back to school

Composant le numéro de ma messagerie, je soufflais déjà. Je ne savais pas qui venait de me laisser un message mais cela devait être important et je n'aimais pas les sujets importants... Je préférez pensez à noël qui arrivait plutôt qu'aux ennuis. « Monsieur Anderson, vous êtes attendus à dix heures à l'université Place pour une petite mise à niveau. Étant donné votre changement soudain de carrière, vous allez devoir retourner en cours, quelques heures par semaine pour voir si vous êtes réellement qualifié pour être professeur de mathématiques » Entendant le son très solennel du directeur de l'établissement pour sourd dans lequel je travaillais depuis peu, je souffla. J'avais fais des sciences toute ma vie et il remettait mes capacités en question, chose qui me dépassait. Intérieurement, je bouillonnais mais je savais qu'éclater devant Madison n'était pas la chose à faire. Depuis que j'avais revu Norah et qu'elle avait décidé de quitter le café que nous fréquentions parce qu'elle était blessée, j'étais à fleur de peau et plutôt... colérique. Il n'était plus rare de me voir piquer une crise pour un rien ou me retrouver à la salle de sport une fois Mady chez mes parents pour ne pas devenir fou. Il fallait dire ce qui était, je n'acceptais pas les remarques de la jeune philippine. Comment osait-elle me parler de confiance alors qu'elle m'avait lâché comme un moins que rien ? Elle était partie du jour au lendemain sans prendre la peine de m'expliquer quoi que ce soit et tout était de ma faute. Le monde tournait vraiment à l'envers. Elle avait tellement changé en six mois que je soupçonnais un homme d'être derrière tout ça. Il devait bien avoir un crétin qui avait réussi à avoir sa confiance et à lui monter le bourrichon... Soufflant une nouvelle fois, je rangea mon téléphone dans la poche de ma veste et pris la direction de la faculté en plein manhattan. À cette allure, je ne serais jamais à l'heure mais ce n'était pas un problème pour moi. Je sentais que ma matinée allait être longue, très longue, vraiment trop longue même !

Alors que je voyais qu'il était onze heure quarante, j'attrapais discrètement mon téléphone et envoyé un message à la plus âgée de mes deux sœurs. Jane devait aller récupérer Mady à l'école à midi puisqu'il semblerait que je n'ai pas le temps de finir ce test et d'aller chercher ma fille. Finissant mon test, je croisa mes bras sur la table et y posa ma tête par dessus. S'il s'attendait à un autre comportement de ma part, c'était vraiment mal parti... Midi. Le professeur ramassa les copies et demanda à me voir quelques instants. Entretien fort concluent puisqu'à ses yeux, j'étais le plus compétent pour être professeur alors que je n'avais passé aucun examen pour. Pourquoi ? Tout simplement parce que j'avais été un très bon enseignant pour mes internes dans le passé... Souriant, je le remercia et me dirigea vers la cafétéria de ce grand bâtiment. Il me fallut une bonne dizaine de minutes avant de trouver le saint Graal. Prenant un café, je me posa à une table et soupira. Mais qu'est-ce que je faisais ici... J'avais quitté les bancs de la faculté il y a tellement longtemps que tout cela semblait ridicule à un point... Passant une main dans mes cheveux, je releva la tête et croisa le regard d'une brunette. Norah. À croire que ma journée ne pouvait pas être pire, il fallait que je croise la jeune philippine... Je lui fis un signe de la tête mais ce fut tout pour le moment. C'était elle qui était partie deux fois, je ne la rattraperais que sur le pas de la porte, si je le faisais... J'étais rancunier et même si je risquais de m'en vouloir, j'avais bien trop mal au cœur pour me laisser piétiner de la sorte..

« Je peux m’asseoir ou tu attends quelqu’un ? Je n’aime pas la manière dont nous nous sommes quittés la dernière fois, je pense qu’il serait bien qu’on parle un peu… » Regardant la jeune femme, je lui fis un léger sourire et secoua légèrement la tête de haut en bas en signe d'acceptation. Bien sur qu'elle pouvait se mettre à cette table. Après tout, je n'étais pas le roi du campus et je n'attendais personne d'autre que moi même. Je me redressa légèrement et poussa ma sacoche sur la chaise à côté de moi. Je n'allais pas prendre toute la place alors qu'elle avait un plateau repas et que moi, je n'avais qu'un petit café. En face de Norah, je ne savais plus quoi dire. Je m'étais tourné et retourné cette situation dans ma petite tête pendant des jours et des jours et voilà qu'une fois devant le fait accompli, je ne bougeais plus. Je n'aimais pas la façon dont nous nous étions quittés l'autre jour au café. Je savais que j'avais dépassé les bornes en lui hurlant à moitié dessus mais c'était ma façon de me défendre... Bien entendu, la jeune philippine n'avait pas connu ce côté sombre de ma personnalité pendant nos soirées à Paris. Elle ne connaissait que le coté doré et brillant de mon âme. Je savais bien qu'elle allait avoir du mal à accepter le choix que j'avais fais de ne pas lui présenter Madison – et de jamais lui en avoir parlé – mais à l'époque, je ne m'étais pas considérée comme un père, absolument pas. J'avais plus l'impression d'être un fantôme pour ma fille, d'être un guignol, un pantin qui était là pour un bisou le soir et qui repartait faire la fête jusqu'au bout de la nuit. J'avais été un père horrible, un monstre sur pattes et j'avais longtemps eu peur de la brunette face le parallèle entre moi et son paternel... Je n'avais rien du monstre que Monsieur Princeton était mais j'avais été tellement ridicule avec ma fille que mon incompétence à être père se rapprochait de celle du père de Norah. J'avais voulu la protéger de ces épreuves mais elle ne le verrait sûrement pas comme cela... Cependant, il fallait que je lui explique, que je lui donne toutes les cartes en main pour qu'elle comprenne mon choix de cacher la petite tête blonde que j'avais. J'étais prêt à me mettre à nu comme nous l'avions si bien fait à Paris. J'étais prêt à la voir devenir folle face à mes propos et à m'incendier parce que j'avais mal penser. J'étais prêt à tout mais surtout à m'expliquer, je ne pouvais pas laisser tout cela dans cette situation sinon j'allais longuement le regretter. J'étais toujours rancunier de son abandon mais si elle m'expliquait, elle aussi, les raison de son départ, tout ira sûrement mieux... « Je suis désolée pour ma réaction de l’autre jour, par rapport au fait que tu m’aies caché ta fille mais aussi par rapport au fait que je ne t’ai rien dit en partant… Je pense qu’on devrait tenter chacun de comprendre où est le problème de l’autre et repartir sur de bonnes bases non ? » Je porta ma boisson à mes lèvres et acquiesça légèrement. Elle n'avait pas tord et j'étais de son avis, il fallait crever l'abcès avant d'arriver à un point de non retour. Je savais très bien qu'elle était en colère contre moi et elle savait que j'étais en colère contre elle mais il fallait que l'on passe cet état pour pouvoir avancer, pour pouvoir se retrouver. « Totalement... Je voulais aussi m'excuser pour la dernière fois... J'ai dépassé les bornes en élevant la voix avec toi » Mettre autant de passion dans une discussion ne voulait-il pas dire qu'il y avait des sentiments ? Après tout, les plus beaux couples se déchirent souvent... Je chassa rapidement cette idée totalement folle de mon esprit et passa une main dans mes cheveux. « J'ai totalement pété les plombs mais te revoir puis ton rejet, ça m'a tué... Mais je suis ouvert à la discussion, il n'y a pas de soucis la dessus... Tu me connais, je ne supporte pas rester en mauvais terme avec quelqu'un... Surtout avec toi » Etait-ce une déclaration ? Peut être pas mais c'était un bon début pour se lancer sur la voix de la déclaration. Je ne savais pas trop où cela allait nous mener mais qui ne tente rien n'a rien. Me raclant légèrement la gorge, je dis « Pose moi toutes les questions qui te passent par la tête et je t'y répondrais » J'y allais à cœur ouvert et cela risquait de faire mal ! Aïe aïe aïe.

Me retrouver face à Norah et disucter avec elle ne pouvait avoir que du bon. Du moins, c'était ce que je croyais... Je me demandais comment elle allait prendre le fait que j'avais été le pire des père du monde pendant près de quatre ans. Madison était ma petite princesse mais cela n'avait pas été le cas dès sa naissance. Je l'avais longuement mise de côté, avec sa mère, et je regrettais largement mon acte... Seulement la petite ne m'en voulait pas, elle ne comprenait pas vraiment ce qui se passait entre la mort de sa grand-mère, celle de sa mère et le déménagement récent que je lui avais fais subir, sans compter sa perte d'audition. Depuis trois mois, Madison voyait son monde changer du tout au tout et c'était à partir de ces moments que j'avais décidé de prendre mon rôle de père au sérieux. Je n'étais plus qu'un homme comme un autre dans sa vie, j'étais celui qui la nourrissait, qui la douchait et lui achetait ses habits. J'étais enfin un père, avec trois ans et demi de retard. « Parle moi de Madison, Noa… Dis moi tout ce que tu ne m’as pas dit pendant toutes ses années… Elle est importante pour toi alors je veux comprendre pourquoi je n’en ai jamais entendu parler. » Regardant la jeune femme, je pris une grande bouffée d'air avant de passer une main dans mes cheveux. Je me demandais vraiment comment elle allait prendre la nouvelle. Je n'étais pas le père de l'année, loin de là même et cela expliquait mon mutisme pendant tout ce temps face à ma fillette. Le comprendrait-elle ? Je n'en savais trop rien mais je lui devais la vérité. Au moins, je n'aurais rien à me reprocher si elle décidait de ne plus m'adresser la parole ou je ne sais pas quoi. Cette révélation pourrait nous rapprocher comme nous séparer un peu plus. Il fallait croire que l'océan qu'elle avait mis entre nous n'avait pas suffit. « Demande moi aussi ce que tu veux savoir… Pour que tout rentre dans l’ordre la conversation doit aller dans les deux sens… » J'allais lui demander plusieurs petites choses mais il fallait d'abord que je vide mon sac. Après tout, elle avait fait le premier pas aujourd'hui et c'était à mon tour de faire un pas dans sa direction. Buvant une nouvelle gorgée de ma boisson – histoire de me donner du courage – je la regarda et dis « Tu n'en as jamais entendu parler pour la simple et bonne raison que je ne me suis jamais occupée de ma fille en quatre ans. Je suis bel et bien son père mais les trois premières années de sa vie, ça s'arrêtait là. On vivait chez ma grand-mère, sa mère et moi et c'était elles qui élevaient Madison. Moi je passais mes journées au bloc, mes soirées en boite ou avec toi quand tu avais tes jours de repos ou bien avec Florie, à l'hôpital pour ses examens. Je ne me suis strictement jamais occupé de Madison jusqu'il y a trois mois. Sa mère était totalement défoncée, ma grand-mère sur le point de mourir et moi, je bossais. Elle était malade comme pas possible et Sara n'a pas été foutue de l'emmener à l'hôpital vu qu'elle était au septième ciel » Je déglutis difficile et tenta de reprendre mon calme. J'en voulais à mon ex petite amie, et pas qu'un peu. Soufflant légèrement, je passa une main dans mes cheveux. « Bref. Sara a entendu la gamine pleurer au bout d'une heure et demi, deux heures et elle l'a emmené à l'hôpital. Elle avait la méningite et c'était pris trop tard donc elle a perdu l'ouïe. Pendant ce temps, j'étais en opération et j'ai même pas sauvé ce patient. Du coup, j'ai tout arrêté du jour au lendemain. J'ai quitté l'hôpital où je bossais et j'ai appris le langage des signes aussi rapidement que possible pour Madison. J'ai été le pire des pères du monde et elle ne comptait pas pour moi à l'époque » Je ne préférais même pas croiser le regard de la jeune philippine, je ne voulais pas voir ses yeux remplis de déception. Soupirant doucement, je dis « Je ne t'en ai pas parlé parce qu'elle comptait pas pour moi. Ça aurait pu être la fille du voisin, ça aurait été la même chose » Aujourd'hui, je m'en voulais énormément d'avoir agis ainsi. J'avais envie de me foutre des baffes à longueur de journée quand je voyais l'enfer dans lequel j'avais plongé ma fille. Me raclant légèrement la gorge, je dis « Je voulais pas que tu te dises que tous les hommes étaient des salops donc plutôt que de te dire que je me fichais de ma fille comme de ma première couche, j'ai rien dis. J'ai fait l'autruche » Et si je ne l'avais pas retrouvé en companie de Madison, j'aurai continué à faire l'autre. Passant une main devant mon visage, je dis « Et toi ? Pourquoi tu es partie de Paris ? T'avais envie de sentir l'air new yorkais ? » Un léger rire nerveux se glissa entre mes lèvres entre ouvertes. « Personnellement, je suis rentrée parce que tu es partie, puis Florie est venue à New York. Sara est morte et ma grand-mère s'est laissée mourir parce qu'elle savait que Madison avait quelque pour veiller sur elle. Plus rien ne me retenait là bas » Absolument plus rien... Plus de métiers, plus de famille, plus Norah...

Tout lui avouer était une aussi bonne chose qu'elle pouvait être mauvaise. Elle pourrait très bien m'en vouloir de tout lui avoir caché. Bien entendu, je lui exliquais la situation de la façon dont je l'avais vécu mais en avait-elle quelque chose à faire ? Elle m'avait dis s'être sentie trahie et je savais très bien que, pour une fille comme Norah, la confiance faisait tout. « Je n’aurais peut être pas pu comprendre ton attitude mais il vaut mieux un père comme toi qu’un père comme le mien crois moi ! » Bien sûre que non elle n'aurait pas compris et c'était pour cela que je n'avais rien dis. J'avais anticipé la réaction de la jeune femme et je ne mettais pas trompé, malheureusement. Je connaissais assez bien la jeune philippine pour – plus ou moins – savoir ce qu'elle pensait ou voulait dire. Nous avions passé tellement de temps ensemble que tout était plus facile entre nous. Le petit 'discours' de la brunette me semblait aussi bien moralisateur qu'une sorte d'aide. C'était comme si elle voulait m'aider à me détacher de cette culpabilité qui me rongeait tous les jours un peu plus. J'avais laissé souffrir mon bébé et même si je tentais de relâchais la pression constante que je m'imposais, il était impossible pour moi de faire comme si de rien n'était. Madison ne m'en voulait pas puisqu'elle n'avait jamais réellement été 'soutenue' par sa mère non plus et qu'elle trouvait cette absence normale mais c'était à moi de me pardonner et ça, ce n'était pas pour tout de suite ; un jour peut être... « Vu la mère qu'elle a eu, le bisou de tous les jours était sûrement la seule marque d'affection qu'elle a eu pendant des années alors là dessus... » Alors que j'aimerais que ma fille s'en prenne à moi et m'en fasse voir de toutes les couleurs, elle était parfaite. Toujours souriante, Madison ne rechignait jamais pour rien. Elle avait rapidement compris qu'elle ne pouvait sûrement plus jamais entendre et qu'elle devait faire avec. Les médecins m »avaient longuement dis que la maladie était arrivée tôt et que c'était bien mieux que lorsqu'elle se déclarait plus tard, après des dizaines d'années d'auditions. Maintenant, ma petite princesse pouvait s'adapter à son rythme et n'était pas trop 'bousculée'. « A moi de passer à la casserole si je comprends bien maintenant… » Souriant légèrement, je secoua doucement la tête de haut en bas pour lui dire que maintenant, c'était à elle de se mettre à nue. Elle avait voulu savoir pourquoi j'avais caché mon enfant, je voulais savoir pourquoi elle était partie. Elle avait voulu fuir, quitter le pays qui l'avait sauvé quelques années plus tôt mais qui l'enfermait suite au procès qui mettait en cause son géniteur. Ses motivations étaient compréhensibles, il n'y avait pas à dire, mais j'étais toujours bloqué sur le fait qu'elle n'avait rien dit sur sa destination et surtout, sur son départ. Du jour au lendemain, j'étais venu au restaurant où elle travaillait et on m'avait appris son départ. Du jour au lendemain, elle avait tout envoyé valsé et cela me faisait mal, très mal. J'essayais de ravaler la fierté et la rancune qui me gagnait puisqu'elle avait fait le meilleur choix pour elle... Souriant légèrement, je dis « Je comprends même si je l'ai mal pris, je dois te l'avouer... Un message prévenant de ton départ n'aurait vraiment pas été de refus » lançais-je, riant à moitié pour détendre l'atmosphère. Une lettre, un coup de fil, un message, tout aurait été le bienvenue. Au lieu de ça, je m'étais retrouvé seul comme un con, me bataillant avec Florie qui voulait partir prendre l'air ailleurs, avec Sara qui ne cessait pas une minute de se drogue mais surtout, me bataillant avec moi même. « Et puis… Certaines choses ne pouvaient plus durer, plus comme ça… Je ne pouvais plus… » Relevant la tête, j'arquais un sourcil. Certaines choses ? Quelles choses ? Tout cela m'intriguait puisque je connaissais parfaitement la brunette et rien ne m'interpellait, ne me faisait tilt, quand elle parlait ainsi... Je ferma les yeux quelques secondes et les rouvris sans pouvoir répondre à ma question. « Certaines choses ? Qu'est-ce que tu ne m'a pas dis lorsque nous étions à Paris ? Tu sais, tu peux avoir confiance en moi Norah... Je sais que tu te sens trahie vis à vis de Madison mais je n'ai pas changé, je suis toujours ce gosse de riche qui va manger au restaurant six jours sur sept parce qu'il ne veut pas rentrer chez lui » Bon, sauf que le restaurant était désormais transformé par la cantine scolaire, ou un petit sandwich préparé préalablement...