Cora n’était pas une grande cuisinière. Elle n’avait pas hérité cette qualité de sa mère qui aurait pu facilement faire chef cuisinier tant elle était douée et lui avait toujours fait de bons petits plats. Non, elle avait plutôt hérité de son père pour le coup et à chaque fois ou presque qu’elle tentait quelque chose, cela se terminait en catastrophe. Bien sûr, elle connaissait les bases et arrivait juste à faire de quoi survivre ce qui en soit ne la dérangeait pas. Elle préférait passer commande, au moins elle était plus ou moins sûre de ce qu’elle mangeait. Pourtant ce soir, elle avait voulu tenter de cuisiner pour Paul. Elle ne voulait pas l’empoisonner, loin de là, elle voulait juste essayer de s’entrainer un peu pour plus tard. Comme elle allait être mère elle supposait qu’elle devait savoir cuisiner un peu mieux que ce qu’elle faisait là. Bien sûr, si le résultait ne lui plaisait pas visuellement – elle n’allait pas prendre le risque de gouter en premier et d’empoisonner le bébé – elle ne le forcerait pas à manger, elle tenait bien trop à lui pour risquer une telle chose.

La jeune femme s’était donc engagée dans la préparation d’un soufflé. Ce n’était peut-être pas l’idéal pour une débutante mais elle avait toujours beaucoup aimé ça et sa mère les avait toujours bien réussis, alors sur un malentendu… La préparation se déroula plutôt bien et trente minutes après l’avoir mis au four, la jeune femme alla le sortir. Ce serait là le plus délicat en fait, le tout était de ne pas le faire retomber. Elle prit donc beaucoup de précautions pour le poser sur sa table de cuisine tout en délicatesse. Ce qu’elle réussit presque miraculeusement jusqu’à qu’elle entende la porte d’entrée s’ouvrir ainsi que des bruits de pas à l’intérieur de son appartement. Elle sursauta sous l’effet de la surprise et de la peur combinées, lâchant en même temps son soufflé qui n’était pour qu’à quelques centimètres de la table. Evidemment, ce dernier termina complètement aplatit. Cora pesta avant de se diriger prudemment vers l’entrée. « Paul c’est toi ? » s’enquit-elle alors. Elle n’attendait personne d’autre même si cela ne lui ressemblait pas d’entrer sans prévenir. Elle chercha rapidemment où était son arme au cas où il s’agisse d’un agresseur mais tomba sur Mako avant de realiser qu’elle était trop loin pour pouvoir l’utiliser. « Idiot ! » fit-elle alors au brésilien avant de le frapper sur l’épaule. « Tu m’as fait peur ! » ajouta-t-elle en fronçant les sourcils. « Si j’avais eu mon arme tu te serais retrouvé avec une balle je ne sais où hein. »

Cora était contente de voir Paul ce soir. Ce n’était même pas parce qu’elle ne l’avait pas vu depuis longtemps vu qu’elle le voyait plus ou moins tous les jours, elle était tout simplement contente de le voir et d’être avec lui. Pour l’occasion - au moins pour le remercier de la supporter – elle avait décidé de s’essayer à la cuisine. Elle n’était pas tellement douée pour ça alors elle espérait qu’elle réussirait à ne pas l’empoisonner et à ne pas lui faire quelque chose de trop mauvais. Tout bien réfléchi, elle n’aurait peut-être pas dû s’attaquer à un soufflé. C’était compliqué et il y avait plus de chances qu’elle le rate qu’autre chose. Surtout si on venait la déranger au pire moment en lui faisant peur comme cela venait d’arriver. La surprise d’entendre la porte s’ouvrir sans prévenir et sans que personne ne s’annonce fit lâcher son plat à la jeune femme, ce qui fit retomber le soufflé. Mais elle avait d’autres priorités pour le moment, elle voulait s’assurer que la personne qui était entrée sans s’annoncer n’était pas un quelconque agresseur parce qu’elle ne connaissait personne qui puisse faire ça. Cora eut rapidement sa réponse : il s’agissait de Mako. Quel idiot quand même ! Pour la peine, elle décida de le frapper. Il était franchement inconscient de faire une telle chose à un flic. « Oh, je veux bien que tu sois déçue que ce ne soit que moi mais ne me frappe pas non plus. » La jeune femme lui lança un regard noir. « Si je trouve que c’est une bonne raison. » Paul était nettement mieux que lui quand même. Surtout qu’il lui avait vraiment fait peur.  « C'est vrai que je fais très peur oui. » « Oui. » confirma la brune d’un air très sérieux. Mais c’était surtout lui qui aurait dû avoir peur parce que si elle avait eu son arme, elle aurait été capable de lui tirer dessus à cause de la peur – ou peut-être pas vu qu’elle était censée savoir se maitriser mais bon. « Quoi ? T'aurais osé me faire du mal ? A moi ? Alors que je te rends si gentiment visite ! » Gentiment visite. Bien sûr. La jeune femme n’était pas dupe et se mit à rire. « Je ne sais pourquoi mais j’ai l’impression que ce n’est pas une simple visite de courtoisie. » Les seules fois où il venait la voir à l’improviste étaient pour la réveiller très tôt le matin. « De quoi as-tu besoin ? » Elle n’avait pas de temps à perdre, elle voulait qu’il parte avant que son petit-ami n’arrive.

Mako lui avait fait vraiment peur. Il avait de la chance qu’elle ne le frappe pas et qu’elle ne lui ait pas tiré dessus non plus parce que c’était ce qui aurait pu se passer si elle ne l’avait pas reconnu à temps ! Mais il ne semblait pas se rendre compte de ce qu’il venait de faire et il se positionnait une fois de plus en victime. Il était vraiment désespérant. « Tu as de la chance d'être une fille tu sais. Sinon je n'aurais pas hésité à te frapper en route. » La jeune femme lui lança un regard mauvais. « Oh mais je ten prie, ne te gene pas pour ça. » Mais il devait faire attention au retour de baton parce qu’elle savait se battre et qu’elle n’hésiterait pas à lui rendre la pareille si c’était nécessaire. Cora était intriguée sur la raison de sa venue maintenant, elle ne pouvait pas le renvoyer chez lui sans savoir. Elle espérait juste qu’il avait une bonne raison pour lui avoir fait peur et pour lui avoir fait rater son plat aussi. Pour ça aussi il méritait au moins une petite frappe derrière la tête. La jeune femme croyait mal au fait qu’il venait juste la voir comme ça, sans raison particulière. Il ne faisait pas souvent ça et sa façon d’agir lui laissait penser qu’aujourd’hui ne faisait pas exception. « Pourquoi je ne pourrais pas te rendre visite sans raison comme ça ? » Elle le regarda d’un air blasé, si en plus il s’amusait à la prendre pour une imbécile il était clair qu’il n’allait pas s’en sortir. « Je te connais un peu Mako. » Elle n’était absolument pas en train de sous-entendre qu’il n’agissait que par intérêt, elle le connaissait juste. Il ne fallait pas qu’il le prenne mal. La brune finit par lui demander ce dont il avait besoin, Paul allait arriver d’une seconde à l’autre et elle voulait avoir réglé cette histoire assez vite. « Mais de rien ! » Elle le regarda une fois de plus de façon appuyée, encore une fois il la prenait pour une imbécile et elle n’aimait pas ça. « J'ai paumé mes clés. J'ai besoin d'un endroit où rester en attendant que ma sœur réponde au téléphone et veuille bien me ramener le double. » « Ah, on y est ! » Elle se concentra ensuite un peu plus sur ce qu’elle venait d’entendre. « C’est très embêtant ça. » Perspicace. « Mais je ne peux pas t’aider, Paul doit venir ce soir et tu ne peux vraiment pas rester, désolée. » S’il avait appelé avant comme toute personne normale et bien éduquée il n’aurait pas fait tout ce chemin pour rien mais il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même.

Cora ne voulait pas croire que Mako était venu la voir juste comme ça, sans raison. Il venait toujours parce qu’il avait quelque chose à lui demander et il était évident que ce soir ne dérogerait pas à la règle. Seulement, le brésilien joua la carte de l’innocence et commença à la prendre pour une imbécile. Il ne plaidait clairement pas sa cause en faisant ça, il ne faisait que s’enfoncer en fait. Mais vraiment, elle ne lui en voulait pas pour ça, elle avait appris à s’y faire et elle l’aimait comme ça. « Mais je fais des choses parfois ! Je t'ai déjà apporté le petit-déj ! » Voilà qu’il s’enfonçait encore. Un peu plus encore et il allait passer dans l’appartement du dessous. « Oui tu l’as fait une fois et ce n’était vraiment pas le bon moment. Donc je ne sais pas si cet argument joue en ta faveur. » Il ne pouvait pas savoir que ce n’était pas le bon moment vu qu’en général elle ne dormait pas beaucoup mais elle l’avait tellement détesté ce jour-là ! Ça avait effacé la beauté de son geste qui pour une fois avait été totalement gratuit en plus. Enfin, ce n’était pas ça qui allait convaincre Cora de l’aider ce soir. Surtout que Paul était supposé arriver dans peu de temps et qu’il était hors de question qu’elle sacrifie sa soirée avec lui pour aider son ami. « Oh come on. » Cora secoua la tête en fronçant les sourcils dès qu’elle vit son air malheureux. Elle n’était pas faible au point de se faire avoir comme ça. « Il n'est pas là encore, je peux bien rester un peu. » « Mais il va arriver et je ne tiens pas à ce que tu sois encore là quand ce sera le cas. » Elle avait bien le droit de vouloir passer du temps seule et tranquille avec son petit ami, non ? Ou bien c’était trop demander ? « Dès qu’il arrive tu dois partir. C’est la seule chose que je veux bien t’accorder » soupira-t-elle par la suite, vaincue. Elle était vraiment trop bonne, Mako ne le méritait pas. « Coraaaaa, il fait très froid dehors. Tu vas pas me mettre à la porte quand même. » « Bien sûr que si je peux » répliqua-t-elle en fronçant les sourcils. « Et je le ferai. Tu ne me feras pas croire que c’était le seul endroit où tu pouvais venir. Tu n’as donc pas d’amis ? Je suis sûre qu’en cherchant un peu tu pourrais trouver une fille chez qui passer la nuit, ce n’est pas comme si ce genre de choses était difficile pour toi. »

L’exemple que Mako utilisait pour prouver à Cora qu’il faisait des choses pour elle ne jouait pas vraiment en sa faveur. C’était même le pire exemple qu’il pouvait donner. « Oh, ça devrait. Tu t'es montrée insupportable avec moi alors que je voulais simplement être gentil, c'est forcé de jouer en ma faveur ça. » Oui, elle se souvenait bien de ça. Mais dans son esprit, elle avait été dans son droit de réagir de cette façon. Elle aurait aimé le voir à sa place. « Accuse moi de mauvaise foi si tu veux mais non, ça ne joue toujours pas en ta faveur. » Il pouvait essayer tant qu’il le voulait, il ne réussirait pas à la faire changer d’avis. De la même façon, il ne réussirait pas à rester chez elle ce soir. Elle ne voulait pas qu’il soit là quand Paul arriverait. « Pourquoi ? » La jeune femme plissa les yeux, ça tombait sous le sens pourtant : elle voulait passer une soirée tranquille avec lui et Mako n’était pas quelqu’un que l’on pouvait qualifier de « tranquille ». Néanmoins, elle n’avait pas à se justifier. Il allait encore plus prendre la mouche et encore moins partir si elle s’expliquait. « Tu ne veux pas me le présenter ? » « Non » trancha-t-elle immédiatement. « Je n’ai pas envie de blesser ton égo. » Il ne faisait pas le poids face à Paul, pour elle en tout cas. Et comme elle était la voix de la raison, c’était forcément une vérité qui devait s’appliquer à tout le monde. Puis elle avait peur de la façon dont il pourrait se comporter avec le blond. Elle aimait beaucoup Mako et elle n’avait pas envie d’avoir à le détester. Cela dit, comme il n’allait pas lâcher l’affaire non plus, elle accepta de le laisser rester un peu. Il devait simplement partir quand son petit-ami arriverait. « Ça me va. » Quelque chose lui disait qu’il n’allait pas rester d’accord très longtemps… Et effectivement, il ne tarda pas à lui donner raison. Il tenta une nouvelle fois de rester plus longtemps et Cora lui demanda pourquoi il ne sortait tout simplement pas pour se trouver une inconnue avec qui passer la nuit. Il lui semblait que c’était un de ses passe-temps favoris. « Mais, ça ne m'intéresse pas. Je voulais juste passer une soirée tranquille chez moi. Donc, si ce n'est pas possible chez moi, ce sera chez toi. » Pauvre petit garçon malheureux. En entendant un tel drame, Cora ne put s’empêcher de se moquer de lui en affichant une moue triste. En tout cas, elle ne voyait pas pourquoi elle s’acharnait à lui parler comme il ne l’écoutait pas. Du coup elle se contenta de le suivre dans sa cuisine. Elle trouverait bien un moyen de se débarrasser de lui plus tard. « Je ne sais pas ce que c'était censé être mais c'est raté tu sais. » « Quelle perspicacité » le félicita Cora en soupirant. « C’est de ta faute tu sais ? » Une raison de plus de lui en vouloir. « Alors, comment tu vas ? » lui demanda-t-il ensuite comme si tout était normal. « Tu sais, je pense que tu devrais commander à manger pour te faire pardonner. Dans un bon restaurant. C’est la moindre des choses non ? Ou tu pourrais cuisiner pendant que je me prépare, mais je ne sais pas si je suis prête à te faire confiance là-dessus. »