Bonny avait du mal à dire non depuis qu'elle était à New York désespérément seule sans ses soeurs. A force d'être toujours avec quelqu'un, la solitude était loin d'être son fort et lorsqu'on lui proposait de sortir de son chez elle pour passer voir des gens en soirée elle finissait toujours par accepter bon gré, mal gré. Évidemment, elle finissait par regretter au bout de quinze minutes et on la retrouvait dans un coin à grommeler contre le reste du monde pour sa faiblesse. Elle n'avait pas le coeur à dire aux gens qui devenaient de plus en plus joyeux qu'elle s'emmerdait à tous les coups. Bonny n'aimait pas boire, enfin, avec modération, mais l'état dans lequel pouvait mettre l'alcool la rendait passablement énervée et elle savait que si elle voyait ses amis ou connaissances passablement bourrés, ça allait juste l'énerver. Alors elle se cherchait une quelconque excuse pour s'échapper de l'endroit. Elle avait tout passé en revue et rien n'avait semblé convainquant, tous les plans qu'elle élaborait avait une faille ou était irréalisable. Tout le monde savait que personne ne l'attendait chez elle. Elle poussa un soupire à fendre l'âme tout en regardant désespérément son téléphone, priant pour qu'il vibre et la sorte de cet endroit beaucoup trop bruyant.

Puis comprenant qu'il y avait peu d'âmes charitables à New York, elle décida de farfouiller sa liste de contact et elle grimaçait à chaque fois qu'elle lisait un prénom d'une personne qu'elle n'aimait pas. Finalement son regard s'arrêta sur le prénom de Peter avant de continuer le défilement. Elle ne pouvait pas le déranger sans prévenir. Puis il était tard non ? Elle avait l'impression d'être là depuis trois heures. Elle regarda l'heure. 21h37, elle était arrivée il y a 20 minutes. Elle geignit avant de retourner au prénom de Peter et lui sonna. Tant pis si elle paraissait désespérée, elle l'était de toute façon !

Elle l'entendit décrocher au bout de la 4ème sonnerie, elle sourit enfin à l'entente de sa voix. Peter était... un type bien, elle ne le connaissait pas bien, mais il avait eu l'amabilité de lui faire découvrir la ville et l'université lorsqu'elle avait débarqué.“ Peter ? C'est Bonny. Tu vas bien ? „ demanda-t-elle par automatisme avant d'enchainer. “ Dis, tu voudrais pas être mon sauveur de la soirée ? Je me suis fait embarquée et... enfin, tu sais, j'aime pas tellement ça, donc je voulais savoir, tu voudrais pas me rejoindre ? Ou si tu ne sais pas venir être mon excuse pour partir ? „ supplia-t-elle presque.

Elle espérait vraiment que Peter allait... être son Batman, Superman, Spiderman, ce qu'il voulait de cette soirée qui s'annonçait beaucoup trop longue.

Depuis son accident, Peter avait bien du mal à reprendre une activité « normale ». La moindre petite chose qu'il faisait avait pour seul effet de l'épuiser, et de le contraindre à aller dormir tôt pour récupérer. Mais cela n'avait échappé à personne : Peter n'aimait pas particulièrement faire la fête, et encore moins prendre part aux soirées étudiantes organisées sur le campus. Son état était donc une occasion rêvée de décliner toutes les invitations qu'il était susceptible de recevoir, et un moyen de rester chez lui, bien au chaud, devant la télé. De cette manière, il pouvait cuisiner et réviser toute la journée sans avoir de comptes à rendre à personne. En contre-partie, le jeune homme ne voyait pas grand monde... Mais ça ne le dérangeait pas plus que ça. En effet, Peter était quelqu'un de plutôt solitaire et réservé, et la compagnie de ses fourneaux lui suffisaient amplement, la plupart du temps.

L'irlandais était donc étalé dans son canapé, avec un jean troué au genou et des chaussettes plus ou moins neuves. De loin, il ressemblai à s'y méprendre à une épave, mais Pete était bien réveillé, et concentré sur un épisode de Bones qu'il n'avait encore jamais vu. C'est alors que son téléphone portable se mit à sonner. Le jeune homme commença par froncer les sourcils, et fit claquer sa langue comme pour le faire taire. Mais bien évidemment, la sonnerie continua de plus belle, et il fut obligé de tendre le bras en direction de la table basse qui vibrait en même temps que le téléphone. En se frottant les yeux, il décrocha et répondit d'une voix rauque sans même avoir pris le temps de regarder qui osait le déranger en pleine séance série télé. « Allo? » Lorsqu'il entendit la voix de son interlocutrice, un petit sourire prit la place de ses sourcils froncés. Il s'agissait de Bonny, une fille qu'il avait rencontrée à l'université, et qu'il n'avait pas hésité à aider pour qu'elle s'y repère les premiers temps. Depuis, ils étaient restés en bon terme et se recroisaient régulièrement dans les couloirs de la fac. « Oh Bonny, oui ça va... » La jeune fille parlait sans vraiment faire de pauses, et Peter fut contraint de l'écouter jusqu'au bout de son discours sans rien dire. L'irlandais se mit à rire, et se redressa sur son canapé, comme si ça allait l'aider à répondre plus... clairement. Où avait-elle encore atterri ? Elle avait vraiment le chic pour s'embrigader dans des situations qu'elle finissait par regretter ! Tout en secouant la tête d'un air désespéré, Peter reprit : « Je veux bien être ton... excuse oui. Dis-moi juste où tu es pour que je puisse prendre un taxi et venir te kidnapper. »

Peter ne pouvait pas s'empêcher de rire en l'imaginant au milieu de cette soirée qui visiblement ne lui convenait pas. Même si le fait d'aller la « secourir » ne faisait pas vraiment partie de son programme, Peter accepta sans hésiter. Ça lui ferait une occasion de sortir un peu. Depuis l'accident, Pete n'avait jamais osé reprendre l volant d'une voiture. De toute façon, la sienne était à la casse, enfin probablement... En réalité il ne savait même pas ce qu'elle était devenue. Sa chère petite voiture qui était sans arrêt en panne... Celle qui avait bien failli lui coûter la vie. Pour lui, il était encore un peu tôt, et il ne se sentait pas capable de s'installer derrière un volant. Pour aller chercher Bonny, il devait donc compter sur les fameux taxi New-yorkais, heureusement très nombreux en ville.