« Une fois que mon boss sera là, z’allez moins rire mes poulets ! » s’exclama Frey, un assistant du médecin légiste particulièrement attendu sur une scène de crime ressemblant davantage à un carnage qu’à un doux conte de fée. Le norvégien se garda bien de dire que son patron était en fait une patronne, que ses méthodes étaient pour ainsi dire hautement personnelles et qu’elle s’attirait plus souvent les foudres de tout le monde que les sympathies. Et pourtant, on ne la détestait pas. Elle surprenait, elle choquait, mais on voulait faire partie de son cercle plutôt que d’en être exclu… pourtant, les membres de la brigade de la NYPD présents sur les lieux du crime continuaient à plaisanter sur un médecin légiste fantôme, qu’ils avaient probablement effrayé avec leur charisme, et qu’il ne se pointerait jamais de peur d’être ridicule… c’était sans compter sur l’arrivée presque discrète d’une moto dernier cri, dirigée par une femme à la combinaison moulante et aux gants de cuir, qui enleva bientôt son casque avec une sorte de grâce et de provocation dont elle seule avait le secret. « Mouais… avec un charisme d’huître comme vous l’avez, excusez-moi mais ça me vend pas du rêve à part en carton pâte ! » s’exclama Lyanna avec son culot habituel, rangeant soigneusement son casque et ses gants avant de ne s’avancer et d’adresser un clin d’œil à Frey. « Toujours aussi ponctuel, z’allez me tuer avec vos conneries… bordel on vous a jamais appris à faire retarder votre putain de montre d’au moins cinq minutes ? J’ai même pas bu de café, c’est limite un crime contre l’humanité ! » Elle n’avait pas réellement salué les policiers présents, juste histoire de les moucher pour leur machisme insupportable qu’elle ne se coltinait que depuis trop longtemps. Mais bonne princesse, elle finit par leur accorder un regard étonnement franc tandis que son norvégien préféré lui tendait des gants d’analyse ainsi qu’une veste de coroner pour ne pas, comme il le disait si souvent « affoler les yeux sensibles avec ses tenues ». « Bon, on a bien rit mais maintenant laissez faire les pros… retournez à vos p’tits guns et à votre paperasse en n’oubliant pas de dégager vos culs de ma scène de crime. Merci Frey vous êtes un saint ! » Lyanna n’avait pas zappé Caine. Elle ne l’avait pas ignoré non plus, comme le prouvait le clin d’œil discret qu’elle lui offrit, seule marque aimable dont elle fit preuve envers les forces de police. Mais aussitôt, elle se rendit sur ladite scène pour faire prélèvements et analyses, oubliant d’un même temps d’expliquer à l’écossais pourquoi, au juste, elle était médecin légiste aujourd’hui…

« Mouais, mouais, mouais !! On me la fait pas à moi, virez vos sales doigts ou j’vous les coupe !! » plaisanta Lyanna car elle n’imaginait pas faire de sa vie une gigantesque tragédie dans laquelle il n’y aurait que larmes, craintes et soucis. Certes, elle ne faisait pas le boulot le plus marrant de la planète mais la piquante brune avait le feu sacré pour celui-ci, c’était l’évidence même. Lyanna n’agissait décidément pas comme le commun des mortels et elle ne fut pas étonnée une seconde lorsque Caine se pencha à son oreille pour lui demander fondamentalement quel était son vrai métier. « Ouais, j’me faisais chier en pédiatrie ! » reprit-elle avec son culot habituel avant de ne lui lancer un sourire légèrement plus franc. « Mon patron en a ras le bol de mes frasques… alors il me flanque à d’autres services jusqu’à ce que je retrouve la raison et que je refasse de la merde ! J’ai plusieurs diplômes, ça aide… pour ça qu’il se débarrasse pas de moi d’ailleurs, mais pour ta gouverne lieutenant, médecin légiste, c’est mon job de base ! Après tout, quoi de plus sexy que de disséquer des doigts et d’analyser des intestins en décomposition, hum ? Fun, fun !! » Lyanna se releva avant de ne froncer les sourcils, ne lâchant pas sa « proie » des yeux, tandis qu’elle analysait la traînée de gouttes de sang y étant rattachée. « Le corps a été transporté ici, la mort remonte au moins à vingt-quatre heures au bas mot. Il faut que je fasse des analyses plus poussées en labo pour donner l’heure exacte du décès mais la traînée de sang est illogique par rapport à la position du corps… si la victime avait été tuée ici, il n’y aurait qu’une traînée perpendiculaire, hors il y en a des deux côtés du corps, preuve qu’il y a peut-être un brin d’amateurisme dans l’air en prime… bordel, des criminels doués, y’en a plus de nos jours ! » Lyanna tourna à nouveau autour de la victime afin d’analyser les traces de sang contre son cuir chevelu, position stratégique qui lui permettait de parler en prime à Caine… « Pourquoi, tu es choqué ? C’est pas drôle si tu connais tout de moi d’un claquement de doigt… faut bien que j’fasse un peu semblant de te résister, nan ? »