SORAVA nice to meet you lil sis'

Debout devant le miroir psyché de sa chambre, Avalon contemplait son reflet avec une légère moue peu convaincue ; elle était pourtant superbe dans cette robe empruntée à sa colocataire et meilleure amie, cependant la jeune femme ne se sentait pas très à l’aise. Honnêtement, si ça ne tenait qu’à elle, Avalon s’y serait rendue dans ses vêtements de tous les jours, cependant, en relisant le carton d’invitation, il ne faisait aucun doute que leur ‘hôte’ ne leur laissait guère le choix. Tenue chic exigée, donc. Ce soir, Avalon avait été conviée à une grande réception organisée par son père et celui-ci avait tenu à ce que sa fille illégitime qu’il avait rejeté durant toute sa vie en fasse partie. Autant dire que la journaliste s’en était immédiatement méfiée : qui voudrait d’une journaliste dans une réception de ce type ? C’était comme faire entrer le loup dans une bergerie ! Cependant Micah avait insisté pour que ses héritières soient présentes – ça sentait le coup de pub à plein nez - et l’informa de la présence de Sora, la seule de ces deux demi-sœur qu’Avalon n’avait pas encore eu l’honneur de rencontrer. Curiosité oblige, Avalon avait abdiqué aux exigences de ce père qui avait toujours été un fantôme dans sa vie demanda aussitôt l’aide de Dolce. Elle avait toujours envié la relation père-fille qui unissait sa colocataire avec son paternel, ils représentaient un idéal pour la mexicaine alors forcément, ils furent les premiers à être informés de l’invitation impromptue de Micah à cette réception en grande pompe. Ce fut Dolce qui réussit à persuader Avalon de s’y rendre et s’autoproclama ‘marraine-fée’ pour l’occasion. La journaliste n’eut pas le courage de la refuser comme elle n’avait pas le courage d’affronter son père et sa demi-sœur jusque là inconnue au bataillon et passa donc entre les mains expertes de sa meilleure amie.

La jeune femme jeta un coup d’œil à l’horloge et soupira : il était l’heure pour Cendrillon de se rendre au bal. Accablée, ses épaules se voutèrent sous l’effet de l’angoisse grandissant, mais la sonnerie de l’interphone la fit descendre sur terre : son carrosse était arrivé. Pour bien se faire voir auprès de ses invités, Micah n’avait pas lésiné sur les moyens : il avait chargé un chauffeur de limousine de venir chercher sa fille au pied de son appartement de l’Upper East Side. Elle aurait pu être excitée comme une petite fille le jour de Noël, mais rien de tout ça. En fait, Avalon était encore plus angoissée de le décevoir par sa simple présence et ce fut le cœur lourd qu’elle se laissa conduire dans le Centre de Manhattan.

Quelques minutes plus tard, la jeune femme descendit du véhicule après que le chauffeur lui ait ouvert la porte et Avalon gravit les marches le plus tranquillement possible en affichant des faux sourires à tout bout de champ à ces inconnus qui l’observaient comme si elle venait tout juste de débarquer de la planète Mars. Elle avait la désagréable sensation d’être un monstre de foire et n’avait qu’une envie : regagner au plus vite son appartement de l’Upper East Side, en bus s’il le fallait ! La soirée n’avait pas encore commencée et elle s’annonçait déjà longue. Stoppée par une personne chargée de l’accueil, Avalon s’annonça en bonne et due forme, puis s’avança à l’intérieur d’une immense salle. Son père vint aussitôt la rejoindre et l’embrassa sur le front, le premier –et sans doute le seul- geste d’affection émanant de lui. Elle fit mine de ne pas paraître trop surprise, afficha un sourire réservé pour la photo et s’éloigna bien vite de son père après avoir échangé quelques convenances. Avalon ne chercha pas à rencontrer sa demi-soeur, au lieu de ça, la journaliste s’enfonça un peu plus parmi la foule et attrapa une flûte de champagne au vol : se saouler était de loin la seule chose intéressante à faire.

AVALON & SORA

❝ nice to meet you lil sis' ... ❞

Ce qu’elle ne comprenait pas c’était l’intérêt qu’elle semblait porter à toute cette histoire alors qu’en réalité elle aurait tant aimé le décevoir juste pour le blesser par simple désir de vengeance. Toutefois, plus les jours passaient et plus elle se rendait compte que ce n’était pas réellement elle qui semblait s’intéresser un peu trop à son statut, mais bien ses employeurs au sein de l’agence de mannequinât. Avoir une des héritières d’Apple posant pour eux depuis quelques années sans même savoir qui elle était à la base semblait leur plaire. Elle était devenue un coup de pub. Bien sûr, elle l’était déjà à la base. Son joli minois avait intéressé dès le début plusieurs marques – bien qu’elles ne soient pas non plus battues pour elle – mais désormais c’était bien plus encore. Si elle était réticente à l’idée de passer du temps avec son père biologique, son agent, lui, s’évertuait à la pousser vers lui en ne cessant de répéter que c’était bon pour son image. Elle ? Elle en doutait sincèrement, c’était uniquement bon pour eux et très perturbant pour elle. Son père n’avait pas été là pour elle une seule fois en vingt ans. D’après ce qu’il avait dit aux journalistes c’était uniquement parce qu’il n’avait jamais eu connaissance de sa naissance et qu’il était partit pour protéger sa mère. Toutefois, Micah en parlait avec une telle aisance que la jeune femme avait de sérieux doutes concernant la sincérité de ces paroles. Pourtant, elle avait une fois de plus accepté d’être en sa présence, à son plus grande damne.

C’était soit disant un évènement important qu’elle ne pouvait pas manquer et surtout elle allait devoir porter l’une des robes de soirées de la marque pour laquelle le posait en craignant à chaque instant de l’abîmer. « Je vais étouffer là-dedans ! » Voilà, elle ne pouvait pas s’empêcher de râler. Cette soirée ne l’intéressait pas le moins du monde. Se retrouver au milieu de la société mondaine l’angoissait comme jamais. Ce n’était pas sa place, quand bien même était-elle héritière d’une des plus grande marque de cette planète, elle refusait de supporter l’idée de se retrouver au beau milieu des gens snob qui allaient tous parler de conversations qui l’ennuyaient à mourir. De plus, elle ne pouvait pas même compter sur son père étant donné qu’elle refusait de lui parler autrement que lors des moments obligatoires. « Tu veux bien arrêter de grogner deux minutes que je finisse les retouches. » Laurie n’était pas obligée de lui rappeler ce petit détail ou le fait qu’elle était tout de même un peu petite pour une telle robe. Cependant, Sora cessa tout de même de parler et posa sur regard sur le miroir juste en face d’elle. La robe était magnifique, redoublant sa crainte de l’abîmer au cours de la soirée. La soie verte était particulièrement agréable – même si elle risquait de mourir de froid – et le moindre de ses défauts étaient camouflés par la longueur de cette robe qui, malheureusement, devait obligatoirement traîner par terre. Une fois les retouches terminées, Laurie passa derrière elle et zippa la robe pour ensuite faire le tour de la Guatémaltèque, visiblement ravie du rendu.

Elle passa ensuite une bonne heure à choisir la bonne paire de chaussures et la bonne pochette, puis une fois maquillée et coiffée, elle fut forcée de monter dans une limousine envoyée par son père et la faisant lever les yeux au ciel tant ce geste l’agaçait. Sur place, elle n’eut guère le temps d’hésiter, la porte s’ouvrit et aussitôt son père apparu dans son champ de vision, lui tendant une main qu’elle s’empressa de saisir afin de sortir. Les flashs ne tardèrent pas à l’aveugler, mais elle put compter sur Micah pour la guider jusqu’à l’intérieur de l’hôtel spécialement utilisé pour la soirée. Comme elle s’en était doutée, les présentations faites, elle s’empressa de trouver un coin isolé pour éviter le plus de ces personnes possible jusqu’à ce que son regard soit attiré par Micah et une jeune femme qui venait d’arriver. Avalon, ça ne pouvait être qu’elle, l’une de ses demi-sœurs qu’elle n’avait pas encore rencontré. Sora la regarda effectuer les mêmes gestes qu’elle – qu’elle qualifia vite de « manœuvres d’évitement » – et elle resta quelques instants à peser le pour et le contre avant de rejoindre la jeune femme, prenant place à ses côtés sans lui lancer un regard. « Soirée passionnante, n’est-ce pas ? » Ironisa-t-elle en regardant chacune des personnes également présentent dans la salle tandis que d’autres arrivaient. Sora posa ensuite les yeux sur la jeune femme et lui adressa un léger sourire. « Je suis Sora … Micah semble trop occupé pour faire les présentations lui-même. » Un soupire lui échappa. De toute manière, leur père avait toujours été trop occupé pour ses enfants et qu’importe ce qu’il pouvait dire ou faire, la Guatémaltèque savait qu’il lui en faudrait beaucoup pour qu’elle le considère vraiment comme son père.

Les épaules appuyées de manière nonchalante contre un mur, Avalon savourait le délicieux champagne que son père avait fait importer de France spécialement pour l’occasion et observait attentivement les personnes qui se pressaient à l’entrée du manoir où avait lieu la réception. De part son métier, il lui était facile de reconnaître certains visages, de les associer à plusieurs affaires médiatiques et de s’amuser de leur présence ici. Qui sait, peut-être réussirait-elle à leur tirer les vers du nez et à obtenir le scoop de l’année ? Bien que l’idée fût particulièrement alléchante, Avalon l’abandonna rapidement : ce n’était pas le moment de contrecarrer les plans de Micah. Elle avait beau le haïr, il restait tout de même son père et elle se devait – tout de moins pour cette soirée – de lui accorder le bénéfice du doute au moins une fois dans sa vie. Avalon espérait que le fait d’être entouré pousserait son père à faire bonne figure et ainsi à entretenir le dialogue avec ses deux filles en commençant par les présenter, mais apparemment, Micah semblait préférer ses invités à elles deux. C’était on ne peut plus logique quand on y pense : de tous les invités, c’était bien Avalon, Sora et Selina qui le dépouilleraient de son argent, tout ça parce qu’un détective avait fourré son nez partout et avait appris l’existence des trois filles en même temps que ces dernières se découvraient des sœurs.

En parlant du loup, une jeune femme blonde vint se poster à ses côtés et Avalon n’eut guère besoin de tourner la tête pour savoir de qui il s’agissait. Sora était l’une des sœurs que les journalistes avaient eu beaucoup moins de mal à retrouver. Elle avait été la première – voire la seule – que leur père avait retrouvé et sa carrière de mannequin lui apportait également une certaine notoriété. Micah avait été sûrement fier comme un paon lorsqu’il avait su ce que sa fille faisait pour gagner sa vie… C’était tellement mieux qu’une experte en cupcakes et une petite merdeuse de journaliste ! Mal à l’aise, Avalon but précipitamment une nouvelle et longue gorgée de son breuvage sans chercher à entamer la discussion. « Soirée passionnante, n’est-ce pas ? ». Sora semblait plus encline à converser que sa demi-sœur et même si Avalon s’était jurée de rester dans son coin à goûter les plats et les boissons, elle ne pouvait se résoudre à ne pas lui répondre. Cette jeune femme était tout de même sa sœur, sa chair et la pauvre avait déjà un père ignoble alors autant faire un effort. « … Grave. » répondit-elle simplement. Mouais. Peu mieux faire, Avalon. « Je suis Sora… Micah semble trop occupé pour faire les présentations lui-même. » poursuivit-elle, ne se laissant pas déstabiliser par le ton agacé qu’avait employé sa demi-sœur qui se tourna complètement vers Sora. « C’est un homme très occupé, en effet. Il n’a même pas pris le temps de connaître ses propres filles alors les présenter entre elles... » lâcha-t-elle, sur un ton morne. Consciente d’avoir l’air exécrable, la jeune femme esquissa à son tour un maigre sourire avant de se présenter à son tour. « Avalon, mais je préfère que l’on m’appelle Ava. » se présenta-t-elle à son tour.

Elle avait besoin d’un remontant. Terminant sa flûte de champagne en vitesse, Avalon attrapa une autre coupe au moment précis où le serveur passait à proximité. « Vous devriez goûter au champagne, il est délicieux. » dit-elle, préférait vouvoyer Sora pour lui faire implicitement comprendre qu’elle n’était pas prête à la considérer comme sa véritable soeur. Avalon avait conscience de donner une bien piètre image d’elle, mais elle n’en éprouvait aucune gêne. Bien au contraire. Faire mauvaise impression à la soirée qu’avait organisée son père la faisait jubiler intérieurement. Avalon détruirait son moment de gloire avec la même facilité qu’il avait détruit son enfance et peu lui importait de ce que Sora penserait de sa grande-sœur -jusque là inconnue au bataillon- puisque de toute façon, elles ne se connaissaient ni d’Eve, ni d’Adam.

Comme elle l’avait supposé quelques heures plus tôt, elle commençait déjà à étouffer dans sa robe, s’y sentant bien trop à l’étroit. Peut-être était-ce plutôt le fait de se trouver au beau milieu de cette foule qui la mettait autant mal à l’aise ? Elle avait peut-être l’habitude que l’on porte un peu trop d’attention sur elle, mais depuis quelques mois elle se sentait de moins en moins capable de le supporter. Elle avait connu bien des épreuves ces derniers temps, des épreuves qui avaient bien vite eut de lui rappeler qu’elle était encore jeune, qu’elle avait bien trop à vivre pour se laisser détruire comme elle avait pu le faire lorsqu’elle avait appris la mort de Dean. Si la demoiselle avait été sur la défensive pendant une longue période, à son réveil du coma elle était redevenue l’habituelle petite Sora qu’elle avait toujours été, douce mais qu’il ne fallait tout de même pas trop chercher, celle qui donnait toujours envie qu’on la protège, ce qu’un grand nombre de personnes dans son entourage n’avaient jamais cessé de faire. Toutefois, elle était également devenue bien plus émotive que par le passé et le simple fait que les journalistes s’intéressent un peu trop à sa vie depuis sa dernière overdose était loin de lui plaire. Elle voulait préserver son jardin secret, les personnes qui y appartenaient, sa relation avec Danjel, tout ce qui lui permettait de garder la tête hors de l’eau, tout ce qui lui avait permis de remonter la pente plus facilement que si elle avait été seule. Sora était devenue bien plus timide devant les caméras et les journalistes, surtout face à ces derniers en réalité.

Elle continuait de mener sa carrière de mannequin tranquillement, mais elle évitait bien plus les photographes et les journalistes qu’elle avait pu le faire auparavant. La guatémaltèque avait cette crainte que tout le monde sache ce par quoi elle était passée même si c’était déjà plus ou moins le cas. Elle avait peur que tout le monde sache ce qu’elle ressentait et surtout ô combien elle pouvait être une jeune femme sensible et facile à briser si on faisait pression au bon endroit. Se retrouver au beau milieu d’une foule pareille, de personnes qui connaissaient sans le moindre doute ses frasques passées lui donnait l’impression que plus les minutes passaient et moins elle était capable de respirer. Elle ignorait pour qui elle faisait réellement tout ça, même si elle en avait bien une petite idée, il n’y avait qu’à poser les yeux sur la robe qu’elle portait, c’était avant tout un coup de pub plus que le besoin de faire plaisir à son père biologique. Ce dernier semblait même être très intéressé par toutes les personnes qui n’avaient pas le moindre lien de parenté avec lui, abandonnant ses filles pour d’autres inconnus, à croire que c’était une habitude chez lui. Toutefois, Sora ne comptait pas passer sa soirée à broyer du noir, seule dans son coin et lorsqu’elle aperçut Avalon, la demoiselle sauta sur l’occasion pour lancer la conversation avec la seule de ses demi-sœurs qu’elle n’avait pas eu l’occasion de rencontrer jusque-là. « … Grave. » Au moins elles étaient sur la même longueur d’onde concernant cette passionnante soirée à laquelle elles avaient été conviées plus par force que par choix.

« C’est un homme très occupé, en effet. Il n’a même pas pris le temps de connaître ses propres filles alors les présenter entre elles... Avalon, mais je préfère que l’on m’appelle Ava. » Sora acquiesça tout en adressant un léger sourire à sa demi-sœur, son regard ne tardant pas à aller se poser vers la foule à laquelle elle rêvait d’échapper. Au final, ce fut vers son père qu’il fut attiré tandis qu’une petite moue prenait place sur son visage. Inconsciemment, elle avait espéré que Micah lui porterait plus d’intérêt que depuis qu’il avait découvert son existence, mais elle devait se rendre à l’évidence : ses filles n’étaient qu’un coup de pub comme la présence de la guatémaltèque à cette soirée. « Vous devriez goûter au champagne, il est délicieux. » Son attention fut attirée par le serveur qui passa devant elles et qu’elle suivit du regard avant de tourner la tête vers Avalon, secouant la tête de gauche à droite, son sourire reprenant doucement place sur ses lèvres. « Je n’en doute pas, mais je n’ai pas vraiment le droit de toucher à l’alcool. » Premièrement, elle n’était pas majeure – même si ça ne l’avait pas tant dérangé que ça par le passé – et deuxièmement étant donné son passé et la raison de son coma, l’alcool était totalement à proscrire de sa vie ce qui, sincèrement, ne lui manquait pas plus que ça. « J’ai entendu dire que vous étiez journaliste ? » Si Avalon la vouvoyez, Sora allait en faire de même et pour tout dire, il était probable qu’elle se serait adressée à elle ainsi de toute manière, qu’elle soit sa sœur ou non, elles ne se connaissaient pas et la guatémaltèque était bien trop polie pour en venir directement au tutoiement.

« Je n’en doute pas, mais je n’ai pas vraiment le droit de toucher à l’alcool. ». Avalon acquiesça d’un signe de la tête, comprenant parfaitement l’allusion de Sora. Son père l’avait pourtant mis en garde sur l’état de santé (et plus particulièrement l’addiction) de sa jeune sœur, mais tout cela étant censé rester secret, Avalon fit mine de ne rien savoir et prêta son refus à l’âge de Sora. « Oui, j’oubliais que vous n’avez pas l’âge légal… » dit-elle, vidant sous son nez sa propre coupe de champagne d’une traite et de la reposer sur le plateau en argent d’un serveur qui passait près de là. Elle prit un petit toast et guetta l’arrivée d’un autre serveur avec des coupes pleines pour en reprendre aussitôt une nouvelle coupe. Avalon ne se souciait pas vraiment de ce que les invités penseraient de la fille de leur hôte, après tout, son père n’avait été qu’un fantôme dans sa vie depuis bien trop longtemps pour qu’elle s’inquiète de sa notoriété et des conséquences que pouvaient avoir son comportement outrancier. Ce n’était pourtant pas dans ses habitudes de se conduire comme cela : on aurait dit qu’elle piquait une véritable crise d’adolescente avec quelques années de retard. Elle était si… différente de ce qu’elle était réellement. Avalon semblait prendre un malin plaisir à tout faire pour décevoir ce côté de sa famille pour être sûre de ne plus jamais avoir à les fréquenter de nouveau, cependant, elle devait bien se rendre à l’évidence que ses demi-sœurs n’avaient rien demandé. La journaliste s’en voulait presque d’être aussi froide voire complètement indifférente envers Sora, alors elle se décida de faire un effort. « J’ai entendu dire que vous étiez journaliste ? » demanda finalement sa demi-sœur. Elle laissait la conversation ? Encore mieux ! Avalon acquiesça d’un signe de tête. « C’est exact. ». Elle reprit un petit four qu’elle mit aussitôt dans sa bouche, puis décida d’entretenir un minimum la conversation pour ne pas paraître grossière. « C’était ça où détective privée, mais le journalisme me semblait être la meilleure manière d’approcher mon… notre… père et quand je vois le résultat, je me dis que finalement j’aurais dû choisir l’option A. ». Elle aimait son métier. Enfin, elle l’avait aimé au cours des premières années d’exercice, mais récemment, avec le papier qu’elle devait rédiger sur l’entreprise de Zachaël et où elle avait été envoyée en ‘mission de reconnaissance’, Avalon se surprenait à en être profondément dégoûtée. Elle s’était engagée dans une profession journalistique pour le plaisir d’écrire et non pour celui de faire la Une en usant de moyens aussi malhonnêtes. Pourtant, elle l’avait accepté et s’en mordait les doigts maintenant qu’elle se rapprochait dangereusement de son ‘patron’. Ayant besoin de changer de sujet et ne voulant pas paraître impolie, Avalon lui retourna finalement la question. « Sinon Micah m’a dit que vous étiez étudiante et qu’en plus de cela vous faisiez du mannequinat pour Burberry. Pas trop difficile de cumuler tout ça ? » demanda-t-elle.

[Tu m'excusera, cette réponse-ci n'est pas terrible]

Qu’est-ce qu’elle était venue faire ici ? Mais qu’est-ce qu’elle était venu faire ici ?! Elle ne se sentait pas à sa place, pas le moins du monde et l’envie de prendre la fuite l’assaillait de plus en plus – si tant est qu’elle puisse courir avant de mourir étouffer par sa robe. Elle regardait chaque personne présente sans être capable de mettre ne serait-ce qu’un nom sur l’un de ces visages. Elle ne connaissait personne et avait l’impression d’être une étrangère … en fait non, ce n’était pas une impression, elle l’était totalement tout comme sa demi-sœur semblait l’être aussi, étrangères et invisibles par-dessus le marché. Tout le monde savait qui elles étaient, quel lien elles avaient avec Micah et tous semblaient savoir que si elles étaient là c’était uniquement pour donner une bonne image au père de famille – qui était loin d’en être eux – et très sincèrement la guatémaltèque était malade rien que de penser au fait qu’il se faisait une belle image de lui-même en usant de ses propres filles sans pour autant leur porter le moindre intérêt. Elles étaient là, toutes les deux dans un coin de l’immense salle à observer chaque personne qui avait été conviée à cette soirée sans que qui que ce soit ne leur porte de l’intérêt, elles n’étaient que des objets et Sora détestait le fait d’être utilisée. Elle avait l’impression d’être l’une de ces call-girl qui touchaient sans nulle doute bien plus qu’elle en étant mannequin pour accompagner des hommes riches à des soirées tout aussi ennuyantes que celle à laquelle elle se trouvait à la différence qu’elle, elle ne touchait rien et devait donc se contenter de l’ennui qui la gagnait ainsi que la sensation d’étouffement qui lui coupait le souffle quasiment tous les cinq minutes.

« Oui, j’oubliais que vous n’avez pas l’âge légal… » Un petit sourire poli prit place sur les lèvres de la demoiselle qui fut sortie de ses pensées par la voix d’Avalon. Son regard posé sur sa demi-sœur, elle la regarda vider sa coupe de champagne d’un coup sans parvenir à cacher son envie de faire de même. Oh oui ! La guatémaltèque avait grandement envie de boire pour faire passer sa frustration et surtout faire disparaître cette étiquette de la petite fille fragile qui lui collait à la peau ces derniers temps. Elle avait envie de redevenir une jeune femme normale et de boire avant l’âge légal comme toutes les personnes de son entourage pouvaient le faire. Elle avait de nouveau envie de prendre ses jambes à son cou et de partir le plus loin possible de cet endroit. Pour se rendre où ? N’importe où à vrai dire, chez elle ou chez Danjel, mais loin de toutes ces personnes qui la rendaient malade et pourtant elle n’en fit rien, trop bien élevée pour ça – que ce soit par sa mère biologique ou par ses parents adoptifs. Elle devait se contenter de se forcer à sourire et de paraître aussi polie que possible alors que ce n’était pas l’envie d’hurler qui manquait. Ainsi, pour tenter de se changer les idées mais aussi pour essayer de briser la glace entre elle et sa demi-sœur, Sora tenta de se lancer dans un sujet de conversation quelconque avec l’espoir que la jeune femme n’allait pas la repousser froidement. « C’est exact. » La guatémaltèque acquiesça d’un petit mouvement de la tête, un léger sourire aux lèvres en s’efforçant de faire abstraction des autres personnes autour d’elle pour se concentrer uniquement sur Avalon. « C’était ça où détective privée, mais le journalisme me semblait être la meilleure manière d’approcher mon… notre… père et quand je vois le résultat, je me dis que finalement j’aurais dû choisir l’option A. »

Cette fois, une légère grimace prit place sur le visage de la jeune femme. Micah n’avait en rien facilité la vie de ses filles et encore … Sora était probablement celle qui s’en sortait le mieux. Durant seize années elle avait eu Anaeli près d’elle et lorsque ça n’avait plus été le cas, Carol et Doug avaient pris la relève et lui avaient permis de ne jamais baisser les bras même si elle l’avait fait tout de même à de nombreuses reprises comme son passé pouvait en témoigner pour elle. « Sinon Micah m’a dit que vous étiez étudiante et qu’en plus de cela vous faisiez du mannequinât pour Burberry. Pas trop difficile de cumuler tout ça ? » Faisant une légère moue, Sora secoua doucement la tête de droite à gauche tout en croisant les bras contre sa poitrine, mouvement qu’il l’empêcha d’autant plus de respirer si bien que, finalement, elle les laissa retomber le long de son corps. « Ça peut aller, mon emploi du temps pour l'agence est fait sur-mesure, mais je ne pense pas continuer de toute manière, j’ai envie de retrouver la simplicité de ma vie d’avant. » Avoua-t-elle dans un léger soupire. Elle voulait se débarrasser des paparazzi et avoir une véritable vie privée, pouvoir faire des erreurs sans que ça fasse pour autant la première page des journaux. Elle souhaitait redevenir une jeune femme aussi banale que la plupart de celles qu’elle rencontrait à l’université et pour ça elle comptait bien arrêter le mannequinât même si la partie « héritière d’Apple » venait entacher son plan pour retourner dans l’anonymat.

Avalon nota la grimace de sa demi-sœur lorsqu’elle mentionna la raison de son choix de carrière et c’est ainsi qu’elle comprit que Sora ne portait pas non plus Micah dans son cœur. Se pouvait-il que leur relation ait été aussi désastreuse que celle qui l’unissait à son père ? Avait-il rejeté toutes ses filles sans exception avant de se pointer la bouche en cœur quelques années plus tard comme si rien ne s’était passé ? Etait-il possible qu’elle ne soit pas la seule à avoir été ainsi délaissée ? C’est vrai qu’en y regardant de plus près, Sora ne se sentait pas du tout à l’aise. Elle ne simulait pas. Sa réaction était typique de la fille qui ne se trouve pas dans son élément et Avalon commença enfin à prendre conscience qu’elle se comportait vraiment comme une garce avec sa demi-sœur. Certes, elles ne se connaissaient pas et leur père ne s’en était jamais soucié alors peut-être devait-elle faire le premier pas. Sora avait entamé la discussion, peut-être en ayant espoir de forger une relation fraternelle avec son aînée et Avalon avait presqu’aussitôt dressée une barrière protectrice, comme si elle craignait que Sora – tout comme leur père – ne se joue d’elle et disparaisse du jour au lendemain. Pourtant, elles semblaient toutes les deux avoir manqué d’un père. Peut-être était-il temps pour Sora d’arrêter de se regarder le nombril quelques instants et de songer un peu aux autres. « Ça peut aller, mon emploi du temps pour l'agence est fait sur-mesure, mais je ne pense pas continuer de toute manière, j’ai envie de retrouver la simplicité de ma vie d’avant. ». Avalon quitta le fil de ses pensées pour s’intéresser à ce que disait Sora. Il lui fallut un certain temps pour retrouver le sujet de conversation initial, mais elle finit par acquiescer d’un signe de tête. « Tu as bien raison. Pour en avoir interviewé des centaines, je peux te dire qu’elles finissent tous droguées et anorexiques. ». Avalon ignorait combien elle visait juste. Sora était déjà passé par là et sans le savoir, elle avait probablement réveillé une blessure pas si ancienne que ça. Tout ce dont son père lui avait parlé, c’était de l’alcool et non d’autres substances illicites. « Oui, j’ai décidé de te tutoyer. Ca fait trop bizarre de parler à sa sœur comme si c’était une étrangère. Je veux dire, c’est ce que tu es pour moi, mais on a le même sang et rien ne nous empêche de faire connaissance. D’ailleurs je pense qu’il est inutile d’attendre Micah pour le faire. ». Impossible. C’était tout simplement impossible pour elle de l’appeler ‘papa’ pour la simple et bonne raison qu’il avait été un véritable fantôme dans sa vie et pourtant, il leur avait expressément demandé de leur servir du ‘papa’ pendant qu’il paradait avec d’autres convives. Quel hypocrite ! « Je n’ai qu’une envie : me tirer d’ici en vitesse. De toute façon, je suis persuadée qu’il ne se rendrait même pas compte de mon absence. » grommela-t-elle. L’idée était alléchante. Très alléchante. Son regard se posa alors sur Sora et elle afficha une expression des plus sérieuses. « Tu serais partante ? » demanda-t-elle, excitée à la simple idée d’échapper à ‘l’autorité’ de leur père, rien que pour leur faire savoir leur mécontentement à son égard. Il n’avait pas été un père modèle, Avalon ne serait pas une fille modèle non plus, question de principe !

Micah avait eu trois filles différentes – du moins s’il n’y en avait pas plus que ça – et Sora s’en rendait bien compte à présent. Elle avait déjà eu la chance de faire connaissance avec Selina et ce petit moment qu’elle avait pu passer avec l’une de ses sœurs aînées lui avait permis de s’en rendre compte. Pourtant, elles étaient toutes les trois liées par autre chose que le fait d’avoir le même père. Elles n’avaient pas un passé facile à encaisser même si c’était à des niveaux différents. Elles avaient toutes les trois soufferts et étaient bien plus liées que ce qu’elles étaient capables de voir. Elle était très observatrice et surtout très silencieuse. Sora appréciait le fait de passer inaperçue depuis quelques années, tout le contraire du lycée où elle avait tout fait pour sortir de l’ombre de sa sœur adoptive qui avait fait de sa vie un véritable enfer. À présent, chaque moment où elle était invisible était pour elle une véritable bénédiction et autant dire qu’elle voyait l’arrivée de Micah dans sa vie comme une malédiction, puisque désormais elle doutait d’être tranquille un seul instant, qu’elle envisage ou non de refuser l’héritage qui était le sien – décision qu’elle espérait blesser Micah même si être mauvaise ne lui ressemblait absolument pas.

Cependant, la guatémaltèque ne voulait pas être invisible aux yeux de ses demi-sœurs. Elles ne se connaissaient pas et c’était là un grand avantage pour toutes les trois, un moyen pour la demoiselle d’avoir une famille de sang même si elle considérait celle qui l’avait adopté comme sa véritable famille, néanmoins elle ne pouvait dire c’était la même chose. « Tu as bien raison. Pour en avoir interviewé des centaines, je peux te dire qu’elles finissent tous droguées et anorexiques. » Instantanément, Sora baissa les yeux, coupable. Avalon ne semblait pas être au courant et même si ce n’était pas plus mal, ça n’empêchait pas la jeune femme de se sentir soudainement très mal à l’aise. Elle avait fait partie de ces mannequins qui finissaient pas tomber dans la drogue – elle avait bien heureusement échappé à l’anorexie – et ce n’était pas une chose dont elle était très fière et elle aimait encore moins y repenser. « Oui, j’ai décidé de te tutoyer. Ça fait trop bizarre de parler à sa sœur comme si c’était une étrangère. Je veux dire, c’est ce que tu es pour moi, mais on a le même sang et rien ne nous empêche de faire connaissance. D’ailleurs je pense qu’il est inutile d’attendre Micah pour le faire. » Sora releva la tête et adressa un sourire timide à sa demi-sœur, ravie qu’elle accepte enfin aussi de sauter à pieds joints dans le plat et briser une bonne fois pour toute la glace entre elles.

Puis, son regard chercha brièvement leur père biologique qu’elle trouva en train de rire à gorge déployée avec un petit groupe de personnes tout aussi snob que Micah. « La seule chose sur laquelle on peut le complimenter c’est son goût en matière de décoration. » Commença-t-elle avant de tourner la tête en direction d’Avalon. « On fait de belles décorations si tu veux mon avis … on est pas grand-chose de plus pour lui. » Un soupire lui échappa. De toute manière elle ne s’attendait à rien de la part de ce père qui brusquement avait décidé de retrouver ses filles alors qu’il n’avait pas pensé à un seul instant à elles auparavant. « Je n’ai qu’une envie : me tirer d’ici en vitesse. De toute façon, je suis persuadée qu’il ne se rendrait même pas compte de mon absence. Tu serais partante ? » Son attention s’était reportée en direction de Micah jusqu’à entendre la proposition de sa demi-sœur. Sora tourna vivement la tête vers cette dernière, sourcils froncés comme si elle jugeait de la véracité de ses propos, puis après un bref regard vers leur « père », elle opina du chef, large sourire dessiné sur ses lèvres. « Plus que partante et si ça te dérange pas j’aimerais seulement aller me changer avant de mourir étouffer dans cette robe. » Lâcha-t-elle dans un soupire. Ce qu’elle pouvait remercier sa mère de lui avoir dit de prendre une tenue de rechange juste au cas où, à croire que Carol avait deviné bien avant sa fille adoptive le désir de fuir la soirée qui allait la gagner tôt ou tard.

La fraternité était quelque chose d’inédit pour Avalon. En vingt-cinq années d’existence, elle n’avait jamais eu de sœur et voilà qu’aujourd’hui, elle s’en découvrait deux. Peut-être y en avait-il plus que ça. Si elle ne se trompait pas, cela faisait d’elle la sœur aînée de Selina & de Sora, mais elle ne se sentait pas vraiment capable d’assumer ce rôle. Sa mère l’avait élevée comme une fille unique et ce n’était pas à vingt-cinq printemps qu’Avalon allait apprendre à se comporter comme une sœur modèle. Plusieurs fois, la jeune femme avait envié ses camarades de classe qui vivaient dans une famille traditionnelle avec père, mère, frères et sœurs, cependant sa mère avait fait de son possible pour que sa fille ne manque de rien et y était parvenue sans grand mal. Malheureusement, Avalon avait été privée de figure paternelle et en avait beaucoup souffert. Sa mère avait de son mieux pour combler le vide et éduquer sa seule fille, mais en plus de devoir jouer sur les deux tableaux, le seul parent qui lui restait travaillait dans les forces de l’ordre et mettait sa vie en péril tous les jours. « La seule chose sur laquelle on peut le complimenter c’est son goût en matière de décoration. ». Avalon fronça les sourcils et regarda autour d’elle, ne partageant pas du tout le même avis que sa demi-sœur à ce sujet : l’endroit était beaucoup pompeux et les tenues des invités étaient des plus extravagantes. Elle se tourna alors vers Sora, prête à rétorquer que même avec deux coupes de champagne dans le nez l’endroit lui paraissait toujours aussi laid, mais la guatémaltèque la prit de vitesse. « On fait de belles décorations si tu veux mon avis … on n’est pas grand-chose de plus pour lui. ». Même si la vérité était douloureuse, Avalon ne put s’empêcher de pouffer de rire en esquissant d’un signe de tête approbateur. S’il avait requis la présence de ses filles, se devait être uniquement pour faire bonne figure et rien de plus. La mexicaine proposa donc de prendre la tangente et attendit la réponse de Sora qui ne se fit pas attendre très longtemps. « Plus que partante et si ça te dérange pas j’aimerais seulement aller me changer avant de mourir étouffer dans cette robe. ». Ravie à l’idée de ne pas quitter la fête toute seule, Avalon pouffa de rire une nouvelle fois et la suivit jusque dans les toilettes pour qu’elle puisse s’y changer. « Je n’ai pas été aussi futée. » avoua-t-elle. Tant pis, elle devrait marcher dans les rues de New York avec des talons et une robe de soirée qui lui coupait la respiration. Finalement, elle avait peut-être jugée Sora un peu trop vite. En règle générale, Avalon n’était pas du genre à se fier à ‘l’emballage’ si l’on pouvait dire. Une fois que sa sœur fut prête, toutes deux quittèrent la fête où elles n’avaient pas leur place en essayant de ne pas trop se montrer et décidèrent d’un commun accord de faire plus amples connaissances autour d’un café.

TO BE CONTINUED