui somme d’arrêter, ce qu’il ne ferait pas avant quelques minutes évidement, énerver les gens était l’occupation favorite du blond.
Après avoir fait un tour de table complet pour vérifier que tout le monde avait bien assimilé la première partie de l’exercice, il reprit sa place au bout de la table et annonça à l’assemblée que le prochain pliage serait un canard. Un coude sur la table, sa tête reposant nonchalamment dans la paume de sa main, Ziggy suivait sans le moindre intérêt ce que l’homme était en train de dire, il tourna un instant les yeux vers la brune qui avait l’air captivé par cette histoire de pliage, ça en faisait au moins une sur les deux. Ziggy était une garçon qui s’ennuyait assez vite quand les choses ne bougeaient pas assez vite pour lui et ce cours était l’exemple parfait des choses qu’il évitait de faire au risque de finir par se trémousser sur sa chaise avec une envie de sortir en courant pour aller courir en rond au milieu de la rue. Un chien enfermé dans une petite pièce, voilà ce qu’il était. Mais pour l’instant tout allait bien, la bombe n’était pas encore amorcée. Le vieil asiatique tapa dans ses mains ce qui eut pour effet de faire redresser le blond sur sa chaise. N’ayant encore une fois rien écouté, il resta à fixer sa feuille jusqu’à ce que la voix de son amie le perturbe. « Tu vas faire encore un truc qui ne ressemble à rien ? » Il souriait en repensant à son pénis en papier, puis haussa les épaules. « Je l’ai déjà fait une fois, ça serait pas drôle de le refaire. » Puis, il zieuta sur ce qu’elle venait de faire et soupira. « Je peux le faire avec toi ce fichu canard ? J’ai pas écouté, j’étais concentré sur sa moustache. » Petit rire, puis il prit un air de petit pug ♥ perdu pour qu’elle accepte de l’aider encore une fois.

Elle regarda hocher les épaules, se demandant bien ce qu’il allait bien pouvoir lui répondre. Non, à vrai dire avec le temps, elle ne voulait même plus réfléchir à cela. Il était tellement spontané. «Je l’ai déjà fait une fois, ça serait pas drôle de le refaire. » lâcha-t-il alors. Hafsa hocha les épaules. De toute façon, elle n’avait pas trouvé cela drôle, pas du tout même. Elle n’avait même pas saisi ce qu’il voulait faire, à part un truc qui n’avait pas de sens sûrement. Mais cela, ça ne l’étonnait pas, Ziggy était un esprit asse farfelu. Alors Hafsa se remit à son pliage, s’appliquant comme il se doit. Cette fois-ci, elle semblait avoir pris le truc. Finalement, ce n’était pas si difficile que cela, il fallait juste de la concentration et du calme. Beaucoup de calme, c’était sûrement pour cela que le silence régnait en roi dans cette petite salle. Mais sa concentration fut soudainement distraite par la voix de Ziggy. Etonnant, n’est-ce pas ? A vrai dire, c’était le seul qu’elle connaissait, il était donc tout naturel que ce soit le seul qui s’adressait à elle de manière assez familière. Elle s’arrêta donc dans son pliage et se tourna légèrement, très légèrement, vers son ami. « Je peux le faire avec toi ce fichu canard ? J’ai pas écouté, j’étais concentré sur sa moustache. » lui avoua-t-il alors. Elle soupira un instant. Concentré sur la moustache de ce professeur… elle n’y crut pas ses oreilles. « Et tu n’aurais pas pu te concentrer sur ce qu’il disait en même temps ? » lui demanda-t-elle dans un murmure. Puis elle finit par faire un signe de la tête. Acceptant de faire cet origami ensemble. Elle continua alors son pliage silencieusement et s’appliquant du mieux qu’elle le pouvait. A vrai dire, Hafsa avait toujours été cette jeune fille appliquée dans tout ce qu’elle faisait. Cela était sûrement dû à son éducation jugée bien trop stricte par certains. Après quelques minutes et une dizaine de pliages, elle se tourna vers Ziggy et lui tendit le canard qui avait pris forme entre ses petites mains de fée. « Tiens, c’est pour toi ! » lâcha-t-elle, sourire au bout des lèvres. C’est à ce moment précis que l’asiatique décida de faire un tour, histoire de voir comment ses élèves se débrouillaient. D’un côté, il devait bien s’ennuyer, tout seul, sur son estrade. La compassion commençait à s’éprendre du faible esprit de Hafsa. D’ailleurs, il venait de se poser juste en face de Ziggy, le dévisageant avec une certaine curiosité. Hafsa à son tour le dévisagea. Pas Ziggy, mais ce professeur. « Montre-moi ce que tu as fait ?! » demanda-t-il à Ziggy, tout en secouant légèrement sa tête de haut en bas, puis de bas en haut. Hafsa reposa alors son attention sur son ami. Elle se demandait bien ce que Ziggy allait lui répondre. Un truc farfelu comme toujours ? Non quand même pas, il était en face d’un homme qui endossait le rôle de professeur le temps d’un cours d’origami quand même. « Monsieur, regardez ce que nous avons fait… finit par dire Hafsa. » Elle montra alors le canard qui trônait entre les deux tables. « Veillez excuser mon ami, il souffre d’une légère déficience intellectuelle, je dois l’aider, l’accompagner dans tout ce qu’il fait… soyez un peu indulgent avec lui. » lâcha au professeur, tout en murmurant afin de ne pas gêner la concentration des autres élèves. Le professeur fit un petit signe de la tête avant de s’en aller vers une autre rangée de tables. Hafsa souffla alors.

« Et tu n’aurais pas pu te concentrer sur ce qu’il disait en même temps ? » Il tourna la tête, gêné, passant une main sur sa nuque. En effet, il aurait pu se concentrer sur ce que le vieux monsieur était en train de dire, il aurait pu ouvrir grand ses yeux face à lui et enregistrer chaque information avec le plus grand sérieux, mais il n’avait tout simplement pas voulu. Ziggy n’aimait pas les cours, tout ce qui comprenait une salle avec un professeur le bloquait psychologiquement et son niveau de concentration atteignait le zéro absolu sans difficulté, même si le cours portait juste sur du pliage de papier, le blond n’était pas capable de rester focaliser sur les mots de l’asiatique, trouvant plus amusant de la détailler de haut en bas et de rire des personnes qui l’entourait. Il ne ressemblait en rien à Hafsa, si studieuse, si intelligente qui pouvait surement rester des heures le derrière sur une chaise à écouter parler quelqu’un qui aurait la clé su savoir. « Non, je pouvais pas. » Il haussa les épaules une nouvelle fois, pas besoin de lui expliquer après tout, elle devait surement savoir pourquoi il n’avait pas écouté un traitre mot des explications données.
Malgré ça, son amie accepta tout de même de faire le fameux canard avec lui, il tenta d’imiter ses gestes avec sa propre feuille mais abandonna vite au bout du cinquième pliage, préférant alors la regarder faire. Il suffisait de la regarder pour savoir qu’Hafsa n’aimait pas échouer même dans la simple construction d’un canard en papier, si concentrer, si délicate dans les gestes qu’elle faisait, c’était beaucoup mieux de la fixer que de le faire soi-même. Coude sur la table, la tête appuyée sur le dos de sa main, il se redressa quand elle se tourna vers lui avec un sourire en lui tendant le petit canard en papier qui s’était formé entre ses doigts, il la remercia avec un petit sourire timide et le prit dans sa main pour le regarder de tous les côtes.
C’est ce moment-là que choisit le professeur pour faire un tour de table, Ziggy posa le bout de papier plier entre eux d’eux quand l’asiatique arriva à sa hauteur et lui demanda de lui montrer ce qu’il avait fait, il passant son regard de sa feuille de papier à moitié plié au petit canard, il finit par hausser une nouvelle fois les épaules quand Hafsa prit la parole à sa place. Il continuait de fixer sa feuille pendant que l’asiat’ tenait dans sa main le chef d’œuvre de son amie. « Veillez excuser mon ami, il souffre d’une légère déficience intellectuelle, je dois l’aider, l’accompagner dans tout ce qu’il fait… soyez un peu indulgent avec lui. » Le blond attendit que le professeur soit parti pour se tourner vers Hafsa. « T’es sérieuse là ? » Il aurait pu en rire si elle lui avait vraiment sauvé la mise, mais là, cette remarque désobligeante n’avait rien à faire dans le contexte, ils étaient là pour plier des papiers pour faire des trucs stupides qui ne servaient strictement à rien. Réussir n’allait pas l’aider à être quelqu’un de meilleur, faire des origamis n’était pas utile sur un CV, il aurait très bien pu dire à cet homme qu’il n’y arrivait pas qu’au final ça n’aurait rien changé, il lui aurait tout simplement réexpliqué. Il baissa sa tête, lâchant un 'tsss' inaudible puis commença à plier sa feuille dans tous les sens.

Un léger trait très fin se dessina sur les lèvres de la jeune fille. Non pas un sourire, encore moins un rictus. Enfin nommez cela comme vous le souhaitez, cela n’a guère d’importance. Le professeur avait disparu et le silence commençait de nouveau à régner entre les deux jeunes gens. Un silence qui ne dura guère. En effet, à peine le grand chinois pas si grand que cela venait de s’éclipser que Ziggy prit la parole une nouvelle fois. Le silence avait dû régner pendant quelques secondes, une minute, mais pas plus. «T’es sérieuse là ? » lâcha-t-il alors. Hafsa détourna le regard sur le visage de son ami. Pour la première fois depuis le début de ce cours, il ne semblait pas rire, ni s’amuser. Pour la première fois. Ou peut-être l’une des rares fois. Bien entendu, il ne semblait pas très bien prendre les répliques que la jeune fille avait pu avoir à son égard. Elle secoua alors la tête, faisant un joli non de la tête. Bien entendu, elle n’était pas sérieuse. Elle savait que Ziggy n’était pas doté d’un grand QI, loin de là, elle savait un peu bêta sur les bords par moment. Il ne souffrait pas non plus d’une sous-intelligence ou d’une déficience intellectuelle. Il était juste un joyeux crétin, ou peut-être aimait-il endosser le rôle du crétin joyeux… Mais toutes ses pensées, toutes ses questions, elle se les garda pour elle. De peur de froisser un peu plus le blondinet. Vexé, il semblait l’être.

Hafsa détourna un instant le regard, observant avec une certaine curiosité tous les hommes qui se trouvaient autour d’eux. Sourire aux bouts des lèvres, elle se tourna vers Ziggy. « Ils n’ont pas l’air aussi doués que nous, tous ces « bonhommes » ! » lâcha-t-elle amusée. Elle se mit à relever les manches, gardant toujours ce même sourire. Puis, elle montra à l’aide de son menton, un homme semblant bien trimer avec son pliage, râlant dans sa moustache sa non-victoire. En soi, cela n’avait rien de drôle, mais Hafsa était fière d’y arriver et de sûrement être permis les meilleurs élèves de ce cours. Peut-être prenait-elle trop à cœur ce cours même… peut-être bien.

Ziggy ne l’avait pas quitté du regard, attendant une réponse de sa part, il détourna alors légèrement la tête quand elle secoua la tête pour lui indiquer que non, elle n’était pas sérieuse, un petit sourire se dessina sur le coin de son visage pendant qu’il reportait son attention sur le petit canard en papier, après tout, pourquoi lui en vouloir ? Hafsa avait surement tenté de le faire rire en lançant le même genre de phrase que lui aurait pu dire à un moment ou à un autre, et savoir qu’Hafsa avait peut-être fait une tentative d’humour était une grande chose, comment la blâmer par rapport à ça ?
Ziggy avait certes été un peu vexé par la remarque qu’elle avait fait, mais il se sentait un peu fière qu’elle s’abbesse à un niveau aussi bas en matière d’humour. Bref, le sujet changea bien vite, laissant cette conversation de côté, comme si elle n’avait jamais eu lieu, qui voudrait s’éterniser sur ce genre de remarque ?
« Ils n’ont pas l’air aussi doués que nous, tous ces « bonhommes » ! » Le blond suivit alors son regard, s’attardant sur chacun des hommes autour de la table qui avait effectivement l’air d’avoir beaucoup de mal avec leur bout de papier pour former un petit canard. « Et j’en fais partie. » Ajouta-t-il alors et ce n’était pas Hafsa qui pourrait le contredire, après tout, sa première tentative n’avait pas été vraiment concluante et son canard, il avait tout simplement abandonné à la cinquième étape, préférant regarder son amie faire.
Il continuait de faire tourner le bout de papier entre ses doigts quand le vieux maitre asiatique reprit sa place sur l’estrade, ceux qui avaient terminé le regardait, attendant qu’il donne la suite de son cours, pendant que d’autres terminaient sagement ce qu’ils étaient en train de faire. Après quelques minutes de silence, il claqua dans ses mains doucement pour attirer l’attention sur lui. « Les choses vont devenir un peu plus difficiles maintenant. » Il expliqua alors qu’ils allaient réaliser la deuxième Grue, qui était un origami traditionnelle et bla bla bla, Ziggy n’écoutait que d’une oreille, comme les fois précédente, mais tout en restant concentré quand il en arrivant au explication, cette fois-ci il voulait réussir, que ce soit difficile ou pas, voulant montrer en même temps à Hafsa qu’il n’était pas un abruti fini. Il s'appliqua donc à reproduite au geste près ce que leur professeur faisait.

Le travail avait toujours eu une place importante pour Hafsa. On n’avait rien sans rien. Sentir la sueur sur son front et trimer encore et encore, cela, elle savait bien le faire. La réussite avait aussi une place prépondérante pour elle. Ne pas réussir, échouer, les défaites, c’était une certaine honte pour la jeune femme. Exceller et ne jamais descendre de sa marche de l’escalier montant de la réussite. Jamais… Son regard ambitieux se posa alors sur le visage de son ami, Ziggy. Deux personnalités opposées, totalement différentes. Tant par leurs physiques que par leurs caractères. «Et j’en fais partie. ». Elle secoua doucement la tête. Que disait-il là. Il avait réussi, la preuve, la petite grenouille et puis… son premier essai. Puis, elle avait bien « nous » et pas « moi ». « Mais non… tu as peut-être besoin d’un peu plus de temps pour comprendre, mais tu es doué aussi… » lui dit-elle d’une voix posée, telle une mère l’aurait fait à son enfant pour le rassurer. Peut-être le materne-t-elle un peu trop. Hafsa était comme ça, souvent comme cela. Prenant son ami pour un enfant puéril. Il fallait avouer que Ziggy n’était pas le garçon le plus mature qu’il pouvait exister sur cette Terre, mais c’était ainsi qu’elle l’appréciait. Avec ses blagues à deux balles, souvent pas très drôles, ses remarques enfantines et son sourire niais.

L’homme âgé avait repris sa place initiale et expliqua les choses à venir. Nouvel origami, nouvelle difficulté. Cela allait être bien plus compliqué, avait-il dit. Un petit sourire sadique se dessina alors sur les lèvres de la jeune fille. Elle avait si hâte que cela se complique. Un peu de difficulté n’était pas refus. Elle buvait les mots du professeur, écoutant d’une oreille attentive chaque consigne. Une fois qu’il avait fini de dicté, elle fit un petit signe de la tête et baissa la tête, se mettant aussitôt au travail. Elle s’appliqua à la tâche, tentant de ne pas louper un pliage. Elle savait que si un pliage n’était pas correct, c’était tout ce qui allait s’en suivre qui serait mauvais et cela ne prendrait donc pas la forme de ce qu’elle désirait. Elle s’appliqua, sourire en coin. Lorsqu’elle était à mi-chemin de donner naissance à sa petite grue, elle détourna son visage sur son ami blondinet. « Tu vois que tu es doué ! » lui fit-elle remarquer alors dans un petit murmure. Un sourire enjoué se dessina sur les lèvres de la jeune fille. Puis elle se mit à réfléchir quelques secondes. « Celui qui finit son pliage en dernier devra offrira un verre… ou un café à l’autre, marché conclu ? » déclara-t-elle alors, prenant un petit air malicieux. Ziggy semblait être partant, et elle se remit aussitôt à l’œuvre, comptant bien entendu terminer la première !

« Mais non… tu as peut-être besoin d’un peu plus de temps pour comprendre, mais tu es doué aussi… » Il regarda de nouveaux les gens qui l’entouraient. A vrai dire, il ne comprenait pas son point de vue, eux aussi avaient surement besoin d’un peu plus de temps pour comprendre, peut-être qu’eux aussi étaient doués. Mais il ne s’aventura pas sur ce terrain-là, haussant simplement les épaules avec un petit sourire, après tout, il ne pouvait pas non plus la contredire, depuis qu’il était petit, il lui avait toujours fallu plus de temps que les autres pour comprendre quelque chose, mais ça ne faisait pas de lui un idiot pour autant, le jeune homme était juste un peu simplet et en jouait.

Les pliages du canard cessèrent pour laisser place à quelque chose de plus traditionnel dans l’art de l’origami : la grue. Après les explications données, Ziggy s’était attelé à la tâche, prenant pour une fois au sérieux ce court qu’il trouvait inutile, car jamais après cette journée il ne lui viendrait à l’idée de faire des origamis pour occuper son temps, sauf si soudainement, il ne restait plus que du papier sur Terre. Son pliage commençait à prendre forme quand il fût dérangé par Hafsa qui lui souligna qu’il était doué, le blond loucha alors sur ce qu’elle était en train de faire « Toi par contre, c’est pas terrible… » Et avec un petit sourire en coin, il se remit à plier sa feuille. C’était faux évidement, depuis le début du cours, son amie avait montré son envie de réussir en faisant tout ce qui avait été demandé avec une perfection à couper le souffle. Il releva de nouveau la tête quand elle prit de nouveau la parole. « Celui qui finit son pliage en dernier devra offrira un verre… ou un café à l’autre, marché conclu ? » Il haussa un sourcil, évidement qu’il était d’accord. Ziggy était toujours partant pour un pari, aussi inutile soit-il, il était joueur. « Prépare la monnaie chérie, parce que tu vas perdre. » Et sur ses mots, il se remit assidument à son pliage, se dépêchant, mais pas trop quand même, il voulait faire quelque chose de beau, sachant très bien qu’Hafsa serait capable de lui lancer qu’il perdait le pari parce que c’était mal fait.

«Toi par contre, c’est pas terrible… » lâcha son ami. Pas terrible… Aussitôt qu’elle entendit ces deux pauvres mots, elle se tourna vers lui. Fronçant des sourcils et lui lançant un regard des plus noirs. Ziggy était de nouveau concentré dans son pliage, ne faisant ainsi pas attention à Hafsa. Après un petit soupir, elle en fit de même. Se concentrant sur son pliage. Puis c’est alors qu’elle se mit à réfléchir et lançant un petit défi totalement idiot en soi entre eux deux. Le dernier qui terminera son pliage devra payer un verre au gagnant… Quelle idée avait-elle eu de lancer cela. Surtout elle, Hafsa. La grande et studieuse Hafsa. Il fallait croire qu’elle avait eu envie de pimenter cette activité en lançant un stupide défi entre eux. Bien entendu, ce petit jeu fit rapidement réagir le blondinet qui se tenait à ses côtés. «Prépare la monnaie chérie, parce que tu vas perdre. ». Hafsa hocha alors la tête, avant de se tourner une dernière fois vers son camarade. « Mais… il faut que ça ressemble à ce que le professeur a fait bien entendu. Sinon, ce n’est pas du jeu. » ajouta-t-elle avant de se lancer dans son pliage. Elle ne fit d’ailleurs guère attention à ce que son ami lui répliqua. Elle s’appliqua du mieux qu’elle le pouvait dans son pliage. Recommençant par moment certains pliages qui semblaient ne pas convenir. Elle recommença encore et encore jusqu’à donner petit à petit naissance à une petite grue entre ses mains. De temps en temps, elle prit le temps à jeter un coup d’œil vers Ziggy, histoire de voir comment il s’en sortait… A ce qu’elle avait pu apercevoir, il semblait plutôt bien s’en tirer, bien plus qu’elle n’aurait pu s’imaginer. Après de longues minutes, le vainqueur du pari s’écria d’un « J’AI FINI !! » enjoué. Hafsa tourna alors la tête, lançant un petit regard à Ziggy. Il bomba légèrement le torse, lui montrant fièrement la grue. La jeune fille roula les yeux. Elle savait bien ce que cela voulait dire, elle allait devoir lui payer un verre, enfin… elle avait surtout perdu. Perdu… « C’est bon, on a compris que t’avais fini… » grommela-t-elle alors. A son tour, elle finit sa grue.

Et le cours continua, encore quelque instant. Le temps de faire un dernier origami. Après quoi, le professeur proclama la fin de ce premier cours. Il mentionna le fait qu’il était fier de ses élèves et patati et patata, Hafsa ne faisait guère attention aux paroles naïves de ce vieil asiatique. Suivant le mouvement de masse, elle rangea ses affaires et garda en souvenir l’un des origamis qu’elle avait fait pendant ce cours. Sûrement, elle le mettrait sur sa table qui lui servait de table pour manger, cuisiner, mais aussi comme bureau. Après quoi, elle prit la direction de la sortie en compagnie de Ziggy. Ce dernier ne put s’empêcher de lui rappeler qu’elle devait lui payer un café. « Je te laisse choisir le bar… je n’en connais pas vraiment à vrai dire… » lui avoua-t-elle.