Anna-Lynn, affalée dans son canapé, regarda la pendule accrochée au mur du salon. Sept heures du soir. Elle sourit intérieurement, son colocataire allait enfin rentrer. Dans une demie heure. Elle avait passé la journée chez elle, trainant à droite et à gauche, mettant un bordel pas possible dans chacune des pièces où elle avait posé les pieds. En parlant de ces derniers, en ce moment, ils étaient tranquillement posés sur la table basse du salon, entre canettes de soda vides et emballages de sucreries en tous genres. Elle s'étira longuement, puis se mis à chercher la télécommande parmi les coussins du canapé. Elle n'avait vraiment pas envie de ranger... Tant pis, Victor allait faire la gueule, mais bon, ça ne durerait pas longtemps. Ça ne durait jamais longtemps. Au pire, quelques heures, mais jamais plus de deux. C'était ce qu'Anna-Lynn aimait dans sa relation avec Victor. Il n'y avait jamais de conséquences. Ils étaient francs l'un envers l'autre, ils pouvaient faire tout et n'importe quoi, enfin, surtout Anna, tout était oublié le lendemain. Elle prit son téléphone, et se dépêcha de prévenir son colocataire qu'ils faisaient une soirée films, qu'il n'avait pas le choix, et qu'il fallait qu'il passe acheter des trucs à manger...

« ¡ Holà chico ! J'ai enfin trouvé le point d'exclamation espagnol, je vais pouvoir t'en faire bouffer... Juste pour te prévenir qu'il faut que tu rappliques, alors arrêtes ce que tu es en train de faire, fonce acheter à bouffer et rejoins moi. Notre frigo est vide, je me suis légèrement laissée emporter par la folie destructrice de mes instants de solitude. Je t'attends...
Move your ass !
A-L »

Une fois le texto correctement envoyé à son destinataire, Anna-Lynn se demanda ce qu'elle allait bien pouvoir faire avant de dépérir d'un ennui profond... Elle décida que, puisque Victor allait faire les courses (et il n'avait pas vraiment le choix s'il voulait manger), elle allait ranger un peu la maison. Enfin, le salon. Enfin, elle allait débarrasser la table basse posée au milieu de la pièce et encombrée de détritus en tous genre. Elle se munit d'un grand sac poubelle, et d'un revers de main, fit glisser tous les emballages à la place qui leur était réservée. Jusqu'à ce que... « Merde, ma chaine de cheville ! » Plongeant le bras au milieu des emballages graisseux, elle tenta vainement de récupérer son bijoux, y laissant au passage sa manucure fraiche d'il n'y a pas deux heures. « Bordel de merde ! Je rangerais plus jamais... » Après avoir réussi à récupérer la petite chaine en métal, ce qui ne fut pas une mince affaire, Anna-Lynn s'assit sur le canapé, face à l'entrée du salon, prête à fusiller son colocataire dès qu'il entrerait. Parce que, merde quoi, c'était de sa faute si elle avait voulu faire le ménage !

Lorsque enfin son colocataire franchit la porte, Anna-Lynn s'appliquait à le fusiller des yeux. Tout était absolument de sa faute, elle en était persuadée. « c’est moi ! » Entendit-elle, alors que Victor venait de pénétrer dans la maison. « Je suis dans le salon ! » Cria la brune, toujours assise dans le canapé.A en juger par le ton dénué de colère de celui avec qui elle vivait, il ne devait pas encore vu l'état dans lequel Anna l'avait mise en l'espace d'un après midi. « Euh… tu m’expliques ce bordel, Anna ? » Avait-il ajouté lorsqu'il avait pénétré dans le salon, laissant au passage tomber les sacs de provisions. « Comment ça "Qu'est-ce que c'est que ce bordel" ? Tu sais que tout ça est entièrement ta faute ? J'étais en train de ranger, tranquillement, et tout d'un coup, pouf, ma chaine de cheville est tombée dans le sac poubelle, du coup, j'ai du passer au moins dix minutes à la chercher, maintenant je suis dégueulasse, et tout ça c'est entièrement ta faute ! » Bon, c'était un peu tiré par les cheveux, admit-elle à elle même. C'était peut-être légèrement sa faute à elle. Mais il était hors de question qu'elle reconnaisse ses torts. Son mauvais sens avait toujours impressionné ses proches, et elle n'allait pas changer ses habitudes maintenant. « Et il est hors de question que je ramasse tout ça. Si t'as la flemme de le faire, t'as cas appeler une femme de ménage. Parce que j'en ai marre de toujours ramasser tes conneries. » La façon dont-elle gesticulait dans tous les sens, manie qui la prenait quand-elle n'était pas vraiment en colère mais qu'elle voulait en donner l'impression, la rendait presque comique. Elle n'était pas très convaincante mais se donnait décidément beaucoup de mal pour le paraitre.