Faire le ménage était une bonne thérapie en soi ! Du moins d’après cette connerie de magasine que j’avais acheté parce qu’il parlait justement de comment occuper son temps en trois leçons. Un ramassis d’âneries toutes plus misogyne qu’autre chose. Leurs idées : le ménage, la décoration et la cuisine. Et après, on s’étonnait que la femme américaine passait son temps en mode desperate. Non, le pire de tout cela, c’était que j’avais déjà revu des points de ma décoration, osant afficher un de mes tableaux que j’avais peint mais qu’en prime, des cookie étaient bien sagement en train de cuire. Bon sang, si un de mes proches me découvraient en train de jouer à la parfaite femme d’intérieure, à coups sûrs, il aurait une syncope ou alors il se foutrait de ma gueule. Il faut dire qu’on ne s’attend pas à ce qu’une Escorte Girl doublée d’une prostituée s’entraine à faire des cookies depuis trois heures. Au moins, durant tout ce temps, j’avais oublié que j’avais envie de drogue. Le sevrage avait été douloureux, me plongeant dans les affres d’une solitude dont je n’avais que faire mais le pire de tout, c’était les passages à vide quand la tentation n’en devenait que plus forte. Comme aujourd’hui par exemple où j’avais pris une journée de congé. J’étais fatiguée, sur les nerfs et malade. Oui, pour la première fois de ma vie, j’acceptais de me considérer comme malade car c’était une bien maladie, l’addiction non ? Quoiqu’il en soit, je ne savais que faire de ce jour de congé. J’avais peint toute la matinée dans l’atelier que j’avais installé dans ma petite cave au sous-sol –ce n’était pas l’endroit rêvé mais cela m’empêchait de salir mon petit vraiment petit studio ; mais sans succès. Mon cerveau demandait toujours sa dose. J’ignorais vers qui me tourner car Kendra était repartie vers de nouvelles aventures et je peinais à me lier véritablement avec d’autres personnes. Un mot comme en cent, j’étais seule. Du moins juste avant qu’on ne frappe à ma porte. « Je sais qui vous êtes » répondis-je froidement avant de soupirer « Entrez ! J’espère que vous avez l’estomac bien accroché, je cherchais justement un cobaye pour tester mes cookies » ajoutais-je en m’effaçant pour le laisser entrer dans mon studio qui devait sûrement faire la taille de son dressing. « Je présume que vous êtes là pour me parler de mon frère »

S’il y avait bien une visite à laquelle je ne m’étais pas attendue, c’était bien celle du géniteur de mon frère. Sullivan et moi étions en froid depuis plusieurs semaines et je ne comprenais pas trop ce que je venais faire dans leur problème familial. Dans la famille, j’étais considérée comme le vilain petit canard, la fille de… Je ne savais pas, ça se trouve un banquier, un actionnaire, un PDG ou même du facteur tant ma mère avait l’habitude d’écarter les cuisses pour le bien de ses affaires. De tous ses défauts, il fallait que j’hérite de celui-là étant donné mes activités extra-professionnelles. Au moins, je pouvais toujours me rassurer d’une chose : je ne m’étais pas tapé le père de mon frère car dans le genre glauque, on n’aurait pas fait mieux. Yeah, j’avais trouvé une chose positive dans la merde de toute mon existence. « C’est vague comme demande. Vous pouvez préciser ? Mais si vous êtes ici, c’est que mon enfoiré de frère n’en a fait qu’à sa tête et qu’il refuse de vous parler ? Je dois dire bienvenue au club dans ce cas » répondis-je calmement tout en lui faisant signe d’aller s’asseoir dans le salon ultra mini car mon studio était on ne peut plus petit que même moi, de temps en temps, ma claustrophobie se rappelait à mon bon souvenir. Je revins vers lui avec une assiette de cookie et du lait avant d’arquer un sourcil « Je n’ai pas d’alcool chez moi alors si vous voulez autre chose que du lait, dites-moi » lui proposais-je à mots déguisés avant de m’asseoir en tailleur sur le pouf face à lui. « Vous savez, je suis pas sûre d’être une grande aide pour vous car même si je vous parlais de mon frère, je ne vois pas en quoi ça vous aiderait car il est pire qu’une tête de mule. Je crois que borné a été inventé rien que pour lui » l’informais-je avec un léger sourire car même en froid, je conservais toujours cet amour pour mon frère. Il était mon roc, ma raison de vivre depuis tant d’années. «Je présume ma chère mère vous a dit qui était responsable de l’accident de mon frère non ? » lui demandais-je avec ironie tout en poussant les cookies vers lui. Ma mère ne se gênait jamais pour dire combien sa fille était une irresponsable, une moins que rien et à force d’être traitée comme de la merde, j’avais finir par m’en considérais comme une.

« Cela ne m’étonne même pas venant de cette vipère » soupirais-je avec un léger sourire. Notre mère n’avait pas toujours été cette face de serpent comme j’aimais l’appeler. Fut un temps, elle avait tout fait pour nous rendre heureux mon frère et moi mais dès lors que Sullivan avait voulu voler de ses propres ailes, le démon avait montré le bout de sa queue. On lui appartenait et elle n’avait jamais pu accepter le fait que mon frère puisse tomber amoureux et fonder une famille. Depuis, les coups bas s’étaient enchainés jusqu’à ce qu’elle cherche à lui retirer la garde de sa fille. Lou était une enfant si adorable, je l’adorais et essayait de la voir le plus souvent possible pour m’assurer qu’elle allait bien. Son père lui manquait autant qu’il me manquait mais je ne pouvais guère faire plus que l’aider à surmonter son absence en restant à peu près bien dans les petits papiers de notre mère. « Tenez » lui tendis-je son verre de l’eau tout en lui demandant plus de précision concernant les renseignements qu’il voulait. Je n’étais pas devin et je ne me voyais guère raconter la vie de mon frère par le menu à un parfait étranger car après tout, pour moi, il n’était que cela et le fait qu’il partage une partie de son code génétique avec mon frère m’indifférait totalement. Cela me rappelait simplement que j’ignorais tout de mon propre père. « Mon frère a toujours su voir le meilleur en moi mais en faire ressortir le pire, c’est un vieux conflit entre nous qui ne date pas d’hier mais effectivement malgré le fait que nous soyons en froid, je continue à l’aimer de tout mon cœur et il en va de même avec ma nièce » répondis-je simplement avec peut-être moins de froideur dans la voix. Il n’avait pas recraché mon cookie donc je pouvais lui accorder le bénéfice du doute bien que d’être dans un espace aussi réduit avec un homme me mettait toujours mal à l’aise. « Pour ce qui est de ses motivations à s’être engagé dans l’armée, si vous les trouvez, je veux bien les connaitre car je ne lui ai jamais posé la question. J’étais contre son engagement ! Quant à la mère de Lou, elle s’appelait Jane, c’était une femme que je respectais et admirais beaucoup. Elle rendait mon frère heureux et moins con, ce qui était en somme un exploit voire un miracle » lui racontais-je avec une certaine tendresse. Jane avait été ce qu’il y avait eu de mieux dans la vie de mon frère après sa fille et je me désolais qu’une autre femme n’arrive pas à réussir à nouveau ce miracle. « Elle est morte en couche car elle était atteinte de mucoviscidose et l’accouchement l’avait épuisé. Sullivan a mis longtemps à s’en remettre s’il s’en est remis » poursuivais-je « quant à notre mère, elle a été présente autant qu’elle pouvait et je crois qu’elle nous a aimé mais c’est une personne possessive qui adore contrôler son monde. Sullivan est incontrôlable et malheureusement notre mère ne peut pas le supporter donc elle s’échine à faire de sa vie un enfer en espérant que cela le fera revenir vers elle mais elle ne fait que l’éloigner »