Le soleil déclinait lentement dans le ciel. A cette époque de l'année, le zénith était bas et on profitait du moindre rayon qui passait à travers la couverture nuageuse. Aujourd'hui, les nuages avaient envahi le ciel de New York et les températures rappelaient aux habitants que l'hiver approchait. Alors que la plupart des gens sortaient les épais manteaux de leurs placards, c'était un bikini que Kate avait sorti d'un tiroir et qu'elle était en train de mettre dans une valise, sur une serviette de plage entre quelques débardeurs et une paire de tongues. Elle y ajouta trois jeans, deux chemisiers, un gilet et une veste en cas de pluie, son nécessaire de toilette, des sous-vêtements et une paire de lunettes de soleil. Sur le lit, juste à coté de la valise, il y avait un sac en bandouillière que Kate allait garder en cabine. Elle y mit les somnifères pour son chien, un classeur rempli de documents à lire pendant les longues heures de vol qui l'attendaient, son passeport, ses billets d'avion, une bouteille d'eau, son Ipod, le reste de ses papiers et tout ce qu'elle avait dans son sac à main. L'architecte regarda sa montre. Il était seize heures trente. Elle vérifia une dernière fois ses bagages pour être certaine de ne rien avoir oublié puis elle alla prendre une douche. Elle en ressortit avec une serviette autour du corps et une autre dans les cheveux puis alluma son ordinateur. Une fois sur Google, elle se renseigna sur la météo de sa destination. Elle eut un sourire en constatant que comme toujours, un grand soleil serait là pour accueillir ceux qui avaient la chance de voir cet endroit aux allures de paradis sur Terre. Dans moins de vingt quatre heures, et pour une semaine entière, la jeune femme serait sur l'île où elle avait vécu ces cinq dernières années, l'île que ses habitants appelaient l'île de l'Espoir pour le nouveau départ qu'elle représentait. En allant là-bas, les gens espéraient changer de vie et même si ça n'avait pas été l'intention de Kate qui avait été contrainte de s'y installer, elle devait bien admettre qu'elle avait aimé, qu'elle aimait et qu'elle aimerait toujours cet endroit. Bien que les raisons de son séjour là-bas de soient pas réjouissantes, elle avait vraiment hâte d'y être et rien que le fait de s'imaginer revoir les lieux et les personnes qui avaient fait son quotidien lui donnait le sourire. Après avoir rangé son ordinateur dans sa sacoche et l'avoir posé avec le reste des bagages, elle alla s'habiller et se sécher les cheveux. Vu qu'elle avait deux avions à prendre, le premier de Newark jusqu'à Phoenix et le deuxième de Phoenix jusqu'à l'île, autant être à son aise. C'est pourquoi elle opta pour un jean à coupe droite, un haut à manches longues basique en coton et une paire de Vans. Elle enfila une veste, une écharpe et sortit de son appartement avec chien et bagages, direction la voiture. L'avion ne décollait qu'à vingt-et-une heures et il n'était que dix-sept heures mais Kate devait d'abord passer au bureau de Mark. Puis avec les embouteillages éventuels, il fallait compter une heure de trajet jusqu'à l'aéroport et l'enregistrement des bagages se terminait une heure avant le décollage. Du coup, si Kate ne passait que quelques minutes avec Mark, elle pourrait sortir de Manhattan à dix-sept heures trente et elle estimait avoir un peu moins de deux heures pour regarder les avions atterrir et décoller avant de monter dans le sien.
D'un coté, la brune n'avait pas du tout envie de revoir son ex. La dernière fois qu'elle était allée à son bureau, elle en était ressortie vraiment mal-à-l'aise. Mark n'y était pour rien. Alors qu'elle l'attendait dans la salle d'attente, son patron était arrivé dans la pièce et comme à son habitude, il s'était montré bavard, trop cette fois. Il avait commencé par quelque chose comme "Bonjour Kate! Comment vas-tu? Ton père m'a tout raconté pour les deux dispensaires, félicitations! Il est en colère mais pour douze millions... Ca se comprend! Ne t'en fais pas, il reprendra contact avec toi un jour ou l'autre." Le tout avec enthousiasme. Kate aurait voulu lui dire de parler moins fort mais il était dans son entreprise et n'avait à recevoir d'ordre de personne quant à son comportement. La jeune Evans ne répondit qu'avec un sourire forcé qui s'effaça à l'instant même où l'homme s'exclama un "Bon, je vais vous laisser travailler!". Kate n'eut même pas besoin de se retourner pour comprendre que Mark était dans son dos. Une fois le meilleur ami de son père parti, elle fit volte face et sans adresser un seul regard à l'homme de loi, elle lui tendit les papiers qu'elle avait eu à signer et prétexta avoir quelque chose à faire pour partir, embarrassée par ce qu'il avait entendu.
D'un autre coté, elle voulait le voir car c'était la dernière fois qu'elle en aurait l'occasion. En effet, son travail était terminé. Kate n'avait plus qu'à lui donner son dernier chèque et une enveloppe de billets, remboursant ainsi l'argent qu'il avait dépensé pour l'hôtel canin. La jeune femme aurait très bien pu laisser le tout au service comptabilité mais un sentiment qu'elle ne pouvait expliquer la poussait à faire ses adieux à Mark. A priori, c'était une très bonne nouvelle pour eux deux mais l'architecte ressentait une certaine tristesse à l'idée de ne plus jamais le revoir.
La nuit était déjà tombée lorsqu'elle se gara dans le parking du bâtiment où se trouvait le cabinet d'avocats. Elle fit rentrer George dans sa cage de transport, ferma la voiture à clé et monta jusqu'à l'étage où travaillait Mark. Elle n'avait pas de rendez-vous avec lui et espérait qu'il n'était ni au tribunal ni avec un client. Si c'était le cas, elle irait à contrecoeur déposer le chèque et l'enveloppe à la comptabilité. Arrivée dans le grand hall d'entrée, elle alla jusqu'au bureau d'accueil, demanda si maître Ruthenford était disponible et attendit que la secrétaire se renseigne.
Mark était effectivement à son bureau ce jour là comme l’indiqua sa secrétaire à l’architecte. L’homme de loi avait eu une journée bien chargé et la soirée s’annonçaient tout aussi épuisante. Il avait une audience importante demain dans la matinée et voulait peaufiner son dossier à la perfection. Dans cet objectif il avait confié Alyssa à Mérédith prévoyant de rentrer tard dans la nuit. Dans son travail Mark était très méticuleux et ne laissait rien au hasard. En l’occurrence le procès, qui était un divorce, ne s’annonçait pas aisé. Aucune des deux parties ne voulaient lâcher le moindre morceau et se disputaient avec acharnement le plus petit centime de la montagne d’argent accumulé aux fils des années. Ce n’était guère des moments réjouissant, d’autant plus qu’étant l’avocat du mari Mark savait parfaitement qu’il lui faudrait humilier la partie adverse en dévoilant des adultéres ainsi que des passages peu glorieux sur certaines addictions. Il n’aimait pas particulièrement détruire la réputation d’une personne mais il avait, il y a longtemps, appris à faire taire la culpabilité ou même les réticences qu’on pouvait éprouver en pareille circonstance pour ne se focaliser que sur la victoire possible.
L’homme ne s’attendait pas à voir Kate à son bureau. Aucun rendez vous n’était convenu et vu la situation entre eux il doutait fortement qu’elle passe juste pour dire bonjour. De plus la dernière fois qu’il l’avait vu la jeune femme avait paru pressée de quitter les lieux. Il n’avait pas vraiment compris pourquoi d’ailleurs…Lorsqu’il était arrivé dans le bureau son patron s’y trouvait et parlait avec la jeune femme la félicitant même. Les quelques brides de conversation lui avait permis de comprendre que Kate s’était débarrassée de l’argent de son père et que par conséquent ce dernier ne lui parlait plus, ce qui n’avait franchement rien d’étonnant lorsqu’on connaissait de quoi ce dernier était capable. Mark n’avait fait aucune remarque à Kate mais avait soudainement fait le rapprochement avec le fait qu’elle lui ai indiqué qu’elle devrait vendre sa voiture pour payer l’hôtel canin lorsqu‘elle se trouvait à l‘hôpital. Sur le coup il n’y avait pas fait attention et puis il fallait avouer qu’il se fichait de l’état de ses finances. C’est pourquoi il n’avait pas compris la réaction de la jeune femme et sa précipitation à sortir de son bureau alors qu’il se fichait totalement de ce qu’elle pouvait faire avec son argent. Cela ne le regardait pas le moins du monde et jamais il ne se serait permis de lui faire une remarque sur son compte en banque.
Ce fut avec surprise qu’il entendit sa secrétaire à l’autre bout du fil lui déclarer que Melle Evans souhaitait le voir. Mark lui répondit simplement de la faire entrer avant de replonger quelques instants le nez dans son dossier. Il se demandait bien ce que la jeune femme voulait. Il lui semblait pourtant qu’ils en avaient terminés concernant son entreprise et espérait qu’il n’y avait pas de problème grave. Ses yeux parcouraient la déposition mais les mots n’avaient aucun impact sur son esprit. Maintenant qu’il savait que Kate était là, il ne pouvait pas penser à autre chose. Un mélange de plaisir et d’agacement se mêlait en lui à chaque entrevue avec la jeune femme.
Tandis que la secrétaire tenait le téléphone contre son oreille après avoir composé le numéro du bureau de Mark, Kate faisait son possible pour ne pas montrer son impatience. Elle s'efforçait de ne pas taper frénétiquement ses ongles contre le comptoir mais elle ne pouvait s'empêcher de garder les yeux rivés sur la secrétaire et de se dire "décroche, décroche...". Enfin, l'employée annonça Kate et après avoir raccroché elle lui indiqua qu'elle pouvait y aller. Sur le chemin qui menait jusqu'au bureau de Mark, la jeune femme se rendit compte que c'était la dernière fois qu'elle empruntait ce couloir, ce qui provoqua un profond soupir. Avec toutes les tensions qu'il y avait eu entre elle et Mark depuis qu'ils étaient tous les deux à New York, elle n'aurait pas pensé qu'un jour elle aurait pu avoir le moindre pincement au coeur en songeant qu'elle ne verrait plus l'homme qu'elle avait aimé pendant des années mais qu'elle avait détesté ces derniers mois. En fait, elle réalisait peu à peu qu'elle avait été incapable de le détester comme elle l'aurait voulu. Si ça avait été le cas, elle n'aurait pas eu les quelques répliques sympas qu'elle avait eu, elle n'aurait pas souri à certaines mimiques de Mark qui l'avait toujours faite sourire, notamment celle qu'il avait lorsqu'il était concentré sur la lecture d'un document dont il voulait être certain de comprendre toutes les subtilités. Elle ne se serait pas non plus surprise à porter une attention particulière à la façon dont elle allait s'habiller lorsqu'elle avait un rendez-vous. Bref, ce qu'elle ressentait était loin d'être aussi simple que ce qu'elle voulait bien admettre. Devant le bureau de Mark, Kate toqua à la porte et puisque l'homme de loi savait qu'elle arrivait, elle n'attendit pas qu'il l'invite à entrer et ouvrit timidement la porte. Le silence n'était troublé que par les bruits de moteurs et des klaxons qui provenaient de Park Avenue mais qui étaient étouffés par le double vitrage. Quand aux sonneries de téléphone et autres témoins de l'agitation qui régnait dans les locaux, ils furent inaudibles une fois la porte fermée.
- Salut.
La brune se décida enfin à s'avancer jusqu'au bureau et avant d'ajouter le moindre mot, elle sortit de son sac le chèque et l'enveloppe et les déposa devant Mark. Sa main était prise d'un tremblement presque invisible. S'en rendant compte, elle la retira et serra les poings pour qu'il cesse.
- Dans l'enveloppe il y a ce que je te dois pour George et le chèque, c'est ce que je te dois pour ton travail. Je sais que j'aurais pu déposer ça à la compta mais vu qu'on a terminé je voulais juste... peu importe.
Si elle lui disait qu'elle voulait le voir une dernière fois, elle allait créer un malaise. Or en ce moment, elle se sentait déjà assez mal-à-l'aise.
- Je retourne sur l'île.
Kate n'avait pas réfléchi avant de dire cela. Elle avait juste ressenti le besoin de combler le silence par la première chose qui était susceptible d'intéresser Mark. Les déplacements de son ex ne le regardaient pas mais il était le mieux placé pour se rendre compte de l'état d'excitation dans lequel elle pouvait être à quelques heures de son départ. Cependant, cette simple phrase pouvait porter à confusion, Kate ne comptait pas s'installer de nouveau sur l'île. C'est pourquoi elle précisa quelques secondes plus tard:
- Juste pour une semaine. Mon avion décolle dans un peu plus de trois heures. Et... il faut que j'aille voir Brooke.
Dire "Brooke" devant Mark, c'était un peu comme dire "Voldemort" devant un sorcier de J.K Rowling. Brooke, c'était celle-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom. Mais qu'il le veuille ou non, Mark était lié d'une certaine manière à elle, par Alyssa. Il était en droit de savoir ce qu'il se passait pour que Kate veuille aller voir Brooke. La raison peu réjouissante qui la poussait à retourner sur l'île était belle et bien Brooke Parker. Puisqu'une image vaut toutes les explications, Kate sortit un autre papier de son sac, celui-ci de format A5, plié en deux, de couleur ivoire, avec des lettres dorées et un ruban. C'était en fait un faire-part de mariage que Matthew avait envoyé à Kate trois semaines plus tôt avec un post-it disant qu'il avait demandé sa nouvelle adresse à une de ses anciennes voisines et qu'il aimerait vraiment qu'elle vienne. Mais là où la jeune Evans avait été sous le choc, c'était en voyant le nom de l'heureuse élue. Sélène McBright. Kate avait déjà entendu que Brooke n'était pas au mieux de sa forme mais maintenant que Matthew allait se marier avec l'autre femme qu'il aimait depuis l'université, elle devait être au trente sixième dessous. Déjà qu'elle était fragile de nature... Kate la connaissait assez bien pour savoir qu'elle devait être dévastée. Elle n'avait donc pas hésité longtemps avant d'avancer ou de reporter les rendez-vous de la semaine du mariage. Si Brooke se mettait à boire, à se droguer ou qu'elle voulait mettre fin à ses jours, son ex meilleure amie ne se le pardonnerait jamais. A vrai dire, cette perspective l'effrayait.
La culpabilité s'était soudainement emparée d'elle. Même si elle savait qu'elle avait fait le bon choix, elle était consciente d'avoir fait beaucoup de mal à Brooke. Il fallait que Kate veille sur Brooke, il fallait qu'elle s'assure qu'elle tiendrait le coup. Il était évident que Brooke n'allait pas oublier la haine qu'elle pouvait ressentir envers Kate mais cette dernière n'avait ni l'intention de lui pardonner ni celle de redevenir son amie. Elle comptait juste remettre un peu d'ordre dans sa vie, à commencer par le cabinet d'architecture qui, aux dires de certains contacts qu'elle avait gardés sur l'île, était délaissé au point de risquer d'être fermé si personne ne prenait les choses en mains. Brooke avait besoin d'aide et la jeune Evans allait garder un oeil sur elle, que ce soit de près ou de loin. Entre ça et le mariage, elle ne lui resterait pas beaucoup de temps pour le bikini qu'elle avait pris et pour piquer une tête dans l'océan Pacifique.
- Elle a besoin de moi, je ne sais pas encore comment je vais m'y prendre pour qu'elle accepte mon aide mais je trouverai bien une fois sur place. Je suppose que ça aidera quand je lui dirai que moi non plus je n'ai plus le droit de voir Alyssa.
Cela n'avait rien de drôle, c'était même plutôt pathétique mais Kate eut un sourire, plus nerveux qu'autre chose.
Dernière édition par Kate Evans le Dim 24 Jan - 17:08, édité 2 fois
Lorsque Kate passa la porte du bureau, Mark releva la tête et posa son regard sur la jeune femme. Il répondit à son salut et n’ouvrit plus la bouche laissant la jeune femme s’exprimer. Son regard ne lâchait pas l’architecte suivant le moindre de ses mouvements. Il lui sembla, pendant quelques instants, qu’elle tremblait légèrement mais il n’y accorda pas plus d’importance que cela puisqu’elle retira sa main rapidement. Il regarda alors l’envellope qu’elle avait déposé sur son bureau en déclarant qu’il s’agissait de ses honoraires ainsi que du remboursement de l’hôtel canin où il avait placé le chien de Kate pendant quelques jours. Mark releva le regard vers la jeune femme alors qu’elle semblait hésiter à terminer sa phrase concluant sur un « peu importe » qui n’avait rien de vrai, il le savait pertinemment.
Pour tout dire Mark avait l’impression que Kate marchait sur des charbons ardents. Elle semblait mal à l’aise. Pas assez pour sortir en courant de la pièce mais il connaissait un minimum la jeune femme pour savoir qu’elle n’était pas à son aise en cet instant. Cela soulevait quelques questionnements chez l’homme de loi mais il s’interdisait d’y penser réellement. Il se contenta de tendre la main pour prendre le chèque ainsi que l’envellope et de les ranger dans un des tiroirs de son bureau. Puis il regarda de nouveau Kate tout en croisant les mains l’air décontracté. Il n’avait toujours pas prononcé un mot en dehors du « Salut » de tout à l’heure.
Kate fit alors une annonce qui était pour le moins surprenante. Habitué à cacher ses émotions Mark ne laissa rien transparaître. Son regard continuait de fixer celui de la jeune femme en face de lui. Cette dernière dû se sentir dans l’obligation de lui fournir davantage d’explication puisqu’elle lui indiqua qu’elle ne partait qu’une semaine afin d’aller voir Brooke. Si elle s’attendait à voir une réaction quelconque chez son ex à l’évocation de la mère de sa fille, elle en serait pour ses frais… Mark n’eu aucune réaction de surprise et sembla d‘ailleurs n’éprouver aucune émotion particulière. Brooke faisait partie intégrante de sa vie même si cela était malgré lui. Elle était la mère d’Alyssa et par conséquent il l’avait assez régulièrement au téléphone. Il avait certes voulu prendre ses distances avec elle mais il ne voulait pas totalement la faire disparaître de la vie d’Alyssa. Il savait que pour le bien être de la petite fille ce n’était tout simplement pas possible. Alyssa avait besoin de sentir que sa mère, non présente physiquement, était toutefois concerné par la vie de sa fille unique. Ainsi Mark appelait Brooke toutes les semaines afin qu’elle puisse parler à leur fille. Il l’avait lui-même appelé lors de la rentrée de la petite pour lui raconter comment cela c’était passé, sans compter qu’il lui envoyait régulièrement des photos de la petite fille par e-mail afin qu’elle puisse suivre sa croissance et voir l’évolution constante d’Alyssa.
Ayant toujours son cabinet d’avocat sur l’île qu’il avait ouvert avec l’un de ses meilleurs amis, Mark savait plus ou moins ce qu’il se passait là-bas. Lors d’une de leur conversation téléphonique Ethan avait révélé à Mark que Brooke et Matthew s’étaient visiblement séparés, le jeune homme n’hésitant plus à s’afficher avec une ancienne amie prénommée Sélène. Il était également au courant que le cabinet d’architecture n’était plus au sommet de sa gloire malgré le talent incontestable de Brooke. Encore une fois la jeune femme laissait ses émotions diriger sa vie selon Mark pour qui ces nouvelles n’étaient pas franchement une surprise. Il saisit le faire part de mariage auquel il jeta un rapide coup d’œil avant de le rendre à Kate. Puis cette dernière lui indiqua qu’elle ne savait pas encore comment elle allait faire pour aider Brooke mais qu’elle trouverait une fois sur place. La dernière partie de sa phrase ne le fit pas rire, ni même sourire. De son point de vue ce n’était pas tellement exact. Brooke avait le droit de voir sa fille contrairement à Kate. D’ailleurs avant de partir de l’île, Brooke voyait la petite fille au moins une fois par semaine. Avec le déménagement à New York les choses s’étaient évidement compliquées et la mère ne pouvait voir son enfant que pendant certaines vacances scolaires. Kate, elle, avait l’interdiction formelle de voir Alyssa ou même de lui parler au téléphone. Mark avait été très clair et il n’y avait pas matière à revenir là-dessus selon lui. Ce n’était donc pas exactement le même cas de figure pour les deux femmes d'autant plus que Kate avait eu le choix de passer le reste de sa vie avec lui et Alyssa mais elle avait préférée les quitter. Brooke elle n'avait pas eu d'autre choix et Mark était certain que si elle s'était retrouvée devant un tel choix elle ne l'aurait jamais quitter, ni Alyssa.
- Brooke et toi avez été de bonnes amies, je ne doute pas une seconde que vous saurez raviver la flamme de votre étrange amitié.
A partir du moment où il avait commencé à fricoter avec Kate, Mark avait toujours trouvé étrange que les deux jeunes femmes restent amies, surtout en connaissant le caractère jaloux de Brooke. Une fois l’aventure révélée à Brooke, cette dernière avait su trouver la force ou l’imbécillité, au choix, de pardonner à sa soit disant meilleure amie. Pour certains c’était sans aucun doute un geste noble mais Mark savait pertinemment que lui n’aurait jamais eu la « noblesse » de pardonner à son meilleur ami si ce dernier s’était mis en couple avec la femme qu’il aimait.
- Par contre je doute qu’elle apprécie que tu te rende au mariage de son ex fiancé et d‘une autre de ses ex meilleures amies, si toutefois tu tiens vraiment à rétablir des liens avec elle…
Durant les semaines de bataille entre Brooke et Mark pour déterminer qui des deux parents aurait la garde d'Alyssa, il y avait un sujet que Kate n'avait jamais osé aborder avec le père. Il était évidemment sur les nerfs et la jeune femme réalisait trop bien que c'était une chance qu'il soit détendu une fois qu'ils étaient seuls tous les deux pour qu'elle tente le diable en posant une question fâcheuse. Mais en fait, elle aurait voulu savoir ce qu'il comptait faire quant à la relation entre Alyssa et sa mère. Car elle était certaine qu'il allait avoir la garde exclusive et il y avait de fortes chances pour que les droits de visite de Brooke soient très restreints. Alors la colère allait-il lui faire couper les ponts entre la mère et la fille? Allait-il au contraire faire son possible pour qu'elles aient un maximum de contacts? Ou dans une demi-mesure, allait-il les garder liées par téléphone, par lettres et envoyer Alyssa sur l'île pour les vacances. Kate espérait de tout coeur qu'il n'empêche pas Brooke de voir sa fille mais elle n'avait pas eu l'occasion de savoir ce qu'il avait décidé. Cependant, elle l'avait vu si furieux contre son ex qu'en ce moment, elle était persuadée qu'il lui interdisait d'avoir le moindre contact avec Alyssa.
Aujourd'hui et encore plus qu'avant, Kate se rendait compte à quel point cela était dur d'être séparée de la petite fille. Et elle n'était "que" la marraine. Pour une mère, ce devait être une douleur atroce de se voir enlever son enfant. En partant seule de l'île, l'architecte avait pas pu concevoir qu'elle ne reverrait plus jamais Alyssa. Elle voulait se laisser un peu de temps pour changer de vie et pour que Mark en fasse de même. Ainsi, elle espérait que les choses seraient moins compliquées, qu'une fois heureux avec une autre femme, il accepterait qu'elle puisse voir Alyssa de temps à autres. Après tout, elle avait en quelque sorte été la marraine avant que lui ne soit le père de la petite fille. Mais le temps n'avait pas eu l'effet escompté. Kate avait encore trop de mal à oublier Mark pour être capable d'aller à sa rencontre. Et il était réapparu avant qu'elle n'en ait trouvé la force.
Quand Mark affirma qu'il était certain que les deux ex meilleures amies pourraient redevenir amies, Kate eut un sourire jaune. Pourtant elle ne dit rien et laissa Mark ajouter qu'il vaudrait mieux qu'elle ne se rende pas au mariage. Le seul point sur lequel la brune lui donnait raison, c'était sur le fait que l'amitié qui l'avait unie à Brooke était étrange. Pendant leurs études, elle était tout ce qu'il y a de plus de normal mais dès l'instant où Brooke avait annoncé à Kate qu'elle était enceinte, la jeune Evans avait eu un rôle de grande soeur protectrice. D'une certaine manière, Kate avait eu tort de se faire autant de soucis pour la jeune maman car elle n'avait pas pu consacrer autant d'énergie à sa carrière qu'elle l'aurait voulu et au final, son rôle avait changé l'amitié entre les deux jeunes femmes. Il n'y avait plus la même folie et la même spontanéité. Kate aimait passé la majeure partie de son temps libre avec sa meilleure amie et la petite Alyssa mais elle avait parfois tendance à observer le comportement de Brooke afin de deviner si tout allait bien pour elle.
La jeune femme posa son sac sur une chaise face au bureau et en fit le tour pour se retrouver du coté de Mark. C'était la dernière fois qu'ils se voyaient, elle pouvait bien se permettre cette familiarité. Et au moins, cela pourrait induire Mark en erreur en lui faisant croire qu'elle était détendue.
- Qui a dit que je voulais qu'on redevienne amies? Je veux juste m'assurer qu'elle tienne le coup. Et j'irai au mariage, entre l'amitié de Matthew et celle de Brooke, le choix est vite fait.
Kate s'appuya contre le bureau et observa la vue qu'on avait de cet étage. Elle ne se trouvait qu'à la moitié du building et pourtant elle pouvait voir relativement loin. Du dernier étage, le panorama était sans doute magnifique. La jeune femme était montée au sommet de gratte-ciels des dizaines et des dizaines de fois mais elle était toujours aussi émerveillée par la vue. Après un profond soupir, elle tourna la tête vers Mark et le regarda dans les yeux.
- Ca y est, c'est terminé. On peut se dire adieu.
Son cœur battait trop fort pour qu'elle puisse se mentir à elle-même, elle n'avait pas du tout envie dire adieu à Mark. Elle espérait qu'il dise ou qu'il fasse quelque chose pour que ce ne soit pas le cas mais elle savait que cet espoir était vain. Elle aurait aussi voulu franchir les quelques centimètres qui la séparaient de lui et l'embrasser mais sa raison le lui interdisait.
Dernière édition par Kate Evans le Mar 22 Déc - 17:05, édité 2 fois
En partant de manière si cavalière Kate ne se rendait pas compte des conséquences de son acte. La douleur que Mark avait éprouvé s’était rapidement transformée en une colère profonde qui le tenaillait encore maintenant malgré les mois passé. En partant à New York, Mark savait qu’il y avait un risque qu’il tombe sur Kate et dans un sens il l’avait même espéré. Il s’était dit qu’une fois loin de l’île il arriverait à oublier sa colère et sa rancune et que les choses pourraient peut être s’arranger. Mais une fois dans la grosse pomme ses sentiments n’avaient pas changés et la première fois qu’il avait revue Kate ne s’était pas bien passé. Il s’était rendu compte qu’il était encore bien trop en colère après elle et que d’une certaine manière elle avait perdu sa place privilégiée dans son cœur.
L’interdiction de voir Alyssa n’était pas moins une punition qu’une façon de la chasser complètement de sa vie. Il n’avait pas eu son mot à dire sur le choix de la marraine de la petite fille et pour cause : il n’avait pas été présent pendant les quatre premières année de la vie de sa propre fille. Il était certain que si il avait été présent pendant la grossesse de Brooke jamais il n’aurait accepté que Kate soit la marraine d’Alyssa. Ce n’était nullement les compétences de Kate à ce « poste » qui était en cause mais bel et bien le fait que cela ne compliquait que davantage la situation.
Une fois qu’il eu tout découvert sur l’existence d’Alyssa, Mark s’était posé beaucoup de question sur le lien qui unissait Brooke et Kate. Il avait du mal à comprendre comment Kate avait pu accepter d’être la marraine de cet enfant sachant pertinemment qu’elle avait flirter avec son pére juste avant qu’il ne parte. Cela lui semblait totalement dénué de bon sens et la seule explication qu’il trouvait était que Kate s’était sentit tellement coupable de ce qu’ils avaient fait qu’elle avait par la suite tenter de se racheter en aidant Brooke à se reconstruire.
En entendant la réponse de l’architecte qui déclara qu’elle n’avait pas envie de redevenir amie avec Brooke, Mark ne pu s’empecher un rictus sarcastique. La jeune femme en rajouta une couche en précisant qu’entre l’amitié de Matthew et celle de Brooke le choix était rapide.
- Je vois…donc dans le fonds ce que tu veux en fait c’est plus te donner bonne conscience que d’aider réellement Brooke.
Ce n’était pas une question mais un simple constat. Si Kate ne tenait pas vraiment à l’amitié de la brunette pourquoi se rendait elle sur place ? Pour Mark ce ne pouvait être que pour se donner bonne conscience et avoir le bon rôle, celui de l’ancienne amie qui malgré les trahisons étaient une nouvelle fois là pour tendre la main. Ce n’était qu’une mascarade puisque Kate avouait elle-même qu’elle se fichait de l’amitié de Brooke.
Il observa Kate s’appuyer sur son bureau. Il avait l’impression qu’elle voulait dire quelque chose mais ne voyait pas ce qui la retenait. D’ordinaire elle ne prenait pas de gants pour dire ce qu’elle pensait. Il du réprimer un sourire moqueur lorsqu’elle tourna la tête vers lui et qu’elle lui annonça d'une phrase digne des textes de tragédie grecque que tout était terminé et qu’ils pouvait se dire adieux. Mark savait que son travail était terminé et que désormais ils n’avaient plus aucune raison de se revoir. Il en avait pris conscience il y avait déjà quelques jours et avait eu le temps de s’y « préparer ». Faisant fi de la pointe de tristesse qui c’était emparé de lui à cette idée, l’homme de loi avait jugé qu’il était temps pour l’un comme pour l’autre de poursuivre sa route. C’était ce que Kate avait voulu en le quittant après tout. Les circonstances de la vie les avaient de nouveau réunis malgré eux mais à présent plus rien ne les obligeaient à se voir. Etrangement Mark ne ressentait pas vraiment de douleur à l’idée que tout était enfin terminé. Peut être cela était du au fait qu’il avait déjà vécu une séparation brutale à laquelle il ne s’attendait pas. Au moins cette séparation là, il en avait eu connaissance depuis le début et ne s’était fait aucune illusion. Il esquissa un léger sourire sarcastique en plongeant son regard dans le sien.
- Si je ne connaissais pas aussi bien notre histoire j’aurais presque l’impression que cela t’attriste Kate. Tu devrais plutôt être soulagée non ?
Son regard posé sur la jeune femme, aucune émotion ne se lisait chez l’avocat. On avait l’impression qu’il était totalement indifférent à ce que venait de lui dire Kate qui malgré ses apparences semblait plus affectée que lui de la situation.
Il aurait fallu que Kate soit complètement insensible pour ne pas ressentir une once de culpabilité après le départ soudain et inattendu de Mark. En effet, elle s'était dit que s'il n'y avait pas eu un flirt entre eux deux, le jeune homme n'aurait probablement pas renoncé à son histoire d'amour avec Brooke qui avait duré près d'un an. Elle avait l'impression que si elle n'avait pas embrassé Mark au spa, ce dernier ne se serait jamais rendu compte des sentiments qu'il avait pour elle et peut-être même qu'il n'en aurait jamais eu. Dans ce cas, qu'est que qui l'aurait empêcher de se réconcilier avec Brooke? Après tout, ce qu'elle avait fait était pardonnable. Par jalousie, elle avait sous entendu à une de ses amies, alors amoureuse de Mark, de lui laisser chasse gardée. Même si l'avocat avait été furieux en l'apprenant, il aurait pu passer l'éponge. Au fil du temps, Kate s'était faite une raison et en était arrivée à la conclusion que cet évènement n'avait été que la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase et que tôt ou tard, Mark se serait séparé de Brooke. Mais cette hypothèse n'avait jamais totalement convaincu la jeune Evans car une surprise de taille aurait pu le garder près de sa petite-amie: l'arrivée d'Alyssa.
Il est vrai que sa culpabilité avait motivé Kate dans son application pour Brooke et Alyssa mais si elle avait voulu être présente pour elle, c'était tout d'abord parce que la belle brune était sa meilleure amie. Si la situation avait été inversée, Brooke n'aurait pas hésité une seule seconde avant d'aider Kate. Mark pouvait difficilement comprendre ce qui unissait les deux architectes mais s'il avait pu les voir depuis le début de la grossesse de la jeune maman jusqu'à ce que cette dernière ait failli causer la mort de sa fille, il aurait pu se rendre compte qu'elles étaient très proches. Elles travaillaient ensemble, passaient la plupart de leurs week-ends ensemble, faisaient leurs courses ensemble...
La première réponse de Mark ne surprit pas Kate, ne s'attendant pas à moins de franchise. Elle usa du même ton et de la même honnêteté:
- En fait, c'est autant pour me donner bonne conscience que pour l'aider.
Elle n'allait pas mentir, elle se sentait en partie responsable de l'était dans lequel se trouvait Brooke à ce jour. Mais ce n'était pas la principale raison qui la poussait à aller la voir. La plus importante était le soutien qu'elle voulait apporter. Et puis avec ou sans Brooke sur l'île, Kate y serait quand même aller pour le mariage de Matthew et Sélène. Elle n'avait pas envie de se justifier auprès de Mark pour lui faire comprendre que c'était d'abord pour aider Brooke et non pas pour soulager sa confiance qu'elle allait sur l'île. Du coup, elle préférait le laisser croire que les deux raisons avaient eu le même poids.
Quand Mark lui dit qu'il pourrait presque penser qu'elle était triste à l'idée qu'il ne se voit plus, Kate eu un petit sourire empreint à la fois d'amusement et de tristesse. Elle ne savait pas s'il se rendait vraiment compte qu'elle était sincèrement triste ou s'il disait cela pour la taquiner. Puis la seconde partie de la réplique lui rendit un visage neutre.
- Je devrais.
Si c'était la dernière fois qu'ils se voyaient, pourquoi mentir? Là, Kate ne disait pas clairement qu'elle était loin d'être soulagée mais elle ne disait pas explicitement le contraire non plus. Elle se redressa et fit le tour du bureau afin de remettre son sac sur son épaule. A présent elle n'avait plus qu'à partir.
Mark s’était toujours demandé ce qui aurait pu se passer si il avait été au courant de la grossesse de Brooke à son début. Il ignorait si la jeune femme connaissait l’existence de sa grossesse la dernière fois qu’ils s’étaient vus avant son départ et la question de savoir si les choses auraient été différentes lui était souvent venu à l’esprit. Il n’avait pas trouvé de réponses réelles, ne pouvant faire que des suppositions sur la réaction qu’il aurait pu avoir. Si aujourd’hui il ne voyait pas sa vie sans Alyssa en aurait il été de même lorsque cette enfant n’était qu’un embrayon dans le ventre encore plat de sa mère ? N’aurait il pas eu peur en se découvrant soudainement lié de façon éternelle à une femme et pris tout simplement la fuite comme beaucoup d’hommes le faisaient allégrement à travers le monde… D’un autre coté c’était le silence de Brooke pendant toutes ces années sur l’existence de leur enfant qui avait définitivement réduit à néant leur chance, si improbable soit elle, d’être une vraie famille. Depuis le départ de Kate et son propre départ de l’île, l’avocat s’imaginait de temps à autre ce qu’aurait pu être sa vie si il avait appris la grossesse de Brooke à son début et si il s’était remis avec elle. Peut être aurait ils eu une vie heureuse tout les trois…après tout il ne pouvait nier qu’il avait sincèrement aimé la jeune femme. Elle était celle qui avait amorcer le changement chez lui, elle lui avait permis de se poser et d’apprécier les avantages d’une relation sérieuse. Les quelques instants qu’ils avaient pu passer tout les trois, une fois l’existence d’Alyssa révélée, s’était très bien passer et chacun d’eux y avait pris du plaisir. Les choses auraient peut être été plus simple si Mark ne s’était pas rendu compte de ses sentiments pour Kate quelques semaines avant que Brooke, elle, ne découvre sa grossesse. Peut être aurait il vu les choses autrement dans ce cas de figure là aussi… Quoi qu’il puisse en penser Mark ne tombait jamais sur le même avis au fil des minutes de ses réflexions et finissait pas chasser ses questionnements de son esprit se disant que de toute manière les choses ne pouvaient pas être changé à présent.
Mark était loin de comprendre ce qui avait amené les deux jeunes architectes à lier une amitié si « profonde ». Encore une fois il ne pouvait faire que des suppositions sur ce sujet. Il n’était en revanche pas dupe sur le comportement de Kate aujourd’hui. La jeune femme avait beau dire qu’elle retournait sur l’île pour aider Brooke, il n’en croyait pas un mot. Une nouvelle fois Kate lui confirma ses pensées en mettant le fait d’aider son ancienne amie et celui de se donner bonne conscience sur le même plan. D’ailleurs elle parlait d’abord de se donner bonne conscience avant de parler d’aider Brooke… Cette attitude ne choquait nullement l’homme de loi qui à présent savait que Kate était capable du pire comme du meilleur.
Un net sourire d’amusement apparu sur les lèvres de l’avocat en entendant la réponse de Kate sur le fait qu‘elle devrais effectivement être soulagée. Il percevait dans sa réplique un sous entendu, une manière détournée de dire qu’elle n’était pas si soulagée qu’elle aurait du l’être. La possibilité qu’elle jouait simplement avec ses nerfs n’était pas à exclure malgré tout. Il avait vécu avec elle et pourtant n’avait pas su prédire son départ brutal. Aujourd’hui il se méfiait quelque peu d’elle et de ses discours ou attitudes. Il la suivit du regard alors qu’elle faisait le tour du bureau et reprenait son sac. Au moment où elle se retourna vers lui, Mark se leva et se dirigea vers elle à pas tranquille puis il plongea son regard dans le sien. Tristesse, amertume ou indifférence il était bien difficile de deviner ce que l’homme ressentait.
- N’es ce pas le moment où je suis censé te demander de ne pas partir parce que je suis profondément amoureux de toi et que je veux passer le reste de ma vie en clamant au monde entier que tu es ma femme ?
L’homme croisa les bras avant de prendre un air pensif. Comme si quelque chose sonnait faux dans ses paroles et qu’il cherchait à les rectifier s’étant trompé.
- Ah non excuse moi…ça c’était ce que j’aurais voulu te dire quant tu m‘a quitter pour venir à New York si tu avais eu la décense d‘en discuter avec moi. Poursuivit il avec un air faussement contrit.
Il esquissa alors un sourire empreint d’une légère mélancolie mêlée à de la résignation.
- Au moins cette fois ci je peux te dire « au revoir » convenablement. termina-t-il en la regardant.
Depuis sa rupture avec Mark, Kate n'avait jamais voulu admettre qu'elle pourrait être heureuse avec un autre homme et amoureuse comme elle l'avait été. Mais ces derniers jours, elle se rendait compte qu'il y avait une chance pour que cela se produise. Et même si cette chance était infime et qu'elle semblait insaisissable pour le moment, elle existait. Kate était consciente qu'elle avait une vie sociale assez dynamique pour lui faire rencontrer beaucoup de nouvelles personnes et que parmi elles se trouvaient sans aucun doute un homme qui pourrait faire office de petit ami et pourquoi pas de conjoint. D'ailleurs, il ne devait y en avoir qu'un. Et puis la jeune architecte était plutôt jolie, sociable et facile à vivre. A priori, rien de l'empêchait de se construire une vie paisible et sans péripéties majeures comme ça avait été le cas avec Mark. Tout était possible, elle pouvait s'attendre à tout. Mark en était la preuve vivante. Rien ne laissait présager que Kate pourrait un jour tomber amoureuse de lui et pourtant c'était bien arrivé.
La jeune femme suivit l'avocat du regard tandis qu'il s'approchait d'elle. Inconsciemment, comme par méfiance, elle attrapa la anse de son sac par les deux mains, la tint fermement contre elle et remonta un peu plus le sac sur son épaule. Elle pressentait qu'elle n'allait pas aimer ce que Mark allait lui dire. Effectivement, se fut le cas. Kate l'écouta parler sans rien dire. Dès les premiers mots, elle comprit qu'elle devait faire comme si ce qu'il disait ne la touchait pas et elle y arriva sans mal. Elle n'adopta pas le petit air hautain qu'elle savait faire à la perfection mais ne montra pas la moindre trace d'émotion non plus. Ce n'est que lorsque Mark fit sa transition qu'elle haussa les sourcils et lui lança un regard dans lequel il pouvait clairement lire un "Tiens donc...". Enfin, il conclut qu'il pouvait lui dire au revoir convenablement et après un court silence, Kate répondit:
- Tu vois, c'est exactement pour que tu ne me dises pas toutes ces choses que je ne suis pas venue te voir pour te dire que je partais seule. Si j'étais venue te voir, j'aurais été incapable de m'en aller sans vous.
L’histoire de Mark et Kate avait été semée d’embûches et de quiproquos. Si ils s’étaient réellement aimés, il n’en restait pas moins que rien ne leur avait facilité les choses. Mark n’avait jamais vraiment cru en l’amour «véritable », celui qui était censé durer toute une vie et survivre à toutes les épreuves. En étant en couple avec Kate il s’était laissé aller à quelques rêvasseries, s’imaginant que finalement il allait peut être atteindre l’innacessible amour après lequel tout le monde courait sans vraiment le savoir. Depuis leur rupture toute ces histoires à l’eau de rose avaient définitivement disparues et il n’espérait, ni n’attendait, plus rien de semblable. Il avait quelques maîtresses par ci, par là et s’en contentait. Avec elles, les choses étaient simples et se passaient de toutes extrapolations. Mark n’en demandait pas plus. Il avait juste envie d’une vie calme pour pouvoir élever sa fille dans les meilleures conditions possibles. Si il devait retomber amoureux un jour, il aviserait à ce moment là en se rappelant avec force ce que lui avait coûté l’amour qu’il avait éprouvé pour Kate Evans et il y réfléchirait à deux fois avant de faire totalement confiance à une femme.
La réponse de Kate à ses paroles le plongea dans ses réflexions. Ce qu’elle venait de lui dire aurait certainement dû lui faire plaisir, ou tout du moins le toucher. Elle était en train de dire qu’elle n’aurait pas pu partir sans lui et Alyssa si elle avait du lui faire face. Mark se rendit compte que cela ne l’affectais pas plus que cela. Il ne croyait pas un mot de ce qu’elle venait de dire et il lui semblait que ce n’était qu’une pseudo explication de plus pour justifier sa lâcheté.
- Hummm…si tu le dis. Répondit il sans grande conviction.
Son regard se focalisa de nouveau sur Kate, sans aucune émotion apparente. Il était temps à présent que chacun reprenne son chemin pour la dernière fois espérait il. Maintenant qu’il en avait terminé avec son dossier, ils n’avaient plus de raison de se revoir, ni même de se croiser. Ses yeux parcoururent une dernière fois le visage de celle qu’il avait profondément aimer sachant que c’était également la dernière fois qu’il le verrait aussi nettement.
- Eh bien au revoir Kate. Bonne continuation à toi et ton entreprise. A l’avenir si tu as un problème avec ta société, ce que je ne te souhaite pas tout de même, tu devras voir cela avec Shayes. Il reprends ton dossier. Il faut d’ailleur avouer qu’il est bien mieux qualifier que moi pour ce genre d‘affaire.
Sa voix était dénuée d’émotion et aussitôt après lui avoir dit au revoir l’homme se dirigea vers son bureau où il pris place sur son siége avant de reprendre son travail comme si de rien n‘était. Il voulait qu’elle s’en aille maintenant. Pourquoi faire durer le moment ? Lorsqu’il avait été en face d’elle il avait , pendant quelques secondes, eu envie de l’embrasser une toute dernière fois mais s’était finalement ravisé. A quoi bon…Et puis cela n’aurait fait que rajouter au « tragique » ridicule de l’événement. L’évidence était là, cela faisait longtemps qu’ils n’étaient plus ensemble et un baiser, même d’au revoir, aurait été déplacé et surtout inutile.
Cela faisait déjà plusieurs semaines, même plusieurs mois, que Kate avait pris conscience que quoi qu'elle dise à propos de ses sentiments, Mark n'en croyait rien. D'un coté, c'était de bonne guerre. Elle l'avait abandonné alors qu'il lui faisait entièrement confiance. Cette trahison avait fait qu'à présent, il étai constamment sur la défensive, voire l'offensive. Malgré cela, Kate n'était pas totalement satisfaite à l'idée de ne plus revoir Mark. Évidemment, elle était soulagée de ne pas avoir à supporter l'ambiance pesante qu'il y avait lorsqu'ils avaient rendez-vous. Elle ne serait plus obligée de se préparer à démarrer au quart de tour et à lui renvoyer le moindre de ses sarcasmes. Elle n'aurait pas à soupirer d'exaspération avant chaque entrée dans ce cabinet d'avocats. Cependant, Mark ne serait plus là pour lui faire vivement garder en mémoire le son de sa voix, son parfum et tous les souvenirs qui lui venaient à l'esprit lorsqu'il faisait un geste qu'il avait déjà fait où qu'il disait une parole qu'il avait déjà dite dans le passé. Sans lui, toutes ses choses risquaient de se consumer doucement jusqu'à ce qu'elle n'en ait plus qu'un vague souvenir. Et bien que Kate soit décidée à tirer un trait sur Mark, elle n'arrivait pas, ou plutôt ne voulait pas, oublier ce qu'elle avait vécu avec lui.
Quand elle avait William au téléphone, ce qui arrivait très régulièrement, au moins une fois par semaine, et qu'il lui demandait si elle était réellement certaine de vouloir bannir Mark de son esprit, elle clamait que oui, qu'elle en était absolument certaine. Mais une petite partie d'elle qu'elle n'avait pas envie d'écouter et qu'elle ne laissait pas s'exprimer lui rappelait qu'au fond, si elle ne voulait pas oublier son histoire avec Mark, c'était simplement parce qu'encore aujourd'hui, cette histoire lui manquait. De toute évidence, il n'en était pas de même pour l'avocat.
Kate hocha simplement de la tête lorsqu'il lui dit qu'à l'avenir si elle avait besoin d'un avocat, son dossier serait pris en charge par Shayes. Il était clair que même si on lui proposait de nouveau les services de Mark elle trouverait le moyen de refuser. Le hasard -pour ne pas parler de destin car Kate n'y croyait pas du tout- pouvait bien s'acharner à les réunir de force, la situation ne faisait que tourner en rond. Après cet au revoir glacial et prononcé par simple politesse, la jeune femme regarda l'homme de loi retourner à son bureau et reprendre son travail comme si elle était déjà partie. Sans lui rendre son au revoir, silencieuse, elle se retourna et se dirigea vers la porte qu'elle ouvrit et qu'elle referma doucement derrière elle. D'un pas régulier et confiant, elle prit la direction de la sortie. Seule dans l'ascenseur, elle se rappela du soir où elle y avait été coincée avec Mark. Un des plus détestables moments de sa vie...
Elle arriva dans le parking vide, entra dans sa voiture et posa son Ipod sur son support fixé au tableau de bord et le brancha au poste de radio. Les premières notes de I'm Yours de Jason Mraz se firent entendre. Bien que cette chanson ait été bombardée pendant des mois à la radio et à la télévision, Kate ne s'en était pas lassée. Elle l'adorait toujours autant, tant pour la mélodie que pour les paroles qui lui rappelaient l'insouciance et l'ambiance qui régnait sur l'île. Même le clip vidéo était digne de ses paysages et de la joie de vivre de ses habitants. La chanson lui arracha un petit sourire. Elle mit le contact, attacha sa ceinture de sécurité et se dirigea vers la sortie du parking, direction l'aéroport de Newark.
Dernière édition par Kate Evans le Jeu 4 Fév - 18:58, édité 2 fois
L'absence de réponse de Kate n'étonna pas Mark. Il ignorait si elle avait espéré des au revoir plus chaleureux et n'en avais que faire dans le fonds. Du moins voulait il le penser...Lorsqu'il entendit la porte de son bureau se refermer, l'homme poussa en profonds soupir tout en lâchant son stylo avant de s'enfoncer dans le dossier de sa chaise. Il ne pouvais nier ressentir un léger malaise, un sentiment peu agréable qui lui prenait doucement les tripes...un peu comme lorsqu'il avait réalisé que Kate l'avait tout simplement quitté pour partir à New York.
L'homme de loi ferma les yeux et respira lentement tentant de faire taire ce sentiment qu'il ne désirait nullement. Il était trop tard pour revenir en arrière, pour effacer et recommencer tout depuis le début. Il avait essayé une première fois après la découverte de sa paternité. Il avait pardonner à Kate de la lui avoir cachée sciemment et il avait fait confiance à la jeune femme plus qu'à aucune autre. Aujourd'hui il en payait le prix ne pouvant s'empêcher, inconsciemment, de comparer toute les autres femmes à Kate et bien qu'il voulait la détester de tout son être il n'y parvenait pas. Devant elle il arrivait encore à faire semblant, à lui lancer des piques, des phrases méchantes et cruelles, des reproches voilés...mais lorsqu'il se retrouvait seul avec lui même et qu'il n'y avait plus personne à qui mentir il ne pouvait se mentir à lui même éternellement.
A présent les choses étaient clairement définies et ils n'avaient plus rien à faire dans la vie de l'autre. Mark avait compris qu'il devait lâcher prise et qu'il devait à présent se concentrer sur sa vie présente et non passée. Il devait aller de l'avant, rencontrer d'autre femmes et pourquoi pas vivre de nouvelles passions en laissant derrière lui cette histoire d'amour qui le marquerait à vie malgré lui. Il était assez lucide pour comprendre qu'a force de regarder en arrière il se privait de toute nouvelle relation.
Le téléphone le tira de ses pensées et il saisit le combiné. Alyssa était à l'autre bout de l'appareil lui demandant quant il allait rentrer. En entendant la voix de sa petite fille, le sourire de Mark revint. Alyssa avait l'étrange pouvoir de remonter le moral de son père en quelques secondes à peine. Alors qu'il parlait à sa fille, Mark oublia momentanément que Kate venait de sortir de son bureau et de sa vie définitivement... Lorsqu'il raccrocha le téléphone il se remit au travail en pensant à sa petite Alyssa qui attendait avec impatience son retour.
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