TALLULAH & ARIZONA

❝ keep me from falling apart ❞

Est-ce que sa vie passée lui manquait ? Probablement … c’était même certain. Tout lui semblait si facile autrefois et plus elle regardait en arrière et plus l’Australienne se rendait compte à quel point sa vie était bien moins misérable. Pourtant, elle était trop fière. Trop fière pour retourner en arrière, trop fière pour regretter ses choix, trop fière pour changer quoi que ce soit. Sa vie était peut-être bien plus simple avant, mais certaines choses de sa vie actuelle ne lui auraient pas été accessibles si elle n’avait pas eu ce moment de folie. Peut-être faisait-elle ce pour quoi elle avait haït son oncle puisque c’était également l’une des raisons de la mort de son père, mais au moins elle était libre de ses choix et capable de se venger de la vie qui l’avait tant torturé jusqu’à présent. C’était à tout ça qu’Arizona pensait le plus souvent au réveil. Elle pensait à ses choix, à ce qu’elle faisait de sa vie et plus que tout elle pensait à sa famille. Elle savait que son frère et ses sœurs devaient lui en vouloir et elle ne pouvait pas les blâmer pour ça, ils en avaient tous les droits, néanmoins elle ne se sentait pas prête à revenir vers eux et leur demander pardon tout de suite, quand bien même fut-elle proche d’eux et plus particulièrement de sa jumelle. Arizona vivait encore avec le deuil de ses frères et des jumeaux qu’elle avait perdu le même jour et elle se savait encore trop fragile pour parvenir à retourner à sa vie passée.

Le regard porté en direction du plafond de sa petite chambre, la jeune femme avait remonté sa couverture jusqu’à son menton et restait blottit sous cette dernière. Les températures de ce mois d’octobre avaient drôlement chuté et étant donné le peu qu’elle gagnait, la demoiselle chauffait le moins de pièces possible pour ne pas avoir à se ruiner plus qu’elle ne pouvait déjà l’être. Arizona resta de longues minutes dans son lit à fixer son plafond en silence avant de trouver le courage de quitter son lit pour se traîner jusque dans sa cuisine afin d’avaler son petit-déjeuner. Elle était peut-être limite concernant ses factures, toutefois elle ne jouait pas avec son alimentation et ces derniers temps sa faim était bien plus importante que lors des jours passés. Son repas du matin avalé, la jeune femme prit ensuite la direction de la salle de bain pour prendre une bonne douche bien chaude qui termina de réveiller l’Australienne qui, une fois lavée, retourna dans sa chambre pour son choix vestimentaire. Même si elle ne comptait pas sortir de chez elle, son choix se porta sur un slim beige, un débardeur blanc par-dessus lequel elle enfila un haut en dentelle de la même couleur avant de mettre un énorme gilet et de grosses chaussettes pour rester bien au chaud. Parée à ne rien faire de sa journée, Arizona rejoignit son petit salon et se laissa tomber devant sa télévision au moment même où son portable se mit à vibrer sur la table basse. Attrapant rapidement le téléphone, elle lut en vitesse le message laissé par Tallulah et ne tarda pas à lui répondre qu’elle acceptait de la voir sans problème.

Bien qu’elle sortait avant tout pour son « travail », l’Australienne avait pu croiser quelques kiosques à journaux et il fallait bien dire que voir son amie et William en première page avait éveillé une certaine jalousie chez la jeune femme qui pourtant n’en montrait rien. Les heures défilant sans qu’elle ne s’en rende compte, lorsque plusieurs coups furent portés à sa porte, Arizona sortit de ses pensées par un sursaut mais s’empressa d’aller ouvrir, adressant un large sourire en reconnaissant la demoiselle face à elle. « Home made ! ». Son regard se posa sur la tarte que Tallulah lui présenta et ça suffit à réveiller la faim de la jeune femme. « Je n'avais pas envie d'arriver les mains vides. ». Un large sourire aux lèvres, Arizona attrapa la tarte et se décala sur le côté en ouvrant la porte de l’appartement plus grand pour laisser l’Africaine entrer avant de refermer derrière elle. « T’étais pas obligée tu sais … enfin vu que je pourrais avaler un éléphant ces derniers temps t’as quand même bien fait. » Avoua-t-elle avec une légère grimace tout en se dirigeant en direction de la toute petite cuisine de son appartement en faisant un signe de la tête à Tallulah pour que cette dernière la suive. « Qu’est-ce qui t’amène ? » Demanda-t-elle de but en blanc une fois dans l’autre pièce en posant la tarte sur le plan de travail avant d’attraper dans un des tiroirs deux cuillères dont une qu’elle tendit à la jeune femme. « Je lis peut-être pas les journées, mais ta tête est en première page … tu veux en parler ? ».

Son regard ne dévia pas un seul instant malgré le fait que la tarte qui se trouvait devant elle ne cessait de lui faire de l’œil. Tallulah semblait vraiment torturée par quelque chose et même si elle avait essayé de s’éloigner un maximum de personnes liées à son passé pour ne pas leur apporter des ennuis pour le simple fait de la connaître, Arizona n’avait pas pour autant rejeté son altruisme et elle était bien incapable de refuser de venir en aide à l’un de ses proches. Même si elle commençait sincèrement à mourir de faim tant le dessert face à elle semblait appétissant, elle était quand même capable de se retenir et d’attendre que la Sud-africaine devant elle se soit un tant soit peu exprimée, après tout cette tarte allait sans doute pouvoir les aider à se sentir mieux une fois le sujet – apparemment gênant et douloureux – derrière elles. « Je voulais te parler de quelque chose. ». L’Australienne opina du chef tout en s’appuyant contre le plan de travail devant elle. Que Tallulah souhaite lui parler de quelque chose lui semblait plutôt évident, non pas qu’elle pensait que la jeune femme ne venait vers elle que pour ça, mais elle restait assez douée pour deviner lorsque quelque chose tracassait une personne et que cette dernière avait besoin d’en parler, d’évacuer, ce qui était clairement le cas de son amie.

Alors, Arizona resta silencieuse, un léger sourire étirant le coin de ses lèvres pour lui faire comprendre qu’elle n’avait pas à avoir peur bien qu’elle fut incapable de ne pas parler du fait de l’avoir vu en première page des journaux lorsqu’elle était sortie de chez elle la dernière fois. « Justement... c'est pour ça que je suis venue. ». Pourquoi la jeune femme éprouvait soudainement l’impression qu’elle se passerait bien de cette discussion ? Ce n’était pas qu’elle n’avait pas envie d’aider Tallulah à se sentir mieux, au contraire même, mais le simple fait de savoir que le sujet allait mêler William la rendait plus nerveuse que jamais ce qu’elle cacha du mieux qu’elle put en se mettant à jouer avec la cuillère qu’elle tenait toujours dans sa main. « Déjà, j'aimerais te demander pardon. ». Cette fois, Arizona arqua un sourcil. Elle était surprise, étonnée que la jeune femme lui demande pardon alors qu’aux yeux de l’Australienne il n’y avait pas de raison qu’elle s’excuse pour quoi que ce soit, mais ça elle n’eut guère le temps de le dire. « Je sais très bien ce qui se trame entre toi et William et... j'ai pas réfléchi. Si cette histoire t'a blessée, j'en suis vraiment désolée... c'était loin d'être mon intention. ». La bouche de la jeune femme s’ouvrit et pourtant aucun son n’en sortit.

Elle resta à fixer Tallulah sans être capable de dire quoi que ce soit encore bloquée sur les propos comme quoi elle savait qu’il se tramait quelque chose entre William et elle. Finalement, sortant de sa léthargie, Arizona secoua la tête de droite à gauche comme pour remettre ses idées en place et soupira. « Y a rien entre William et moi. ». Bah voyons ! Comme mensonge elle n’avait pas mieux fait ces derniers temps. Ce n’était absolument pas comme si ce crétin de Slayers l’obsédait quasiment à chaque fois qu’elle ouvrait les yeux ou lorsqu’elle se perdait dans ses pensées. Secouant de nouveau la tête, Arizona chassa ceci de son esprit et s’efforça d’adresser un sourire à son amie pour cacher le fait que déjà elle pensait à l’Américain, ce qui contredisait totalement ses précédentes paroles. « Ça me touche que tu te sois inquiétée pour moi, mais vraiment y a pas de quoi Tal’. Mais par contre, dis-moi plutôt ce qui t’as poussé à aller vers lui … enfin il s’est passé quelque chose avec Andrea ? ». Autant éviter de rester plus longtemps sur le sujet « William », si Arizona pouvait y échapper elle le ferait avec grand plaisir, utilisant tous les prétextes pour passer à autre chose et là le prétexte n’était autre que le fait de vouloir aider son amie à se confier et à se sentir mieux.