Je déteste les dimanches matin. Déjà que le dimanche est un mauvais jour, alors le matin est encore pire. Bien entendu, prévoyante comme je ne suis pas, j’ai oublié de racheter un paquet de clopes hier. Je l’ai fini sur le chemin métro-appart, à la fin de la soirée alcoolisée- mais pas trop – d’hier. Je n’aime pas trop boire. Si ce n’était que moi, je ne boirais pas du tout. Mais voyez-vous, socialement parlant, c’est presque devenu une obligation. Et moi, au bout de deux verres je me sens déjà bouleversée. Cette soirée d’hier était d’un ennuie tel que j’en ai bu quatre. Un grand cru, parait-il. Je ne fais jamais la différence, je suis sûr que je pourrais boire de la pisse si on me disait que c’est du champagne sans bulle. J’étais donc invité à une soirée en l’honneur d’un designer New Yorkais. Enfin ne croyez pas non plus que je suis VIP, c’était une invit’ facebook. Cela m’a tellement emmerdé que je reprenais un verre de vin tous les quarts d’heure. Oui, bon calcul, je suis donc resté environ 1h. Il faut dire que je viens d’arriver à New York, je n’ai pas vraiment d’ami à part le chat de ma voisine qui vient squatter sur le rebord de ma fenêtre ou encore la gardienne de l’immeuble qui vient m’apporter des petits gâteaux la veille de la facturation de mon loyer. Je me demande si elle fait ça avec tout le monde. Oui , donc j’ai fini mon paquet de clopes hier à cette soirée minable et je suis donc obligé de me lever assez tôt ce matin pour aller m’en acheter un, vu que dans mon quartier le seul tabac n’ouvre que le matin. Bref, je déteste me lever un dimanche matin. Alors, c’est de mauvaise humeur que je suis parti, après avoir enfilé un jean, des grosses pompes fourrées et ce gilet en laine horriblement moche que ma mère m’a offert. Maintenant, il faut traverser toute l’avenue, bondée de gens comme par hasard. Les gens ne vont pas à la messe ? Bizarrement j’aurais pensé qu’un dimanche matin il n’y aurait personne dans les rues de Brooklyn. Cette vision d’horreur me donna tord. J’ai eu soudainement envie d’aller me changer, par honte de ce que je portais ; quand la gardienne sortie et me lança : AGATHE ! BONJOUR, QUEL MAGNIFIQUE GILET QUE VOUS PORTEZ LA ! Trop tard. Je ne pouvais pas me permettre de la vexer, je mettrais en péril les petits gâteaux. Donc je la saluai et continua ma route. Sur le chemin des mexicains m’arrêtaient pour me vendre tout un tas de choses, des femmes mendiantes m’arrachaient presque mon sac des mains et des enfants faisaient la manche en plein milieu de la route. J’avais l’habitude de ce genre de paysage mais cela me perturbais plus aujourd’hui. Une petite fille seule assise sur le trottoir avait l’air complètement drogué et tanguait tout en clignant des yeux. Des chiens errants faisaient les poubelles de l’autre côté de la rue et le vieil homme couché dedans ne semblait pas être dérangé. J’arrivai au tabac du quartier, des pouffes latino était en train de rire bêtement devant la vitrine du Nolas Bazar, un magasin de vêtements cheap. Et dire que c’est avec une de ces filles que mon ex m’a trompé. Je rentre dans le tabac, prend le Times au passage et me dirige vers la caisse. BORDEL, LA QUEUE EST INFINIE.