Depuis l'accident que ma sœur et moi avions eu, je n'avais pas eu ni la force, ni l'envie de contacter Vitaly. J'étais encore trop sonnée et blessée par ce que j'avais appris. Et j'avais eu besoin de temps pour mettre les choses au clair dans ma tête. Et même après trois semaines sans donner signe de vie à Vitaly, à réfléchir à nous et à notre futur, les choses étaient toujours aussi compliquées. Je l'aimais. Oui, ça c'était certain, je l'aimais passionnément. Mais je lui en voulais d'être retombé dans les bras de ma sœur, de la voir sans rien me dire... Et, cerise sur le gâteau, elle était enceinte ! Tout cela partait vraiment en live et la situation ne pouvait perdurer de la sorte... Ainsi, même si cela m'arrachait le cœur, j'avais prit la ferme décision de quitter Vitaly. Ce n'était pas tant le fait qu'il soit retourné vers Serena, mais c'était surtout pour ce bébé qu'attendait désormais ma sœur. Je ne pouvais pas le laisser grandir avec un père quasi absent – comme ça avait été le cas pour Serena et moi – si ce dernier s'absentait justement pour voir sa maîtresse, c'est-à-dire moi. Non, cela devenait bien trop tordu et dangereux. Et si un jour ce petit découvrait que, depuis toutes ces années, son père avait une relation avec « tata Lindsay », ça n'allait clairement pas le faire. Il valait donc mieux tout arrêter maintenant, afin que Vitaly puisse faire le meilleur choix... Si toutefois il décidait d'assumer cet enfant et de rester au près de ma sœur. Le pire, c'était que, même si j'avais pris cette décision, j'avais été incapable d'aller voir le principal intéressé pour lui en parler... J'avais, au contraire, bien pris mon temps. Sans doute car j'avais besoin d'être sûre de faire le bon choix. Et quand bien même je l'étais, il fallait que je trouve le courage de lui parler de tout cela. Et le simple fait d'y penser était affreusement douloureux.

Ainsi, j'avais préféré soigneusement éviter Vitaly depuis l'accident, ne répondant ni à ses messages, ni à ses appels. J'avais besoin de temps pour réfléchir à tout cela et je savais très bien que le revoir allait très certainement me décourager de le quitter. C'était d'ailleurs fou de voir à quel point sa seule présence pouvait me faire perdre la raison. Et c'était pendant que je songeais à tout cela que des coups furent frappés à la porte, quelques minutes après le départ de mes parents. Étaient-ils de retour ? Non, ils n'aurais jamais prit le soin de frapper avant d'entrer dans leur propre demeure. Intriguée, je me levais aussitôt et allais ouvrir. Et quelle ne fut pas ma surprise en découvrant, sur le pas de porte, le principal objet de mes tourmentes. Merde. « Vit' ? » C'était pourtant prévisible... Il n'allait pas rester des semaines et des semaines sagement de son côté, attendant que je daigne lui donner des nouvelles. Sauf que je n'avais franchement pas prévu de le voir aujourd'hui. Et cela signifiait que j'allais devoir mettre les choses au clair. Et j'appréhendais franchement ce moment. « Entre... » dis-je assez froidement, en m'écartant afin de le laisser passer, évitant son regard. J'étais submergée par une vague de sentiments divers et douloureux. Je brûlais d'envie de sauter dans ses bras, l'embrasser et le retrouver, après ces trois longues semaines passées sans le voir. Et en même temps, je repensais à l'air à la fois rêveur, excité et amoureux qu'avait eu ma sœur en m'expliquant qu'ils se revoyaient depuis un moment. Et cette affreuse douleur que j'avais ressenti en comprenant qu'il trompait l'une avec l'autre. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Comme si ce n'était pas évident... Mais c'était pour moi un moyen de gagner un peu de temps. Je me dirigeais alors vers la fenêtre afin de vérifier que mes parents ne venaient pas de faire demi-tour et que nous serions bel et bien tranquilles.

Mon silence ne représentait pas la fin de notre relation. Non, j’avais tout de même plus de tenue et de considération pour lui. Pour sûr, si je devais le quitter, je comptais bien le lui dire directement et pas disparaitre simplement de la circulation sans lui dire clairement les choses… Mais il était vrai que je n’avais plus donné signe de vie depuis longtemps. Le temps pour moi de réfléchir à toute cette foutue situation et de prendre véritablement une décision. Ainsi, rester éloignée de Vitaly durant ces quelques semaines m’avait permis de faire le point. Et puis, je lui en voulais aussi beaucoup. Bien trop pour répondre à ces appels et messages et faire comme si de rien n’était. Oh non, une chose était certaine, j’avais encore du mal à avaler qu’il soit retourné vers Serena et qu’il l’ait vu dans mon dos. Si je ne supportais pas le fait qu’il m’ait « trompé » avec ma sœur, je supportais encore moins bien le fait qu’il ne m’en ait rien dit. Certes, je l’aurais certainement mal prit mais… Elle demeurait sa femme. Et j’aimais suffisamment Vitaly pour accepter à nouveau cette situation. Même si, évidemment, j’aurais préféré qu’il reste seul. Une fois qu’il fut entré, je lui demandais alors ce qu’il faisait là. Je m’en doutais pourtant très bien. « Tu sais très bien ce que je fais là. » Je n’aimais pas le ton qu’il employait, même si je venais d’en faire de même. C’était plus légitime que moi, je lui en veuille, plutôt que l’inverse, non ? Et puis, dans tous les cas, je n’aimais pas qu’il y ait autant de distance entre nous. Ce n’était pas nous. Et même si j’en voulais à Vitaly, me montrer aussi froide et distante me coutait terriblement. Mais clairement, je ne pouvais pas passer au-dessus de cela et faire comme si tout allait bien.

« Je crois que j'ai quand même besoin à quelques explications, non ? » Si je lui devais des explications quant à mon silence, il m’en devait aussi concernant sa relation avec ma sœur. Je soupirais alors doucement tout en me tournant vers lui. « J’avais besoin de… faire le point. Et d’être seule. » répondis-je d’un ton calme et posé tandis que mon regard se plantait dans le sien. Je du cependant bien vite le détourner, réalisant ô combien il devenait difficile de lui faire des reproches en le fixant de la sorte. Je baissais donc le regard vers mon poignet, fracture, encore maintenu par une attelle. « Je sais tout. Après l’accident, Serena m’a expliqué que vous vous étiez revus. Et pas qu’une fois… » Etait-il au courant de sa grossesse ? Je n’en savais toujours rien. Et, comme je l’avais promis à Serena, je n’allais rien dire à personne. Pas même au principal intéressé. D’autant plus que cette lourde tâche ne me revenait pas le moins du monde. Et tant mieux ! La situation était déjà bien assez difficile. Manquait plus que je me trouve obligée d’annoncer cette heureuse nouvelle à Vit. « Tu n’imagines pas à quel point j’ai pu souffrir en découvrant cela… C’est pour cela que je n’ai pas donné de nouvelles ces derniers temps. J’avais besoin de digérer cela et de réfléchir à nous… » Je m’arrêtais alors là, ne voulant pas tout balancer d’un coup. Puis, c’était déjà bien assez éprouvant pour moi de lui tenir ces propos. Et en sachant très bien que j’allais bientôt lui annoncer que tout était fini. Si toutefois, j’en trouvais le courage…

Nous savions dès le début que cette relation ne signifiait rien de bon. Et qu’elle prendrait fin un jour ou l’autre, certainement en faisant de nombreux dégâts. Et il semblait que nous soyons arrivés au dernier chapitre de l’histoire… Sauf que je n’avais rien vu venir. Tout était allé trop vite. Je n’avais pas eu le temps de voir les choses se dégrader… Au contraire. Alors que j’étais en plein bonheur avec Vitaly, j’avais appris certainement la pire des choses ; qu’il revoyait Serena et qu’elle était enceinte. Et forcément, j’en avais souffert. Alors je n’osais imaginer ce que cela donnerait pour Serena, si elle découvrait notre liaison… Tout cela prenait une tournure bien trop douloureuse et dangereuse. Ainsi, je finis rapidement par expliquer à Vitaly les raisons de mon silence. Sans pour autant lui dire que je voulais mettre fin à notre relation… Chaque chose en son temps. Et puis, ce qui se passait là était déjà suffisamment douloureux. Inutile d’en rajouter une couche dans l’immédiat. Même s’il était évident que j’allais devoir prendre cette décision pour le moins radicale. Clairement, nous ne pouvions continuer ainsi. Cela n’avait pas de sens ! Et, pour le bien de tous, il valait mieux que nous nous séparions… Même si, évidemment, les repas de famille risquaient d’être une véritable torture… « Et ta conclusion, est ... ? » J’ouvrais la bouche pour lui répondre et la refermais aussitôt, ne trouvant pas le courage de lui annoncer si brutalement ma décision. Et j’étais clairement en train de regretter de ne pas avoir trouvé la force de faire cela plus tôt. Avant que les choses n’empirent. Ou, encore mieux, avant que notre liaison ne débute.

« Parce qu'au cas où tu l'aurais oublié, quand on a entamé cette liaison, j'étais déjà marié à ta soeur. Est-ce que tu peux vraiment me reprocher, aujourd'hui, d'être avec elle ? Je ne comptais pas te cacher quoi que ce soit et j'aurais préféré t'en parler avant Serena. Simplement, tu as cessé de répondre à mes appels. Je te l'aurais dis quand au juste ? Je n'ai pas eus le temps pour le faire. » Il ne me facilitait pas la tâche. Au contraire, il semblait me reprocher mon attitude, qui pourtant me semblait légitime… Je me pinçais alors légèrement les lèvres en relevant le regard vers lui pour le fixer. « Oui, tu étais marié à ma sœur lorsque tout a commencé, mais il y a quelques mois, vous vous étiez séparés, non ? Vous étiez même sur le point de divorcer ! Alors n’essaie pas de me faire croire que votre relation actuelle est légitime ! Et puis, ce que je te reproche surtout, c’est de ne m’avoir rien dit, de m’avoir menti… Et ne prends pas le temps comme excuse, Serena m’a dit que ça faisait déjà un moment que… que tout avait repris entre vous… » répondis-je, cette fois ci un peu plus sur les nerfs. A l’entendre, tout était de ma faute ! Et sous prétexte qu’elle avait été sa femme, Serena pouvait revenir tout à fait normalement dans sa vie… « Tu as eu le temps de m’en parler. Tu n’en as simplement pas eu le courage. » repris-je alors d’un ton plus calme. Il ne fallait pas qu’il tente de se foutre de moi. Je le connaissais suffisamment et savais qu’il voyait Serena depuis un bon moment. Le manque de temps qu’il évoquait n’était qu’un prétexte. « Je suppose qu'elle t'a également parlé de sa grossesse ? Que tu l'as su avant moi ? » Je me dirigeais alors vers le salon et prit place sur le canapé, fixant à nouveau Vitaly en acquiesçant doucement. Ca y est. On abordait le point le plus douloureux. « Oui… Elle avait eu les résultats juste avant l’accident et m’en avait donc parlé… » expliquais-je d’une voix plus faible, me montrant cette fois ci plus fragile qu’auparavant. « Et… tu as pris une décision ? Tu comptes t’impliquer et assumer cet enfant ou… ? » Serena m’avait confié ses doutes à ce propos, mais je n’avais pas su, au final, ce qu’il avait été décidé. Et j’avais tout de même envie de savoir ce qu’il en était. Même si, dans tous les cas, ma décision était prise. Et peut-être que cette dernière encouragerait Vitaly à véritablement retourner auprès de ma sœur et assumer son rôle de père. Malgré tout, je n’évoquais pas tout de suite notre séparation, préférant y aller en douceur. Et gagner du temps. Car la simple idée de devoir me séparer de lui me détruisait intérieurement…

Si ma décision me paraissait claire avant qu'il ne débarque, tout devenait désormais plus confus. Et je réalisais à quel point cela pouvait être difficile de renoncer à l'être aimé. Et, le pire de tout, de devoir lui dire que tout était terminé. Surtout que je n'étais franchement pas habituée à faire ça. Et cela m'arrachait le cœur. Car, pour sûr, il en souffrirait autant que moi. Et je ne voulais pas le faire souffrir. Mais je ne pouvais décemment pas laisser les choses ainsi. Toutefois, lorsqu'il me tendit la perche en me demandant quelle était ma conclusion, je fus incapable de la lui formuler. Le simple fait de l'avoir en face de moi, après plus de trois semaines passées loin l'un de l'autre, faisait renaître un tas de sentiments que j'espérais dissous. Malgré tout, je continuais de lui reprocher son silence, persuadée que leur relation n'avait pas reprit la veille de l'accident et que, par conséquent, il m'avait caché la vérité. Et évidemment, j'aurais préféré apprendre tout cela de la bouche de Vitaly et non celle de ma sœur. Mais la pauvre n'avait certainement pas fait cela volontairement, puisqu'elle ne pouvait pas savoir quelle type de relation son mari et moi entretenions. Et, histoire de bien remuer le couteau dans la plaie, je ne pu m'empêcher, agacée au plus haut point par tout cela, d'insinuer qu'il n'avait tout simplement pas eu le courage de me dire clairement les choses et avait donc préféré prétexter un manque de temps, d'occasion pour cela. « Putain Lindsay ! A quoi tu joues ? Est-ce que je t'ai déjà donné, rien qu'une fois, une raison de douter de moi ? D'accord, je suis un enfoiré de première qui trompe sa femme depuis des mois. Mais tu ne crois pas que j'ai déjà bien assez de difficultés, comme ça, à mentir à une femme, sans en plus en arriver à mentir à l'autre ? Ouais, j'ai sérieusement manqué de courage sur ce coup. Mais je ne t'ai pas menti ! Depuis que je me suis remis avec Serena, je ne t'ai pas revu, toi. Alors comment voulais-tu que je te l'apprenne ? Par téléphone, histoire de bien empirer mon statut d'enfoiré de première. Tu m'diras, j'suis certainement plus à ça près, hein ! »

Pour la première fois, je le voyais véritablement hors de lui. Je n'aurais d'ailleurs jamais cru qu'il puisse être ainsi. De surprise, je fis donc un pas en arrière, baissant soudainement le regard, comme une petite fille que l'on réprimande. Pourtant, de nous deux, je n'étais pas censée être celle qui était en tort... Sentant les larmes monter, je continuais alors à détourner le regard, n'ayant pas du tout apprécié la façon dont il venait de me mitrailler du sien et demeurais silencieuse quelques secondes. « Tu... tu me jure qu'on ne s'est pas revus entre temps ? Et que tu comptais m'en parler ? » demandais-je alors, penaude et craignant qu'il explose à nouveau. Puis il fut question de la grossesse de Serena. Et je lui avouais donc que oui, j'avais été au courant avant lui. Avant tout le monde, même, puisque j'étais la première à qui ma sœur l'avait annoncé. Bon, il faut dire qu'elle n'avait pas vraiment eu le choix... Et je remarquais alors que, cette fois-ci, c'était lui qui détournais le regard. Sans doute réalisait-il à quel point cela me faisait souffrir... Je ne pu cependant m'empêcher de lui demander, d'un ton beaucoup plus calme, ce qu'il avait prévu de faire. « Ou quoi, Lindsay ? » Je savais qu'il ne tenait pas à devenir père. C'était bien pour cela que je doutais autant que ma sœur, qu'il puisse accepter de devenir père de cet enfant du jour au lendemain. Surtout dans une telle situation, alors qu'il était partagé entre deux femmes. « Ou continuer ta vie... sans te préoccuper de ce gosse... Ce n'est pas une critique... Je connais parfaitement ton point de vue sur la paternité, c'est pour cela que je me demande ce qu'il en est vraiment... » répondis-je alors doucement, posant mon regard sur lui.

Garder le silence durant ces trois semaines n’avait peut-être pas été la meilleure décision. Mais j’en avais éprouvé le besoin. A vrai dire, j’avais tellement été blessée et déçue par Vitaly que le contacter était au dessus de mes forces. Je n’avais de cesse de me souvenir des paroles de Serena et clairement, cela ne m’encourageait pas à retourner vers Vitaly. Même pour lui faire part de mes découvertes et de mon besoin de temps. Toutefois, après l’avoir véritablement vu hors de lui, je redevenais presque penaude, intimidée par tout cela. « Je comptais vraiment t'en parler Lindsay. Mais j'avais besoin de trouver comment te le dire, avant de te revoir. Mais tu vois ... Ce n'est pas pour autant que j'ai cessé de répondre à tes appels ... » Outch. Ça, ça faisait mal. Et j’avais horreur du ton qu’il prenait. Certes, j’aurais peut-être dû donner des nouvelles…. Mais il ne me semblait pas être à la meilleure place. Non, clairement pas. Après tout, j’avais certainement plus de choses à lui reprocher que lui en avait à me reprocher. « Mais merde, Vit’, mets-toi à ma place ! Comment aurais-tu réagis en apprenant que la personne que tu ai… » Que « tu aimes » ? Oui, c’était ce que j’allais dire. Mais je m’arrêtais juste avant. Après tout, jamais nous n’avions clairement parlé d’amour. Et le faire dans un moment pareil était un peu délicat. « … que la personne qui compte le plus pour toi est allée voir ailleurs ?? Je me sentais trahie, blessée, humiliée, et clairement, la dernière chose que j’avais envie de faire était te contacter… Je t’en voulais bien trop pour ça. Alors ne me fais pas passer pour la méchante ! Ce n’est pas moi qui suis le plus en tort…» Et, parce que je regrettais presque aussitôt d’être aussi dure envers lui, je baissais soudainement le regard, déjà embué. « Je suis désolée… »

Je m’étais clairement emportée et, même si je demeurais persuadée qu’il était le plus fautif, je regrettais d’avoir été aussi dure envers lui. Mais c’était plus fort que moi. Je ne pouvais plus accepter une telle situation. Ainsi, lorsqu’il fut question de la grossesse de Serena, je lui demandais ce qu’il comptait faire. Car je savais très bien que, jusqu’à présent, l’idée d’avoir en enfant ne l’enchantait pas vraiment. « Je ne sais pas. Je ne sais vraiment pas. J'ai tenté de tourner et retourner la situation dans tous les sens ... Et je ne sais pas. Si je suis capable d'être père, si je peux concilier travail et famille ... » Bien… Il semblait donc que le moment était venu pour moi de lui dire ce que j’envisageais. Ou plutôt, ce que je venais de décider. Car, même si cela m’arrachait le cœur, je me devais de mettre un terme à notre liaison. C’était mieux pour tout le monde. Et surtout pour sa future vie de famille. Car, même si cela impliquait que l’on ait à se voir lors des réunions de famille, je n’étais pas bête et savais bien que sa véritable place était auprès de ma sœur. Et de leur enfant. « Toi seul peut décider de cela… » Je pris alors une lente inspiration, détournant une nouvelle fois le regard. « J’ai beaucoup réfléchi ses dernières semaines et… je crois qu’il serait préférable qu’on arrête tout. Je me dis que, peut-être, si je disparais de ta vie, tu auras plus de facilité à retourner véritablement auprès de ma sœur… Et de cet enfant… Puis, je ne voudrais pas qu’il grandisse sans père par ma faute… Les choses deviennent beaucoup trop compliquées pour que l’on puisse continuer ainsi… Je suis sincèrement désolée…. » Voix tremblante, regard fuyant, je me relevais alors subitement et me dirigeais vers la fenêtre où je posais le regard, ne voulant pas lui laisser entrevoir les larmes qui commençaient à perler sur mon visage…

« Est allée voir ailleurs ... ? Mais est-ce que tu t'entends Lindsay ? Est-ce que c'est Serena que je trompe, avec toi, ou toi que je trompe avec Serena qui est, ne l'oublions pas, mon épouse ? » Toute la question était là. Pouvais-je réellement considérer qu’il m’avait « trompé » alors qu’il était simplement retombé dans les bras de sa femme ? En théorie, non. C’était évident. La seule cocue, dans l’histoire, c’était elle. Car de mon côté, j’avais toujours su qu’il était avec elle et n’avait pas spécialement l’intention de la quitter pour moi. Pourtant, j’avais cette foutue sensation de trahison. D’avoir été cocue. Même si je savais qu’il y avait une très grande part de vérité dans ses propos. Ainsi je baissais légèrement le regard, partagée entre ce qu’il venait de dire, et ce que je ressentais vraiment. « Bien sûr, c’était et c’est toujours ta femme… Femme de laquelle tu étais, il y a encore quelques semaines, séparé. Vous ne viviez même plus ensemble… Alors… j’me suis peut-être emballé, mais j’ai pensé que c’était définitif… Et que, du coup, je devenais la seule femme dans ta vie… » Et par conséquent, qu’il retourne avec ma sœur m’avait horriblement blessé. Si, encore, il ne s’était pas séparé de ma sœur, je ne me serais jamais fait d’illusions… Alors que là, j’avais véritablement cru que j’étais désormais la seule femme qui comptait pour lui. Parce que, même si je ne pouvais pas me réjouir de leur séparation, je devais bien avouer que cela m’arrangeait en un sens…

Après tout, si Serena disparaissait de sa vie, cela nous laissait plus libre. Et puis, partager son homme n’avait rien de très plaisant. Ainsi, sa séparation avec Serena nous arrangeait franchement. Et même si cela ne nous permettait pas d’assumer publiquement notre liaison, nous pouvions désormais nous voir plus facilement. Et je préférais largement savoir qu’il n’y avait désormais plus que moi. C’était peut être con et puéril, mais cette sensation d’exclusivité, d’être la seule femme dans sa vie, me rendait foutrement heureuse. Alors, pour sûr, en apprenant que ce n’était plus le cas et que nous revenions à la case départ, j’avais été fortement déçue. Blessée, même. Mais le pire était certainement la grossesse de Serena. C’était la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase. Et surtout, l’élément de déclic pour moi. Je me sentais déjà bien assez monstrueuse d’entretenir cette liaison avec le mari de ma sœur. Mais si, en plus, ils avaient un enfant… Je ne pouvais pas me permettre de continuer de la sorte. Je pris donc mon courage à deux mains pour lui dire tout cela. Et pourtant, ce n’était pas chose simple. Au contraire, cela me coutait énormément. Tout simplement car j’aimais Vitaly et que je n’avais absolument pas envie que l’on se sépare. Et malgré les reproches faits auparavant, je le laissais bien vite me prendre dans ses bras. Où je fondais aussitôt en larmes. J’étais tellement bien, là, tout contre lui. Et la simple pensée que c’était certainement la dernière fois que je me trouvais ainsi, me faisait affreusement souffrir. « C'est moi qui suis désolé. Désolé de n'avoir pas été capable d'arrêter tout ça quand il était encore temps. Pas désolé d'éprouver ce que j'éprouve pour toi. Mais désolé d'avoir été si faible, dès le départ ... » Il n’était pas seul responsable de la situation. Les torts étaient partagés. « Tu n’es pas responsable de tout ça… Moi aussi, j’ai été faible… On est tous les deux responsables de cette situation… Et puis, on a quand même eu de très bons moments ensemble… Je crois que je ne regrette rien.. si ce n’est de devoir tout arrêter maintenant…» dis-je en me blottissant davantage contre lui.

Bien sûr, j’en voulais à Vitaly. Et si j’étais en colère contre lui, c’était simplement car j’étais déçue et attristée par tout cela. Et puis, ses réactions ne m’aidaient pas à prendre les choses calmement. Et, en même temps, il était vraiment difficile pour moi de lui en vouloir véritablement. Lui faire des reproches était vraiment compliqué dans la mesure où je n’étais pas habituée à cela et que je l’aimais toujours autant. Je n’avais pas envie de le faire souffrir ou de créer de quelconques tensions entre nous. Mais j’avais toujours en travers de la gorge le fait qu’il revoit ma sœur… Je me calmais finalement et lui expliquais alors pourquoi j’avais l’impression qu’il m’avait trompé. Ce n’était peut-être pas totalement le cas… voire pas du tout. Mais j’avais ressenti les choses ainsi. « On venait tout juste de se séparer. Tu n'aurais pas du te mettre Martel en tête. Et ce n'est pas comme si ça avait toujours été simple entre Serena et moi. » Ma naïveté m’avait, sans doute, encore une fois piégé. Car, évidemment, à peine étaient-il séparés que je voyais cela comme quelque chose de définitif. Faisant ainsi de moi la seule femme dans la vie de Vitaly. J’y étais allée peut-être un peu vite. Pour sûr, mes conclusions étaient hâtives… mais…imaginer être la seule à compter pour lui était tellement plaisant et puissant que je m’étais rapidement confortée là dedans. Et j’avais sans doute préféré fermer les yeux sur le fait que son couple avec ma sœur ne soit pas encore totalement dissout. « Je sais bien mais… vu comme c’était parti, j’ai cru que c’était définitif… » répondis-je doucement, presque gênée de cette confusion. Toutefois, je ne pu retenir ma curiosité plus longtemps. « Mais.. Quand avez-vous vraiment commencé à vous revoir ? Et comment tout a repris entre vous ? » demandais-je alors, craignant malgré tout la réponse. J’avais pourtant vraiment envie de tout savoir. De tout comprendre…

Et, dans le même temps, je savais que le moment fatidique se rapprochait. Les reproches étaient passés et la discussion tournait désormais autour de la grossesse de Serena. Et des conséquences pour nous. D’ailleurs, je ne tardais pas à l’informer de ma décision. Nous devions nous séparer. Les choses devenaient bien trop importantes et impliquaient bien trop de personnes pour que nous puissions continuer ainsi. Puis, depuis le début, nous savions que ce jour devait arriver… Et il était temps de se montrer raisonnable. Pourtant, c’était vraiment difficile. Très difficile. Ainsi, je ne pu retenir quelques larmes tandis qu’il me serrait dans ses bras, entreprenant même de me bercer doucement. Le simple idée qu’il s’agissait certainement de la dernière fois où nous nous comportions de la sorte, me faisait atrocement mal. « Je savais que ce moment finirait par arriver ... Mais j'ignorais que ça ferait autant de mal. » Comme si je ne souffrais pas assez de la situation, j’apprenais ainsi qu’il souffrait tout autant que moi. Et que c’était MA décision qui le faisait souffrir. C’était d’ailleurs une bien horrible pensée qui retournait le couteau dans la plaie. Mais nous ne pouvions pas revenir en arrière… Enfin si, nous le pouvions. Mais le plus dur était fait. Cela ne serait désormais qu’une question de temps afin que la douleur s’apaise, d’un côté comme de l’autre. Une fois calmée, je me retirais doucement de ses bras et reculais légèrement le visage afin de planter mon regard dans le sien. Et d’une main, je vins délicatement redessiner ses traits, m’attardant tout particulièrement sur ses lèvres. Dont je finis par m’emparer, avec une douceur incroyable, pour un lent baiser. Le dernier. Sans doute. Alors, pour sûr, je voulais le faire durer au maximum… En profiter autant que possible puisqu’il n’y en aurait certainement pas d’autres…

Vitaly trompait sa femme avec moi, c’était un fait indéniable. Et, moi-même, jamais je n’aurais cru qu’un jour, je reprocherais à Vitaly de me tromper. C’était même l’hôpital qui se foutait de la charité. Cela ne tenait pas la route… La seule qui était véritablement cocue, c’était Serena. Pas moi. C’était évident et je le savais parfaitement. Sauf que je m’étais fait avoir. Je m’étais laissé avoir par mes sentiments et par cette volonté d’être la seule pour Vitaly. Car, pour sûr, si au début, l’idée de le partager avec ma sœur m’était acceptable, j’avais de plus en plus de mal à m’y faire. Peut-être parce qu’au début, c’était simplement de l’attirance. Et que plus les sentiments avaient prit place, plus j’avais eu envie d’avoir Vitaly pour moi-seule. N’était-ce pas normal ? Je l’aimais et la simple idée qu’il puisse avoir une autre femme dans sa vie me faisait souffrir, même si je savais dès le début dans quoi je me lançais. Alors oui, en un sens, je m’étais réjouie de sa séparation avec ma sœur. Et apprendre qu’ils étaient finalement de nouveaux ensemble m’avait foutu un sacré coup au moral. Surtout que j’avais véritablement cru que tout était bel et bien terminé entre eux… « Je suis désolé Lindsay ... Je dois reconnaître que je le pensais aussi ... » Si, pendant un long moment, je lui en avais voulu, cette amertume s’était désormais atténué. Le simple regard qu’il affichait à ce moment là le rendait tellement attendrissant et adorable qu’il était impossible de lui en vouloir plus longtemps. Et puis, il m’avait bien fait comprendre que je n’avais rien à lui reprocher… Ou du moins, pas autant que ce que je pensais à la base… Toutefois, je ne pu m’empêcher de le questionner sur sa relation avec Serena. Je voulais tout savoir. Même si, forcément, cela risquait de me faire souffrir… « On devait parler de la publication de mon bouquin. On aurait du se retrouver à la maison d'édition, mais ils ont eut quelques soucis de plomberie. Et comme ça urgeait, on a fait ça chez elle... »

J’acquiesçais alors vaguement, repensant aux paroles de ma sœur, qui allaient dans ce même sens…  Et j’appréciais même qu’il s’abstienne de rentrer davantage dans les détails. Car pas besoin d’être devin pour deviner quelle tournure la soirée avait finalement prit. « Mmmh, d’accord… Merci.. pour ton honnêteté. » Je gardais cependant pour moi d’autres questions, comme par exemple s’il l’aimait toujours, s’il m’aimait également, plus qu’elle ou pas… Mais je n’étais pas certaine de vouloir entendre sa réponse. Surtout tandis que je m’apprêtais à le quitter. Ne rendons pas les choses plus difficiles… Elles l’étaient déjà suffisamment ! Et, lorsqu’il me prit finalement dans ses bras, je ne pu résister bien longtemps avant de venir, lentement, parcourir son visage du bout des doigts avant de m’emparer doucement de ses lèvres. Ce n’était peut-être pas très raisonnable mais je ne pouvais vraiment pas m’en empêcher. Surtout lorsque je songeais que c’était sans doute la dernière fois que nous nous retrouvions de la sorte, qu’il me prenait dans ses bras et que nos lèvres entraient en contact… D’ailleurs, il ne manqua pas de glisser une main derrière ma tête afin d’approfondir ce baiser. Sans doute le dernier. Non… Cette pensée faisait affreusement mal. Mais il fallait bien que je m’y fasse. Je prenais d’ailleurs fortement sur moi pour ne pas me blottir à nouveau dans ses bras en le suppliant de ne pas me laisser. Mais soit. J’avais décidé qu’il était mieux pour nous d’arrêter là et même Vitaly semblait trouver cette décision raisonnable. C’était juste…. Affreusement difficile. Je le laissais ainsi prolonger le baiser, laissant même ma langue se mêler à la partie avec tendresse tandis que, presque machinalement, je laissais l’une de mes mains glisser sur son torse. J’avais véritablement envie de lui… Une dernière fois ? C’était hautement tentant mais je savais très bien que je serais incapable de me dire que c’était la dernière fois. Chaque « dernière fois » en appellerait une autre… Et nous repartirions dans un cercle vicieux. Je mis alors doucement fin à notre baiser et reculais à peine mon visage du sien, baissant bien vite le regard. Le sien me faisait encore beaucoup trop d’effet pour que je sois capable de le soutenir maintenant…

Bien sûr, j'avais envie de savoir exactement ce qu'il s'était passé avec ma sœur. Je voulais comprendre. Et effacer ce sentiment de trahison. Et en même temps, il semblait évident que s'il me disait réellement tout, j'allais souffrir. Et j'en étais plus que consciente. C'était donc à double tranchants. Je voulais la vérité mais redoutait déjà sa réponse. Pour sûr, elle n'allait pas être très plaisante. Heureusement, il eut la délicatesse de taire certains détails. Sans doute les plus douloureux. Mais malgré tout, je les devinais. Cela semblait si évident... Et le pire restait à venir. Cela risquait d’être fortement difficile et douloureux, s’il se remettait véritablement avec ma sœur, de les voir ensemble, les côtoyer comme si de rien n’était. Et même s’il semblait que nous étions plutôt de bons comédiens, je doutais de ma capacité à ne rien laisser paraître en les voyant roucouler de bonheur. Mais soit. Il le faudrait bien… Et j’allais faire de mon mieux pour que Serena ne se doute de rien. Après tout, ça serait sacrément con qu’elle découvre tout maintenant que nous étions quasiment séparés… D’ailleurs, je finis par prendre sur moi pour lui dire ce que je pensais réellement. Du moins, que nous devions arrêter là. Nous avions fait beaucoup trop de mal et risquions d’en faire vraiment plus en continuant. Il était donc temps d’agir raisonnablement. Et même si c’était ce que j’avais l’habitude de faire, cela n’était franchement pas simple cette fois-ci. Car même si, contrairement à lui, j’avais vraiment eu le temps de me préparer à cela – puisque la décision venait de moi – cela me faisait souffrir. Je n’avais de cesse de repenser à tous les moments que nous avions pu passer ensemble. Tous aussi merveilleux les uns que les autres… Et voilà que tout s’achevait…

La fin d’une histoire, le début d’une autre ? Peut-être pour lui s’il acceptait de devenir père… Oh oui, il pouvait très bien changer de vie et devenant un époux et père exemplaire. Mais moi… et bien, j’allais tout simplement reprendre ma petite vie tranquille… Et je devais bien l’avouer, je m’étais habituée à cette liaison si forte et palpitante. C’était même assez plaisant d’être un couple interdit dans le sens où il y avait toujours cette excitation. Et des retrouvailles souvent torrides… Je ne pu cependant résister à l’envie de l’embrasser. Une dernière fois. Toute dernière fois… Arf. Je n’arrivais vraiment pas à me faire à cette idée. Si bien que toutes les occasions étaient bonnes pour prolonger ce moment. Je l’aimais… Et je n’avais pas envie de le laisser partir. Même si je n’avais pas d’autres choix… J’avais pris cette décision pour le bien de tous et elle me semblait vraiment être une bonne décision. Juste affreusement douloureuse… Et lorsque notre baiser prit fin, je fermais les yeux au contact de ses doigts sur ma peau. Il rendait les choses vraiment difficiles. Parce que j’avais de moins en moins envie de me retrouver sans lui. Et j’appréhendais tellement ce moment où il franchirait, sans doute pour la dernière fois, la porte. « Je vais y aller. D'accord ? » Non ! Non !! Pas maintenant… J’avais encore besoin de lui. Et ne voyais pas ma vie sans lui. Bon sang ! Je n’aurais jamais cru qu’il serait si difficile de me séparer de lui… Et pourtant, il le fallait. Surtout que lui-même semblait avoir bien du mal à se détacher de moi, vu les baisers qu’il continuait de déposer sur mon front. « Si tu veux… C’est peut-être mieux… » murmurais-je alors en levant doucement le regard vers lui avant de reculer légèrement. Juste pour nous éviter de craquer une nouvelle fois. Car à cette allure, nous en serions encore là le lendemain ! « Tu vas me manquer… » Mouais. Ce n’était peut-être pas une très bonne idée de lui dire ça maintenant… Mais je ne faisait que lui dire la vérité et il devait bien s’en douter…