Ce matin-là, se fut les rayons du soleil venant caresser et chauffer sa peau à travers la fenêtre qui réveillèrent Poppy. Réclamant quelques minutes de sommeil supplémentaires, elle attrapa son oreiller et fourra sa tête dedans. Il n'était pas très habituel, pour elle, d'être réveillée par le soleil, même un samedi. D'une part parce qu'elle avait l'habitude de tirer les rideaux avant d'aller se coucher et d'autre part car elle se levait toujours avant que le soleil ne soit trop haut dans le ciel. De plus, elle sentit l'intérieur de sa bouche assez sec, comme si elle avait bu de l'alcool, et ses lèvres déshydratées pour avoir donner nombre de baisers. Sans ouvrir les yeux, elle essaya de se rappeler la soirée de la veille. Elle se souvenait qu'elle était sortie, seule, dans un club. Juste après le boulot, elle était rentrée chez elle, s'était changée, et avait décidé d'aller s'amuser, de passer une bonne soirée, en boîte. Elle avait encore en mémoire la paire de bottines en velours bleu foncé et gris Jimmy Choo qu'elle avait aux pieds et la robe-pull bleu électrique qu'elle avait enfilé en hâte avant de partir. Elle se souvenait d'ailleurs qu'elle avait été très facile à désenfiler – non qu'elle l'eut choisi ce soir là pour cette raison-là. Elle se souvint alors du beau et ténébreux jeune homme qui l'avait avec plaisir aider à se déshabiller, tard dans la soirée, après qu'elle lui eut proposé de finir la soirée chez elle. Elle n'avait pas une image très clair de son visage, mais de sa voix, du moment où il l'avait interpellé dans le club où ils s'étaient rencontrés, des instants qu'ils avaient partagés cette nuit. Et en effet, en bougeant son pied de quelques centimètres, Poppy effleura une jambe qui n'était pas la sienne.

Cette impression – celle de ne pas avoir un souvenir précis de sa soirée et d'avoir une fois encore une relation d'un soir avec un jeune homme dont elle ne savait presque rien – n'était pas tout à fait agréable, sans pour autant être totalement déplaisante. Poppy était une jeune fille naïve qui rêvait du prince charmant, de l'homme avec qui elle vivrait heureuse pour toujours – mais elle ne pouvait jamais se retenir de faire la fête, de draguer un garçon et de se laisser aller au plaisir charnel avec lui, même le temps d'une simple nuit. Elle ne pouvait s'en empêcher, c'était un fait et c'était presque en train de devenir une habitude. Elle retira doucement l'oreiller de devant son visage. De là où elle était, allongée dans son lit, elle avait une vue globale de sa chambre récemment redécorée dans les tons blanc cassé, rose pale et chocolat. Elle voyait sa robe bleue un peu plus loin, sur son bureau et une chemise et une paire de chaussures qui appartenaient visiblement à un homme. Poppy bailla silencieusement, la main devant sa bouche puis se tourna légèrement vers celui qui partageait son lit. Elle ne voyait que ses cheveux et une partie de sa joue, mais cela lui suffit pour se remémorer entièrement son visage. Il était difficile de ne pas le remarquer, de ne pas le trouver charmant, elle s'en était aperçue dès un premier regard échanger, même si à ce moment-là, elle n'avait pas prévu qu'ils finiraient la soirée chez elle. Après un effort qui dura quelques secondes, elle retrouva son prénom: il s'appelait Nate. Sans se défaire de sa position allongée, Poppy se retourna de l'autre côté, au bord du lit et attrapa au pied de celui-ci, ses sous vêtements La Perla bleu pastel qu'elle enfila rapidement et agilement sous la couverture.

Maintenant réveillée depuis plusieurs secondes sinon quelques minutes, Poppy commençait à avoir les idées claires. Elle s'était, de nouveau, laissée tenter par les plaisirs sensuels avec un homme séduisant mais dont elle ne savait pas grand chose. Elle savait pertinemment que ce n'était pas ce qu'elle recherchait, comme relation, mais que c'était quelque chose chez elle qu'elle avait du mal à contrôler. Maintenant, peut-être pouvait-elle tout de même décider d'être polie et gentille avec lui, et lui proposer de prendre un petit déjeuné, si ce n'est de faire un peu plus connaissance. Contente de son idée, la jeune fille s'assit au bord du lit et prit son portable, dans son sac à main sur la table de nuit. Elle tapa rapidement sur les touches de son Blackberry, envoyant un message à Micaela, sa cuisinière, d'apporter non pas un mais deux de ses excellents petits-déjeuné avec deux cafés du Starbucks, dans sa chambre, dans les dix minutes à venir. Ceci fait, elle regarda l'heure, constata qu'il était dix heures moins le quart et remit le portable à sa place initiale, sachant que Micaela obéirait sans prendre la peine de lui répondre. Puis elle se leva et remarqua par la même occasion que le jeune homme avec qui elle avait passé sa nuit, Nate, n'était pas plus endormi qu'elle.

Les aventures sans lendemain étaient quelque chose de vraiment facile et peut-être était-ce la raison pour laquelle Poppy s'y laissait si volontiers et si régulièrement tentée. Elle n'avait qu'à bien s'habiller, sortir en boîte ou dans n'importe quel club de Manhattan, séduire un charmant jeune homme dans les bras de qui elle finirait la nuit, et au matin, le congédier ou partager un petit déjeuné avant de lui demander de partir. C'était simple, facile, plaisant, agréable. Quelque chose qu'elle aurait presque pu faire chaque jour, ou tout du moins chaque week-end. Mais Poppy ne voyait pas sa vie comme ça. Elle était une rêveuse et une romantique incorrigible qui se revendiquait d'être comme tel. Pourtant sa conception de la vie, ses rêves perpétuels ne coïncidait pas tellement avec sa façon d'agir. Elle aimait beaucoup trop s'amuser et elle se laissait bien trop aisément tentée pour ça. Alors au lieu d'être une fille sage et raisonnable en quête de l'homme de sa vie, elle avait malgré ses rêves exaltés et romantiques ce genre d'histoires d'un soir. Ce matin-là, la jeune femme était d'une humeur plutôt bonne, presque guillerette, et le garçon qu'elle avait ramené chez elle, en plus d'être bel homme, était plutôt sympathique, charmant, courtois, alors au lieu de lui demander gentiment de partir dès l'instant où il eut ouvert les yeux – chose qu'elle avait déjà faite avec d'autres hommes, notamment quand elle était irritée – elle lui proposa généreusement un petit déjeuné et lui adressa même l'un de ses plus beaux sourires, sincère.

Comme chaque matin, tout ce que demandais Poppy, c'était un bon grand café, quelques-uns des pancakes parfaitement délicieux que préparaient sa cuisinière, une cigarette et peut-être aussi le journal du jour. Tandis que Nate se levait et enfilait quelques fringues, elle prit dans le tiroir de sa table de chevet, une pince à cheveux avec laquelle elle coiffa négligemment sa longue chevelure blonde en un chignon lâche. À peine eut-elle fini qu'elle remarqua que Nate s'était approché d'elle. Se tournant face à lui, elle le regarda assez intensément et se laissa embrasser, mettant ses mains sur les épaules du jeune homme et rendant le baiser un peu plus langoureux.

Poppy s'écarta de Nathaniel et repéra vite le blouson de celui-ci, sur sa commode près de la porte. Elle s'en approcha et y attrapa dans la poche un briquet et deux cigarettes. Elle mit les deux cigarettes entre ses lèvres, les alluma et remit le briquet là où elle l'avait pris. Ce fut à ce moment-là que la cuisinière, qui préparait à manger à Poppy depuis que celle-ci avait trois ou quatre ans, entra discrètement dans la chambre et posa le plateau de petit déjeuné sur la commode à côté de la veste du jeune homme, avant de repartir aussi vite qu'elle était arrivée. Poppy ne fit pas vraiment attention à elle, se contentant d'aller chercher le plateau garni de deux cafés brulants du Starbucks Coffee et, comme l'avait prédit la jeune femme, de quelques pancakes. Elle posa le plateau de petit déjeuné au bord de son lit puis donna à Nate son café et sa cigarette.

La jeune new-yorkaise prit l'un des lourds cendriers que lui avait laissé son père, qu'elle trouva dans un coin de sa chambre, elle posa sur son lit et elle y déposa sa cigarette avant de s'allonger sur le ventre par-dessus les draps pour manger quelques morceaux d'un pancake et boire une longue et chaude gorgée de café noir comme elle l'aimait.