WAYNE AND MANUELA.
LIVE FAST, HAVE FUN, BE A BIT MISCHIEVIOUS

La journée avait été particulièrement éreintante. C'est sur les coups de 17 h 30 que je m'étais rendue à l'hôpital afin de suivre ma séance de kiné. Le moral au beau fixe et forte des énormes progrès que j'avais fait ces derniers mois, je n'y allais plus à reculons. Bien au contraire, je considérais désormais chaque séance comme une véritable bénédiction. Quant aux spécialistes qui me suivaient, ils n'en revenaient toujours pas. Pour eux, mon cas relevait du véritable miracle. Miracle ou pas, j'espérais que mon état continuerait d'aller en s'améliorant. Faut dire que je faisais pas mal d'efforts, qui plus est, y croire et se battre aidait beaucoup selon moi. D'ailleurs et sans cette subite prise de conscience, sans Soraya, je n'y serais probablement jamais arrivé. Quoi qu'il en soit, j'avais dû fermer la boutique pour m'y rendre et par conséquent, j'avais pas mal de travail en retard. Et puisque je n'avais pas encore trouvé l'employé idéal, je devais me débrouiller toute seule. Sauf que faire l'inventaire, recevoir les livraisons et remettre les nouvelles collections en rayons était loin d'être une promenade de santé pour une handicapée telle que moi. Je pouvais peut-être me redresser, mais mon dos était encore trop fragile pour que je ne m'aventure à faire ce genre de choses. Pas aussi longtemps en tout cas. La moindre petite encartade et mes efforts seraient réduits à néant. D'après mon kinésithérapeute, je ne devais surtout pas commettre d'imprudences. Mieux valait donc travailler moins vite et prudemment. Alors, oui l'inventaire allait me prendre des heures, oui la réorganisation des rayons allait être difficile, mais je préférais de loin passer ma soirée à la boutique et rentrer en un seul morceaux, que gagner quelques heures et ruiner mes chances de remarcher un jour. Par conséquent, j'avais passé un coup de téléphone à Wayne il y a quelques jours en lui demandant de garder la petite. J'aurais bien demandé à mon père de me rendre ce service, mais il s'absentait de plus en plus régulièrement ces derniers temps, prétextant que c'était un bon entraînement et que comme il allait bientôt rentrer en Espagne, j'allais devoir apprendre à me débrouiller de toute façon. Le fait est qu'il avait décidé de passer la nuit chez des amis et la petite adorant Wayne, je m'étais dit que c'était la meilleure solution. D'ailleurs, je l'appréciais beaucoup moi aussi. Doux, tendre, drôle, sérieux et avec la tête sur les épaules, il avait tout du baby-sitter parfait. Je ne comptais même plus les fois où nous avions eu des crises de fous rires ou celles où il était resté dîner à la maison. Wayne et moi n'ayant que deux ans d'écart, le courant était plutôt bien passé entre nous. Bien que réticente au départ (c'est bête, mais j'aurais plutôt pensé à une jeune femme pour garder Soraya), j'avais appris à le connaître et à l'apprécier. Et il me le rendait bien, il NOUS le rendait bien; il était adorable. Je pouvais toujours compter sur lui et il avait ma confiance totale en ce qui concernait ma fille, fait assez rare pour être notifié. Je n'accordais que très rarement ma confiance aux gens, mais avec lui cela avait été différent. Sans que je ne puisse réellement me l'expliquer, je l'avais laissé entrer dans nos vies et nous apprivoiser.

1 h 05. Ouvrant délicatement la porte, je rentrai enfin à la maison. Peu mécontente, je posais mes affaires sur le canapé et tandis que je m'apprêtai à rejoindre la cuisine pour me servir un verre d'eau, je croisai le regard de Wayne. Il sortait visiblement de la chambre de Soraya et, connaissant suffisamment bien ses méthodes maintenant, je supposai qu'il avait été la border pour l'énième fois. Attendrie par cette pensée, je souris bêtement quelques secondes avant d'ajouter à son intention: « Alors , ça s'est bien passé? Elle a été sage? » demandai-je en roulant lentement vers lui, histoire de le saluer.

Pour la petite histoire, c'est le père de Manuela qui a reçu Wayne avant de partir. Manuela étant au travail, puis au kiné ne l'a pas vu, raison pour laquelle elle le salue. C'est pas juste pour le plaisir de l'embrasser 150 fois hein! Qu'on se mette d'accord, parce qu'avec toi

Wayne Ҩ Manuela

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« Adorable, comme toujours. C'est une gamine géniale, vraiment. » me répondit-il tout sourire. C'est vrai qu'en ce qui concernait la petite, je n'avais rien à redire. Bien sûr il y avait eu un temps d'adaptation et j'avais dû l'apprivoiser, apprendre à la connaître et à gagner sa confiance, mais ma sœur-aînée et son mari avaient fait un travail formidable avec elle, parce qu'elle était extrêmement bien élevée. En plus d'être sage et posée. Soraya était un véritable petit ange, un cadeau du ciel même et, c'était à moi désormais de veiller à ce qu'elle reste telle qu'elle était. Je craignais parfois de ne pas être à la hauteur, mais j'avais tellement souffert de l'absence de ma mère qu'inconsciemment je m'investissais corps et âme dans notre relation depuis que je l'avais récupérée. A l'heure actuelle, j'avais d'ailleurs beaucoup de mal à concevoir que j'ai pu un jour l'abandonner. Enfin, on ne refaisait pas l'histoire, n'est-ce pas? Faisant un pas vers moi, Wayne finit par me saluer. « Tu vas bien » me demanda-t-il, concerné. « Tu veux que je te prépare du thé ou quelque chose? ». A ces mots, je ne pus m'empêcher d'esquisser un franc sourire. C'est fou comme il pouvait être attentionné. Je ne comprenais pas toujours ce qui pouvait bien le pousser à se montrer si gentil avec nous, mais je lui en étais sincèrement reconnaissante. D'ailleurs, j'ignorai ce que j'aurais bien pu faire de ma fille s'il n'avait pas répondu à notre petite annonce. D'autant plus que Papa allait bientôt repartir. Dans moins d'un mois, il serait loin d'ici et sans Wayne, je me serais retrouvée dans une sacré mouise. Bien sûr j'avais une autre baby-sitter, mais le courant passait moins bien avec Soraya et elle pouvait rarement rester aussi tard. « Je vais très bien, j'ai juste mal partout, mais je suppose que c'est bon signe. Je suis ENFIN à même de sentir quelque chose alors, je ne vais pas me plaindre » je lâchai dans un rire, avant de poursuivre. « Et je te remercie, mais ça ne sera pas nécessaire. Tu en as déjà suffisamment fait pour ce soir » je répliquai quelques secondes plus tard, avant de rejoindre la cuisine. « Tu veux quelque chose? » je lui demandai en me servant un verre d'eau. Elevant légèrement la voix, il me fit savoir que non et je le rejoignais un couple de secondes plus tard dans le salon. Wayne n'avait pas bougé d'un poil, d'ailleurs il semblait perdu dans ses pensées. Claquant des doigts, j'essayais d'attirer son attention. « Wayne, tu es sûr que tout va bien? ». Je l'avais rarement vu aussi distrait. J'avais comme l'impression qu'il me cachait quelque chose et que ça le rendait mal à l'aise. Ou bien était-il seulement fatigué? Allez savoir, il était tard après tout. « Tu sais, si tu veux rentrer vas-y, je ne t'en tiendrais pas rigueur! Tu as déjà beaucoup fait! D'un autre côté, il est tard alors, si tu n'as pas le courage de traverser la ville, tu peux toujours dormir dans la chambre d'amis » dis-je en m'approchant du canapé. Mes muscles étaient extrêmement tendus, mais quant à moi je n'avais pas sommeil, raison pour laquelle je décidais de passer un petit moment devant la télévision. Je mis d'ailleurs quelques minutes à réussir à sortir de ma chaise et convenablement m'installer. J'avais parfaitement conscience du fait que Wayne aurait voulu m'aider, qu'il se serait même précipité, mais la dernière chose que je voulais c'était qu'on me traite comme une invalide et ça, il l'avait bien compris, raison pour laquelle il n'avait rien fait. D'un autre côté, je n'aimais pas offrir ce type de spectacle à mes invités, mais tant que je serais coincé dans ce fauteuil je n'aurais pas d'autre choix que de vivre avec ça.

Wayne Ҩ Manuela

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« C'est gentil Manuela, merci. Je crois que je vais faire ça, si ça ne te dérange pas ». Pour toute réponse, je me contentai de lui adresser un franc sourire et le laissais rejoindre ‘ses quartiers’. Si je lui en voulais d’aller déjà se coucher? Pas le moins du monde. Il était près de deux heures du matin et d’après ce que j’avais compris, Wayne s’était levé très tôt. Qui plus est, il avait gardé mon petit démon et, bien qu’elle soit d’un naturel sympathique, la demoiselle avait aussi tendance à être légèrement hyperactive sur les bords. En d’autres termes, elle ne tenait pas en place et elle usait facilement les gens. D’un autre côté, Soraya était tellement adorable qu’on lui pardonnait chacun de ses débordements. Moi complètement gaga? Je ne m’abaisserais même pas à répondre à ça. Tout ça pour dire que Wayne était partit se coucher et que de mon côté, je continuai de zapper. Les programmes diffusés la nuit étant soit totalement inintéressants, soit complètement déplacés, je décidai de couper court à ces bêtises pour finir par aller me coucher. Mais au moment même où j’allais regagner mon fauteuil, monsieur Caldeira réapparu. « Manue, je... » Surprise, je me retournais vivement et lui adressais un regard interrogateur. Il avait besoin de quelque chose? J‘avais oublié de mettre des draps dans le lit peut-être? Faut dire que je n‘utilisais que très rarement cette chambre aussi. « Non... Rien... Bonne nuit ». J’eus à peine le temps de réagir à ses propos qu’il avait déjà refermé la porte derrière lui. Et sa réaction m’avait laissé quelques peu perplexe. Je m’entendais vraiment bien avec Wayne et j’avais souvent eu de longues conversations avec lui. Il était à l’aise avec moi, tout comme je me sentais bien avec lui et nous avions abordés de nombreux sujets délicats sans aucun tabous. Comme le fait que ma mère m’ait abandonné, la manière dont Soraya avait vu le jour, la façon dont elle était revenu dans ma vie, mon handicap et j’en passe. De son côté, il m’avait aussi brièvement parlé du fait qu’il avait dû retourner vivre au Mexique pendant un moment. Mais ces derniers temps, il se montrait beaucoup plus sur la réserve. J’avais comme l’impression qu’il était constamment mal à l’aise. Pourtant, il avait vraisemblablement quelque chose sur le cœur. Il avait envie et besoin de m’en parler, ça crevait les yeux. Pourtant, il finissait toujours par se raviser. J’étais vraiment embêtée. D’ailleurs, j’étais tellement obnubilée par le comportement de mon invité que j’eus beaucoup de mal à trouver le sommeil. Ayant déjà de fortes tendances à faire des insomnies, force était de constater que tout ça n’arrangeait en rien mes affaires.

Le lendemain matin.
Bien que je ne travaillai pas, je m’étais réveillée relativement tôt et j’en avais profité pour donner son bain à Soraya. La demoiselle n’était pas du genre à garder le lit le matin, mais puisque Wayne dormait dans la chambre à côté, j’avais tâché de l’occuper un maximum, histoire qu’elle n’aille pas le réveiller. Malheureusement, je n’avais pu la retenir qu’une petite heure et c’est sur les coups de 9h30 qu’elle était entrée dans sa chambre. Je lui avais pourtant formellement interdit d’aller l’embêter, mais elle avait profité du fait que je sois occupée à préparer le petit déjeuner pour s’éclipser. Elle réapparu d’ailleurs un couple de minutes plus tard, confortablement blottit dans les bras de son baby-sitter favoris. « Bonjour Wayne » dis-je, tout sourire avant de réprimander un tant soit peu ma fille. « Dis donc Soraya, qu’est-ce que je t’avais dis? ». « De ne pas aller réveiller Wayne. Pardon maman » lâcha-t-elle, confuse. « C’est pas grave. Mais la prochaine fois, tu obéiras, d’accord? » Pour toute réponse, elle acquiesça d’un signe de la tête. «  Allez file regarder ton dessin animé, je t’appellerais quand les pancakes seront prêts » je m’empressai de lui répondre, avant de concentrer mon attention sur Wayne avant de déclarer « Tu peux installer la table. Mettre les bols, sortir le jus d’orange, tout ça. Des pancakes, ça te va? » Comme à son habitude, il me fit savoir que oui. Décidément, ce garçon n’était pas difficile. « Dis Wayne, loin de moi l’idée de te mettre mal à l’aise, mais tu es sûr que ça va? Non parce que tu te comportes de manière plutôt étrange en ce moment. J’ai comme l’impression que tu as quelque chose à me reprocher et pour tout te dire, j’aimerais bien savoir ce que c’est. J’ai fais quelque chose de mal ou de déplacé? Si tu n’as plus le temps de garder Soraya ou si tu en as assez de passer autant de temps avec nous, tu peux me le dire. Je peux comprendre, tu sais? ». J’avais lancé ça l’air de rien, en continuant de préparer le petit déjeuner. Tout ce que j’espérais c’est qu’il n’allait pas m’annoncer qu’il nous quittait. La petite en aurait eu le cœur brisé. Quant à moi, j'aurais été attristée.