La rentrée n’était plus très loin et j’étais impatiente de recommencer une année supplémentaire. D’ailleurs, j’avais presque lu la moitié des livres de ma liste mais pour bien faire, je m’étais dirigée en ce jour vers le secrétariat dans l’unique but de prendre un formulaire pour m’inscrire à une option théâtre cette année. Je savais que les places étaient très prisées mais peut-être qu’en m’y prenant un peu plus tôt, j’aurais un peu de chance. En réalité, je n’étais pas particulièrement friande de théâtre –bien que j’appréciais d’en lire ; mais j’avais pour objectif de sortir un peu de ma coquille. J’étais trop timide, c’était mon plus grand défaut mais cette année, j’avais décidé de me prêter au jeu de la vie sociale. D’ailleurs, je n’étais pas mécontente du relooking que m’avait offert Calliopé une semaine auparavant car ma nouvelle garde-robe me mettait bien plus en valeur que l’ancienne. Je me sentais belle et à l’aise dans mes vêtements si bien qu’un léger sourire flottait sur mes lèvres. « Tiens, tiens, le petit rat de bibliothèque sors le grand jeu apparemment se faire sauter a décoincer bien des choses en elle » m’interpella une fille que je n’avais jamais vu. « Euh c’est à moi que vous vous adressez ? » demandais-je confuse. « Elle fait sa mijaurée alors que tout le monde sait que c’est une petite chienne en chaleur qui adore se faire prendre à l’arrière d’une bagnole » renchérit son amie, me plongeant dans l’incompréhension totale. « Tu as oublié de dire aussi qu’elle adore être attachée ! Tsss elle joue les sainte ni touche mais c’est la marie couche toi là de l’université. A mon avis, y a pas que Tristan qui lui soit passé dessus » m’insulta une autre. Le rouge me monta aux joues tandis que je commençais à comprendre de quoi elle parlait. Cette fameuse fête !! « Ecoutez, je ne sais pas ce qu’on vous a dit mais je n’ai jamais eu aucun rapport sexuel avec lui » Me défendais-je en ressentant presque le besoin d’aller me cacher dans un trou de souris tant je me sentais mal. « Ouais c’est ça ! On va te croire et ton nouveau look ce n’est pas pour rameuter d’autres mecs comme par hasard… Elle nous prend en plus pour des connes, j’y crois pas » répliqua la même sur un ton froid et mesquin. « Ce n’est pas ce que vous croyez » bafouillais-je les larmes aux yeux car je ne comprenais pas leur méchanceté gratuite ni même leur brutalité car l’une d’entre elle me bouscula, me faisant perdre mes papiers. « Ça suffit, je vous ai rien fait alors laissez-moi tranquille ! » déclarais-je en me baissant pour ramasser mes papiers. « Tin’ elle me saoule à faire sa mijaurée alors qu’on sait quelle salope c’est.. Je ne sais pas ce qui me retient de ne pas te frapper ! » Ma parole, mais dans quels ennuis venais-je une nouvelle fois de me fourrer ?!

Je ne comprenais pas pourquoi je récoltais leur méchanceté. Je n’avais rien fait à part embrasser Tristan à cette fête et encore, c’était simplement pour lui montrer qu’on pouvait attendre une personne pour se donner et qu’un baiser donné avec amour pouvait être beaucoup plus succulent qu’un donné par habitude. Je n’avais absolument jamais eu de relation sexuelle avec lui et encore moins appréciée d’être attachée. C’était totalement ridicule mais cette accumulation de haine m’avait réellement blessé et des larmes s’approchaient du bord de mes yeux, n’attendant que mon feu vert pour s’écouler sur mes joues. Or, il était totalement hors de question que je pleure devant ces filles. Je ne leur ferais jamais ce cadeau ni même leur offrirait cette victoire mais je n’eu pas le temps de rétorquer quoique ce soit que l’objet de ce lynchage s’approchait de nous pour m’embrasser. J’écarquillais les yeux en me crispant dans ses bras, ne sachant pas le moins du monde quoi faire. Après tout, d’habitude, il venait pour m’embêter et non pour m’embrasser seulement à ma plus grande honte, je sentis mes muscles se détendre et ma traitre de bouche répondre à ce baiser. Pourquoi fallait-il que je sois si faible ?! Et si tout cela n’était que dans un seul but : m’humilier davantage ? Et bien le plus étrange, c’est qu’en quelque sorte, Tristan Ravenwood venait de voler à mon secours et je me trouvais bien incapable de dire quoique ce soit. « Je dois y aller » marmonnais-je en détachant ma main de la sienne, les laissant entre eux car je ne voulais pas rester une seule seconde de plus avec ses filles. Non, je préférais de loin me réfugier dans un couloir désert et lâcher ses larmes de tristesse. Je n’aimais pas qu’on me remarque car lorsque quelqu’un le faisait, c’était toujours pour être blessant ou médisant à mon propos et après ma meilleure amie s’étonnait de mon manque de confiance. Le problème c’est que personne n’était au courant de mes problèmes à l’université, je ne voulais pas faire de vague. « Merci » lâchais-je en entendant un bruit de pas venir de ma gauche. Je savais que c’était lui. J’essuyais donc rageusement mes larmes. « Tu n’étais pas obligé de faire ça, maintenant tout le monde va croire que l’on sort ensemble ou du moins, que tu trompes ta petite-amie avec moi. Je suis pas certaine que ça va arranger mes affaires » murmurais-je en gardant la tête baissée.

Je ne savais pas pourquoi Tristan était venu m’aider mais peu importait dans le fond. Il m’avait aidé et je me devais de le remercier bien que je craignais d’autant plus les représailles car tout le monde allait croire que j’étais sa maitresse ou je ne sais quelle histoire sordide –comme si j’avais besoin de ça maintenant que je passais pour la trainée de service. « Ma petite amie ? Vicky ? Oh personne va penser que j’la trompe. On est dans une relation libre elle et moi. Tous les étudiants de la fac le savent. » Me répondit-il et je le regardais complétement choquée. Relation libre ?! C’était quoi cette histoire ?! Soit on était en couple, soit on ne l’était pas. Décidément, à chaque fois que je lui trouvais un côté agréable et gentil, il prenait un malin plaisir à me rappeler à quel point, il était poussé par le vice. C’était dommage ! « Relation libre ça veut dire qu’on sort ensemble mais qu’on peut coucher avec qui on veut. J’traduis. Toi qui attends le mariage pour coucher tu dois pas connaitre ce genre de truc. » Poursuivit-il avec son arrogance habituelle qui avait le don de me faire sortir de mes gonds bien que je n’osais pas lui tenir tête. Je savais que je n’aurais pas le dernier mot et puis, je ne voulais guère exprimer des pensées malvenues ou méchantes à son égard. Ce n’était pas mon genre du tout. « Mais attend toi qui est pas du genre à écouter les ragots ou à trainer avec du monde, comment tu sais que je sors avec Vicky ? Tu t’es renseigné sur moi ? » Me demanda-t-il et j’eue la décence de rougir car je venais tout simplement de me griller sur place. En même temps, il était l’une des coqueluches de l’université alors les ragots même si tu ne voulais pas les entendre, tu les entendais quand même. « Tsé si ça t’arrange... on peut être aussi en relation libre toi et moi. Elles te feront plus chier. » Osa-t-il finalement me proposer et je me relevais complétement ahurie. « Ça ne va pas non ?! J’ai un peu plus d’amour propre que tes groupies » décrétais-je avec aplomb « Et pour ta gouverne, je ne suis pas décidée à attendre jusqu’au mariage juste que je souhaite éprouver des sentiments pour l’homme avec qui je ferais l’amour et qu’il en ressente pour moi mais ça doit être un concept qui t’échappe » Me défendais-je comme je pouvais. J’étais fatiguée de passer pour la vierge effarouchée de service, je ne souhaitais tout simplement éprouver de l’affection pour mon partenaire pas qu’il me demande en mariage. « Et puis, je suis désolée mais je ne partage pas ! Tu as peut-être l’habitude que toutes les filles se pavanent devant toi mais ça ne sera pas le cas avec moi bien que je te sois reconnaissante de m’avoir sortie de ce règlement de compte… Finalement ce relooking n’était vraiment pas une bonne idée » soupirais-je en tirant sur ma jupe qui dévoilait mes jambes. Dire que même ma lingerie était devenue affriolante et je me retrouvais toujours à ce fichu point de départ. « Tout le monde va me prendre pour une fille facile, c’est bien ma veine »

Je n’osais pas lui dire la véritable raison de mes pleurs. Tristan ne pourrait pas comprendre un traitre mot et puis à quoi bon ? Calliopé m’avait conseillé d’avoir une véritable discussion avec lui mais je savais que cela ne servirait à rien. Cet homme n’était pas pour moi. Les garçons populaires ne s’intéressent pas aux filles discrètes et mal fagotée bien que j’avais refait toute ma garde-robe à neuf grâce à mon amie. « Pourquoi je me servirais de toi ? » lui demandais-je en douceur en le regardant avec perplexité « Je n’ai pas envie de te gifler ni de raconter des horreurs sur ton cas. Je ne suis pas comme ces filles et je n’ai pas envie de m’en faire des amies surtout pour un prétexte aussi faux. Tu m’as aidé et je n’ai pas envie de te gifler. Toute cette histoire finira par se tasser et je retrouvais mon anonymat » décrétais-je en haussant les épaules, déposant à la place, un baiser sur sa joue. « Je ne sais pas comment on fait dans ton monde mais dans le miens, ce n’est pas comme ça. Traites moi de Bambi si tu le souhaites ou de stupide ou je ne sais quoi encore mais ma sincérité, c’est tout ce que j’ai à offrir aux gens et je ne changerai pas parce qu’une bande de filles se prennent pour des amazones en culotte courte. Cela se tassera et concernant les garçons, tu sais… Ils peuvent toujours essayer de me séduire, ce n’est pas pour autant qu’ils réussiront ! » Terminais-je par lui dire car cela ne m’effrayait pas. Ce n’était pas la première fois qu’on chercherait à faire de moi un vulgaire trophée, Tristan en était même le premier de la liste mais peu importait. Au pire, je deviendrais une femme désabusée comme certaines de mes héroïnes. Pour l’heure, j’étais dans un couloir désert avec un homme qui m’attirait mais qui n’était pas accessible. Je ne sais pas pourquoi Tristan s’entourait de cette muraille de Chine mais elle était bien là, empêchant les autres de l’approcher d’un peu trop près. « Tu es quelqu’un de complexe. Tu parais arrogant et crétin dans un premier temps mais c’est comme si tu cherchais à te protéger des autres ou à protéger les autres de toi. C’est assez troublant mais dans le fond, tu es libre de faire ce que tu veux. J’aurais bien aimé être ton amie mais je sais que tu vas m’envoyer paitre » murmurais-je tout bas, peiné de cette vérité.

J’étais peut-être folle de vouloir être son amie alors qu’il avait passé un temps fou à me casser du sucre sur le dos et à m’astiquer dès qu’il me voyait mais peu importe. Tristan m’intriguait et au lieu de devoir fuir comme mon instinct me le dictait, je continuais à vouloir m’en approcher tel un papillon attiré par la lumière qui se dégageait de lui sous l’épaisse fumée sous laquelle il se cachait. Malheureusement, je n’avais que peu de raison de croire qu’il accepterait une telle chose. Lui ami avec une fille ? Je crois que j’avais plus de chance de me transformer en bonne sœur adepte de déviances sexuelles comme le BDSM qu’en amie de Tristan Ravenwood. « Pas nécessairement. » me surprit-il et je le regardais avec étonnement mais aussi avec un plaisir non dissimulé. J’avais tellement de mal à me faire des amis que je ne pouvais qu’éprouver une joie infinie à l’idée qu’il accepte. « Tu y tiens tant qu’ça ? Ça ne te servira à rien d’être mon amie ! Puis honnêtement j’ai pas beaucoup d’amie fille, ça nuirait à ma réputation. » me dit-il tandis que j’hochais la tête pour lui dire que oui, j’y tenais beaucoup « Mais puisque que tu insistes... okays soyons amis. Tant que cela ne me force pas à être sympa, ça me va. » Finit-il par consentir et je rigolais même lorsqu’il me demanda de ne pas chercher à le comprendre. J’étais vraiment trop heureuse à cet instant précis pour me formaliser d’une tellement demande. « Cette tenue te va vraiment bien Bam... Lexie » me complimenta-t-il et je rougissais sous son regard. « Merci mais tu sais, tu peux continuer à m’appeler Bambi. Venant de toi, je crois que je pourrais le tolérer. En ce qui concerne ta réputation, tu sais, je ne te demande pas d’être gentil avec moi en public. Tu peux continuer d’amuser la galerie et puis cela ne me gêne pas. J’ai connu bien pire » plaisantais-je en haussant les épaules même si je savais que cela me blesserait mais Tristan allait rapidement comprendre qu’en amitié, j’étais prête à des sacrifices dont il n’avait sûrement jamais été confronté. Je me fichais bien de souffrir tant que mes amis allaient bien. « Je demande juste quand nous sommes seuls que tu tâches d’être un peu plus agréable et cela m’ira parfaitement. J’ai bien conscience qu’être mon ami te rendra pas populaire, ce serait même le contraire mais une amitié cachée me va parfaitement » lui assurais-je bien que dans le fond, ce n’était pas le cas mais bon, je ne voyais pas quel intérêt il aurait à se montrer gentil avec moi en public. « Au moins, tu pourras m’aider à me méfier des garçons ainsi. Tu seras mon éminence grise » rigolais-je avant de brusquement le serrer dans mes bras. « Je voulais juste un câlin désolée » bafouillais-je en me séparant de lui, rougissant comme jamais car je me sentais idiote d’avoir agi si impulsivement face à lui.