Arthur semblait confus. Il avait baissé la tête et regardait le matelas comme si il cherchait la réponse à toutes les questions de l'univers. Le silence était arrivé sans crier gare. Il était bien dommage de voir à quel point l'animosité entre les deux jeunes gens restait primordiale. A croire qu'ils étaient bien trop différents pour s'entendre, finalement. La littéraire et le mathématicien, le pôle nord et le pôle sud. L'accepter restait inconcevable pour le jeune homme, cela voudrait dire qu'il ne pourrait pas jamais la comprendre. Si il ne la comprenait jamais il ne serait alors jamais capable de former un couple avec elle. L'idée lui donnait envie de vomir, ou de pleurer, il ne savait trop. Qu'en pensait-elle de son côté? Devait-il vraiment savoir si elle possédait les mêmes doutes que lui?Il risquait de s'attirer ses foudres une fois de plus, mais là n'était pas son but. Avoir une discussion sensée et régie par le calme l'était. Le phillippin se leva pour chercher le pantalon qu'il n'avait eu aucun scrupule à ficher par terre. Il fit de même avec son T-shirt, et secoua de ses mains sa chevelure ébène. La couverture demeurait pourtant sur son amante. Puis, alors qu'il semblait prêt à partir, il se posa aux côtés de la tête blanche sur le lit. Confortablement assis il croisa les bras : Où va-t-on comme ça? Pourquoi on devient tout de suite agressifs dès qu'on se parle? Sérieusement, ça fait combien de temps que l'on a pas eu une conversation normale au sujet... D'un homme politique ou d'un groupe de musique? Une pointe de nostalgie perçait timidement sa voix. Peut-être qu'en grandissant ils avaient changés, trop changés pour pouvoir s'entendre comme ils s'entendaient avant. Les préoccupations ne sont pas les mêmes quand on est adolescent. Ou peut-être était-ce de sa faute, ou de la sienne, il ne savait trop.

Tu crois que c'est à cause de moi? Tu trouves que j'ai changé, que je ne suis plus le même depuis que l'on s'est quitté à Los Angeles? On a tendance à ne pas se rendre compte de nos propres états âmes, pour cela on a besoin d'une personne à ses côtés. Je sais que je peux te faire confiance pour que tu me le dises. Mais cette agressivité, je n'en peux plus. Il y a dix minutes on semblait être les deux adultes les plus amoureux du monde, maintenant, un vieux couple au bord du divorce... En disant cela il venait de lui montrer subtilement qu'il avait bien sûr envisager de l'épouser maintes fois. S'il ne l'avait pas fait, il trouvait que c'était une erreur. Quelques années auparavant, mariés, ils seraient restés à Los Angeles sans broncher. Elle n'aurait pas fuit aussi facilement, elle n'aurait pas pu. Son regard se leva vers Myrcella, tristement. J'ai peur. Peur que l'on n'y arrive pas, que je n'y arrive pas. Peur de te perdre, alors. Quand la colère ne les animaient pas, c'était la peur.

Myrcella avait ramené ses genoux contre elle, tout en soupirant tristement. Elle le sentait s’éloigner à chaque seconde et cette idée la rendait malade. Elle ne savait même pas comment elle faisait pour ne pas exploser dans la seconde… pourtant, elle se maîtrisait, comme s’il fallait jouer un rôle et ne pas montrer d’émotion négative. Mais le discours d’Arthur fut loin de la laisser impassible en revanche : il lui arracha une large expression surprise, attristée, avant qu’elle ne prenne automatiquement sa main dans la sienne. Sous des derrières un peu froids et à toujours freiner des quatre fers pour tout, par peur d’être déçue, se cachait tout de même une âme sensible et généreuse. Peut-être l’avait-elle un peu trop oublié ces derniers temps, alors qu’elle n’avait vécu que pour son art et oublier tout le reste dans l’espoir que le manque d’Arthur ne lui fasse pas perdre littéralement l’esprit. « Tu es plus agressif qu’avant. Et moi, davantage sur la défensive, car je suppose qu’un chat averti en vaut deux… nous avons grandi, Arthur. Il est logique que nous soyons différents. Tu as tes préoccupations, tes peurs, tes doutes, c’est pour ça que je pensais qu’ici ou ailleurs… pourquoi l’important ne serait pas juste d’être ensemble ? » Myrcella haussa légèrement les épaules avant de le saisir pour le ramener vers elle et l’inciter ainsi à s’allonger contre le lit mais également contre elle tandis qu’elle le berçait doucement dans ses bras tout en caressant sa chevelure brune bouclée. Sans doute avait-elle plus de raisons d’avoir peur que lui, mais ils ne réagissaient jamais de la même manière. « Il faudrait que l’on apprenne à regarder dans la même direction… et on risque d’avoir du mal si nos problèmes nous sautent à la gorge dès que l’on ouvre la bouche. »

La jolie seychelloise n’avait pas fermé les yeux, toujours fidèle à sa crainte de perdre à nouveau la vue, mais également parce qu’elle réfléchissait vite et bien aux différentes options qu’ils avaient. En bonne optimiste qu’elle restait malgré tout… elle refusait de croire que tout était fini juste parce qu’ils avaient des difficultés et deux tempéraments de merde. « On pourrait partir quelques jours. Se retrouver rien que toi et moi dans un petit chalet à la montagne, n’importe où, dans un endroit désert avec personne d’autre que toi et moi. Histoire de repartir sur de bonnes bases… et notre complicité. Je t’interdis de prononcer le mot « film d’horreur » mais en dehors de ça, ça me semble être une bonne alternative. » Myrcella laissa échapper un petit rire avant de conclure, d’une voix murmurante : « Pour divorcer, il faudrait déjà que l’on soit mariés ! »

Arthur s'était sentit apaisé, lorsque la jeune femme l'avait attirée contre elle. Il se sentait toujours ainsi, dans ses bras. Il aimait l'affection féminine plus que tout, sûrement parce qu'il n'avait pas eu la chance de la goûter étant un enfant. Même sans avoir connu sa mère, il pouvait affirmé qu'elle lui avait manquée. Beth avait fait de son mieux pour lui faire oublier ses calvaires, mais jamais une femme, aussi incroyable qu'elle soit, ne pourrait combler le vide que la mort de son unique figure maternelle avait laissée.
Ses pensées divaguèrent légèrement, alors qu'il avait fermé ses yeux. Trop de sérieux ne faisait que de tuer la raison. Trop de temps éveillé, à sans cesse se poser des questions avait fini par le rendre aussi malade qu'un fou. Partir loin lui semblait une superbe solution à tout ce qu'il considérait comme problème. S'éloigner quelques temps pour mieux revenir, profiter de la distance par rapport aux choses réelles pour s'en endurcir. Mais, comme trop souvent il avait une multitude de "mais". Tu ne crois pas que ça se passera exactement comme notre voyage à Washington? Une fois là-bas, oui, ça serait à l'image d'une parfaite idylle amoureuse. On ne cessera pas de se rappeler à quel point on s'aime d'amour et de s'embrasser. Mais, une fois de retour ici, qui te dit que l'on ne sera pas habités de cette animosité? Finalement partir n'est jamais la solution. La preuve : tu es partie à New York, mais je suis là maintenant. Je t'ai retrouvée. Le pessimisme devait apparemment faire partie de sa nature. A tel point qu'il se rendit lui-même compte que ces propos n'avait cure de briser leurs espoirs amoureux.

Non, attends, je n'ai rien dit. Promis un jour j'arrêterais de toujours tout percevoir d'un oeil noir. On devrait s'en aller une petite semaine. A la montagne ou près de la mer. Bien que j'avoue avoir une préférence pour la neige. La chaleur, on peut très bien la trouver une fois dans notre lit le soir. Qu'en dis-tu? Son visage venait de faire un bond énorme entre la tristesse et la joie. Il s'illuminait et releva sa tête pour contempler son amante. L'idée de boire une bière, devant une cheminée, sachant qu'on est bien au chaud alors que la neige surplombe l'extérieur était alléchante. Il l'embrassa aussitôt que sa vague de bonheur le frappa de plein fouet. Quelles raisons avait-il pour paraître malheureux? Aucunes. Puis il l'embrassa encore, et encore une fois. Si tu tiens tant à divorcer, on pourrait régler ce problème. Dès que tu le souhaites. Le ton de la blague avait fait son retour, et il ne s'empêchait pas de regarder Myrcella au plus profond de ses prunelles. On peut tout arranger, il suffit de quelques mots et de quelques baiser pour ça. Il l'embrassa encore.