Une soirée tranquille pour Josephine et Milo s’annonçait. Elle avait une semaine de « vacances » et comptait bien en profiter un maximum pour passer du temps avec son fils qu’elle ne voyait pas assez.  Elle ne sortait en général pas beaucoup parce que justement, cela l’empêchait de passer du temps avec lui. Même s’il dormait et qu’elle aurait pu tout à fait le faire garder sans qu’il se rende compte de son absence, la jeune femme estimait que ce serait l’abandonner encore et qu’elle faisait déjà bien assez appel aux services de Coleen et de sa belle-famille. Puis vraiment, un peu de repos n’était jamais de trop, cela ne pouvait décemment pas lui faire de mal. Pour ce soir, la jeune australienne avait sélectionné plusieurs dessins animés même si Milo n’y prêterait sans doute pas une très grande attention ou s’endormirait avant la fin du premier film. Puis elle avait commandé une pizza pour elle.

Là, la jeune femme venait de faire manger Milo et le premier film venait de démarrer. Elle n’attendait plus que sa pizza en fait qui était étrangement longue. Elle avait tellement faim ! Elle était prête à manger la nourriture de son fils, c’était dire…  Son estomac ne cessait de se rappeler à elle en fait et cela l’empêchait presque de suivre son film. C’était un Disney, un classique, et c’était un sacrilège ! Au bout d’un moment,  Josephine décida de se lever et se dirigea droit dans sa cuisine dans le but de manger un petit truc pour patienter. La pizza était mieux d’être excellente… Alors qu’elle refermait son frigo, le bruit de la porte d’entrée se fit entendre. Elle soupira, soulagée que sa pizza soit enfin là avant de se rappeler que les livreurs de pizza n’entraient pas chez les gens et surtout annonçaient leur présence en sortant à la porte… Inquiète, elle se précipita dans l’entrée pour tomber nez à nez avec un grand brun qu’elle n’avait encore jamais vu. « Je peux vous aider ? » demanda-t-elle en se plantant devant lui, les sourcils froncés. Il ne manquait pas d’air à entrer chez elle comme ça. « Vous êtes qui ? »

Josephine passait une soirée tranquille avec son fils. La première depuis trop longtemps à son gout, c’était la raison pour laquelle elle voulait d’autant plus en profiter. Sauf qu’elle n’arrivait pas à en profiter parce qu’elle avait eu la fausse bonne idée de commander une pizza pour éviter de cuisiner mais que cette pizza n’arrivait pas… Est-ce que les minutes défilaient vraiment lentement ou bien le livreur était vraiment en retard ? Avec sa chance elle allait même hériter d’une pizza froide, c’était tellement moins bon réchauffé au micro-onde… Urh. Du coup son estomac faisait un boucan monstre et elle n’arrivait même pas à apprécier le moment tant c’était pour elle une torture que de subir le mécontentement de son estomac. Ce n’était pas de sa faute en plus ! Enfin un peu quand même mais elle persistait à penser qu’elle ne méritait pas un tel traitement.

Finalement, la jeune femme entendit du bruit du côté de la porte d’entrée. Et elle était trop focalisée sur sa pizza qu’elle ne remarqua même pas que ce bruit n’était pas habituel, ou n’était en tout cas pas celui qu’un livreur de pizza était supposé faire. Elle ne le remarqua que lorsqu’elle tomba nez à nez avec un homme qu’elle n’avait encore jamais vu et qui pourtant était entré librement de son appartement. Immédiatement, elle prit peur et voulut savoir ce qu’il faisait-là parce qu’il n’avait rien à faire là justement. Il avait de la chance qu’elle n’appelle pas la police. En même temps, il n’avait pas l’air dangereux. « Euh... » Ouais en fait il n’avait même pas l’air de savoir comment il s’appelait et d’être vraiment lent à la détente, donc elle ne craignait rien. « Erik. » finit-il par dire. Son cas n’était peut-être pas perdu finalement. « Et vous êtes ? » « Josephine. » répondit-elle en fronçant les sourcils alors qu’elle n’était même pas obligée de répondre vu que ce n’était pas elle qui était en tort. « Je me suis trompé d'appartement pas vrai ? » « Well, vous avez mis le temps pour le comprendre. » Elle était interloquée que le fait qu’il soit entré dans son appartement sans avoir à le déverrouiller ne l’ait pas interpellé. « Excusez-moi de vous demander ça mais… Est-ce que vous êtes… Enfin, est-ce que quelqu’un est censé être responsable de vous habituellement ? » S’il était un peu… limité c’était une bonne excuse pour lui que de s’être trompé comme ça. Il avait l’air tellement à l’ouest qu’elle s’inquiètait un peu du coup. « Est-ce que je dois appeler quelqu’un ? »

Un homme se trouvait dans son entrée et Josephine avait du mal à y trouver une explication logique. Si encore il avait eu une pizza avec lui elle aurait pu passer là-dessus mais non, il était juste là planté devant sa porte ouverte et il semblait vraiment paumé. Au moins il avait l’air inoffensif, c’était toujours ça de gagné et de rassurant. Mais quand même, il devait en tenir une sacré couche pour s’être trompé d’appartement comme ça. C’était pourtant quelque chose de mécanique, un adulte normalement constitué devait être capable de se rappeler où il vivait ! Après vu comme le monde était aujourd’hui la jeune femme n’aurait sans doute pas dû être trop étonnée. Ça devait bien arriver plus qu’elle ne le pensait. « A ma décharge, s'il y avait un numéro sur les portes, ce serait bien plus simple de s'y retrouver. » Mouais, si c’était sa seule défense elle trouvait que c’était bien faible. « C’est une simple question d’habitude selon moi. » Il y avait peut-être une autre explication et ce n’est qu’après coup qu’elle se mit à réfléchir. « Vous venez d’emménager en fait ? » Cela expliquerait pourquoi elle ne l’avait jamais vu auparavant. Même si bien sûr, elle ne connaissait pas toutes les personnes qui vivaient ici mais elle en avait croisé la plupart. Donc si effectivement il était “nouveau” ici, cela l’excuserait un peu plus. Après… Josephine pensa à autre chose d’un peu plus blessante sans doute mais elle n’était pas certaine de se tromper non plus vu, encore une fois, à quel point il semblait à l’ouest. Elle emit l’hypothèse qu’il était un peu… handicapé mentalement. S’il ne l’était pas il allait sans doute le prendre mal mais elle devait vérifier au cas où il l’était et quelqu’un était en train de le chercher. « Est-ce que vous êtes sérieuse là ? » Well apparemment il ne l’était pas. C’était bien sa chance… Elle pinça les lèvres et le regarda d’un air désolé. « Parce que je suis très responsable par moi-même. Je me suis trompé, ce sont des choses qui arrivent à tout le monde. » « D’accord, désolée d’avoir insinué que vous n’étiez pas tout… là. » Elle ne savait pas comment dire les choses délicatement mais c’était assez explicite selon elle. « Mais vous devez comprendre que c’est un peu surprenant et que ça fait plutôt peur alors… Voilà. » Elle haussa les épaules. C’était des excuses en quelque sorte. « Parce que contrairement à ce que vous semblez penser ça ne m’était encore jamais arrivé donc je ne savais pas comment on se devait réagir dans une telle situation. »

Josephine essayait encore de comprendre comment son voisin avait fait pour se tromper d’appartement comme ça. Ce n’était pourtant pas très compliqué à se rappeler. Enfin, elle ne pensait pas… Sauf s’il venait d’emménager. A la limite, ça pourrait lui donner excuse, mais vraiment à la limite. « Oui c'est tout à fait ça. » Ceci expliquait cela alors. Elle aurait préféré le rencontrer dans d’autres circonstances mais bon, il en avait « décidé » autrement. « Well, bienvenue dans l’immeuble dans ce cas. » Maintenant que cela était réglé elle n’avait plus besoin d’avoir peur, parce qu’il lui avait réellement fait peur. Elle aurait bien aimé le voir à sa place, en mère célibataire avec un enfant. « Mais je ne fais pas peur pourtant. » Voilà qu’il était arrogant maintenant. Il avait en tout cas l’air très convaincu e ce qu’il disait mais encore une fois, il ne pouvait pas juger, il ne savait pas ce qu’elle avait ressenti ! « Si. Mais ne le prenez pas pour vous, n’importe qui m’aurait fait peur dans une telle situation. » N’importe qui sauf le livreur de pizza. Il avait du souci à se faire celui-là d’ailleurs… Mais soit, pour le moment ce n’était pas la question. Elle avait eu peur à cause de son voisin, il aurait pu être un dangereux psychopathe… Même si elle l’avait trouvé plutôt long à la détente, cela n’empêchait rien… Elle avait même été jusqu’à penser qu’il était un peu limité mentalement et qu’il n’était pas responsable de lui-même. C’était l’impression qu’il lui avait donné mais il était clair qu’elle s’était trompée et elle s’en voulait maintenant. Elle n’avait pas voulu le blesser même si elle avait elle aussi des circonstances atténuantes : elle ne savait pas comment réagir dans une telle situation ! « Ça ne m'est jamais arrivé non plus. » Il était clair que non sinon il ne l’aurait pas jugée comme il le faisait depuis tout à l’heure. « Mais je n'aurais pas pensé que vous étiez handicapé mentale si les rôles avaient été inversés. » Josephine trouvait qu’il s’avançait beaucoup sur le coup, on ne pouvait jamais savoir comment on réagirait dans telle ou telle situation. « J’aurais justement aimé vous voir à ma place. Pour voir comment vous auriez réagi. Parce que, excusez-moi de remettre vos paroles en doutes mais vous n’avez jamais connu ça alors vous ne pouvez pas réellement savoir comment vous auriez réagi à chaud. » Donc encore une fois il ne pouvait pas vraiment la juger. « Enfin navré pour le dérangement. » Josephine haussa les épaules, signe qu’elle avait déjà oublié. Donc il devait la pardonner lui aussi. « On a tous les deux nos torts. Mais désolée aussi… » Elle se stoppa et pinça les lèvres, hésitant à lui proposer de rester. « Vous avez faim ? » finit-elle par demander. « Enfin, si vous n’êtes pas contre le fait de partager une pizza… » Elle faisait un gros sacrifice là parce qu’elle n’était pas sûre qu’une moitié de pizza suffirait à apaiser sa faim. « C’est histoire de me faire pardonner et de vous accueillir convenablement. »

« Vous savez, pour éviter d'avoir peur, vous pourriez aussi fermer votre appartement à clé. » Josephine fronça les sourcils et le dévisagea quelques instants. « Ah parce que c’est de ma faute maintenant ? » C’était ce qu’elle comprenait en tout cas et elle était quasiment sûre de ne pas se tromper. Ce n’était en aucun cas de sa faute en tout cas, c’était lui qui était entré chez elle-même s’il ne l’avait pas fait exprès. Elle supposait qu’elle méritait un peu ça parce qu’elle n’avait pas été très délicate en insinuant qu’il puisse être atteint de problèmes mentaux… Mais elle avait dû vérifier ! Si ça s’était avéré vrai et qu’elle ne l’avait pas demandé, elle aurait pu être accusée de non-assistance à personne en danger. Elle préférait prendre toutes les précautions nécessaires, tout comme elle avait rapidement vérifié qu’elle n’avait pas affaire à un tueur en série. Un air aussi paumé ne pouvait pas se feindre. Il se crut ensuite mieux qu’elle en affirmant savoir comment il aurait réagi à sa place alors que rien ne le garantissait. « Si, bien sûr que je le sais. Je n'aurais insulté personne moi. » « Je ne vous ai pas non plus insulté » répliqua-t-elle en levant les yeux au ciel. Il était légèrement dramatique là… Etre malade ne diminuait en aucun cas une personne. Mais bon, puisqu’elle l’avait apparemment vraiment blessé, ou au moins son égo, elle lui proposa de partager sa pizza qui n’était même pas encore là mais qui, vu le temps qui s’était maintenant, ne devait plus tarder à arriver. Considérant à quel point elle avait faim, c’était un énorme sacrifice de sa part. « Il faudrait être difficile pour avoir quelque chose contre la pizza hein. » Josephine hocha la tête, ils étaient au moins d’accord sur un point, c’était bien. « C'est très bien ! Vous avez quoi comme pizza ? Pour me faire pardonner moi, je veux bien en commander et payer une deuxième. » « C’est bien ça parce que j’ai très faim et je n’avais pas très envie de partager en vrai… J’ai juste fait ça pour être polie » avoua-t-elle ensuite en haussant les épaules, loin d’être désolée. Au moins elle était honnête. « Surtout que la pizza n’est même pas encore arrivée. »