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Musique ♪ : Rise - AaRON.

« Les rires éclatent mieux lorsque la nourriture est bonne. Proverbe irlandais. »

Une clochette tinta dans le petit restaurant lorsque la porte s'ouvrit. L'endroit était simple, absolument sans prétention, et c'était ce qui convenait le mieux. Une douce odeur de fumée de tabac et de friture embaumait toute la salle de service. Rafaël salua les quelques personnes présentes avant de s'asseoir à la banquette d'une petite table à l'écart, près de la baie-vitrée qui donnait sur la rue.
Le jeune homme se fit servir une bière brune. Il en but quelques gorgées, mais le liquide froid, de même que le récipient en verre qui le contenait provoqua chez lui un léger frisson. Il se frotta les mains l'une contre l'autre avant de les joindre pour souffler de l'air chaud à l'intérieur, dans une tentative pour se réchauffer ces membres extrêmes. Nerveusement et sans vraiment y faire attention, il bougeait sa jambe droite de haut en bas, très rapidement. Une sorte de toc, quand il ne savait pas quoi faire d'autre. Il but cette bière. Puis une autre. Rafaël regarda l'heure, poussa un soupir, puis décida de s'arrêter là.
La journée était ensoleillée, bien que quelques nuages aient fait leur apparition dans le ciel new-yorkais, mais le vent soufflait fort et véhiculait un air des plus froids provenant de l'océan. Il était bien habillé, pour le coup. Un gros sweat à capuche vert avec des inscriptions blanches et rouges était accompagné de sa veste à col noire, jetée à côté de lui. A cela s'ajoutait un jean serré et des chaussures blanches relativement usées, mais qu'il mettait encore pour le confort qu'elles lui procuraient.

L'assistant vétérinaire fronça des sourcils en inspirant bruyamment. Il sortit son portable de sa poche, consulta à nouveau l'heure. « 12 : 40 » Puis il soupira, encore. Il piannota sur quelques touches avant de coller l'appareil sur son oreille. A l'autre bout du fil, la sonnerie retentit plusieurs fois, avant d'enclencher le mécanique :


« Salut, vous êtes bien sur la messagerie de Jett. Je n'ai malheureusement pas de temps à vous consacrer pour l'instant ou alors j'ai plus de batterie, au choix. En attendant, vous pouvez toujours me laisser un gentil petit message, ça fera pas de mal. Je vous recontacterai, si besoin. Tchous. »


Rafaël raccrocha avant d'arriver au "biiiip" final. Jett était en retard. Et Rafaël détestait tout ce qui concernait l'attente. Pour patienter, il répondit à quelques messages, consulta ses mails grâce à son smartphone et entama même une application jeu. Un quart d'heure plus tard, n'y tenant plus, il appela de nouveau et tomba une nouvelle fois sur la messagerie. Cette fois, il décida de laisser sa marque.


« Jett, mais bon sang, qu'est-ce que tu fous ? Ça va bientôt faire trois quarts d'heure que je poireaute comme un con dans le restau. Je sais pas si t'es au courant, mais un portable est censé te rendre joignable. Sinon, appelle moi quand tu aura ce message. »


Le jeune homme passa frénétiquement sa main dans ses cheveux blonds. Il regarda par le pan de mur vitré et observa les gens dans la rue, en attendant. Il ne comprenait pas que son meilleur ami soit en retard. Après tout, Jett savait pertinemment que Raf détestait attendre ! Sans s'inquiéter pour autant, Rafaël prit son mal en patience et attendit encore. Puis la clochette sonna de nouveau. Instinctivement, il leva la tête. Après tout, son ami pouvait enfin être arrivé. Il l'espérait, en tout cas, car son ventre criait déjà famine depuis une bonne demi-heure.

« Jett ... »
Un souffle chaud lui caresse la nuque alors qu'il semble émerger doucement du sommeil. Sa tête le lance douloureusement, sûrement les restants de la soirée bien arrosée d'hier. Ne souhaitant pas qu'on l'importune plus, il se tourne mollement sur le ventre, enfonçant sa tête au plus profond de l'oreiller. Mais apparemment, cette personne qui refuse de le laisser dormir ne l'entend pas de cette façon. A nouveau, un souffle chaud dans son cou et une mèche de cheveux qui effleure la peau nue de son dos qui le couvre d'un frisson agréable. Serrant l'oreiller contre lui, il sourit, toujours perdu dans son demi-sommeil. Voilà une façon plutôt agréable de se faire réveiller surtout quand c'est par … par qui au fait ? Il ouvre brusquement les yeux, sentant son corps se raidir. A vrai dire, il n'a aucun souvenir d'avoir ramené quelqu'un chez lui cette nuit-là, ou alors c'est vraiment très flou. Et si elle était super moche ? Mon dieu, sa réputation de tombeur auprès des garçons allait en prendre un sacré coup. Faites qu'elle soit belle et que le fait qu'il ait cédé à la tentation de la tromperie encore une fois soit justifiée. Lentement, il se retourne, un peu craintif sur ce qu'il va trouver mais dès qu'il aperçoit le visage de la jeune femme qui tente de couvrir son corps nu d'un des draps du lit, notre tombeur se détend immédiatement. De longs cheveux bruns, des yeux verts, une peau laiteuse et lisse. Bref, pour lui, cela suffit à justifier sa faiblesse d'un soir … enfin, d'un soir parmi d'autres bien sûrs. D'un geste sûr, il l'attire contre lui et passe une main dans sa chevelure d'ébène.
« Salut beauté. »
La jeune femme semble presque intimidée maintenant que toute trace d'alcool a disparu et qu'ils se retrouvent en quelque sorte pour la première fois face à face.
« Je … je crois que ton téléphone a sonné avant. »
Sérieux ? Il est où d'ailleurs cet engin de malheur ? Se redressant sur les coudes, il finit par l'apercevoir et le saisit avant de se reblottir dans les bras de sa conquête. Un appel en absence de Raf. Il fronce les sourcils. Ils avaient quelque chose à faire aujourd'hui ? Pas à sa connaissance pourtant. Bof, il avait dû l'appeler pour faire le contre-rendu de la soirée, rien de spécial. En attendant, le jeune homme avait quelque chose de bien plus intéressant pour s'occuper et il comptait bien en profiter un peu. Remettre ça le matin, rien de plus agréable et la demoiselle semblait de cet avis. Mais leur tranquillité fut de courte durée puisque le portable se remet à vibrer sur le sol. Dans d'autres circonstances, Jett aurait sûrement pris le temps de répondre mais vraiment là, ça tombait mal. Quoique, il trouvait ça assez étrange. Deux appels aussi rapprochés ? Et si il arrivait quelque chose d'important ? Ou qu'il … ou qu'il avait oublié qu'il devait retrouver son meilleur ami au resto pour 12H ? Eh merde, bordel de crotte. Aussi vite que possible, il roule sur le lit, manquant de tomber à la renverse en dérapant sur un des vêtements éparpillés sur le sol. Il est où ce fichu jean ? C'est pas possible, est-ce que tous ses vêtements propres ont disparu ? Il finit enfin par trouver une chemise rangé dans un des sacs de sport qui lui servent d'armoire en attendant que son appart soit meublé et l'enfile à toute allure sous le regard d'incompréhension de la brunette -dont il ne connaît toujours pas le nom au passage. Pas le temps de lui dire aurevoir que déjà il dévale les escaliers de la mezzanine sans se soucier le moins du monde de laisser une parfaite inconnue chez lui. Toute façon, ce n'est pas comme si il y avait quelque chose à voler dans son appartement désert pour l'instant alors bon … Elle n'aura qu'à claquer la porte en partant et puis voilà. Et le fait de passer pour le pire des salauds est bien le cadet de ses soucis pour l'instant.

Il tapote frénétiquement son portable contre son genou une fois à l'intérieur de son taxi. Punaise, Raf va le tuer, c'est sûr. Déjà qu'il déteste attendre alors si il lui sort que son excuse, c'est d'avoir tout simplement oublié leur déjeuner … non non mieux vaudrait éviter ça. A peine arrêté, il balance quelques billets au conducteur avant de s'engouffrer, un peu essouflé dans le petit restaurant, repérant immédiatement la table de son ami.
« Hey, salut. Désolé j'ai eu un petit … contretemps. »

« Qui ne se préoccupe pas de l'avenir lointain, se condamne aux soucis immédiats. » Confucius.

Effectivement, Rafaël identifia rapidement le tout nouveau venu. C'était bien Jett, en jean et chemise, qui s'approchait de lui puis qui s'assit en face de lui sur la banquette en cuir. Aussitôt, une serveuse en profita pour s'approcher de leur table et demander à Jett ce qui lui ferrait plaisir. Quant à Rafaël, il refusa gentiment la proposition d'un nouveau verre. Dans quelques minutes, enfin, ils allaient commander et Rafaël pourrait manger.
Les bras croisés et appuyés sur la table, les jambes pliés sous la table, Rafaël fixait Jett d'un regard noir. Il ne lui en voulait pas vraiment, mais il aurait juste aimé être prévenu. Puis même si son ami le croyait fâcher, ce n'était pas bien grave, au contraire, ce serait bien fait pour lui ! L'aîné des deux jeunes hommes, poussa un soupir puis se décontracta légèrement. Toujours les bras croisés, il s'appuya au dossier de son siège, et montra en un mouvement de tête la l'horloge accrochée au-dessus du bar et qui indiquait 13 heures passées.


« T'as avalé ton portable cette nuit, ou quoi ? »


Humour sec. Rien de méchant, mais Rafaël tenait tout de même à en faire la remarque. Evidemment, il acceptait les excuses de son ami. Rafaël était très impatient, mais pas rancunier. De plus, le jeune homme avait bien remarqué l'allure générale de Jett et, quitte à le mettre mal à l'aise, Raf avait bien l'intention d'en savoir plus. Lorsque la boisson de Jett arriva sur la table, il adressa un sourire à la demoiselle et attendit qu'elle reparte avec de s'adresser à Jett, avec un sourire moqueur et un air innocent.


« Un petit contretemps, alors, hein ? Cheveux ébouriffés, yeux endormis, braguette ouverte, tu empeste la bière et tu as encore une trace de rouge à lèvres dessous l'oreille. Laisse moi deviner : grande, brune, cheveux courts, yeux bleus ? Et un prénom qui finit en -a. »


Pas besoin d'un dessin pour savoir ce que son ami avait fait la nuit dernière. Il y avait des preuves probantes. Rafaël n'avait peut-être rien à dire de son côté non plus, mais aujourd'hui il n'avait rien à se reprocher, car ce n'était pas lui le retardataire -et il ne l'avait jamais été.


« Sinon, tu m'excuses, mais je vais passer commande, parce que je crève la dalle, là ! »


Il appela donc la serveuse et demanda des ravioles au saumon accompagnées de quelques tagliatelles et de sauté de veau. En attendant Jett, il avait largement eu le temps d'examiner la carte des menus sous tous les angles !
Ensuite, il posa à nouveau son regard sur Jett. Il n'attendait plus que sa justification.

Rafaël ne put qu'esquisser un sourire face aux révélations de son ami sur la nuit qu'il venait de passer. Jett n'avait pas changé depuis la dernière fois qu'ils s'étaient vus. Toujours le même arnaqueur, toujours le même dragueur, toujours le même type avide de sexe, de femmes et d'alcool. Mais pouvait-il vraiment l'en blâmer ? Après tout, Rafaël n'avait pas besoin de jouer à l'hypocrite car lui-même se conduisait exactement de la même façon. A un détail près : Rafaël n'avait pas de petite amie officielle, au contraire de Jett. Et c'était d'ailleurs à cause de Litzy que les deux jeunes hommes ne s'accordaient pas. Rafaël ne la connaissait que de vue, et même si Jett la lui avait officiellement présentée il y a de ça quelques mois, il ne la connaissait pas tant et plus. Mais sa naïveté au sujet de Jett le mettait mal à l'aise. Raf ne savait vraiment de quoi parler en sa présence, ignorant ce qu'elle connaissait précisément de Jett. Les deux seules fois où ils s'étaient vus tous les trois, l'ambiance du repas avait été étrange et chargée de non-dits car Raf préférait éviter d'aborder les sujets usuels entre les deux hommes, de peur d'en dire trop. C'était notamment suite au second repas que Rafaël avait reproché à Jett son manque d'honnêteté. Et il refusait que Jett l'implique dans ses plans foireux pour pouvoir sauter des nanas dans le dos de sa copine. Du coup, Jett avait renoncé à mettre Litzy et Rafaël face à face. Involontairement, Raf était maintenant complice des mensonges de son ami et cela lui plaisait peu. Malgré tout, lorsque son camarade tenta d'enlever le rouge à lèvres en s'observant dans une cueillère, la scène eut le don de provoquer l'hilarité de Rafaël. Toujours le sourire aux lèvres, Raf l'écouta s'étendre sur la description de la délicieuse créature pour laquelle il s'était épris pour une nuit. Les sourcils haussés, le regard froid, Rafaël se contenta juste de commenter.


« Tu sais très bien ce que j'en pense. Surtout par rapport à Litzy. »


Raf ne voulait pas s'étendre sur le sujet, car il savait que la discussion allait virer en désaccord total, voire en dispute. Et ce n'était absolument pas le but de leur rencontre. La serveuse s'approcha une nouvelle fois d'eux pour prendre leur commande définitive. Lorsqu'elle repartit en direction des cuisines, le regard trop direct de Jett n'échappa pas au blondinet. Il se pencha par dessus la tête pour lui infliger une tape ferme et légèrement douloureuse -surtout pour un lendemain de soirée- sur le sommet de crâne.


« Je te dérange, peut-être ? maugréa-t-il. »


Un léger sourire envahit à nouveau ses traits tandis qu'il hochait doucement la tête de droite à gauche dans un signe de profond désespoir. Jett ne changerait jamais. Ou alors pas avant longtemps. Celui-ci s'enquit donc des nouvelles que Raf pouvait lui apporter. Il pouffa à la mention "Raf le magnifique". Au moins ça.


« Non, c'est juste que j'ai la dalle parce que mon meilleur pote m'a quasiment posé un lapin. Alors mets là en veilleuse, tu veux ! dit-il avec humour. Et j'imagine que les animaux à poils n'incarnent pas chez toi un intérêt tout particulier, ironisa-t-il en faisant référence à son boulot d'assistant vétérinaire. Pour le reste, eh bien ... Je n'ai pas fêté mon anniversaire. Le drame. »


Rafaël ouvrait de grands yeux, hocha la tête de haut en bas en signe d'approbation. Il semblait sérieux, mais ce n'était pas le cas. Certes, il n'avait pas à proprement parlé, fêter son anniversaire, qui remontait déjà au 3 septembre. Mais les soirées qu'il avait faite durant tout le mois de septembre compensait largement à ce petit écart.
Qu'avait-il d'autre à raconter ? Ah oui. Jett était son meilleur ami. Il pouvait donc savoir, en ce qui concernait Lynn. Et Marley Rose. C'est là que Rafaël se rendit compte de la complexité de sa situation. Autant sa relation avec Lynn était pleine, intense et explosive. Autant retrouver Marley Rose et la redécouvrir lui faisait un bien fou. Et ces deux femmes commençaient légèrement à lui faire tourner la tête. Mais ce n'était peut-être le moment de lancer la discussion là-dessus, si ? Raf attendrait un peu, que le moment soit plus opportun, ou que Jett ne lance le sujet. Autrement, il préférait rester muet pour le moment. Cela lui permettait de ne pas avoir à se prononcer sur cette bizarrerie. Il tenta alors de détourner la conversation.


« Et toi ? Tu étais passé où pendant tout ce temps ? Tu glandais quoi, au juste ? »


Il s'en rendait compte ; Jett lui avait un peu manqué, au final. Mais juste un peu, hein.




Excuse moi pour le retard, j'avais pas du tout vu ta réponse ...