« Juste pendant cinq minutes, je ne veux pas perdre mon idée mon ours ! » s’excusa Elvia non sans continuer de taper, ne s’arrêtant même pas pour le regarder afin de finir plus vite et d’être d’autant plus rapidement entre ses bras pour son fameux câlin. « Je te donne tous les câlins que tu veux dans quatre minutes montre en main ! » poursuivit-elle avant de n’être bêtement interpellée par la sonnerie du portable de Gabriel, qui ne manqua pas de l’interrompre dans son écriture. Le discours qui s’en suivit ne lui plut guère et si elle finit en quatrième vitesse sa phrase commencée, elle ne manqua pas de refermer aussitôt son ordinateur portable pour revenir sur le lit, le visage presque grave. « Mais tu ne vas pas déjà repartir Gabriel, tu viens à peine de rentrer ! » protesta vivement Elvia, sans forcément péter littéralement une durite pour autant. Elle ne s’appelait pas Morgana Wolf mais cela ne l’empêchait pas pour autant de marquer son regard d’une vive panique ainsi que d’une appréhension parfaitement digne d’elle. Son mari était resté suffisamment absent pour que son boulot ne l’envoie encore à Perpète les petites olives pendant un temps indéterminé. « Je sais que techniquement parlant c’est ton travail et que je n’ai pas mon mot à dire mais flûte… tu pars toujours dans des coins très dangereux et moi je m’inquiète énormément pour toi. D’autant plus maintenant qu’il y a les jumelles et que j’ai souvent tes parents sur le dos… mais ce n’est pas le plus important tes parents, je sais que c’est ce que tu aimes, mais… je ne sais pas si je supporterai des années que tu partes tout en sachant que tu peux très bien ne jamais me revenir. » L’émotivité d’Elvia avait reprit le dessus en faisant couler des larmes le long de ses joues. A sa décharge, la gueule de bois était loin d’aider.

« Ah non, tu n’as pas le droit d’être en apnée, c’est criminel ! Tu es au courant que tu me fais de l’odieux chantage mon ours ? » s’était-elle amusée juste avant que la conversation ne prenne une teinte nettement plus sérieuse et… ne soit marquée par ses larmes. C’était sûrement ridicule mais Elvia ne pouvait pas s’en empêcher. Elle ne comptait plus le nombre de prières qu’elle se surprenait à faire, de nuits blanches successives, toujours à espérer qu’il ne lui arrive rien. Et d’ailleurs, qu’il soit entouré de militaires ne la rassurait guère, car il restait en terrain dangereux et que par essence, pour effectuer ses reportages de guerre, il ne devait pas se rendre au pays de Candy. Voilà pourquoi elle se blottit d’autant plus dans ses bras avant de n’accepter finalement de croiser son regard, Gabriel balayant ses larmes de son beau visage sans pour autant que celles-ci ne cessent de couler. « Ah oui, vraiment ? Il n’y a rien qui puisse t’empêcher de revenir vers moi ? Mais imagine cinq secondes que tu sois en plein reportage et que tu tombes sur un terrain miné… tu penses vraiment que tes précieux militaires, si doués et entraînés soient-ils, te protègeront ? Tu ne peux pas forcément anticiper toutes les catastrophes Gabriel et je ne sais pas combien de temps je vais supporter des nuits et des nuits à prier toute seule dans le noir pour que tu me reviennes en vie ! » Elvia rougissait actuellement, se sentant la pire égoïste que la terre ait porté mais elle ne pouvait décemment pas s’en empêcher. « Tu l’as dit toi-même, « sans toi je manque d’air », il en est de même pour moi mon ours. Pourquoi tu ne prends pas ce poste de rédacteur en chef maintenant ? Je sais que c’est monstrueusement égoïste Gabriel mais si tu venais à disparaître… » La jolie suissesse en baissant le regard, honteuse. Ce n’était pas forcément le bon moment pour dévoiler ses pires craintes mais tant pis.