Daniel regardait la jeune femme parler avec attrait. Il avalait de nombreuses bouchées de pâtes et trouvait même qu'il mangeait trop souvent. Les phrases sortant de la bouche de l'aveugle découlaient avec grâce, et il trouvait la situation rigolote. Finir par se confier à une inconnue, qui en plus lui avait donné l'envie de vomir plusieurs fois était bien des plus innatendu. Deux jeunes gens que tout oppose, deux jeunes gens qui ne ressemblent apparemment pas. Après tout peut-être que son père avait raison quand il insistait sur le fait de faire connaissance avec les personnes de son entourage pour lesquelles il n'avait aucun intérêt. Parfois il avait l'impression de redécouvrir la société l'entourant, et de devoir encore se voir recevoir quelques conseils sur les règles de vie indispensable pour survivre dans ce monde de tarés. Il s'étouffa d'une pâte en rigolant :
« Bordel j'adore pleurer dans ma Porsche, mais tu sais quoi? Le résonnement de mes sanglots est beaucoup plus mélodieux quand je le fais dans ma Ferrari. » Il savoura fièrement sa victoire avec cette blague tout droit sortie de l'imagination d'un gosse de riche, et s'apprêta à répondre à la tirade de son interlocutrice.
« Je ne sais pas ce qui fait que je sois moins stressé, peut-être le fait que j'avais faim. Mais tu verrais ces requins, toujours prêt à te sauter dessus pour la moindre petite miette que tu laisserais derrière toi. C'est quelque chose bien difficile que devoir réfléchir à chacun de ses gestes et mouvements. Je dois même contrôler mon rire ridicule, et mon temps de parole. » Il s'étira doucement, se rendant compte qu'il n'avait toujours pas prit le temps de boutonner sa chemise, et malgré le fait que Myrcella ne puisse pas le voir il le trouva impoli. C'est pourquoi il entreprit de se rhabiller plus convenablement tout en parlant :
« Au fond, je suis un peu handicapé aussi. Je n'ai pas la liberté totale de mes mouvements, je suis contrôlé par des nécessités qui ne sont pas vraiment positives. Non, bien que j'adore mon jacuzzi et mon lit à eau j'adorerais aussi me rouler par terre au milieu d'un bar sans avoir des répercussions. » Daniel se disait même que si parfois il avait des réactions perdues, tel un enfant, c'était parce qu'il n'avait jamais vraiment été lâché en dehors de son enclos parental. C'était bien triste que d'être dépendant de quelqu'un et de quelque chose, mais c'était un mode de vie à part.

« Mais tu vois, j'en viens à devoir épouser la première venue pour la sauver de quelconques problèmes financiers. C'est bien évident que ma réaction soit négative, et que mon comportement soit détestable. Je ne l'imagine pas autrement.» Il n'était pas redevenu méchant, juste lucide et d'une certaine façon il cherchait à justifier ses réactions malsaines et désagréables.

Sa boutade fit écho dans l’esprit de Myrcella car elle n’hésita pas à en rire de bon cœur. L’un comme l’autre se trouvaient nettement plus détendus qu’au départ, ce qui n’était pas peu dire. Finalement, la jeune femme était bien loin de le trouver désagréable, surtout lorsqu’il faisait preuve de sincérité et mettait de côté son arrogance habituelle, bien loin d’être naturelle. Sans même s’en rendre vraiment compte, elle lui accordait une attention toute particulière, s’imprégnait du moindre de ses mots et ponctuait ses discours de petits sourires délicats et rassurants. Elle ne le blâmait pas, au final. Il avait grandit dans un monde difficile, qu’elle ne connaissait pas et qu’elle était bien loin de vouloir côtoyer. Daniel avait les épaules solides pour ne pas s’être fait broyer par ces requins sans scrupules, justement, et elle finissait par en prendre conscience. Mieux vaut tard que jamais. « Tu manques peut-être simplement de pratique… en matière de liberté. » Myrcella aurait pu lui prouver ce que ce mot voulait dire, mais elle garda cette idée dans un coin de son esprit pour l’instant. Il était inutile de brûler les étapes, pas alors qu’ils avaient été capables de se jeter les pires horreurs à la figure par le passé. « Je ne nie pas que tu es narcissique et plus arrogant que je ne pourrais le dire… mais ce n’est qu’une façade. Tu veux simplement appartenir à ce fameux monde de requins que tu décris. Et pour cela, la gentillesse, l’altruisme n’ont aucunement leur place j’imagine. Je ne peux pas dire que je comprends… mais commence à comprendre pourquoi tu es aussi odieux, sans forcément cautionner la chose. Et… je ne t’aurais jamais épousé. D’une parce que je considère que tu as le droit, toi aussi, d’épouser la personne que tu souhaites, et de deux parce que j’estime pouvoir choisir moi aussi, même si je parais inutile dans ce monde de voyants. C’est ma seule fierté. » Elle tenait à sa liberté et s’y accrochait comme à une bouée de sauvetage, mais mettait en avant le fait qu’elle n’avait pas pensé qu’à elle en refusant ce mariage. Contrairement à ce que l’on pensait, l’égoïsme ne faisait pas partie intégrante de son caractère et ce n’était pas près de changer. « M’accorderais-tu une heure pour te sortir de ton marasme ? Juste une. Et après, tu retourneras à ta fameuse Ferrari qui répercute si mélodieusement l’écho de tes sanglots. » Léger sourire. Mais en attendant, elle fut en mesure de l’inciter à la suivre dans un taxi, le plus discrètement du monde, après avoir terminé de se délecter des pâtes qu’il avait préparées pour eux.

En l’espace de vingt petites minutes, le taxi s’arrêta à l’endroit qu’elle lui avait indiqué, et où elle était venue totalement par hasard. Myrcella avait beau ne pas pouvoir s’émerveiller des réalités de son monde, son imagination surpassait de très loin tout ceci. Elle n’hésita pas à ôter ses chaussures pour se délecter du contact de l’herbe fraiche et douce sous ses pieds, incitant Daniel à la suivre pour se délecter d’un coucher de sommeil sur une étendue d’eau qui n’était autre qu’un lac. Une petite berge leur offrait une vue absolument imprenable et elle eut même l’audace de lui prendre sa main pour ne pas le perdre malgré la luminosité encore présente. « Oublie cinq minutes qui tu es. Ferme les yeux et rouvre-les pour accueillir ce spectacle qui doit être absolument inoubliable. C’est ça, la vraie liberté. Avoir la possibilité de plonger ses pieds sous de petits cailloux, avoir même l’audace de se baigner malgré l’eau frisquette… faire tomber les barrières, ne plus être un fils de mais simplement un homme normal. » Juste pendant cette petite heure, il fallait qu’il oublie son nom de famille et se contente d’être Daniel, jusqu’à ce qu’elle ne le raccompagne à l’appartement de Diego, ne lui rende sa chemise et ne le laisse simplement partir. « Ici, tu peux te rouler à terre si tu veux, il n’y a aucun spectateur pour répéter le haut scandale que cela pourrait représenter ! »

Il suivait la jeune aveugle comme si les rôles avaient étés inversés. Cette fois ci c'était à lui de se laisser guider, et Myrcella représentait la vue. C'est tout comme s'il avait rejoint une autre dimension, étant bercé par les clapotis de l'eau et les reflets d'une lumière nocturne. L'ambiance était favorable à la méditation et à la détente, rien à voir avec celle que l'on trouvait dans les soirées mondaines. Daniel respirait l'air frais, celui qu'il avait rarement l'occasion de sentir... Sauf quand il se rendait dans les succursales de son entreprise dans le Wyoming, mais bref.
Le garçon laissait sa main dans celle de la tête blanche, étant incapable de concevoir que quelques heures plus tôt ils n'étaient même pas capable d'avoir une conversation civilisée sans ce jeter des piques. C'était impressionnant de constater l'évolution de leur relation en une soirée. A croire qu'il aurait fallu aller tout de suite plus profondément que les apparences directement, au lieu de se laisser berner par des préjugés.
C'est dingue, on dirait les paysages des cartes postales que je fais envoyer par mon assistant quand je suis en déplacement professionnel.
Il constatait la superficialité de son environnement quotidien, et voyait à quel point un retour aux sources pouvait être bénéfique. Ses souvenirs lui rappelaient sa maison de campagne, celle où il allait quand il était enfant. A cette époque là les soucis et responsabilités étaient moindres. Ce temps là était révolu mais laissait des cicatrices nostalgiques dans le coeur du businessman.
Allons-y, puisque je peux redevenir un gamin je vais m'en donner en coeur joie.
Daniel enleva ses chaussures comme l'avait conseiller plus tôt la jeune femme. Il retira sa veste et se lança brusquement sur le sol humide de la soirée. Jubilant de son immaturité il roula au sol, tâchant sûrement de façon irrévocable le reste de ses vêtements.
Tu devrais suivre tes conseils! Ils sont pas si mal que ça finalement!
Sans attendre un mot de l'aveugle il se releva pour la rejoindre, lui attrapa la main et l'entraîna dans ses roulades enfantines. Peu importe que leurs vêtements ne soient plus montrables, cette minute était adressée à une sorte de folie particulière. Qui laissait inévitablement la raison de côté.
Son rire fendait l'air, et son sourire était visible à des kilomètres à la ronde. Ils finirent leur chute allongés sur le dos, une vue prenante sur les étoiles que le jeune homme aurait aimé pouvoir lui décrire. C'était triste de louper un tel spectacle.

Tu as raison. Je ne laisserais personne faire des choix à ma place, j'ai déjà bien assez subit de ce côté là. Ce mariage serait une façon de prouver à mon père que je peux bien trouver un parti me convenant, et que je n'ai en aucun cas besoin de son aide et de ses jugements.
Daniel ne tenait pas à la vexer, il n'y avait même pas raison de. Mais il réalisait que même ce mariage montrait sa soumission face à sa figure paternelle. Pas question de s'y cotonner. Il tourna sa tête pour mieux voir celle de Myrcella, qui semblait plongée dans un voyage rêveur.
Je ne suis pas obligé de parler si tu ne m'écoutes pas!
Daniel Carter était reposé, et distant de toute carapace émotionnelle.

Myrcella tentait d’imaginer la voute étoilée à sa manière, yeux parfaitement ouverts, mais cela ne voulait pas dire qu’elle n’écoutait pas Daniel. Bien au contraire, elle ne perdait pas une miette de ce qu’il disait, comme toujours lorsque l’on s’adressait à elle. Il s’agissait là d’une formidable façon de faire deux choses en même temps… laisser son esprit vagabonder vers des rêves plus cléments et lumineux que jamais, tandis qu’une petite partie de celui-ci enregistrait admirablement toutes les informations qu’on pouvait bien lui transmettre. « Mais je t’écoute. Je sais simplement faire deux choses en même temps ! » Myrcella se sentait apaisée, comblée de cette paix qu’elle ne savait trouver qu’ici, bien en dehors de la vie et de tout l’empressement qui y régnait. Ici, aucun risque que ses oreilles ne soient polluées par un quelconque brouhaha car le silence était aussi pur qu’un champ de blé. Elle aurait volontiers pu y rester des heures, et sans doute allait-elle se risquer à passer la nuit là : il suffirait que Daniel appelle un taxi dès qu’il en ressentirait le besoin, laissant derrière lui la seule personne à avoir compris la chose qu’il lui fallait… un peu de paix, de tranquillité, la sensation profonde d’être à nouveau libre, si toutefois il l’avait été un jour. « Je te pense suffisamment intelligent pour prendre le temps qu’il faut pour choisir une femme qui saura parfaitement survivre à tes côtés. Je n’en n’ai même jamais douté. Ce qu’il te faut c’est juste… arrêter de feindre. Cesser d’être dans l’ombre d’un grand homme et prouver, à ta façon, en le criant au monde entier s’il le faut, que toi aussi tu sais être un grand homme. N’as-tu jamais rien accompli d’extraordinaire qui puisse être clamé ? A vrai dire, je peux même répondre pour toi : tu as enfin ôté ton masque et accepter de profiter d’une liberté bien méritée, sans que ton père ne soit au courant ou n’aie eu son mot à dire… beau progrès, je suis fière de toi. » Myrcella laissa un sourire mystérieux prendre bientôt place contre ses lèvres : bien loin d’être vexée par les propos de Daniel, elle les approuvait. Il lui fallait juste ouvrir les yeux et se rendre compte de la vraie valeur des gens. « Mais tu as encore un long chemin à parcourir… car je doute que tu sois capable de séparer les femmes qui en valent la peine de celles qui sont avant tout attirées par ton pécule conséquent. »

La jeune femme se releva légèrement, désormais assise entre les cailloux, la terre et l’herbe, plongeant sa main dans l’eau qui était très proche d’eux pour lui balancer quelques gouttes d’eau sur le visage, comme pour le réveiller et lui faire comprendre qu’il avait tout pour mener une belle vie, une existence dont il serait fier et qui ne pourrait que rendre son père fier de lui à son tour. Il devait simplement oublier une chose… « Arrête d’être juste un Carter. Soit Daniel. Celui qui est capable de se vautrer dans la terre avec classe ! » Et pour le coup, c’est une bonne flaque qu’elle lui balança en pleine tête avant de se relever complètement, avec souplesse, et de mettre ses pieds dans l’eau. Cette sensation était divine. Décidément, Daniel devait comprendre qu’elle n’était pas aisée à tromper, bien qu’elle soit aveugle et considérée comme diminuée par tous… très difficile à tromper même, et c’est bien que ce Carter père avait su remarquer dès le départ.

Les propos étaient toujours enchaînés d'un moment de rigolade, comme pour couvrir le sérieux de leur conversation et faire en sorte de rester dans une recherche perpétuelle de l'autre. Daniel savait bien sûr s'ouvrir aux gens, il n'avait pas de mal à le faire. Son autre facette n'était qu'un autre lui public, qui n'avait rien à voir avec son fond. Et il le voyait de la même façon chez Myrcella, elle se couvrait de phrases littéraires et de mots mais tout est plus simple derrière. Les formules de politesse peuvent tout aussi bien être un masque que l'arrogance. Par contre, patauger dans des flaques presque boueuses n'avait rien de discret. Une vraie scène tirée d'un film, deux adultes totalement bien dans leurs chaussures qui s'amusaient des plaisirs de la vie les plus simples. Des fois il fallait laisser aller la raison, se concentrer sur les petites choses qui changent l'humeur, et là, Daniel ne ressentait rien qu'une éclosion de sentiments. Comme s'il se livrait, sous un ciel étoilé en compagnie d'une personne tout autant exposé aux problèmes qu'il l'était.
« Je suis dégueulasse! »
S'exclama l'américain alors qu'il constatait avec un futile effroi que ses vêtements étaient définitivement des plus sales. Déjà que la tête blanche avait lancé une machine seulement pour sa chemise de soie, il faudrait remédier à nettoyer tout le reste. Devrait-il rentrer avec elle ensuite? Finalement Carter commença à se poser quelques questions quant à l'avenir de cette soirée. Elle avait effectivement mal commencée, mais continuait dans un bon sens des plus bon sens! Comment devrait-elle se conclure? Comment devrait-il rentrer et quel serait les conséquence de cet échange bien particulier?
Ce n'était une fois de plus pas très visible chez lui, mais il avait aussi tête, de mathématicien certes, plus que de littéraire, mais réfléchir et se poser trop de questions faisait partie de son quotidien.

« Je suis Daniel, juste Daniel là maintenant. Et tu pourras retenir que le vrai moi adore se rouler dans la boue comme un porc. Plutôt bon souvenir, hein? »
Il regarda sa montre rapidement pour avoir une idée de l'heure, et resta assez lucide quant à la finalité de la soirée. Il commençait à se faire quelque peu tard, et il ne fallait pas oublier de rentrer et d’entamer une nouvelle journée professionnelle dès demain. L'avenir ne se précisait pas d'un point de vue social, mais au moins, au niveau de son travail le garçon n'avait aucune question à se poser : à l'aube il serait dans un immense bureau à travailler sur la gestion d'une entreprise immense. Et la nuit passé à rire près d'un lac sous les étoiles en compagnie d'une aveugle qu'il avait méprisé auparavant ne serait plus d'actualité.
« Tictactictac l'heure passe mais il faudrait penser à en finir. Je passerais bien prendre un truc à boire en rentrant, je prend ma chemise et on se dit au revoir.»
Il n'y avait rien de vraiment froid dans sa phrase, seulement un comportement de directeur qui revenait au galop. Il avait le sens de l'organisation et c'était quelque peu laissé dépassé par les évènements.

Une chose d’importance à connaître sur Myrcella : elle n’était que difficilement vexée. Encore fallait-il la connaître sur le bout des doigts pour savoir ce qui pourrait l’enchanter, la rendre timide, en colère ou bien encore muette comme une carpe. Il s’agissait d’informations que ce bon Daniel n’avait évidemment pas en sa possession, pas plus que l’inverse n’était vraie dans le cas de la jolie demoiselle aux cheveux d’argent. Mais elle s’amusait de cet état de fait. La soirée continuait de façon beaucoup plus douce, et contre toute attente, Daniel semblait décidé à y mettre un terme. Elle ne pouvait pas aller contre, pas alors qu’elle avait mis un point d’honneur à ne surtout pas interférer de quelque manière que ce soit dans l’existence de ce businessman dont elle ne partagerait jamais le monde spécial et cruel. « Libre à toi d’appeler un taxi » énonça-t-elle tout en ponctuant ses paroles d’un sourire léger et sincère. Elle sortit même les pieds de l’eau, constatant avec horreur que les vêtements prêtés un peu plus tôt par la barmaid Lizzie étaient tout aussi immondes que devaient l’être ceux de Daniel… diantre, ils n’étaient pas beaux à voir ! Mais qu’importe, au moins, pendant l’espace de quelques minutes, ils étaient parvenu au miracle de se comprendre, ce qui n’était pas rien. « Dans le loft où je vis ce ne sont pas les alcools qui manquent, je pense que tu devrais pouvoir trouver de quoi te rincer le gosier comme il se doit. Je pense que ta chemise devrait être propre désormais. » Myrcella fut la première à se saisir du téléphone portable offert par Diego pour appeler un taxi, à vrai dire. Il était évident que Daniel était pressée et bien loin de vouloir aller contre sa volonté, elle lui offrit même le luxe d’un voyage de retour dans le silence le plus complet, tandis qu’elle se berçait de doux rêves en imaginant la magnificence offerte par le ciel étoilé de ce soir. Lorsqu’ils furent dans l’ascenseur, ce silence perdura, mais cette fois-ci, il n’était aucunement gênant. Myrcella se concentrait davantage sur sa respiration afin de conserver des battements de cœur réguliers et non pas chaotiques comme cela avait pu être le cas lors de la soirée de gala. Finalement, ce n’est qu’une fois de retour à l’intérieur du loft qu’elle brisa ce silence délicat dans lequel ils avaient baigné pendant de longues minutes…

« Le bar est par là, tu peux te servir comme bon te semble, je vais m’assurer que ta chemise est propre. Je reviens sous peu. » A nouveau, Myrcella se protégeait à l’aide de ses grandes phrases littéraires, replaçant soigneusement une distance régulière entre eux afin qu’aucune gêne ne puisse être ressentie. Mais c’est en moins de temps qu’il n’en fallut pour le dire qu’elle revint dans le salon, toujours pieds nus, la chemise de Daniel très soigneusement pliée entre ses doigts. « Voilà… »

Daniel avait suivit la jeune fille sans un bruit. Tellement que l'atmosphère n'était pas gênante mais légèrement trop silencieuse. Il n'avait pas vraiment parlé d'alcool quand il avait prononcé le mot "boire" mais qu'elle le prenne comme ça n'était pas si mal. Il s'était plutôt imaginé aller acheter un café dans un coffeshop encore ouvert, histoire de se réchauffer de cette température pré-hivernale. Mais être dans le loft était chaleureux aussi, et bizarrement, il ne possédait pas encore l'envie de rentrer. C'est pourquoi il envoya un simple message à son chauffeur, lui demandant de venir de quelques temps, ce qui lui laisserait le temps... Le temps de quoi? Le temps de converser encore avec cette fille qu'il avait méprisé plus que quiconque? Finalement la tête blanche lui rendit sa chemise qu'il enfila sans attendre.
« Elle est encore humide mais je peux te dire qu'elle est presque redevenue comme neuve, merci.» Son ton était devenu doux, comme si il rassurait Myrcella en lui disant qu'elle avait fait du bon boulot. Les remerciements n'étaient pas la spécialité de l'américain, mais il donnait tout ce qu'il avait.
« Ecoute, je ne vais pas tarder et t'embêter plus longtemps. » Il prit une longue inspiration, comme s'il s'apprêtait à faire un annoncement important. « Je voulais... Je voulais te présenter des excuses. Et ne rigole pas car j'en serais vexé! J'ai réagis de façon incontrôlée, mais toute cette histoire de mariage m'est montée à la tête. J'avais bien d'autres choses en tête que de m'intéresser à qui pourrait être ma future femme. D'un autre côté ça m'horripilait de ne même pas pouvoir choisir celle que j'aime. Enfin bon, j'ai mal agit, et j'ai pu être méchant, ce qui n'est pas, comme tu as pu le voir, ma véritable nature. » Il parlait de façon saccadée, reprenant son souffle asses souvent et cherchant ses mots. C'était un vrai discours improvisé qu'il faisait là.
« Je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, mais je voulais que tu saches que cette soirée m'a éclairée les yeux. Je vois bien que tu n'es pas celle que je pensais que tu étais, et plus que ça... Tu es quelqu'un de bien, et je comprends aussi pourquoi mon père a voulu que je t'épouse. »
Prit par un sentiment qu'il ne pouvait pas discerner il s'approcha de la jeune tête blanche. Respirant plus doucement il ne savait pas comment contrôler ses émotions. Un vrai problème chez le fils Carter.
Finalement Daniel se faufila le plus près d'elle et laissa sa tête s'avancer vers celle de l'aveugle. Ses lèvres presque tremblantes était à deux doigts d'embrasser doucement la petite tête blanche alors qu'il avait déjà fermé les yeux, mais d'un coup de claquement de doigt il sortit de son imagination. Le jeune homme se sentait résolument ridicule face à cette situation.
« Hm. J-je devrais y aller. Excuse moi. »

De façon brusque Daniel attrapa sa veste et claqua la porte, jurant dès qu'il avait atteint l'ascenseur. Bon sang, les pulsions masculines...