Tout était fin prêt pour l’accueillir, ou plus exactement pour LES accueillir. Il faut dire que l’irlandais ne s’y était pas prit au dernier moment pour préparer cette soirée. Depuis le temps qu’il en parlait et qu’il l’attendait, il avait tenu une fois de plus à mettre les petits plats dans les grands. Le simple fait de cuisiner était en lui-même un immense plaisir pour Peter. Mais lorsqu’en plus il le faisait pour Manuela, c’était encore mieux. Après tout ce qui était arrivé à la jeune femme, il avait souvent eu peur de la perdre, de perdre leur belle amitié si essentielle pour lui. Mais le temps lui avait appris que malgré ses cops de gueule, et le fait qu’elle ne veuille plus le voir pendant un temps, rien ne semblait pouvoir les séparer. En fait, Peter était plutôt têtu, et même après l’accident, il avait continué à aller la voir, à la traiter comme il l’aurait fait avant même si elle ne voulait pas de lui. Et sans savoir si sa technique avait été efficace ou pas, il avait vu l’état de Manue s’améliorer de jour en jour. Désormais, elle allait beaucoup mieux, et il était donc beaucoup plus plaisant de la voir, de pouvoir la faire rire et sourire comme si rien de tout ça n’était jamais arrivé.

Mais ces derniers temps, Peter avait été pour le moins occupé. Et pour une fois, ce n’était pas forcément par son travail ni ses études. Cette fois, son esprit était embué par autre chose, quelque chose de bien plus compliqué que les bouquins et les révisions ne pouvaient en aucun cas résoudre. D’abord, il y avait eu cette jalousie maladive qu’il n’arrivait pas à contrôler, et qui lui avait voulu de se séparer de Coleen alors qu’ils vivaient une si belle histoire. Par sa faute, ils avaient été contraints de faire une pause, et de ne plus se voir pendant un temps histoire de prendre l’air… Et l’air justement, Peter l’avait un peu trop prit. Une fois éloigné de la fille qu’il aimait, il avait rencontrée Mia et était littéralement tombé sous son charme. Elle avait absolument tout pour lui plaire, mais elle n’était pas Coleen. Et le hic était bien là : il était séduit par Mia, mais toujours amoureux de Coleen. Autant dire qu’il était perdu, coincé, incapable d’avancer d’un côté comme de l’autre. Et là, tout de suite, l’irlandais avait bien besoin d’une oreille attentive, quelqu’un à qui se confier sans être jugé, et sans (trop) passer pour un crétin. Pour cela, il n’y avait personne qui soit à la hauteur de Manue. Bien sûr, elle ne serait pas seule et viendrait accompagnée de sa fille, mais Peter prenait plutôt sa présence comme une opportunité de détendre l’atmosphère. Elle ne l’empêcherait pas de parler, et finirait certainement par s’endormir dans un coin de toue façon. Et puis elle avait du tellement grandir… Peter brûlait donc d’impatience d’entendre la sonnette retentir.

Cela faisait des semaines que Peter avait en tête d’inviter Manuela, mais avec sa vie « trépidante » il n’avait pas encore trouvé le temps de l’appeler. Mais désormais c’était chose faite, et la table dressée ainsi que le four encore chaud n’attendaient plus que les invités, pour leur offrir une bonne soirée qui, Peter l’espérait, pourrait lui apporter quelques pistes et surtout beaucoup de sourires et de soulagement.

Peter Ҩ Manuela

« True friendship is a plant of slow growth, and must undergo and withstand the shocks of adversity before it is entitled to the appellation - George Washington »

Ces derniers mois avaient été particulièrement éprouvants pour moi, principalement parce que j'avais dû faire face à pas mal de problèmes; tant sur le plan privé que professionnel. Il y avait d'abord eu le drame du 12 septembre et tout ce qui en avait découlé: ma paralysie, mes sautes d'humeurs à répétition ou ma descente aux enfers en d'autres termes. Complètement anéantie par cette soudaine impotence, je m'étais progressivement éloignée de tout le monde et mon entêtement chronique avait bien failli me faire perdre des personnes qui comptaient énormément dans ma vie. D'ailleurs le souvenir de ma dispute avec Matthew me revenait souvent en mémoire et m'arrachait un pincement au cœur à chaque fois. Bien sûr j'étais ravie que nous nous soyons réconciliés depuis, mais la simple idée de le voir sortir de ma vie me terrorisait, pour la simple et bonne raison que je le considérai presque comme un frère et que je ne savais pas ce que j'aurai bien pu faire sans lui. Il en allait de même avec Peter, mais les choses s'étaient passées de manière différente avec lui. Disons qu'il s'était montré plus clément, voir même un peu trop gentil, puisqu'il avait encaissé toutes ces choses horribles que j'avais pu lui envoyer en pleine figure sans rien dire. Comme avec la plupart des personnes qui souhaitaient me venir en aide à l'époque, j'avais passé mon temps à l'envoyer sur les roses en lui hurlant qu'il n'avait rien à faire là et que je ne l'appréciais même pas de toute façon. Bien sûr c'était complètement faux. Qui plus est, mes propos étaient blessants et injustes, je m'en rendais bien compte maintenant et, quiconque à sa place aurait sans doute quitté mon appartement en claquant la porte, mais Peter ne l'a pas fait. Pour je ne sais quelle sombre raison, il ne m'a jamais tourné le dos. Pourtant, Dieu sait comme j'ai pu me montrer exécrable avec lui. Le pire dans tout ça c'est que je n'aurai jamais pu supporter toutes mes sautes d'humeurs et mes longues crises de larmes si j'avais été à sa place. Mais Peter était un homme foncièrement généreux, un ami formidable et, j'avais de la chance de l'avoir. Si les choses m'apparaissaient avec tant de clarté, c'est parce que j'avais fait du chemin et que j'allais beaucoup mieux aujourd'hui. J'avais progressivement reprit ma vie en main et, forte des progrès que j'avais faits, j'avais même recommencé à travailler. Le hic c'est qu'entre mon travail à la boutique, mon site internet, les commandes auxquelles je devais répondre, Soraya et mes examens, je n'avais pas eu une minute à moi. Peter étant tout aussi débordé de son côté, cela faisait un petit moment que nous ne nous étions pas vu et la vérité était qu'il me manquait. Alors, forcément quand il avait téléphoné en nous proposant de venir dîner, je m'étais empressée d'accepter. Papa n'était pas là de toute façon et étant donné qu'il avait décidé de s'en aller (et que c'était pour bientôt), j'allais devoir m'habituer à me débrouiller seule. D'autant plus que le 15 juillet - jour de son départ - arrivait à grands pas.

C'est complètement surexcitée que j'arrivai devant chez lui. S'étant toujours très bien entendu avec Peter, Soraya ne tenait plus en place. A dire vrai, elle lui avait même fait un dessin qu'elle tenait fermement dans sa petite main. Je jetais alors un regard attendri à ma fille avant de lui baiser le front et de me résoudre à frapper à la porte. Peter mit peu de temps à nous ouvrir et au moment même où je le vis, un énorme sourire se dessina sur mon visage tandis que j'ouvris les bras afin de l'étreindre. Nous restâmes dans cette position quelques instants, puis Peter se redressa. « Tu m'as manqué tu sais? Je suis contente de te voir » je déclarai après quelques minutes en lui tendant la bouteille de champagne que j'avais amené pour l'occasion. Un petit verre ne pourrait pas nous faire de mal n'est-ce pas?
« Et moi, alors?! » finit par râler Soraya. C'est bête, mais avec tout ça, nous en avions presque oublié qu'elle était là. « J'ai pas le droit à mon câlin?! ». Quelle petite impatiente! « Puisque c'est comme ça, tu n'auras pas ton dessin, na! » conclut-elle en croisant ses bras sur sa poitrine. Décidément, elle n'était pas croyable cette petite!

Tel un gamin qui attendrait le retour de ses parents, persuadé qu’ils allaient lui ramener une surprise, Peter commençait à faire les cent pas à travers son appartement. Son impatience était palpable, et il avait beau scruter la fenêtre toutes les cinq minutes, il ne voyait jamais Manuela et Soraya arriver. Mais finalement, au bout d’une attente quasi-interminable, quelqu’un frappa à la porte. A peine eut-il entendu ces quelques coups que le visage de l’irlandais s’illumina d’un large sourire. En courant à moitié, le jeune homme se dirigea vers l’entrée, puis ouvrit la porte, tombant ainsi nez-à-nez avec ses deux invitées. Le sourire qu’arborait Manuela ne mentait pas : elle allait beaucoup mieux. Et le simple fait de la voir comme ça réchauffait déjà le cœur de Peter. Sans attendre, il répondit au geste de la jeune femme et se baissa pour la prendre dans ses bras. Profitant de cet instant de proximité, il ne bougea plus pendant quelques instants, trop heureux de retrouver son amie en bonne santé. « Tu m'as manqué tu sais? Je suis contente de te voir » L’irlandais laissa échapper un petit rire, comme pour signifier à son amie que la réponse qu’il s’apprêtait à lui fournir était une évidence. « Tu m’as manqué toi aussi ! » dit-il en haussant un sourcil à la vue de la bouteille de champagne que Manue lui tendait. Impressionné mais souriant, il s’en saisit et remercia son amie.

Mais tout à coup, une petite voix signala à Peter qu’il venait d’oublier quelque chose. Ou plutôt quelqu’un. En baissant les yeux, le jeune homme se trouva face à une Soraya déterminée, les bras croisés sur sa poitrine, avec son petit air renfrogné. « Puisque c'est comme ça, tu n'auras pas ton dessin, na! » Pete lança alors un regard malicieux en direction de la petite fille, accompagné d’un large sourire lorsqu’il se mit à la chatouiller. « Ah non ? » Soraya se mit alors à rire de bon cœur, et sembla oublier au passage la décision qu’elle venait à peine de prendre. Sans lui laisser le choix, l’irlandais se baissa et l’attrapa de son bras encore libre avant de la soulever comme s’il s’était agi d’une plume. Il reçut en riant le câlin que la petite fille consentit quand même à lui donner, puis se posta derrière Manuela pour entrer dans l’appartement à sa suite.

En arrivant dans le salon, il posa Soraya sur son canapé, fila mettre le champagne au frais, et s’attela à débarrasser son amie de ses affaires. Puis, le jeune homme retourna dans la cuisine pour servir les cocktails qu’il avait préparés tout spécialement pour l’apéritif. Plutôt fier de lui, il déposa deux breuvages colorés sur la table basse, à sa place et à celle de Manuela. Puis, il revint avec un autre verre, tout aussi coloré, rempli d’un cocktail sans alcool cette fois, qu’il tendit avec un large sourire à Soraya. Il la prit ensuite sur ses genoux et s’installa dans le canapé, puis tourna la tête vers Manue. « Ca fait tellement longtemps ! J’ai tellement de trucs à te dire… » s’exclama-t-il alors. Mais il reprit bien vite : « Mais toi d’abord ! »

Peter Ҩ Manuela

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Pour toute réponse, Peter se mit à la chatouiller ce qui la fit rire aux éclats. Il faut dire que ma fille n'était pas quelqu'un de foncièrement rancunier et tout comme moi, elle avait beaucoup de mal à faire la tête très longtemps. Si elle se fâchait? Assez fréquemment oui. Elle brillait par son impulsivité, maintenant elle finissait toujours pas revenir et s'excuser. Elle tenait cette faiblesse de moi, d'ailleurs j'avais beaucoup de mal à imaginer nos prochaines et inévitables disputes mère/fille. Il y en aurait surement, mais quelque chose me disait qu'elles ne dureraient jamais très longtemps. D'abord, parce que nous étions déjà très liées et que j'avais bon espoir que notre relation se solidifie au fil des années ensuite, parce que nous n'avions aucune volonté. Nous étions peut-être têtues, mais nous finissions toujours par baisser les armes. Parfois cela prenait du temps (comme avec Matthew par exemple), mais en règle générale, nous savions reconnaître nos torts et nous tâchions d'arranger les choses au mieux. Un peu comme aujourd'hui, lorsque Soraya m'avait désobéi et s'était empressée de rejeter la faute sur une petite voisine qui était venue jouer avec elle. Je l'avais fortement réprimandée, elle était partie bouder dans sa chambre, mais supportant difficilement d'être en froid avec ce bout de chou de presque cinq ans, j'avais fini par lever la punition. Sincèrement désolée, Soraya avait tenu à aller s'excuser auprès de notre petite voisine et c'est de cette manière que nous nous étions rabibochées. J'avais conscience du fait que j'allais devoir me montrer plus ferme avec elle. Pour être une bonne mère, il allait falloir que j’instaure un certain climat d’autorité, une barrière entre elle et moi, mais je n’avais pas été là pour elle au départ et, je crois que je cherchais simplement un moyen de combler mon absence, ce manque, ce rejet qu’elle avait subi de plein fouet. Alors, non je n’étais pas encore une mère parfaite, mais j’y travaillais.

Peter se décida finalement à reposer Soraya et il me débarrassa de mon manteau et de mon sac. Tout en le remerciant, je rejoignis ma fille au salon et attendis patiemment notre hôte. A ma plus grande surprise, Peter revint avec des cocktails colorés et probablement délicieux et tout en le regardant déposer les verres, je remarquai que de petits toasts étaient disposés sur la table basse. Monsieur avait mis les petits plats dans les grands, j'étais flattée, vraiment. Toutefois, je ne pus m'empêcher de le taquiner un semblant. « Dis, c'est très joli tout ça, mais est-ce que c'est buvable au moins? T'essaierai pas de m'empoisonner par hasard? » je demandais l'air faussement suspicieux en examinant le dit cocktail. Chasser le naturel et il revient au galop? C'est cela qu'on disait je crois. « Je plaisante. Ça a l'air délicieux, tout comme ces petites choses » je poursuivis en montrant les plateaux du bout des doigts. « Mais tu n'aurais pas dû te donner autant de mal ». Après tout, ce n'était que moi.

« Ça fait tellement longtemps ! J'ai tellement de trucs à te dire... Mais toi d'abord ! » reprit-il quelques secondes plus tard après avoir installé Soraya sur ses genoux. La petite était aux anges et n'arrêtait pas de sourire. Parfois, je me demandais même si elle n'était pas fascinée par mon ami. D'ailleurs quand lui , Wayne ou Matthew était dans les parages, c'était un peu comme si je n'existais pas. Elle n'avait d'yeux que pour eux. « La vraie question c'est par où commencer? ». Je répliquai quelques secondes plus tard après avoir trempé mes lèvres dans le breuvage multicolore que monsieur Brown m'avait concocté. « Hum... à propos c'est délicieux ». Il esquissa un rapide merci, mais il changea rapidement de sujet. De toute évidence, il n'avait aucune envie de s'éterniser sur sa préparation et préférais de loin savoir ce qu'il s'était passé pour moi ces derniers mois.
« Alors, le plus remarquable c'est sans doute que j'ai fait d'énormes progrès. Je recommence à sentir mes jambes et le bas de mon dos. Ça me fait un mal de chien, mais les médecins n'y croyaient plus et la douleur est définitivement quelque chose de positif à leur yeux. Je poursuis ma rééducation, mais ils pensent me faire passer sur le billard prochainement. Ils ont bon espoir de me voir remarcher un jour et je suis ravie de les entendre dire ça. A la surprise générale, mon père et moi nous nous sommes extrêmement rapprochés et bien que j'ai du mal à croire que je vais dire ça, il va énormément me manquer lorsqu'il va rentrer en Espagne. Je me suis réconcilié avec Matthew. Je n'aii pas été tendre avec lui, ni avec toi d'ailleurs, mais j'essaie de remettre de l'ordre dans ma vie. Côté travail? Tout va bien. J'ai eu mon diplôme, la boutique marche bien, je vends pas mal de mes créations grâce à mon site internet. Il ne me manque plus qu'à trouver les fonds et je pourrais créer et commercialiser ma propre ligne de vêtements. Sinon? J'ai engagé un détective privé pour retrouver ma mère. Ne me demandes pas pourquoi, je l'ignore, j'en avais besoin c'est tout. Oh et, j'ai fait une étrange rencontre. Je n'en ai parlé à personne pour l'instant parce que j'avais peur qu'on me prenne pour une folle, mais... j'en sais rien, ça me perturbe et, il fallait que je le dise à quelqu'un », je conclus en grimaçant, légèrement mal à l'aise. « Mais et toi? Raconte-moi ». Mon monologue était d'un tel ennui que j'étais étonnée qu'il ne se soit pas encore assoupi.

Dire que Peter était heureux de retrouver son amie était un euphémisme. En effet, Manuela comptait énormément pour lui, et ce depuis le jour même où il avait croisé son chemin. Sa gentillesse et sa bonne humeur avaient tout de suite séduits l’irlandais, qui était rapidement devenu un ami proche de la jeune femme. Elle était sa confidente à lui, celle à qui il pouvait tout raconter sans crainte d’être jugé. Et même lorsqu’elle avait été au plus mal, Peter s’était fait violence pour passer au-dessus de toutes ces réflexions et ces méchancetés qu’elle lui envoyait, se disant que tout rentrerait dans l’ordre un jour. Et il avait eu raison. Manue était loin d’être une personne méchante, et il pouvait comprendre qu’elle ait voulu s’isoler après l’accident. Mais jamais il n’avait eu l’intention de l’abandonner dans son malheur, et il avait inlassablement continué à lui rendre visite, même si a priori elle ne voulait plus de lui. Mais aujourd’hui tout était différent. Peter avait depuis quelques temps retrouvé la Manue qu’il connaissait, celle qu’il appréciait et dont il avait eu bien du mal à se passer pendant ces quelques mois un peu à part. Et puis il y avait Soraya… Ce petit rayon de soleil qu’il adorait, et avec qui il se comportait un peu comme le ferait un grand frère bienveillant. Alors pour elles, Peter avait tenu à mettre les petits plats dans les grands, ce qui n’échappa d’ailleurs pas à l’œil avisé de son amie. « Dis, c'est très joli tout ça, mais est-ce que c'est buvable au moins? T'essaierai pas de m'empoisonner par hasard ? » Comme s’il venait d’être prit sur le fait, Pete grimaça puis baissa la tête pour cacher son sourire. « Démasqué… » articula-t-il avant de reprendre : « Bien sûr que si ! Je tiens quand même à ce que vous reveniez la prochaine fois que je vous invite ! »

Mais bien plus que le repas ou l’apéritif, ce qui intéressait Pete était la présence de Manue. Depuis le temps qu’ils ne s’étaient pas croisés à proprement parlé, il brulait d’impatience de savoir ce qui avait bien pu se passer dans sa vie. Et comme il l’espérait, le jeune homme ne fut pas déçu. De son état de santé à sa ligne de vêtements en passant par ses relations avec son père, tout ou presque semblait avoir changé dans l’existence de Manue, en bien. D’ailleurs, plus il l’écoutait et plus le sourire de l’irlandais s’élargissait. Entendre toutes ces bonnes nouvelles d’un coup, alors qu’elles ne faisaient pas particulièrement partie de son quotidien en ce moment lui faisait du bien. « Woaw, Manue ! C’est génial ! Je suis super content, vraiment ! Ca me fait plaisir de te voir comme ça, je commençai à languir la vraie Manue !! » Toutefois, le dernier élément de son monologue attira l’attention de Peter qui lui lança un regard en coin, rempli de sous-entendus. Trouvant ainsi une occasion d’éluder la question qui le mènerait forcément à raconter ce qu’il se passait dans sa propre vie, l’irlandais sauta sur l’occasion : « Attends attends, tu me parles d’une rencontre étrange et tu crois que je vais laisser passer ça ?! Je veux tout savoir, dans les moindres détails ! C’est un garçon ? Hein ? Il est comment ?! Pourquoi je devrais te prendre pour une folle ? » Oui, Peter était un peu curieux, mais il voyait surtout là une opportunité de retarder l’échéance, de reculer le moment où il faudrait qu’il aborde le sujet tant redouté : Coleen. Ou plutôt : Mia et Coleen.

Peter Ҩ Manuela

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Peter semblait heureux, voire même soulagé d’apprendre que les choses étaient rentrées dans l’ordre. Il avait été l’une des rares personnes à ne pas se braquer et à rester à mes côtés. Pourtant, je n’avais pas été tendre avec lui. Les fois où je l’avais incendié ne se comptaient plus, mais il s’était contenté d’encaisser mes insultes, sans rien dire. Toutefois, nous avions été pas mal occupés ces derniers temps ce qui expliquait pourquoi il me posait autant de questions. Il voulait prendre connaissance des derniers bouleversements, savoir où j’en étais réellement. Je crois aussi qu’il avait compris que j’avais besoin de prendre mes distances pour faire le point et force était de constater que ce léger isolement m’avait plutôt bien réussi. Je me sentais mieux dans ma peau, j’avais évolué, mûrie aussi et c’est en partie pour ça que je reprenais progressivement goût à la vie. Bien sûr, Peter n’avait pu s’empêcher de me téléphoner ou de passer de temps à autre à la boutique (il avait été incapable de couper totalement le cordon si je puis dire), mais au final j’étais contente qu’il ait réagi ainsi. En s’accrochant à moi, en protégeant notre amitié et en supportant toutes mes crises; il m’avait prouvé qu’il serait toujours à mes côtés, qu’il ne m’abandonnerait jamais et j’étais vraiment touchée par son comportement. Peter était un de mes plus proches amis. Avec lui, nul besoin de prétendre; je pouvais tout lui dire et il savait pertinemment que je serais toujours là pour lui et ce, même si j’avais un peu manqué à mon rôle de confidente ces derniers temps. « Attends attends, tu me parles d’une rencontre étrange et tu crois que je vais laisser passer ça ?! Je veux tout savoir, dans les moindres détails ! C’est un garçon ? Hein ? Il est comment ?! Pourquoi je devrais te prendre pour une folle ? ». Je savais que je n’aurais pas dû aborder le sujet. Maintenant, j’allais devoir tout lui raconter et j’étais persuadée qu’après ça, il me prendrait pour une dégénérée. D’un autre côté, je n’arrivais pas à le chasser de mon esprit. Cet homme, cette rencontre m’obsédaient et il fallait que j’en parle à quelqu’un. Peter était un homme de confiance et l’un de mes meilleurs amis. Il ne me jugerait pas. C‘était la personne idéale, n‘est-ce pas? Je veux dire, il comprendrait? Il me soutiendrait? Il m‘aiderait à tirer cette histoire au clair? En tout cas, c‘est tout ce que j‘espérais. « Tu l’auras voulu » je répliquai quelques secondes plus tard en levant les yeux aux ciels. «  Mais je te préviens, si tu te moques de moi, je m’en vais » je poursuivis, faussement menaçante avant de tout lui raconter. «  Alors, voilà. J’étais tranquillement en train de faire les magasins. Pour tout te dire, je recherchai un cadeau d’anniversaire pour une amie. Il y avait foule ce jour-là et tu connais les gens, ils ne regardent pas où ils mettent les pieds. J’en avais plus qu’assez qu’on manque de me tomber dessus et c’était plutôt difficile de me frayer un chemin avec mon fauteuil ». Viens en aux faits, bon sang de bonsoir, je me maudis intérieurement tandis que Peter acquiesça d’un signe de la tête, impatient à l’idée que je lui en dise davantage. «  Bref, tout ça pour dire que j’étais prête à passer à la caisse quand quelqu’un m’a percuté de plein fouet! Mon sac s’est vidé sur le sol dans la bousculade, il a alors ramassé mes affaires et… quand il a levé les yeux vers moi, je suis restée tétanisée. C’est un peu comme si la terre s’était arrêtée de tourner. Ce type… c’é… c’était Adan. Enfin non, je sais que ça ne peut pas être lui, il est définitivement parti, mais si tu avais vu cet homme… Il lui ressemblait dans les moindres détails. C’était affreusement troublant. Un sosie parfait, je te jure. Je… Je sais pas quoi en penser. Je veux bien croire que les sosies existent, mais je doute sincèrement qu’on puisse à ce point se ressembler. Tu penses que j’ai halluciné? Tu crois que je suis folle, pas vrai? » je conclus en baissant la tête, affreusement gênée.

Spoiler:

Lorsqu’il s’agissait d’éviter de parler de lui, Peter trouvait toujours une combine pour s’en sortir. Et cette fois, la partie s’annonçait encore plus facile que d’habitude puisque Manue venait tout juste de lui tendre une sublime perche, qu’il ne se priva d’ailleurs pas d’attraper. Elle semblait avoir fait une rencontre particulièrement importante pour elle, et le jeune homme ne pouvait décemment pas passer à côté de ça. En bon ami et confident qu’il était, il se DEVAIT de lui demander de plus amples informations. Et avant même que la jeune femme ne daigne lui en dire plus, Peter se prit à imaginer tout un tas de scénarios possibles. Dans sa tête, il ne pouvait s’agir que d’un homme. Et s’il l’avait bouleversée à ce point, c’était pour lui un bon signe. En effet, et encore plus maintenant qu’elle avait la petite Soraya à charge, Pete ne souhaitait qu’une chose à son amie : qu’elle trouve quelqu’un de bien. Quelqu’un qui saurait s’occuper d’elle t de sa fille comme elles le méritaient toutes les deux. C’est donc un regard brillant et plein d’espoir que le jeune homme porta sur son interlocutrice. Il savait combien Manuela avait souffert par le passé, et espérait de tout son cœur que quelqu’un vienne définitivement mettre fin à tout ça même si, il devait bien l’avouer, elle se débrouillait de mieux en mieux toute seule. « Tu l’auras voulu » déclara-t-elle finalement, laissant un Peter aussi impatient qu’un gamin à qui on aurait promis une surprise. « Mais je te préviens, si tu te moques de moi, je m’en vais » Instantanément, le jeune homme leva les yeux au ciel. Comme s’il avait pour habitude de se moquer d’elle ! Enfin… Du moins lorsqu’il le faisait, c’est qu’il savait que cela restait gentil et qu’elle ne se vexerait pas. Peter ne lu donna donc aucune réponse supplémentaire, et se contenta de la fixer les yeux grands ouverts, en attendant qu’elle lui donne enfin son verdict.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Manue ne fut pas tendre avec les nerfs de Peter. Allant de banalité en éléments inutiles, elle lui contait l’intégralité de sa journée sans jamais vouloir en venir aux faits. Puis, au terme d’un suspense quasi-insoutenable pour le jeune homme, Manue se décida à lui expliquer cette rencontre… pour le moins inattendue. Elle était tellement gênée qu’elle baissa la tête, ce qui arracha une petite grimace à Peter. A vrai dire, il ne savait pas vraiment comment la rassurer. Le fait qu’elle ait pu voir Adan était tout bonnement impossible, et pourtant elle paraissait si troublée… « Je… Non, enfin je comprends que ça ait pu te perturber mais… Ce gars-là avait peut-être juste le même regard, et ton imagination a fait le reste… » tenta-t-il un peu maladroitement. « Mais toi, qu’est-ce que tu as fait. Tu… tu lui as parlé ? Et lui, il t’a dit quelque chose ? » Mine de rien, son histoire éveillait la curiosité de l’irlandais qui ne put s’empêcher de poser plus de questions sur la tournure qu’avait prise cette rencontre. C’était étrange, incroyable même. Mais en matière d’histoires incroyables, Pete avait un certain vécu qui le poussait à se dire que finalement, rien n’était totalement impossible.

Haha, t'inquiètes
Je me doute qu'il va pas s'en sortir aussi facilement oui