Central Park avait toujours été un endroit que Derek appréciait : cette immense étendue de verdure et de nature, bien qu'artificielle et partiellement implantée, était ce qui se rapprochait le plus d'un endroit apaisant pour lui. Certes, c'était loin du désert d'Australie qui lui semblait presque infini, mais certains arbres lui rappelaient étrangement ceux qu'il avait pu voir dans les forêts bordant la ville de Cairns, dans le Queensland. Malheureusement, il n'avait pas beaucoup de temps pour se permettre de se balader dans cette bouffée de nature au milieu de la ville polluée ; son travail au zoo du Bronx lui prenait presque toutes ses journées. Pas qu'il n'aime pas ça, au contraire ! La vie qu'il menait depuis qu'il avait trouvé ce job n'était qu'un gros concentré de passion pour ce qu'il faisait. Ce matin du 12 septembre, cependant, était différent ; depuis plusieurs jours, le zoo était à la recherche d'un soigneur assez compétent pour découvrir le mystérieux mal qui envahissait le léopard des neiges de l'exposition et qui le rendait hostile et irritable.

En entrant dans le zoo, Derek salua les quelques employés avec qui il avait eu l'occasion de sympathiser au cours de ses précédentes interventions et ne tarda pas à trouver tout seul, comme un grand, l'immense cage du léopard. C'est même en sautillant légèrement qu'il déverrouilla automatiquement la porte avec le pass qui lui avait été donné précédemment et qu'il entra dans l'enclos reproduisant à la perfection l'habitat naturel de l'animal. Préférant ne pas s'approcher d'abord, le hollandais se donna quelques instants de réflexion en observant l'attitude de son patient qui jusqu'à présent semblait positivement calme. « Je savais bien que j'avais entendu que tu serais à Central Park ce matin ! » entendit-il derrière lui, au-delà de la barrière, alors qu'il était près de l'animal. Derek prit son temps pour se retourner, histoire de ne pas brusquer la bête, et sourit instinctivement à Aloysia qui avait définitivement des oreilles partout. Les deux jeunes partageaient la même passion pour les animaux et, rapidement, leur conversation dériva sur le fait qu'elle pourrait sûrement l'aider. Il fit mine de ne pas être autorisé à la laisser entrer dans la cage (ce qui était vrai), elle lui avait lancé un regard entendu et il avait balancé la main avant de la faire pénétrer à l'intérieur. Certes, il encourait sûrement de gros problèmes si quelqu'un la trouvait là avec lui mais, en réalité, il n'en avait strictement rien à faire. Le protocole, il l'utilisait pour essuyer ses serviettes sales. Et puis, il avait confiance en la jeune femme, même s'il ne la connaissait pas depuis longtemps, qu'il savait particulièrement douée avec les animaux et sûrement même aussi compétente que lui.

Ils étaient en train de discuter des symptômes du léopard lorsqu'un bruit profond surgit de derrière les arbres, faisant faire volte-face au jeune homme qui perçut immédiatement, dans le ciel, l'explosion et la fumée opaque qui en résultat. « Qu'est-ce que... » commença-t-il avant de s'interrompre, incapable de terminer sa phrase, bouche bée. Mais à peine avait-il assimilé ce qu'il venait de se produire que, déjà, il entendait un autre bruit menaçant derrière lui. Il se retourna brusquement, juste assez vite pour remarquer le regard à la fois flamboyant et apeuré du guépard qui, affolé, balançait violemment sa queue et tendait rageusement ses muscles. « Attention ! » cria-t-il à l'intention d'Aloysia, sur lequel le guépard semblait prêt à fondre d'un instant à l'autre. Il ne lui donna même pas le temps de réagir, lui sauta littéralement dessus pour la pousser et, une seconde plus tard, se retrouvait plaqué à terre par l'animal. Une douleur fulgurante lui déchira l'avant-bras lorsque les crocs de l'animal s'enfoncèrent dans sa peau et se mit à se débattre violemment. Mauvaise idée, prise sur un coup de tête, dans la panique ; le guépard, se sentant encore plus agressé, avait remplacé ses ents par ses griffes et s'attaquait au torse du jeune homme avec un peu trop d'ardeur. Dans un dernier effort, Derek plia sa jambe sous lui et souleva littéralement la bête à l'endroit stratégique qui terminait ses côtes, l'étouffant en poussant avec une force qu'il s'ignorait et qui devait sûrement être dopée par l'adrénaline folle qu'il devait produire. Il repoussa le guépard, qui toussa en boitillant mais semblait toujours prêt à en découdre plus tard. Derek roula sur le ventre dans l'espoir de se lever mais ses forces l'avaient abandonné et il retomba mollement sur le sol, étouffant un juron mal placé dans la terre humide.

La journée s'annonçait parfaite pour Aloysia. Lorsqu'on lui avait annoncé qu'ils quittaient l'Afrique, elle l'avait très mal pris, affirmant qu'elle n'en avait rien à faire des zoos de New York, qui n'avaient rien à voir avec sa réserve. C'était toujours le cas, elle n'aimait pas voir ses animaux en cage, bien que leurs milieux naturels soient reproduits au mieux et rêvait toujours de repartir en Afrique. La demoiselle était devenue organisatrice de mariage, métier bien loin de celui qu'elle avait toujours envisagé et rêvé. Certes, elle aimait ce qu'elle faisait, mais pas autant que ce qu'elle aurait pu faire. Malgré tout, elle n'arrivait pas à se décider à repartir, tout simplement parce que sa vie complète se trouvait ici à présent. Aloysia n'abandonnerait pas Tamsin, encore moins Aaron, et elle savait que ni l'un ni l'autre n'avait envie de repartir comme elle. Elle se contentait donc de ces zoos qu'elle avait tant critiqué mais qui lui permettait de passer un peu de temps en compagnie des animaux. La jeune femme s'était d'ailleurs renseignée quand aux heures de travail de Derek et espérait bien l'amadouer un petit peu, juste assez pour qu'il la laisse entrer en contact avec le léopard des neiges dont il s'occupait en ce moment.

Ce fut plus facile qu'elle ne le pensait, une chance que Derek ne soit pas un employé modèle qui respectait le règlement à la lettre. En quelques minutes, elle se retrouvait dans la cage et avait peine à cacher son excitation. Elle devait pourtant rester la plus calme possible, pour ne pas brusquer ou énerver l'animal, mais Loysia arrivait très bien à canaliser ses émotions, elle avait apprit à le faire il y a bien longtemps. Finalement, elle se concentrait sur ce que Derek lui expliquait, appuyée contre un petit rocher alors que l'animal, couché, ne semblait pas perturbé le moins du monde par leur présence. C'est du moins l'état dans lequel il se trouvait une dizaine de seconde plus tôt, peut-être plus. Tout s'était passé beaucoup trop rapidement. Un bruit sourd, les grondements de la bête et Aloysia qui heurtait un arbre après avoir été poussée par Derek. La jeune femme n'avait pas eut le temps de réagir, de comprendre ce qui se passait et était comme sonnée. Pas par le coup reçu, mais par les événements qui s'étaient enchainés beaucoup trop vite pour qu'elle ne les assimile.

Après de longues secondes, elle réalisait l'état dans lequel se trouvait Derek mais aussi l'animal, qui avait perdu tout son calme. « Ne bouge plus.» Ça, il devait l'avoir deviner seul que c'était la meilleure chose à faire mais malgré tout, elle le voyait s'agiter, en sang, ce qui ne ferait qu'exciter un peu plus la bête. A petit pas, Aloysia s'approchait face aux rugissements menaçants du léopard. Tout en s'avançant, elle descendait de plus en plus vers le sol, finissant à moitié à quatre pattes, de façon à ce que la bête ne se sente pas menacée par sa présence. En s'abaissant plus bas que lui, l'animal savait qu'il avait le dessus et qu'elle ne cherchait pas à le blesser. De cette façon, elle arrivait à attraper le sceau, contenant de nombreux morceaux de viande, qu'elle lui lançait au plus loin. Au mieux, ils avaient quelques minutes pour évacuer si la bête ne se calmait pas, mais Loys était plutôt confiante. Quoi que le corps en sang de Derek ne devait en rien calmer les choses. Elle put enfin se dépêcher pour s'approcher de lui et constater ses blessures. « Tu n'aurais pas du! Je n'ai pas besoin qu'on me protège, il ne m'aurait rien fait! » Ou peut-être bien qu'il lui aurait arracher la tête en quelques secondes chrono, c'était par principe, elle aimait penser qu'elle n'avait pas besoin de protecteur, quoi qu'il arrive. La panique la gagnait à présent, réalisant que tout cela était arrivé à cause de ce bruit assourdissant dont elle ignorait la provenance. « Derek, tu peux t'appuyer sur moi? Je pourrai pas te sortir seule, je vais avoir besoin de toi là... » Malgré son corps fin de danseuse, Aloysia avait de la force mais certainement pas assez pour sortir Derek de la cage s'il n'y mettait pas un peu du sien. La question était de savoir s'il en avait encore la force, en vue de son état. La jeune femme prit les devants, en tentant de le redresser en passant un bras autour de son cou, s'il pouvait se redresser, ce serait beaucoup plus simple que de le tirer dans cette poussière qui irait droit dans ses plaies laissées par les griffes du léopard.

Derek avait été totalement déboussolé par ce qui venait de se produire. Son bras ensanglanté ne lui faisait pas aussi mal que ce que le choc avait bien voulu lui faire croire, ou bien étais-ce le choc qui l'empêchait de ressentir la douleur ? Les yeux difficilement ouverts sur le ciel qui s'emplissait étrangement de fumée, le jeune homme gémit sans pouvoir s'en empêcher et tourna finalement la tête sur le côté, épuisé. « Ne bouge plus. » entendit-il une voix familière lui conseiller. Sans chercher à comprends, le jeune homme s'exécuta, sûr que de toute façon il n'avait pas la force de se lever tout seul. Il ignora si une seconde ou une heure avait passé lorsque la voix d'Aloysia lui revienne. « Tu n'aurais pas du! Je n'ai pas besoin qu'on me protège, il ne m'aurait rien fait! » La réflexion de la jeune femme arracha un sourire à Derek et, miraculeusement, lui fit reprendre conscience. Il ressentait plus violemment la douleur maintenant et à vrai dire, ça le rassurait plus qu'autre chose : il réalisait enfin l'ampleur de la situation. « Derek, tu peux t'appuyer sur moi? Je pourrai pas te sortir seule, je vais avoir besoin de toi là... » il sentit une pression au niveau de sa nuque, soupira lorsqu'Aloysia tenta de le soulever mais n'hésita pas à l'y aider. « Je vais bien, je vais bien. » argumenta-t-il, les dents serrées, alors qu'il tentait maladroitement de se redresser. Poser ses pieds sur le sol, ressentir de nouveau le poids de son corps, lui fit une sensation vraiment étrange. Il avait la tête qui tournait et ses pupilles dilatées inondaient son regard de lumière. « Wow... » réussit-il à articuler en passant sa main valide sur ses yeux. Il ignorait si il était capable de marcher mais de toute façon, il semblait ne pas avoir le choix.

Sans quitter l'appui que constituait Aloysia, Derek se traîna jusqu'à l'extérieur de l'enclos en secouant la tête dans l'espoir de se réveiller un peu. Il lança un regard en arrière avant de franchir les barrières, observant un instant la bête meurtrière se régaler des morceaux de viande que lui avaient lancé la jeune fille pour l'écarter du petit-déjeuner que constituait Derek pour lui. Sans plus de cérémonie, il referma les barrières une fois à l'extérieur et la verrouilla automatiquement pour finalement s'appuyer dessus, prêt à retomber. Il se reprit, se redressa, lança un regard alentours et à la panique qui semblait en réalité avoir gagné tout le zoo. « Merci Loysia... Je serais de la chaire à pâtée si t'avais pas été là. » dit-il en se tournant vers l'intéressée. Sincèrement, il n'aurait jamais pensé se retrouver dans cette situation, il avait déjà été blessé et avait toujours su contrôler la situation mais là, il n'avait pensé qu'à la sécurité de la petite brune.

Il semblait étrangement avoir oublié qu'il avait été mordu ; son bras restait prostré le long de son torse mais son regard suivait les clients qui courraient tous vers l'extérieur. « Mais qu'est-ce qui s'est passé ?! » s'exclama-t-il en scrutant l'épaisse fumée qui surgissait des arbres et montait substituer les cumulus de fin d'été. « Je dois aller faire le tour du zoo, voir si quelqu'un n'a pas été blessé. » dit-il soudainement pressé en scrutant chacune des directions possibles et à l'écoute d'un quelconque cri d'aide.

Si l'urgence du moment était de sortir de cette cage, Aloysia avait beaucoup de mal à rester concentrée face à tout ce sang. Contrairement à son père et sa soeur, elle n'avait aucune passion pour la médecine ni pour le sang. Non pas qu'elle paniquait à la moindre petit coupure mais l'état de Derek surpassait de loin une petite coupure, la jeune femme avait l'impression de le voir se vider de son sang à chaque seconde. Sur le coup, compresser sa morsure semblait être la meilleure chose à faire et pourtant, elle se devait de les sortir de là avant tout, sans quoi il risquait d'y rester ou d'y perdre quelques membres. Non sans difficultés, elle finissait hors de la cage en retenant Derek pour éviter de le voir s'écrouler. Le t-shirt du jeune homme était en lambeau après être passé sous les griffes de leur ami, et c'est sans réfléchir qu'Aloysia en arracha le plus gros bout possible pour ensuite l'appuyer contre sa plaie. Haussant un sourcil, elle adressait un sourire amusé à Derek. « Dans un autre contexte, ce geste était plutôt sexy hein? » Trêve de plaisanterie, elle cherchait juste à lui faire oublier la douleur, même si ce n'était que l'espace d'une seconde.

« Si je n'avais pas été là, tu n'aurais pas eut à me protéger et tu serais peut-être en forme à l'heure qu'il est, je suis désolée Derek...» Maintenant qu'elle avait un peu de temps pour faire le point sur tout ce qui venait de se passer, Aloysia réalisait surtout qu'elle avait mit leur deux vies en danger, ainsi que le job de Derek. Apriori, il n'y avait aucun témoin pour prouver qu'elle était dans la cage au moment de l'accident, mais elle était persuadée que le zoo repasserait ses chères vidéos de sécurité au moment venu. « Faut croire que le protocole n'est pas juste la pour décorer... »

« J'en ai pas la moindre idée, je n'suis pas sure de vouloir le découvrir. » Les commémorations des attentats avaient border leur journée d'hier, pour ne pas dire leur semaine, ceux ci venaient donc directement à l'esprit de la petite brune. Aloysia observait Derek de haut en bas quand il précisait vouloir faire le tour du zoo. « T'es pas en état de faire le tour du zoo! Au pire un éléphant s'offre la ballade du siècle! Faut que j’appelle Tams', elle va me dire quoi faire jusqu'à ce qu'on te trouve un médecin. » Mais surtout, Aloysia voulait savoir si sa soeur allait bien, son frère, Stan, Alek, beaucoup trop de personnes pour qui elle paniquait totalement. Voulant sortir son portable de sa poche, elle réalisait qu'il se trouvait au milieu de la cage, dans laquelle il était hors de question qu'elle mette à nouveau un pied. « Dit moi que tu as ton portable? » ajoutait-elle à l'égard du blessé, avec u regard suppliant. La pression montait mais surtout la peur qu'il soit arrivé quelque chose à quelqu'un à qui elle tenait, qu'il se vide de son sang face à elle. « Ok, inspirez, expirez. T'es pas tombé sur la meilleure Sullivan pour...ça... Il faut que tu appuies sur ta plaie, et... qu'on bouge! Il te faut un médecin! Je peux m'occuper des cages si t'y tiens, mais c'est pas l'urgence. » Sa tête la faisait également souffrir, après avoir heurter le sol mais elle n'était pas vraiment en bonne position pour se plaindre. Au contraire, elle pouvait s'estimer plus qu'heureuse.

Derek observait dubitativement Aloysia s'occuper de sa blessure, mais il était complètement déphasé. Est-ce que sa tête avait été touchée aussi ? Il ne lui semblait pas, mais à vrai dire dans le feu de l'action il se pouvait très probablement que son crâne ait heurté le sol brutalement. « Dans un autre contexte, ce geste était plutôt sexy hein? » L'intervention de la jeune femme le sortit de ses pensées et il esquissa un sourire en coin. Il voyait bien qu'elle se retenait de paniquer, et la trouvait déjà plutôt courageuse d'essayer de le réconforter lui. « Si je n'avais pas été là, tu n'aurais pas eu à me protéger et tu serais peut-être en forme à l'heure qu'il est, je suis désolée Derek... Faut croire que le protocole n'est pas juste la pour décorer...» Cette fois-ci, l'australien se renfrogna. Il était comme ça, il n'aimait pas suivre les règles et il ne l'avait jamais voulu, que ce soit à l'école, dans sa famille ou dans n'importe quelle situation, il agissait selon ses règles parce qu'il pensait toujours agir pour le mieux. Pour le coup, ça n'avait pas été le cas, et ce qu'Aloysia lui disait pour s'excuser ne faisait, en réalité, que le rendre plus coupable. « Et justement, c'est moi qui t'ai fait entrer dans la cage. » éluda-t-il en adressant un regard dissuasif à Aloysia pour l'empêcher de répliquer sur le sujet.

Derek avait mal mais il ne pouvait penser qu'à son boulot, aux animaux paniqués dans leurs cages qu'il fallait calmer et les visiteurs qu'il fallait éloigner, expulser même pour leur bien à tous. « T'es pas en état de faire le tour du zoo! Au pire un éléphant s'offre la ballade du siècle! Faut que j’appelle Tams', elle va me dire quoi faire jusqu'à ce qu'on te trouve un médecin. Dis-moi que tu as ton portable? » l'avait interrompu la jeune femme devant lui comme si l'idée de faire le tour du zoo maintenant était la plus stupide qu'elle ai entendu ; c'était peut-être le cas, en fait, l'esprit de Derek était pour le moins chamboulé. Il tâtonna dans ses poches à la recherche de son téléphone, le trouva finalement dans la poche arrière de son pantalon, mais interrompit son geste en le tendant à Aloysia : l'écran était en mille morceaux et, lorsqu'il essaya d'en allumer l'écran, celui-ci resta désespérément inerte. « Fais chier... Désolé. » grommela-t-il en remettant l'engin détruit dans sa poche, dépité : encore une dépense dont il n'avait pas besoin. « Ok, inspirez, expirez. T'es pas tombé sur la meilleure Sullivan pour...ça... Il faut que tu appuies sur ta plaie, et... qu'on bouge! Il te faut un médecin! Je peux m'occuper des cages si t'y tiens, mais c'est pas l'urgence. » Cette fois-ci, ce fut un petit rire qui s'échappa des lèvres du jeune homme : il se demandait bien où il trouvait la force de rire, d'ailleurs, mais il avait de plus gros problèmes à régler que de le découvrir. « Toi, t'occuper des cages ? J'ai retenu la leçon, hors de question. » Il sembla réfléchir un instant, lança une nouvelle fois un regard circulaire pour trouver son chemin et passa sa main valide derrière sa tête. « Ok, trouvons-le ton médecin. » déclara-t-il comme si il ne trouvait pas que c'était une bonne idée alors qu'en réalité, une petite voix dans sa tête commençait fourbement à l'inquiéter.

Il prit, de sa main valide, le bras d'Aloysia et l'entraîna à sa suite vers la source de l'explosion qu'ils avaient entendu. Si il y avait un endroit où ils trouveraient des médecins, c'était sûrement là où il était le plus probable qu'il y ai des blessés. En plus de ça, même si il craignait de savoir ce qu'il venait d'arriver, il était curieux et, encore une fois, son envie d'aider lui murmurait qu'il pourrait bien la satisfaire si il allait là-bas. En traversant la portion du zoo menant à l'extérieur, il remarqua que celui-ci était déjà presque désert et accéléra le pas en ignorant la douleur qui le faisait souffrir de son torse au bout de ses doigts.

Aloysia eut beaucoup de mal à ne pas riposter. La jeune femme détestait ne pas se faire entendre raison, surtout qu'elle savait parfaitement être la responsable. Elle n'avait rien à faire dans cette cage, elle n'aurait même pas du lui poser la question et mettre sa carrière en jeu. Au final, c'était même de sa vie dont il était question même s'ils étaient maintenant hors de danger. Si le jeune homme arrêtait de se vider de son sang, du moins. « Fais chier... Désolé. » Roulant des yeux, elle les levait au ciel ensuite d'un air accusateur. On les voulait mort, à coup sur. La petite brune n'avait jamais été croyante, mais lorsque les choses tournaient mal, elle aimait avoir un responsable et n'avait que le ciel, Dieu, pour l'instant. « Toi, t'occuper des cages ? J'ai retenu la leçon, hors de question. » Le petit rire semblait à la limite de la moquerie et elle du se rappeler la situation actuelle pour ne pas s'énerver. Elle en était parfaitement capable, elle le savait parfaitement, il suffisait qu'elle retrouve son calme. « Oui, moi... jusqu'à preuve du contraire, je m'en sors plutôt pas mal. » Juste l'impression qu'on venait de lui briser un bloc de béton sur le crâne, mais il y avait surement bien pire qu'elle, à commencer par lui.

« Ok, trouvons-le ton médecin. » Des mots justes sortaient enfin de la bouche de Derek, ce qui la rassurait un peu, il n'avait pas totalement perdu l'esprit. Tout en opinant, elle le laissait attraper son bras et le soutenait du mieux qu'elle le voulait, bien qu'il cherche à s'en sortir de lui même la plupart du temps. « Je n'sais même pas ou Aaron est! Encore moins Stan, Alek! Ce bruit... mon Dieu s'il leur est arrivé quelque chose! Pas que je cherche à affoler les troupes, mais je m'attends au pire... » La jeune femme ne s'adressait pas vraiment à Derek, bien qu'il soit l'unique à subir ses paroles. Elle paniquait, donc elle parlait, tout à fait logique chez elle. Aloysia ne pouvait s'empêcher de penser à voix haute, dans l'espoir d'entendre un "Ne t'inquiètes pas, tout le monde va bien" alors que personne n'en avait la preuve.

La traversée du parc fut assez pénible, surement plus pour Derek que pour elle, mais ils en venaient doucement à bout, entrant dans un nuage de fumée ou il était difficile de percevoir quoi que ce soit. La seule chose certaine était que les secours étaient en route, à l'entende des sirènes de tout côté de la ville. Elle se repris à deux fois pou continuer sa route, se prenant le pied dans un arbre au sol. Ce n'était peut-être pas le meilleur chemin à emprunter pour Derek, mais c'est ici que les secours arriveraient en premier, non au zoo. « AU SECOURRRRRRRR, AIDEEEEEEEEEZ MOI, JE SUIS COINÇÉ » Figée, tous ses sens étaient en alertes afin de trouver d’où venait ses cris. « Je reviens, ne bouge pas! S'il te plait... » La dernière chose qu'elle voulait était de le perdre de vue. Non seulement parce qu'il allait mal, mais aussi parce qu'il était l'unique personne qu'elle connaissait, elle refusait de se retrouver seule en territoire de guerre. Aloysia essayait d'avancer le plus vite possible, sans chuter et finit par repérer d’où provenait les cris. « Je suis là, ne vous inquiétez pas! J'AI BESOIN D'AIDE !!! » Aloysia avait crier désespérément, même si elle ne pensait pas en obtenir. Seule, elle n'arriverait jamais à soulever ces troncs, malgré toute sa bonne volonté, c'était inutile d'essayer. Elle espérait voir apparaitre quelqu'un, n'importe qui, Derek, même si elle était consciente qu'il n'était pas en état de leur venir en aide. « Je ne vous abandonnerai pas. » Le visage sali et blessé, Aloysia pouvait simplement apercevoir qu'il s’agissait d'une jeune femme. Bien qu'elle soit une inconnue, elle se promettait de ne pas la laisser là, quoi qu'il arrive.

« Je n'sais même pas ou Aaron est! Encore moins Stan, Alek! Ce bruit... mon Dieu s'il leur est arrivé quelque chose! Pas que je cherche à affoler les troupes, mais je m'attends au pire... » Derek remarquait qu'Aloysia commençait légèrement à paniquer. Sachant qu'il était lui-même en train de se contenir, il ne pouvait pas dire si ce comportement de leur part était de bonne augure. Lui au moins avait une excuse pour devenir fou : il était blessé, et il souffrait.

Alors qu'ils étaient sur le point de sortir du parc, un cri attira leur attention. Si la brune s'était brutalement arrêtée, Derek avait fait de même ; lui qui se prenait pour Superman, il trouvait enfin un blessé. « Je reviens, ne bouge pas! S'il te plait...» Certes, il ne se réjouissait pas particulièrement de la chose, mais c'était dans son caractère. Quelqu'un avait besoin d'aide et il ne pouvait pas ignorer cet appel, malgré le fait qu'il ne soit pas exactement opérationnel.

« J'AI BESOIN D'AIDE !!!» Le cri sembla réveiller brusquement le jeune homme ; est-ce qu'il venait de s'endormir, de sortir de l'inconscience, ou est-ce qu'il était juste en train de commencer à délirer ? Il ne pouvait pas se laisser aller, il se l'interdisait. Secouant brusquement la tête pour se réveiller, il tira sur sa blessure et laissa échapper un grognement de douleur avant de se mettre à marcher, ou plutôt à tâtonner vers la voix d'Aloysia. « Qu'est-ce qu'il se passe ? » demanda-t-il en entendant les derniers mots de la jeune femme, une fois debout près d'elle. La trouver n'avait pas été particulièrement difficile, ce qui fut difficile fut d'analyser la situation. Derek resta même un moment à observer la scène, les sourcils froncés, sans vraiment comprendre. Et puis, il se pencha et remarqua une tête grimaçante sous les débris et le tronc d'un arbre. « Oh... Merde. » Pour le coup, il semblait que l'inconnue avait vraiment été au mauvais endroit au mauvais moment. Se rendant compte qu'il n'aidait sûrement pas en constatant la gravité de la situation, il grimaça à son tour. « Est-ce que ça va, là-dessous ? » demanda-t-il maladroitement en descendant d'un cran pour observer l'enchevêtrement de débris d'un autre point de vue.

Au bout d'un moment, il lâcha un « Hm... » suivi d'une remarque qu'il n'aurait jamais cru être capable de sortir dans son état normal. « Loysia, tu penses qu'on peut faire rouler ce truc ? Je peux pas faire grand chose, pousser un minimum, mais il nous faudrait d'autres bras pour le soulever... »

Comme elle s'y était attendu, l'unique personne qui se portait volontaire pur l'aider était Derek. Elle ne put s'empêcher de grimacer en le voyant arriver à elle d'un pas nonchalant. Au moins, elle n'était pas seule face à cette personne souffrante. N'empêche, ou était la bonne nouvelle si ce n'est qu'ils allaient l'observer souffrir à deux? Avec un effort, Derek ne pourrait s'empirer son cas. Pendant qu'il arrivait doucement à elle, Aloysia n'avait écouter que d'une oreille ce que lui racontait la jeune femme, qui se mit à pleurer en constatant sa mort. Les nerds à vifs aidant sans doute, Aloysia ne pouvait s'empêcher de sourire, se retenant même de rire. Finalement, elle reprit son sérieux, voir une personne rire de son cas dans une telle situation n'avait rien d'agréable, même s'il était impossible qu'elle l'aie remarquer. « Vous n'êtes pas morte, on va vous sortir de là très vite, je le jure... On va tout faire pour en tout cas... » Pourquoi jurait-elle des choses alors qu'elle n'en savait rien? ils allaient essayer c'était clair, mais qu'ils y parviennent était bien plus incertain.

« Je ne sais pas... j'ai jamais eut la force d'Hercule et toi, tu ferais mieux de t’inquiéter de tes propres blessures. Je... ne sais pas! » Et dieu qu'elle détestait ne pas savoir quoi faire. Levant une nouvelle fois les yeux au ciel, elle avait perdu toute son assurance et avait plus envie de pleurer sur le coup. Elle n'en avait pourtant pas le droit, étant la seule personne qui s'en sortait pas mal dans les trois. Elle prit donc une bonne inspiration, s'ordonnant de relever la tête et de garder tout le courage qui l'accompagnait habituellement. « ok, on essaye. Personne ne viendra, pas dans les minutes à venir en tout cas... Si tu sens que c'est trop douloureux, on abandonne et on attend les secours... je vais essayer de pousser un maximum pour t'éviter trop d'effort. » C'était tellement absurde qu'elle eut du mal à s'y mettre. C'était bien beau d'avoir des paroles de super héros mais la force ne suivait pas forcément le mouvement. Bloquant son pied contre une pierre pour ne pas reculer, elle se mit à pousser de toute ses forces, accompagnée de Derek, avant de voir le tronc bouger. Pas totalement, mais assez pour laisser un petit espace. La douleur dans son abdomen se faisait ressentir, tant elle se retenait de lâcher ce poids, elle n'imaginait donc même pas la douleur que devait ressentir son ami. Sur le coup, elle s'énervait d'ailleurs de constater que la personne ne faisait aucun effort pour s'extirper seule, pendant qu'ils retenaient le tronc. « C'est le moment ou vous essayer de nous aider... » Loysia constatait vite fait qu'elle n'en avait pas les capacité, mais de ce coup d'oeil, elle restait surtout muette et lâchait par réflexe le tronc, qu'elle repoussait rapidement en le voyant reculer. « Je rêve, je rêve, sérieusement c'est quoi ce délire? » Elle observait le jeun homme pour qu'il lui confirme qu'elle était totalement folle, ou qu'il voyait la même chose qu'elle. D'accord, elle s'était pris un coup sur la tête, mais elle avait l'impression d'aller plutôt bien jusqu'ici, en dehors de la douleur au crâne. le tronc roulait enfin sur le côté, dégageant totalement la voie. Loys' ne se précipitait pourtant pas et dévisageait la personne qui se trouvait en face d'elle, qui se trouvait être elle, ou du moins cela y ressemblait beaucoup.

« Je ne sais pas... j'ai jamais eut la force d'Hercule et toi, tu ferais mieux de t’inquiéter de tes propres blessures. Je... ne sais pas! » A vrai dire, Derek ne portait pas vraiment d'attention à ce que les deux jeunes femmes se disaient, plus préoccupé par le sang qui glissait sur son bras qu'autre chose. Techniquement, il n'y avait aucun risque de transmission de maladie, les animaux du zoo étaient rigoureusement contrôlés et vaccinés, parfois par lui-même, mais il pouvait toujours risquer une infection, le mauvais nerf touché ou déchiré, ou pire une hémorragie, et il était fini. Parlant à moitié avec lui-même dans son esprit, il leva les yeux au ciel et claque sa langue contre son palais. Il écartait la dernière possibilité, il était complètement en train de paniquer et de surjouer, là. « ok, on essaye. Personne ne viendra, pas dans les minutes à venir en tout cas... Si tu sens que c'est trop douloureux, on abandonne et on attend les secours... je vais essayer de pousser un maximum pour t'éviter trop d'effort. » Derek hocha la tête, s’abstenant un commentaire sur le fait qu'il ne voulait pas qu'elle se blesse non plus - il y avait des moments il où valait mieux remballer sa fierté et agir, et maintenant faisait partie de ces moments. Il se plaça à l'autre bout du tronc histoire d'équilibrer leurs forces et, à son signal, poussa de toutes ses forces de ses deux bras - le blessé ne tint cependant pas longtemps et il dut le laisser retomber contre son corps dans un grognement de douleur, ne s'appuyant que sur son bras valide en y mettant toutes ses forces disponibles.

Derek crut qu'une éternité passa avant qu'enfin, le tronc ne glisse sur le côté et ne dévoile celle qui était coincée en dessous. « Je rêve, je rêve, sérieusement c'est quoi ce délire? » Derek cligna des yeux avant de rejoindre Aloysia, se décidant contrairement à elle à s'approcher de quelques pas. « Oh bah, merde alors... » fut-il seulement capable de dire en observant le visage de la jeune femme. Il avait devant lui la copie conforme de l'amie qui se tenait en retrait par rapport à lui. La situation était irréelle. Faisant fi de la douleur qui le lançait de nouveau dans l'épaule, il se précipita finalement vers la blessée et, de son bras valide, tenta de la soulever, mais il en était incapable seul. Restant un instant dubitatif devant l'apparence de la jeune femme, il se tourna finalement vers Aloysia et, comme si la situation était plus gênante qu'autre chose, lui adressa d'un signe de tête et d'un mouvement des yeux pour lui indiquer de le rejoindre illico presto et de lui donner un coup de main. « Loysia... C'est ton portrait craché... » dit-il finalement une fois qu'il fut plus proche d'elle, complètement ébahi.