Au volant de sa voiture, Edwin roulait sur la route en priant pour qu'aucun feu ne passe au rouge de sorte qu'il puisse traverser la ville jusqu'à atteindre le quartier du Lenox Hill au plus vite. Il savait que les secondes lui étaient comptées et, s'il voulait aidé son amie, il se devait de faire au plus vite tout en arrivant chez elle en un seul morceau. Théo l'avait appelé quelques minutes plus tôt, ses sanglots l'empêchant de parler correctement. Il n'avait pas complètement compris ce qu'il s'était passé, il avait simplement saisi l'essentiel : elle allait très mal et il devait absolument le retrouver chez elle pour l'empêcher de sombrer comme elle avait pu le faire auparavant. Il savait qu'elle était fragile, particulièrement depuis le décès de Liam en août dernier, et il s'était profondément juré d'être présent pour elle comme elle avait pu l'être pour lui quand ils s'étaient connus à son arrivée à New York en octobre. S'il s'était réellement écouté, il serait resté chez lui, une bière en main à regarder la télévision tout en se questionnant sur le départ de Capucine dont il ne s'était toujours pas remis. Mais aider son amie était bien plus important. Non seulement ça l'aiderait à ne plus penser à son ex petite amie, mais en plus, Théo avait profondément besoin de lui. Alors au final, son pied s'enfonça tout de même dans l'accélérateur, faisant ainsi vrombir le moteur de sa voiture pour traverser la route plus rapidement.

Il se gara en bas de l'immeuble sans faire attention à si le véhicule était correctement placé entre les deux lignes. Il y avait des choses plus urgentes et importantes qu'un simple parcage. Fermant sa voiture, il courut ensuite en direction de l'immeuble, composa le code d'entrée et se rua à l'intérieur. Appelant l'ascenseur, il ne patienta que quelques secondes avant de se résigner à prendre les escaliers. Il les gravit à une vitesse folle, ne prêtant aucune attention à son rythme cardiaque qui lui demandait de ralentir. Et une fois face à la porte donnant sur l'appartement de la jeune femme, il ne prit même pas le temps de récupérer son souffle avant de frapper plusieurs coups. Se retenant presque de respirer alors que son palpitant tapait bruyamment dans sa cage thoracique, il attendit quelques secondes mais personne ne vint lui ouvrir. S'inquiétant d'autant plus, il priait pour qu'elle n'ait pas déserté son appartement sur un coup de panique. « Théo ? C'est moi, ouvre-moi ! » déclara-t-il suffisamment fort pour se faire entendre au travers de la porte, tout en toquant une nouvelle fois contre.

Les secondes qui s'écoulèrent jusqu'à ce que la porte s'ouvre semblèrent être une éternité au londonien qui eut largement le temps de s'inquiéter pour Théo. Il avait connu la jeune femme il y a plusieurs moi - en octobre plus précisément -, quelques jours seulement après avoir emménagé à New York. Elle avait lu en lui comme dans un livre ouvert dés leur première rencontre, comme si elle comprenait la peine qu'il trainait avec lui sans qu'il n'ait à en parler. Et elle avait tenté désespérément de l'aider, sans grand résultat étant donné que sa dépression avait perduré et qu'il n'avait réussi à se débarrasser de sa culpabilité que des mois après. Elle avait pourtant tenu bon, insistant pour être près de lui, pour lui porter secours et tenter de lui faire entendre raison concernant l'accident qui lui avait arraché sa petite amie. Cela dit, leur relation s'était quelque peu dégradée quand ce fut au tour de Théo de sombrer. Et, en contrepartie, Edwin n'avait pas été là pour elle, du moins au début. Encore trop entouré par les fantômes de son passé, il n'avait rien fait si ce n'est lui montrer avec ironie que la vie n'était pas aussi belle qu'elle l'avait prétendu auparavant. Mais, à force de temps, il avait fini par se rendre compte qu'il n'agissait pas comme il le devait et il s'était finalement tourné vers elle pour lui tendre la main à son tour. Elle était son amie, il tenait à elle énormément et ne supportait pas de la voir souffrir. Aujourd'hui montrait une fois de plus qu'il était là pour elle, prêt à tout pour lui redonner le sourire. Il espérait du moins en être capable, en espérant surtout que Théo n'avait rien vécu de traumatisant où de grave pour l'appeler avec une telle panique.

Oui, il s'inquiétait pour elle. Son coeur battant la chamade dans sa cage thoracique en témoignait. Il était une des rares personnes à connaître les antécédents de la jeune femme ainsi que tout ce qu'elle avait eu à traverser et ce qu'elle affrontait encore aujourd'hui. Et leurs passés se ressemblaient étrangement, tous deux ayant perdu la personne qu'ils aimaient et ayant connu le cercle infernal de la drogue. C'était d'ailleurs principalement pour ça que le britannique se faisait un sang d'encre pour Théo. Il la savait fragile et il connaissait largement ce à quoi ressemblait la sensation de manque pour savoir que, lorsque l'on se retrouve en situation de faiblesse, la tentation devient énorme et il en faut généralement très peu pour y retoucher. Edwin refusait catégoriquement que l'australienne replonge et il était prêt à lui offrir tout son temps s'il le fallait. Il lui avait promis de veiller sur elle, de l'aider coûte que coûte et il était un homme de promesse qui ne faillait jamais.

Finalement, après des secondes interminables, la porte s'ouvrit. Le musicien n'eut même pas le temps de voir Théo apparaître qu'elle sautait déjà à son cou. « Je suis désolée. » Désarçonné, il sentit bien vite que le corps de la jeune femme était secoué de sanglots profonds et qu'elle tremblait de tous ses membres. Alors, sans attendre, il encercla sa taille de ses bras et la serra contre lui pour lui montrer qu'elle n'était plus seule. « Hey... je suis là. » murmura-t-il avant de l'entraîner à l'intérieur sans la lâcher, refermant la porte derrière lui. L'état de son amie l'inquiéta d'autant plus et il se mit à imaginer les pires scénarios. Priant pour que ce ne soit rien de grave, il s'écarta légèrement d'elle et prit son visage entre ses mains avec une délicatesse sans égale, plongeant son regard inquiet dans le sien, larmoyant. Dégageant les mèches de cheveux qui entravaient sa vue, il caressa ses joues de ses pouces pour effacer les larmes qui y roulaient. « Calme-toi... respire. » essaya-t-il de la rassurer, exagérant ensuite sa propre respiration pour l'inciter à le suivre afin qu'elle prenne le dessus sur ses sanglots. Heureusement pour lui, sa présence sembla l'aider à ralentir ses pleurs assez vite et il put rapidement la reprendre dans ses bras, embrassant sa tempe avec tendresse. Son corps lui semblait soudainement frêle et vulnérable, et il s'ordonna silencieusement de rester auprès d'elle tant qu'il ne la jugerait pas capable de rester seule. « Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » finit-il par lui demander en se dégageant légèrement tout en la gardant contre lui de sorte à voir son visage, espérant qu'elle soit dans la mesure de lui répondre. Il avait lui même traverser ce genre de moment où la souffrance est tellement grande qu'on se sent incapable de prononcer la moindre phrase ou que l'on ne parvienne pas à trouver les mots juste pour exprimer ce que l'on ressent. Mais, pour éviter cela, il encouragea Théo en glissant une de ses mains jusque dans sa nuque pour la lui caresser avec douceur.

L'australienne semblait se calmer, ce n'est pas pour autant qu'Edwin s'en écarta. Au contraire, il la garda contre lui, exerçant les mêmes caresses à la base de sa nuque pour lui donner un minimum de courage. Sa bouche s'ouvrit mais pour se refermer aussitôt, signe qu'elle ne savait pas quoi répondre. Et pourtant, elle finit par lui donner une explication. « Rien... » Le londonien la regarda d'un air dubitatif, sans comprendre. Il ne s'était rien passé ? Alors pourquoi était-elle dans un tel état de panique ? Cela en devenait d'autant plus inquiétant, et Théo dut le lire dans le regard du jeune homme, car elle reprit la parole, peu sûre d'elle. « Je me sens tellement mal... et les médicaments de Liam... » En soi, ces quelques mots ne voulaient pas dire grand chose. Mais en connaissant parfaitement la jolie brune, Edwin comprit immédiatement. Cette fichue tentation l'avait prise d'assaut, profitant de sa faiblesse pour s'immiscer en elle et la pousser vers les médicaments de son défunt mari, comme un tableau attirerait un aimant. Il avait donc eu raison de rappliquer en vitesse dés la fin de leur conversation téléphonique afin de lui prêter main forte.

« J'ai cru que j'y arriverais pas tout seule, j'ai paniqué... Je suis désolée. » Elle était désolée alors qu'il n'y avait aucune raison qu'elle le soit. Mais une fois de plus, Edwin la comprenait. Il avait l'impression de se retrouver face à lui-même, il y a de ça plusieurs mois, alors qu'il était à la dérive. Demander de l'aide puis s'excuser auprès de la personne était une réaction normale. On a vite fait de culpabiliser de soit-disant déranger les autres. Et, évidemment, comme toute personne venant en aide à quelqu'un, le brun répondit d'une voix douce : « Tu n'as pas à te sentir désolée Théo. » Elle devait absolument s'attendre à ce genre de paroles, mais elles n'en restaient pas moins rassurantes. Lui adressant un sourire réconfortant et fit glisser sa main de sa nuque à sa joue, le regard planté dans le sien. « Je sais ce que c'est... tu as bien fait de m'appeler. » Il n'aimait pas forcément appuyer sur le fait que lui aussi avait connu cette période. Mais dans le cas présent, il savait pertinemment que Théo avait besoin de l'entendre. Se rappeler qu'il avait traversé la même chose pouvait la rassurer et lui rappeler qu'il savait exactement quoi faire pour l'aider. Par ailleurs, il savait que la première chose à faire était de l'éloigner de tout ce qui pourrait lui nuire. Dans le cas présent, il devait impérativement la débarrasser des médicaments de Liam. Ils lui étaient complètement inutiles, la seule chose qu'ils puissent lui apporter étant cette fichue tentation qui pourrait bien se solder par une conséquence qu'elle n'aimerait pas vivre. S'écartant légèrement d'elle, il l'attrapa par les épaules sans lâcher son regard. « Les médicaments, tu y as touché ? » Elle lui avait parlé de ces médicaments, mais il ne savait même pas si elle en avait pris. Et il espérait que cela ne soit pas le cas. Si ça l'était, il allait devoir agir vite pour vider son estomac afin que les gélules n'agissent pas.

j'ai mis des plombes pour te pondre ce truc ripou, je suis désolée

La première fois qu'elle avait du traverser une longue période de déprime, Théo avait refuser de suivre un traitement auprès de personnes spécialisées. Si elle avait réussit à s'en sortir sans leur aide après trois ans dans un état second, il n'y avait aucune raison qu'elle aie besoin d'eux à ce jour. Elle allait s'en sortir, en tout cas elle le voulait plus que tout, mais une fois qu'elle se retrouvait seule, c'était beaucoup plus difficile à réaliser. Entre la tentation de les savoir là et l'envie de soulager sa peine, rien ne l'interdisait d'y toucher en dehors de la promesse qu'elle avait faite à son mari. Celle-ci était néanmoins suffisante pour qu'elle se re-saisiste, pas pour longtemps, mais assez pour passer un appel à l'aide à Edwin. La jeune femme ignorait s'il allait venir, s'il était assez solide pour tenir le coup et réalisait que c'était complètement égoïste de prendre le risque de l'entrainer dans sa chute, mais elle n'avait personne d'autres, pas pour passer à travers cette douleur là. Seul lui pouvait la comprendre, comprendre à quel point il était difficile de résister quand on se sentait aussi mal.

Dans ses bras, Théo reprenait doucement son calme à chacun de ses gestes qui la réconfortait. Il agissait comme un calmant sur elle & quand bien même l'envie était toujours là, elle se sentait beaucoup plus forte qu'il n'y a dix minutes lorsqu'elle était complètement seule pour prendre une décision dans un sens ou l'autre. « Tu n'as pas à te sentir désolée Théo. » Elle haussait les épaules, sachant parfaitement que c'est ce qu'il allait lui dire, qu'il le pense sincèrement ou non. Il n'empêche qu'il était tard, qu'il avait lui même ses propres problèmes à affronter et sans doute des choses plus intéressante que du baby-sitting. Malgré sa culpabilité, la jeune néo-zélandaise restait soulagée d'avoir passé cet appel, car il venait sans doute de lui sauver la vie, ou du moins - pour ne pas exagérer - une bonne partie de celle-ci. « Je sais ce que c'est... tu as bien fait de m'appeler. » Un instant, elle s'écartait pour l'observer et lui adresser un sourire pour le remercier d'être là, de ne pas s'énerver sur elle pour avoir été si faible ce soir. « Les médicaments, tu y as touché ? » Théo agitait doucement la tête de manière négative, sentant les larmes lui monter aux yeux à nouveau. Elle avait été si proche de le faire, de foirer autant d'années de travail... « Ils sont à la salle-de-bain... » finissait-elle par lâcher, priant pour qu'il aie la force de l'aider à s'en débarrasser. La moitié des cachets étaient surement encore étalés sur le sol, mais elle n'avait pas pris un seul d'entre eux, c'était l'essentiel. « Je vais tout balancer, je ne veux plus rien de tout ça ici... » Plus un seul médicament malveillant, qui en plus de la tenter lui renvoyait la douleur de Liam en plein visage, et la façon dont elle avait cru naïvement qu'il était soigné. « Je peux appeler quelqu'un d'autre pour le faire, je suis désolée... » Elle ne pouvait s'empêcher de s'excuser à nouveau, pour l'avoir mit dans une telle situation, face à la tentation lui aussi. Il était néanmoins toujours plus facile de céder à deux que seuls, mais Théo avait un tas d'amis qui n'avaient jamais ne fus-ce qu'envisager ces saloperies et qui pouvaient l'en débarrasser sans le moindre doute. Elle tenait pourtant à ce que ce soit fait maintenant, tout de suite.

Théo pouvait s'excuser des centaines de fois de l'avoir appelé, elle était un milliard de fois pardonnée d'avance. Le londonien était passé par là lui aussi, et il savait combien on pouvait être rongé par la culpabilité au moment d'appeler un ami au secours. En réalité, il se sentait bien plus proche de cette scène que devait le penser l'australienne. Il y a de ça plusieurs moi, le jour de l'anniversaire de mort de son ex petite amie, il avait mélangé alcool et médicaments en ayant lui aussi le réflexe d'appeler une amie au secours. Aladiah avait rappliqué et avait passé la nuit près de lui, à lui faire recracher ce qu'il avait ingurgité et à l'écouter lui raconter toute la douleur et la rage qu'il ressentait avant de tenter de le rassurer au mieux. Pour avoir vécu cette scène, Edwin savait donc également combien se sentir soutenu par une personne était bénéfique pour celui qui se retrouvait dans une situation difficile. D'autant plus quand l'ami présent est capable de nous comprendre mieux que quiconque. Théo n'avait donc aucune raison de s'excuser. Elle avait eu le meilleur des réflexes en l'appelant à l'aide avant de commettre une erreur et à présent, il se jurait intérieurement de ne pas quitter les lieux tant qu'il ne la saurait pas en état de s'en sortir seule. Il y passerait la nuit, voire des jours s'il le fallait.

La tenir contre lui était le meilleur moyen pour lui de lui prouver qu'il était là pour elle. Les gestes sont parfois plus porteurs de sens que des mots, et dans une telle situation, Edwin préférait la rassurer en la serrant contre lui. Sentir la force de ses bras qui l'entouraient devait lui redonner un tant soit peu de courage et de force, du moins, c'est ce qu'il espérait. Il finit tout de même par se détacher doucement d'elle, sans pour autant casser le contact physique, l'attrapant par les épaules comme pour lui assurer qu'il n'avait pas l'intention de partir, qu'il n'allait pas disparaître comme par magie d'une seconde à l'autre. La question qu'il lui posa était la clé de tout : si elle avait avalé des médicaments, il allait devoir se dépêcher de les faire ressortir de son estomac, alors que, si elle s'était contentée de les garder en mains, il allait simplement falloir l'aider à s'en débarrasser. Le signe négatif qu'elle lui adressa de la tête le rassura, lui enleva même une certaine pression. Les choses n'allaient pas être plus simples, mais elle était au moins hors de danger. « Ils sont à la salle-de-bain... » Ses yeux larmoyants parlaient pour elle. Edwin voulut la reprendre dans ses bras pour la calmer, mais elle le devança en reprenant la parole. Alors il se contenta de lui frictionner doucement les épaules en signe de soutien. « Je vais tout balancer, je ne veux plus rien de tout ça ici... » Non seulement elle n'avait rien avalé, mais en plus, elle était lucide. Elle semblait tout à fait consciente que garder ces médicaments -qui ne lui avaient jamais été prescrits- ne lui servirait à rien si ce n'est lui attirer des ennuis. Plutôt confiant, le britannique parvint à adresser un léger sourire à son amie, caressant le haut de ses bras avec la même tendresse. « Je peux appeler quelqu'un d'autre pour le faire, je suis désolée... » À l'entente de ces quelques mots, Edwin baissa légèrement la tête. Elle connaissait son passé, elle savait ce qu'il avait enduré, ce qu'il avait commis comme erreur. Elle savait qu'il s'était drogué avant de rencontrer Aly, qu'il avait perdu la jeune femme qu'il aimait, qu'il avait tenté de mettre violemment fin à ses jours. Et, de ce fait, elle devait certainement craindre qu'il craque également, qu'il n'ait pas le courage de l'aider par peur de ne pas tenir lui-même. Certes, Edwin gardait toujours une part de lui fragile qui risquait de baisser les bras à n'importe quel moment, principalement maintenant qu'il sortait d'une relation qu'il avait cru fondée et heureuse. Mais, durant sa dépression et la rechute qu'il avait faite en janvier dernier, il avait appris à se battre, et ce grâce à ses amis. Il était capable de contenir ses pulsions, capable de gérer ses souvenirs et ses émotions. Et il s'était rendu compte que porter son aide à son entourage l'aidait à être un peu plus en peine avec lui-même. Alors Théo n'avait pas de soucis à se faire. Il ne craquerait pas et il se montrerait plus fort que tout, pour elle. Relevant alors la tête, il chercha à rencontrer son regard et lui sourit tendrement. « Je suis là maintenant, d'accord ? Ça va aller. » la rassura-t-il une fois de plus, finissant par remonter une main jusqu'à sa joue pour y glisser sa paume en un doux effleurement. « Et arrête de t'excuser. » souffla-t-il en rigolant presque, espérant lui tirer un léger sourire.

Maintenant, l'étape la plus dure restait à faire. Théo avait bel et bien montré qu'elle désirait se débarrasser de ces médicaments, mais l'étudiant en psychologie enfantine savait pertinemment que l'idéal soit qu'elle les jette elle-même. Ce qui n'allait pas être une mince affaire. Lui-même n'en avait pas été capable huit mois plus tôt. Mais il se sentait apte à l'aider, de la soutenir dans cette tâche et il la savait capable de le faire. S'écartant d'un pas tout en glissant sa main le long du bras de la jeune femme, il finit par lui attraper la main et y exerça une légère pression en avançant, le regard figé sur elle. « Viens. » l'encouragea-t-il, attendant cependant qu'elle se décide seule à le suivre en direction de la salle de bain. Arrivés dans la pièce, Edwin s'arrêta pour contempler la situation. La pharmacie était fermée, mais quelques boîtes de médicaments étaient éparpillées au sol. Serrant doucement la main de l'australienne, Edwin la caressa de son pouce et lui jeta un regard pour s'assurer qu'elle ne resterait pas figée. Puis il s'avança, lui lâchant progressivement la main pour aller s'accroupir au sol et rassembler tous les médicaments étalés par terre. Il reconnut certaines boîtes alors que d'autres lui étaient inconnues. Mais quelque soit leur contenu, elles représentaient toutes un danger pour Théo. Se redressant, les médicaments en main, il se tourna vers la chanteuse. « C'est tout ce qu'il y a ? » lui demanda-t-il pour avoir la certitude que rien d'autre d'inapproprié pour elle ne traîne. Puis il finit par lui tendre la main, attendant qu'elle la lui prenne sans la forcer. Il voulait l'inciter à en faire le maximum par elle-même, c'était le meilleur moyen pour qu'elle se sente réellement mieux après. Quand enfin elle glissa sa paume contre la sienne, il entremêla leurs doigts et marcha jusqu'aux toilettes qu'il ouvrit sans attendre. Déterminé, il sortit une des plaquettes d'une des boîtes et fit tomber progressivement chaque pilule dans la cuvette, jusqu'à ce qu'elles y soient toutes. Jetant un regard vers Théo, il constatait bien qu'elle était tendue, et pourtant, il lui tendit tout de même une des boîtes pour l'inciter à l'imiter. « Tu te sentiras mieux après. » lui glissa-t-il en guise d'encouragement. Qu'elle se débarrasse elle-même de ces médicaments allaient nettement plus l'aider que s'il le faisait à sa place. Mais si elle n'y parvenait pas, il le ferait sans attendre. Elle ne pouvait pas passer plus de temps avec cette tentation meurtrière dans sa salle de bain.

Théodora avait toutes les raisons de céder, qui lui en voudrait de le faire après avoir perdu son mari? Ses amis tenteraient de l'aider mais ne porteraient pas de jugement - et quand bien même, elle s'en moquait. C'était d'une telle facilité et ça lui permettrait de se sentir bien mieux, pour l'instant du moins. La jeune femme savait néanmoins la longue traversée qui l'attendait ensuite, cet enfer lorsque vous étiez en manque depuis des heures voir des jours et elle ne voulait pas repasser par là. Et puis, il y avait cette promesse qui la tenait pieds et mains liés. Cette nouvelle famille aussi... Elle ne connaissait rien d'eux et Théo voulait que cela change, ce n'est pas en arrivant dans un état second qu'elle arriverait à les convaincre de l'accepter. La jeune femme se souvenait parfaitement de ce à quoi elle ressemblait à l'époque et ce n'était rien de bien joli, si seulement sa mère ne l'avait pas quitté du jour au lendemain... Sauf qu'on ne refait pas le monde avec des si, son passé était bel et bien là, prêt à ressurgir au moindre ennuie pour l'embarquer dans une spirale infernale.

Devant Edwin, Théo se sentait encore plus faible et nulle qu'elle ne l'avait ressentit il y a quelques minutes, elle faisait une belle veuve désespérée et pitoyable. Même si elle tenait surtout à ne pas craquer, Théo avait eut assez de temps pour se calmer un temps soit peu et pour réagir au fait qu'il n'était pas la personne à mettre en contact avec ces pilules. « Je suis là maintenant, d'accord ? Ça va aller. » La main qu'il posait sur sa joue ne la réconfortait pas vraiment, au contraire, elle était à nouveau en lutte pour ne pas fondre en larmes sous ses yeux. « Et arrête de t'excuser. » Comment pouvait-elle arrêter de s'excuser en étant si égoïste? Qu'elle appelle à l'aide était courageux - c'est du moins ce qu'on lui avait répéter des dizaines de fois à l'époque bien qu'elle n'en croyait pas un mot - mais mettre quelqu'un dans la même position qu'elle était inacceptable. Théo aurait du penser à quelqu'un qui n'avait jamais eut le moindre soucis avec la drogue, quelqu'un qui flanquerait tout à la poubelle sans la moindre hésitation et sans craindre de chuter & non à quelqu'un qui ne la jugerait pas. Elle avait refuser de montrer ses faiblesses à quelqu'un qui les ignorait et maintenant, elle risquait d'échouer dans son envie de s'en sortir. S'il lui arrivait quoi que ce soit, elle ne pourrait se le pardonner elle le savait parfaitement, ce pourquoi elle continuait à s'excuser qu'il le juge nécessaire ou pas.

« Viens. » Suivant Edwin, Théo s'était laissée prendre la main et se dirigeait vers la salle de bain en manquant un peu plus d'air à chaque pas. Ses poumons étaient beaucoup trop étroits pour contenir l'air dont elle avait besoin pour vivre, elle se sentait compressée, avait l'impression que sa poitrine pouvait exploser à tout moment. La jeune australienne continuait pourtant d'avancer & de respirer lentement, du mieux qu'elle le pouvait, et observait complètement figée Edwin s'abaisser pour se regrouper les boites de médicaments. Elle avait l'impression qu'une bombe pouvait éclater à tout moment et s'attendait au pire, se tracassant bien plus pour lui que pour elle à présent alors qu'il semblait plutôt sur de lui. « C'est tout ce qu'il y a ? » Toujours aussi inerte, Théo ne parvenait pas à répondre à sa question, la jeune femme était tétanisée et se contentait d'observer les boites qu'il tenait déjà à la main. D'autres, peut-être, elle n'en savait rien, surement pas, peut-être que oui, elle n'arrivait pas à se souvenir de ce que contenait sa pharmacie et elle n'avait surtout pas envie de le savoir. Au niveau des toilettes, elle regardait chaque pilule tombée dans celle-ci avec soulagement mais aussi avec une certaine douleur. Lorsqu'il aurait fini, plus rien ne pourrait l'aider à panser cette plaie ouverte qui lui déchirait la poitrine, elle devrait se contenter de vivre avec. « Tu te sentiras mieux après. » La main tremblante, Théo lui adressait un signe négatif de la tête avant de lâcher sa main pour ouvrir sa pharmacie. Liam avait une tonne de médicaments à prendre pour mettre un terme à sa souffrance, ce qui lui faisait un bon paquet à éliminer, c'était le moment ou jamais. Sortant les trois derniers petits pots de l'armoire, elle revenait vers les toilettes dans lesquelles elle le versait d'une traite, jetant ensuite les boites dans la poubelle. C'était psychologique puisqu'elle n'avait rien touché, mais la jeune femme se lavait les mains de manière exagérée pour se sentir complètement débarrassée. Elle finissait par se tourner vers Edwin, abandonnant l'essuie avec lequel elle s'arrachait pratiquement la peau. « Je suis censée faire quoi maintenant? » Haussant les épaules, elle retenait les larmes qui la submergeait à nouveau. Théo n'avait aucune idée de la manière dont elle était censée surpasser ça et continuer à vivre sa vie alors qu'elle avait perdu la personne qui comptait le plus à ses yeux. La jeune femme finissait par passer ses bras autour du coup d'Edwin, se laissant aller dans ceux-ci sans retenir sa peine. Elle avait besoin de laisser celle-ci sortir mais encore plus de sentir que son ami était là pour elle, même après ce moment de faiblesse.

Qui lui en voudrait de céder après avoir perdu son mari ? Edwin lui en voudrait, terriblement. Ou tout du moins, il se sentirait terriblement en colère, contre lui-même, pour ne pas avoir su lui apporter son aide au point de la débarrasser à se sortir de ses pulsions. Il tenait à elle, terriblement, si ce n'est beaucoup trop, beaucoup plus qu'il ne se l'admettait, et la savoir aussi proche du gouffre le terrifiait. Un pas de trop et c'était la chute, chute qui pouvait se montrer interminable et se solder par une morte brutale. Et ça, il refusait que cela arrive. Lui vivant, jamais Théodora ne finirait complètement accroc à quoi que ce soit et encore moins elle mourra d'une éventuelle dépendance. Le jeune anglais s'en faisait le serment. Quand lui-même avait plongé, il aurait aimé avoir quelqu'un qui aurait pu l'épauler de la bonne manière parce qu'il aurait traversé la même chose. Cette personne, il la rencontrait des années plus tard, et les rôles en étaient inversés : il n'était pas celui qui devait être sauvé, il était le sauveur, celui qui se devait d'aider Théodora. Et il comptait bien faire tout ce qui était en son pouvoir pour soutenir l'australienne et faire en sorte qu'elle tourne définitivement le dos à cette fichue tentation et à son passé. Qu'importe ce qu'il devrait faire pour parvenir à la guider, il se sentait capable de tout pour la voir sourire et heureuse à nouveau.

Edwin se sentait observé dans chacun de ses mouvements. Il sentait le regard de Théo qui le suivait et, les quelques fois où il la regardait également et avait l'occasion de croiser ses iris, il sentait son coeur se crisper à la vision qu'elle lui offrait. Elle semblait suffoquer, totalement tétanisée, incapable de bouger. C'était à peine si elle lui répondait quand il lui demanda s'il restait des médicaments ailleurs. Il n'obtint en réalité aucune réponse et fut contraint de s'imaginer que les boîtes trouvées au sol étaient les seuls qui pourraient gravement nuire à son amie. Pourtant, quand il incita Théo à l'imiter en jetant les pilules dans les toilettes, cette dernière secoua négativement la tête et lui lâcha la main pour se rapprocher de sa pharmacie et en sortir trois pots supplémentaire qu'elle s'empressa de vider, sans prendre son temps, dans la cuvette des toilettes. Elle fut si rapide qu'Edwin n'eut même pas le temps de l'encourager et, lorsqu'elle alla se laver les mains, il n'avait pas encore terminé sa part du "travail". Alors il se dépêcha de jeter les derniers cachets et lâcha les boîtes dans la poubelle après avoir tiré la chasse-d'eau et s'être assuré que plus rien ne traînait. Il manqua ensuite de dire à Théo de se calmer, à la vision de l'énergie qu'elle mettait en se frottant les mains avec sa serviette, mais elle s'arrêta d'elle-même. « Je suis censée faire quoi maintenant ? » La question que l'anglais redoutait. Ce qu'il fallait faire ? Il n'en savait trop rien, car lui-même ne comprenait pas réellement comment il avait fait pour se sortir de sa dépression. Il s'était cru perdu à jamais, par amour pour sa défunte ex petite amie, mais avec de la volonté, il avait fini par sortir la tête de l'eau et réussissait aujourd'hui à nager plus ou moins maladroitement, buvant la tasse de temps à autre sans pour autant se remettre à se noyer.

Edwin étaient à la recherche d'une réponse rassurante et plausible à lui fournir quand elle finit par s'approcher de lui pour entourer son cou de ses bras et se laisser aller contre lui. La sentir si fébrile, si faible, en proie à une douleur débordante, lui fendait le coeur et il n'attendit pas pour encercler sa taille de ses bras et la serrer contre lui. Calant son menton contre la tête baissée de son amie, il caress son dos d'une main avec tendresse alors que l'autre lui assurait une protection en signe de soutien. « Te montrer courageuse et ne pas baisser les bras. » finit-il par répondre, en sachant pertinemment que cela n'aiderait en rien l'Australienne. Combien de fois ses propres amis lui avaient répété de ne pas flancher ? Il ne pouvait pas en compter le nombre, mais il savait que ces paroles avaient le don de l'agacer. Que pouvaient-ils dire là-dessus ? Il ne savait pas ce que c'était d'avoir perdu la personne qu'on aimait et d'avoir sombré, d'être tombé aussi bas. Et là était la différence avec Théo : alors qu'Edwin avait dû se contenter du soutien de ses amis, la jeune femme quant à elle avait la chance de l'avoir lui, une personne qui la comprenait réellement, parce qu'il avait traversé également la même chose. Soupirant doucement, Edwin resserra légèrement son étreinte et remonta une de ses mains jusqu'à la tête de son amie pour lui caresser les cheveux. « Je sais que c'est dur, que ça semble irréalisable, crois-moi, je suis passé par ce stade moi aussi... mais tu m'as moi et je ne te laisserai jamais tomber. » Puis il finit par décaler son visage afin de planter son regard dans celui de Théo. Il voulait qu'elle lui fasse pleinement confiance, qu'elle comprenne qu'il l'aiderait jusqu'à ce qu'elle s'en sorte, qu'elle ne serait jamais seule. Il finit par solder son tour de parole en lui glissant un « Je te le promets. » débordant de sincérité. Il ne la laisserait jamais, il serait toujours là, quel que soit l'endroit, quel que soit le moment.

Théo n'avait pas réfléchit en faisant venir Edwin pour la sauver, mais elle devait bien admettre qu'elle était heureuse qu'il soit là à ses côtés, puisque c'était lui ou personne. Personne ne connaissait ses anciens soucis avec la drogue et ce n'était pas maintenant qu'il fallait qu'elle en parle, pas alors que sa carrière décollait doucement. Ce n'était certes qu'une couverture pour elle, mais ça restait sa passion, être sur scène était la seule chose qui lui permettait de se sentir vivante et d'exprimer tout ce qu'elle ressentait. Sa vie personnelle était un désastre complet, elle n'allait surement pas détruire sa vie professionnelle en même temps, ni même son image auprès des Ioannis. Sa famille qu devait la haïr en partie avant même de la rencontrer à cause de l'accident des jumeaux, elle avait tout intérêt à ne pas empirer son image. Tout ceci n'étant que des excuses mais qui lui permettaient de tenir, elle voulait avant tout tenir bon pour elle, pour ne pas traverser l'enfer à nouveau. Maintenant qu'elle était débarrassée de tout, elle se sentait soulagée bien que toujours un peu déphasée. Théo ne savait toujours pas ce qu'il l'avait poussée à céder aujourd'hui alors qu'elle s'en sortait plus ou moins bien jusqu'ici. Peut-être le simple fait qu'elle n'avait absolument rien fait de sa journée à part penser à lui, ce qui était loin de l'aider.

Dans les bras d'Edwin, elle se laissait aller pour enfin se sentir libérée de toute cette pression. Théodora savait parfaitement qu'elle se sentirait beaucoup mieux par la suite, même si ce qu'elle voulait avant tout c'était de se sentir forte, assez pour surmonter tout ça. Pour l'instant, le fond du tunnel semblait être bien loin mais elle savait qu'elle pouvait y arriver avec de la volonté. Elle avait survécut à sa rupture avec Liam, alors pourquoi pas maintenant? Peut-être tout simplement parce qu'elle en connaissait la cause maintenant, parce qu'il n'était plus là. La jeune australienne savait que ce n'était pas impossible, sa meilleure amie avait perdu sa soeur jumelle et s'en était remise, même si cela restait douloureux. En réalité, la force de Sephora l'a faisait se sentir encore plus faible et ridicule, elle aurait aimé avoir la même que cette dernière mais ce n'était pas le cas. Elle était faible, fin de l'histoire, et es faibles ne survivent pas dans un monde aussi cruel. « Te montrer courageuse et ne pas baisser les bras. » Théo laissait échapper un léger rire parmi ses sanglots, c'était tellement facile à dire mais l'appliquer était bien plus difficile. Toujours contre Edwin, la jeune femme tentait de calquer sa respiration sur celle de son ami pour calmer ses sanglots qui ne semblait pas vouloir s'arrêter. « Je sais que c'est dur, que ça semble irréalisable, crois-moi, je suis passé par ce stade moi aussi... mais tu m'as moi et je ne te laisserai jamais tomber. » S'écartant légèrement, Théo l'observait en lui adressant un sourire confiant. Elle avait confiance en lui et savait qu'il ne l'abandonnerait pas, cette promesse n'était pas une parole en l'air dans le simple but de la rassurer. « Je te le promets. » Théo passait sa main sur la joue d'Edwin avant de poser ses lèvres sur les siennes. Elle ignorait ce qui la poussait à agir ainsi alors qu'elle pleurait son mari défunt, peut-être juste l'envie de se sentir soutenue et aimée. Peut-être plus. Toujours est-il que ce n'était pas le moment, ce qu'elle savait parfaitement. S'écartant de lui, elle posait son index sur ses lèvres avant qu'il ne puisse dire quoi que ce soit. « Prend ça pour un simple " Merci ". » La jeune femme lui adressait un sourire sincère, espérant qu'il ne cherche pas plus d'explication puisqu'elle n'était pas vraiment d'humeur à entamer une conversation complexe. « Tu passerais la nuit ici si je te le demandais? » finissait-elle par lui demander tout en lui faisant un signe de la suivre. Ils n'allaient pas rester éternellement dans la salle de bain, pas maintenant qu'ils étaient débarrasser de tout. « Je n'ai pas envie d'être toute seule ce soir... » Précisait-elle pour ne pas qu'il pense que ça aie un quelconque rapport avec le baiser qu'elle venait de lui donner. En un sens c'était le cas, elle aimait sa présence, sa compagnie mais c'est surtout qu'elle avait besoin de soutient aujourd'hui. « J'ai un tas de films sur le disque dur pour nous occuper... Et je peux nous préparer quelque chose si tu as faim? » En attendant une réponse de sa part, Théo attrapait un mouchoir pour essuyer ses joues ainsi que le maquillage qui avait coulé sous ses yeux et qui lui donnait un air misérable. Elle ne se sentait pas super bien miraculeusement, mais comme il venait de lui dire, à part être forte et courageuse, il n'y avait pas grand chose qu'elle puisse faire.

Cela faisait longtemps qu'Edwin ne s'était pas senti important pour quelqu'un. Non pas qu'il se plaçait lui-même à haute échelle dans la vie de Théodora, mais il savait parfaitement qu'elle l'avait appelé pour une bonne raison : il était une de seules personnes à connaître ses antécédents et en qui elle avait pleinement confiance. Ce qui faisait irrémédiablement de lui quelqu'un d'important à ses yeux. Elle l'appelait à l'aide et, enfin, il se sentait utile pour une personne en ce bas monde. Utile et, en plus de ça, capable de l'aider. Étant passé par la même passade, il savait bien que rien ne pourrait faire disparaître la douleur mais que le soutien indestructible d'une personne proche pouvait faciliter les choses et accélérer le processus jusqu'à ce la douleur disparaisse. Edwin comptait bien être cette personne là pour la belle australienne. Il l'aiderait, la soutiendrait, serait là chaque seconde, jusqu'à ce qu'elle se sente mieux. Et même après cela encore.

Ses paroles ne valaient pas grand chose. Il en était conscient. Quand il était tombé en dépression, tous ses proches n'avaient eu de cesse à l'encourager en lui disant de ne pas baisser les bras, lui promettant que tout finirait par s'arranger, que la douleur ne serait qu'un lointain passé. Mais qu'en savaient-ils ? C'était ce qu'avait pensé Edwin à l'époque et, par conséquent, il leurs riaient à la figure, les remettant à leur place en prétextant n'avoir besoin de l'aide de personne. Mais c'était précisément ça dont il aurait eu besoin : le soutien précieux d'une personne qui comprenait réellement ce qu'il ressentait et qui serait donc en mesure de lui dire "Tu verras, ça finira par passer". C'était précisément ce qu'il promettait d'être à Théodora. Jamais il ne la laisserait seule, elle pouvait en être certaine. Et le sourire rassuré qu'elle lui adressa après s'être écartée de lui lui montra qu'elle lui faisait confiance. Et c'était tout ce qui importait. Du moment qu'elle croyait en lui, elle était sur la bonne voie pour remonter la pente en douceur. Le jeune anglais lui rendit alors son sourire et entrouvrit les lèvres de sorte à laisser s'échapper quelques nouvelles paroles rassurantes. Mais il fut littéralement coupé dans son élan : la main de Théo vint caresser sa joue et, sans qu'il ne s'y attende ne serait-ce qu'une seconde, elle vint poser ses lèvres contre les siennes. Ce ne furent que quelques brèves secondes qui parurent pourtant être une éternité au jeune homme, éternité pendant laquelle il parvint à entendre son rythme cardiaque soudainement accéléré par l'effet de surprise. Un véritable ralenti cinématographique qui le prit de cours sans qu'il n'ait le temps de s'en rendre compte. Rouvrant les yeux, il croisa tout juste le regard de Théodora qui, à peine leurs lèvres séparées, vint poser son indexe sur ses lèvres, lui interdisant ainsi de prendre la parole. Il en aurait de toute manière été incapable après un si court moment d'intensité. « Prend ça pour un simple " Merci ". » Le sourire qu'elle lui adressa voulait tout dire : elle ne voulait pas entamer une conversation au sujet de ce qu'il venait de se passer. Acceptant sa volonté sans pour autant faire comme si de rien n'était, Edwin refit surface et lui sourit à son tour, comme pour lui assurer qu'ils n'auraient pas à en parler. Ou si, peut-être un jour, mais pas maintenant. « Tu passerais la nuit ici si je te le demandais ? » D'abord ce baiser et maintenant cette question ? Sans ne laisser rien paraître sur son visage, l'étudiant resta cela dit déstabilisé. Était-ce simplement parce qu'elle avait besoin qu'on prenne soin d'elle qu'elle se voyait agir ainsi ? Après tout, elle était dans une passe difficile due à la mort de son mari, il semblait donc invraisemblable que tous ces éléments partent d'une quelconque volonté de sa part. « Je n'ai pas envie d'être toute seule ce soir... » Évident. Sans se sentir pour autant rassuré ou conforté dans une quelconque idée, Edwin se contenta de lui sourire. Ce n'était pas le moment de tout remettre en question pour un simple baiser probablement parti d'une pulsion insensée. Passant finalement par-dessus cela, le londonien finit par replacer une mèche de cheveux de la chanteuse derrière son oreille, son regard planté dans le sien. « Je t'ai promis d'être là... » souffla-t-il en soutenant son regard, un léger sourire au coin des lèvres. Oui, il avait promis, et il était un homme de parole. « Évidemment que je le ferais. » termina-t-il avant de glisser le bout de ses doigts contre sa joue et ce jusqu'à sa nuque avant de s'approcher d'elle et de poser ses lèvres contre son front. Un geste affectif comme un autre qui pourtant fit tressaillir son coeur.

Finissant par quitter la salle de bain, Théodora emmena le brun dans son salon. Il la suivit de près sans rien dire, préférant la laisser prendre la parole. Lui imposer quoi que ce soit en commençant à parler lui semblait largement inapproprié et il préféra donc s'arrêter à sa hauteur pour l'observer en lui souriant dès que ses yeux se posaient sur lui, pour la rassurer une fois de plus. « J'ai un tas de films sur le disque dur pour nous occuper... Et je peux nous préparer quelque chose si tu as faim ? » Tout à coup, il revoyait la Théodora qu'il connaissait au-delà de son malêtre : cette jeune femme charmante, magnifique avec qui il ne se lassait pas de passer du temps. La regardant qui attrapait un mouchoir pour essuyer les larmes qui avaient emporté son maquillage, il garda un léger sourire sur ses lèvres en lui répondant. « Je t'aurais plutôt proposer de commander quelque chose à manger pour t'éviter de cuisiner, mais si ça te fait plaisir... » répondit-il en lui souriant gentiment. Loin de lui l'envie de l'obliger à se mettre aux fourneaux pour les nourrir. Après toutes les larmes qu'elle avait versées, peut-être préférait-elle faire dans la simplicité. Simple proposition. Gardant son regard posé sur elle, Edwin remarqua qu'une marque noire n'avait pas été effacée par le mouchoir qu'elle avait traîné contre sa peau. S'approchant d'elle, il attrapa son mouchoir en lui glissant un « Attends... » doux, puis, portant une de ses mains à son visage pour le lui tenir, il avança son autre main tenant le mouchoir vers ses joues pour effacer les dernières traces délaissées par ses larmes avec une tendresse infime. « Et voilà, belle comme si aucune larme n'avait coulé. » déclara-t-il en éloignant ses mains de son visage, lui souriant affectueusement.

La jeune femme ne savait pas vraiment ce qui la poussait à agir ainsi alors qu'il agissait en si bon ami auprès d'elle. Théo évitait toute présence masculine depuis le mois d'aout et se contentait de culpabiliser pour les relations qu'elle s'était forcée à avoir dans le but d'oublier Liam. A présent, elle embrassait Edwin alors qu'il avait tout fait pour elle, qu'il s'était déplacé pour l'aider et la soutenir. A l'heure actuel, il était l'une des seules personnes sur laquelle Théo pouvait compter, le seul en qui elle avait confiance lorsqu'il s'agissait de montrer ses faiblesses, la jeune femme ne voulait surtout pas risquer de ruiner ce lien qui les unissait. En agissant ainsi, c'est pourtant comme ça que ça se passerait, parce qu'elle était loin d'être prête pour une relation stable et qu'il sortait lui même d'une rupture. A vrai dire, elle ignorait même pourquoi elle se prenait déjà tant la tête sur ce baiser, comme elle l'avait dit, c'était sa manière - certes étrange - de le remercier d'être là, ça n'avait aucune importance, ça ne pouvait pas en avoir pour l'instant car ça compliquerait bien des choses. De tous les hommes qu'elle avait pu embrasser ces derniers mois, c'était pourtant la première fois qu'elle avait ressentit un petit quelque chose et même si ça l'angoissait, ça faisait aussi un bien fou. Le sourire mais surtout le silence d'Edwin la rassurait, Théo ne comprenait pas elle-même cette réaction, elle était loin d'être prête à en parler puisqu'elle ne serait quoi en dire. Il faut croire qu'Edwin avait choisi de respecter son choix puisqu'il la laissait reprendre la conversation comme si rien ne s'était passé. La jeune femme restait immobile lorsqu'il replaçait l'une de ses mèches, se contentant de le regarder dans les yeux en espérant qu'il ne l'imite pas - bien qu'au fond elle espèrait sans doute un peu l'inverse, c'était assez contrariant. « Je t'ai promis d'être là... » C'est vrai qu'il l'avait fait, mais elle exagérait peut-être un, en demandait toujours trop ce qu'il n'était pas obligé d'accepter. « Évidemment que je le ferais. » fermant les yeux lorsqu'il l'amenait à nouveau contre lui, Théodora souriait en sentant ses lèvres contre son front. « Considère que je te le demande alors... » soufflait-elle en s'éloignant légèrement de lui. La jeune femme était bien plus apaisée qu'il n'y a quelques minutes, en plus de son aide, Edwin fonctionnait comme un véritable calmant sur elle, sans doute parce qu'il savait trouver les bons mots, avoir les bons gestes. Elle n'était pas au top de sa forme, mais elle était apaisée, lui apportant un sentiment de bien-être qu'elle savourait avant une nouvelle tempête.

Reprenant doucement mais surement ses esprits, Théo avait fini par sortir de cette maudite salle-de-bain pour rejoindre le salon en compagnie de son ami. A part regarder un film, elle ne voyait pas comment occuper leur soirée, à moins de finir sur un jeu de société - ce qu'elle adorait, mais à deux c'était peu. « Je t'aurais plutôt proposer de commander quelque chose à manger pour t'éviter de cuisiner, mais si ça te fait plaisir... » Cuisiner ne dérangeait pas, elle n'avait rien d'une grande chef avec des spécialités bien à elle mais elle s'en sortait pas mal et passait parfois plusieurs heures à tenter de nouvelle recette, de desserts principalement puisque c'était la meilleure partie dans un repas. « Je pourrais choisir la facilité c'est vrai, mais c'est ce que tout le monde fait de nos jours. Une escalope milanaise ça te convient? C'est pas trop compliqué et on peut discuter pendant que la sauce mijote. Sauf si tu es affamé, alors on suit ton idée... » C'était un des recettes qu'elle était certaine de réussir mais surtout dont elle avait tous les ingrédients sans sortir de chez elle. La nouvelle génération avait tendance à ne plus prendre le temps de manger correctement, à commander sans cesse - ce qu'elle faisait elle-même pour gagner du temps - mais certaines personnes méritaient un petit effort, lui surtout. Voyant Edwin s'approcher à nouveau d'elle, Théo sentait les battements de coeur accéléré et du se retenir de faire un pas en arrière pour éviter cette proximité.« Et voilà, belle comme si aucune larme n'avait coulé. » un instant elle détournait le regard avant de lui adressé un sourire timide. « Merci, encore... » murmurait-elle, avant de s'éloigner nerveusement. « Il faut que tu arrêtes d'être aussi parfait... et proche. » Finalement, Théo se détendait en lui adressant un sourire amusé, elle paniquait beaucoup trop pour peu de choses bien qu'elle été honnête, c'était préférable qu'il ne s'approche plus si près de son visage. Elle n'était pas d'accord avec ses envies, elle culpabilisait de les avoir mais ne pouvait pas les empêcher, elle comptait donc sur sa compréhension, surtout qu'il approuvait sans doute comme elle qu'il s'agissait d'une mauvaise idée. Prenant une bonne inspiration, elle zappait à nouveau ce passage angoissant pour reprendre « Assez parler de moi et de mes malheurs. Comment tu vas? » Elle ne voulait pas prononcé le prénom de son ex petite amie mais il était évident que c'est là qu'elle voulait en venir, elle ne lui demandait pas simplement s'il avait passé une bonne journée. Chacun son tour d'apporter son soutient, la jeune femme voulait l'aider du mieux qu'elle le pouvait.

Edwin avait passé la majeure partie de sa vie à ne pas croire en l'amour. Bien trop concentré dans tout ce qu'il pouvait mettre en place pour se dresser contre ses parents et leur religion débordante, il ne s'attachait pas aux filles, se contentant de quelques conquêtes ici et là. Le plus important restait la débandade. Après avoir touché à la drogue pour la première fois, il s'était enfermé dans ce cercle vicieux sans avoir réellement envie de s'en sortir, conscient que ça lui permettait de s'évader autrement qu'au travers de l'art. Les supplications de sa mère qui avait fini par découvrir ce qu'il faisait n'avaient su le remettre sur le droit chemin. Ce n'est que lorsque ce en quoi il n'avait jamais cru avait fini par s'immiscer dans sa vie qu'il avait su renoncer à la drogue. Sa rencontre avec Ally l'avait incontestablement changé : il s'était calmé, avait trouvé une situation stable, avait arrêté la consommation illicite qui était devenue son quotidien et, par-dessus tout, il était tombé amoureux. Lui qui n'avait jamais pensé pouvoir devenir dépendant d'une femme un jour ou l'autre s'était vu accaparé par le charme de la demoiselle et était rapidement devenu accro à sa présence. Cela avait duré une année, et ce jusqu'à ce qu'Ally disparaisse de ce monde, le laissant désespérément seul avec son amour débordant. Persuadé dés lors que le sentiment amoureux n'était que souffrance, il avait pourtant fini par comprendre qu'un mal pouvait toujours être résolu grâce à Capucine avec qui il avait eu une histoire courte et décevante. Au jour d'aujourd'hui, Edwin ne savait plus réellement que penser. Il savait que l'amour existait, mais était-ce fait réellement pour lui ? Il se le demandait bien. Et, à voir autour de lui, entre ses frères et soeurs et quelques-uns de ses amis, le grand amour parfaitement réussi n'existait pas. Il y avait toujours un événement pour tout ébranler, et cela lui faisait peur à vrai dire, si bien que, pour l'instant, il restait sur ses gardes. Pourtant, malgré toute la méfiance qu'il pouvait ressentir à l'égard d'un quelconque sentiment d'attachement, il ne pouvait pas s'empêcher de ressentir une partie des symptômes à l'égard de Théodora. Ce constant besoin de s'assurer qu'elle va bien, cette envie d'être là pour elle comme personne ne pourrait l'être, cette agréable sensation l'enveloppant lorsqu'il la prend dans ses bras, cette légère accélération de son rythme cardiaque quand elle se trouve proche de lui. L'océanienne comptait pour lui, énormément, certainement plus que ce qu'il aurait souhaité, et il était tout simplement incapable de marquer une quelconque distance avec elle. Et, aussi étrange que cela puisse paraître, il n'en ressentait aucune crainte. Certainement parce qu'il ne s'était pas réellement rendu compte à quel point il était attaché à la jeune femme. « Considère que je te le demande alors... » Ce soir, il ne rentrerait donc pas chez lui. Et cette constatation l'emplit inconsciemment de soulagement et de joie. C'était lui qu'elle avait appelé, lui, personne d'autre, et elle lui demandait de rester avec elle. Il y avait de quoi être flatté. Quoi qu'il en soit, si elle ne lui avait rien demandé, il serait resté aux aguets toute la nuit près de son téléphone après lui avoir fait promettre de l'appeler si quelque chose n'allait pas. Il lui promettait d'être là, il le serait réellement, comme il ne l'avait jamais été pour personne. Répondant à Théodora par un sourire, il préféra le silence aux paroles, se contentant de la regarder, les coins de ses lèvre légèrement relevés.

À présent dans le salon, le londonien assurait à son amie qu'il pouvait se contenter d'un plat commandé. Il s'incrustait déjà -mais était-ce réellement de l'incruste compte tenu du fait qu'elle l'avait appelé ?-, il ne voulait pas encore l'obliger à cuisiner quelque chose. « Je pourrais choisir la facilité c'est vrai, mais c'est ce que tout le monde fait de nos jours. Une escalope milanaise ça te convient? C'est pas trop compliqué et on peut discuter pendant que la sauce mijote. Sauf si tu es affamé, alors on suit ton idée... » Edwin laissa s'échapper un léger rire. Il n'était pas réputé pour être un gros mangeur et son estomac ne criait pas famine pour l'instant. Il haussa alors les épaules et lui adressa un nouveau sourire. « Rassure-toi, je suis encore loin de la crise d'hypoglycémie. » déclara-t-il sur le ton de l'amusement. Si l'envie lui prenait de cuisiner, il la laisserait faire, du moment qu'elle faisait ça par plaisir. Loin de lui l'envie de la forcer en quoi que ce soit. Puis finalement, il se rapprocha de Théodora afin d'essuyer les dernières traces de larmes persistant sur son visage. Il sentit une soudaine tension chez elle, son sourire légèrement crispé et son mouvement de recul en témoignant largement. Se maudissant intérieurement, Edwin commençait par croire qu'il se montrait peut-être trop tactile avec elle et qu'elle n'appréciait pas cette proximité. « Merci, encore... » Lui répondant par un demi-sourire légèrement crispé, il ne sut quoi répondre. Mais elle fit vite d'ajouter « Il faut que tu arrêtes d'être aussi parfait... et proche. » Bingo. Lui qui n'était pourtant pas le plus câlin de sa famille et qui n'était pas du genre à se montrer tendre avec les gens qu'il aimait, il est vrai qu'il était particulièrement doux avec l'océanienne. Et, comme il l'avait redouté, elle en était déstabilisée. Reculant alors d'un pas, Edwin grimaça légèrement et laissa s'échapper un « Désolé... » sincère. Il n'avait pas envie de la rendre mal à l'aise, et c'était exactement ce qu'il était en train de faire. Alors, il força la distance en se tenant plus loin d'elle et croisa les bras, comme pour lui prouver qu'il n'aurait plus de geste aussi tendre à son égard, si c'était ce qu'elle désirait.

« Assez parler de moi et de mes malheurs. Comment tu vas? » Changer de sujet pour passer outre les courtes minutes déstabilisantes qui avaient fait leur apparition était une bonne initiative. Mais l'anglais aurait sans doute préféré aborder un autre sujet de conversation. Il n'aimait pas particulièrement parler de lui et il comprenait parfaitement où Théodora souhaitait en venir avec sa question. Il était difficile d'y répondre pour lui. Il allait plutôt bien en comparaison à son état des suites de la perte de son ancienne petite amie. Mais il n'était pas au summum de sa forme. Le départ soudain et incompréhensible de Capucine l'avait remué. Tout semblait se mettre en place correctement, il appréciait les moments avec elle et sentait qu'il tombait progressivement amoureux d'elle. Mais, alors que tout semblait bien se passé, elle avait subitement mis fin à leur histoire naissante pour repartir en Angleterre, rejoindre son ami d'enfance qu'elle avait qualifié d'âme soeur devant lui. Edwin n'avait pas réellement compris ce soudain changement d'attitude, elle qui, quelques jours plus tôt, lui assurait être bien à ses côtés. Était-ce lui qui avait fait une erreur ou bien était-ce la demoiselle qui n'avait pas agi correctement avec lui en le bernant ? Il n'en savait rien et n'en saurait jamais rien étant donné qu'il lui avait bel et bien fait comprendre que, si elle partait, il ne voulait plus jamais entendre parler d'elle. Elle était partie et depuis, il n'avait pas eu de nouvelles. « Ça va... » finit-il par souffler en guise de réponse. À comprendre par là qu'il tenait le coup mais n'était pas pour autant bien mentalement parlant. Depuis le départ de Capucine, il s'était à nouveau renfermé sur lui-même, se concentrant sur ses études et faisant passer ses relations amicales ou familiales au second plan. Sa jumelle avait remarqué sans mal qu'il n'allait pas spécialement bien et avait tenté d'être là pour l'aider. Mais Edwin savait pertinemment qu'une seule chose l'aiderait à aller mieux : le temps. « J'ai toujours du mal à comprendre pourquoi elle est partie... mais ça finira par aller mieux. » assura-t-il en tentant de sourire. Mais cela se montrait difficile. Edwin devait réellement porter la poisse avec lui pour que les deux seules histoires qui l'avaient sorti du gouffre se terminent mal. À croire que le destin le condamnait à rester seul toute sa vie. « Bon alors, cette escalope. Tu as besoin d'aide ? » lança-t-il pour changer de sujet de conversation à son tour. Tout à coup, il se braquait, comme à chaque fois qu'il sentait qu'on s'intéressait trop à lui, à ce qu'il ressentait. Non pas qu'il ne faisait pas confiance à Théodora, loin de là. Mais il ne se sentait pas en mesure de parler plus longtemps de son état d'âme.

S'il y avait bien une chose qu'Edwin détestait, c'était de mettre les gens mal à l'aise et de se sentir gêné en retour. Et c'était exactement ce qui était en train de se passer avec Théo. Ce rapide épisode de baiser échanger les remuaient visiblement tous les deux et l'océanienne semblait complètement déstabilisé par le comportement plutôt tendre qu'il avait à son égard. Lui-même se surprenait : il avait tendance à fuir les preuves de tendresse depuis la mort d'Aly, en excluant évidemment sa jumelle avec laquelle il s'était toujours montré affectif ainsi que ses deux meilleures amies, Alissa et Maxime, qu'il connaissait depuis un certain temps et qu'il savait n'être que des amies à son coeur et ceci à jamais. Mais en ce qui concernant toutes les autres filles de la planète, Edwin ne montrait généralement pas autant de douceur à l'égard des femmes. À croire que Théodora démantelait complètement cette vérité à son sujet. Avec elle, il ne pouvait simplement pas se montrer distant. La prendre dans ses bras semblait être le geste le plus naturel du monde et le simple écart pouvant les séparer lui donnait une sensation de manque qui ne manquait pas de le surprendre. Cela dit, la jeune femme semblait le prendre différemment en lui demandant de se montrer moins proche, forçant ainsi l'anglais à s'excuser pour son comportement. Arquant légèrement les sourcils au moment de l'entendre rire, il l'observa sans comprendre. Mais rapidement, elle lui donna son explication. « Non, je suis désolée, je ne voulais pas te mettre mal à l'aise... enfin on oublie ! » Edwin se contenta alors d'hocher la tête en signe d'acquiescement, feignant un sourire léger en glissant ses mains dans les poches de son jean. Oublier ce qu'il s'était passé ? Il en était incapable, compte tenu du fait de ce qu'il avait pu ressentir -malgré lui- au contact des lèvres de Théodora contre les siennes. Mais soit, il jouerait le jeu et n'en parlerait pas, par respect pour elle.

Finalement, au moment de déambuler en direction de la cuisine, la demoiselle changea de sujet en mettant Edwin au centre de la conversation, à son désarroi. Il se jugeait encore dans un état trop instable pour se sentir capable d'en parler en long et en large, préférant alors d'expliquer simplement qu'il ne comprenait pas le départ si soudain de celle qu'il ne savait même pas s'il devait la considérer comme une ex. Pourtant, les raisons en étaient claires : elle lui avait annoncé sans faux-semblants être éperdument amoureuse de son ami d'enfance et ne pas vouloir le blesser en retournant en Angleterre, l'abandonnant. Tout avait été clair, mais Edwin persistait à se demander où était la faille pour qu'elle ait préféré retrouver ce type plutôt que de rester à ses côtés. « Il y a surement une explication logique, tu sais... ou elle est juste conne et ne te méritait pas. » L'étudiant ne sut pas quoi répondre. Il ne pouvait pas dire qu'elle était conne, car Capucine avait été la meilleure chose qui lui était arrivé depuis un bout de temps, quand bien même elle n'était pas restée longtemps à ses côtés. Et il pouvait encore moins dire qu'elle ne le méritait pas, bien trop pessimiste quand il s'agissait de porter son regard sur lui-même. Il avait la fâcheuse tendance à toujours se rabaisser et là, il aurait aimé répondre que c'était plutôt lui qui ne méritait pas cette jeune fille. Mais pouvait-il la placer en victime ? Non, car il s'agissait de lui dans cette histoire. C'était lui qui avait été abandonné et non le contraire. Préférant ne rien répondre, il se contenta donc d'observer Théodora qui s'affairait déjà à la cuisine, lui proposant son aide immédiatement, en homme bien élevé qu'il était. « Pas touche à la cuisine, tu n'es pas venu pour travailler, tu m'as déjà bien assez aidée... » s'exclama-t-elle, faisant légèrement rire Edwin. S'avouant vaincu, il leva alors les mains montrant qu'il n'insistait pas plus, puis il se contenta de l'observer en restant près d'elle, une main appuyée contre le meuble du plan de travail. « J'ai bien compris que tu n'avais pas envie d'en parler, mais si un jour c'est le cas, tu sais que je suis là, n'importe quand. » reprit-elle, le faisant cette fois sourire, touché par sa bonté de coeur. Il avait toujours apprécié la compassion et le dévouement dont elle faisait preuve à son égard, et ceci depuis qu'ils se connaissaient. Ils s'étaient plutôt bien trouvés à vrai dire : deux âmes en perte tentant de se reconstruire après avoir perdu la personne qu'ils aimaient. Oui, ils se ressemblaient énormément et cela les rapprochait indéniablement, bien plus qu'ils n'osaient le croire et malgré leur réticence mutuelle. Finalement, tous les deux retournèrent au salon pour aller s'installer dans les canapés. En chemin, Edwin finit tout de même par prendre la parole pour lui répondre. « Ce n'est pas que je n'ai pas envie d'en parler... c'est juste qu'il n'y a pas grand chose à dire. Elle est partie retrouver celui qu'elle a toujours aimé, elle m'a pris pour un con, point. » L'amertume et la déception s'entendait facilement dans sa voix. En réalité, Edwin se demandait s'il était touché par ce départ parce qu'il tenait réellement à Capucine et voulait construire quelque chose avec elle, ou bien parce qu'elle lui avait fait croire que retrouver l'amour après ce qu'il avait vécu était possible mais qu'elle l'avait aussitôt abandonné, détruisant l'espoir qu'elle avait fait naître. C'était certainement un peu des deux. Mais il lui en voulait de l'avoir berné bien plus que le reste. « Je m'en remettrai. J'ai traversé bien pire. » conclut-il après s'être assis à son tour, adressant un sourire qui se valait rassurant à Théodora. Oui, il s'en relèverait, car il avait su se remettre sur ses pieds après la mort d'Aly. Il était confiant. Il lui faudrait certainement un peu de temps, mais il n'allait pas rechuter aussi bas qu'il avait pu le faire auparavant.

Au moment où l'océanienne l'encouragea à se servir de chips, Edwin sentit qu'elle tentait de combler le silence, comme par peur que la gêne de tout à l'heure refasse surface. Souriant amicalement, il se pencha alors pour obéir aux "ordre" et porta la chip à sa bouche pour la faire croustiller entre ses dents. « Tu veux un apéro ou autre chose à boire ? » Il fallait qu'elle se détende. Sa tension pouvait se ressentir à des kilomètres à la ronde et le jeune anglais avait horreur de voir son interlocuteur tendu, encore moins quand cela touchait une personne à laquelle il tenait. « Je prendrai ce que tu as. » commença-t-il par répondre, lui souriant comme pour lui assurer qu'elle n'avait aucune raison de stresser. Alors, conscient qu'elle craignait de voir ressurgir cette gêne, Edwin décida de lancer à nouveau le sujet la concernant, soit son état mental actuel. Il était conscient qu'elle ne voudrait certainement pas reparlé de Liam et de tout ce qu'elle traversait, mais il tenait simplement à lui rappeler qu'il était là pour elle et qu'elle ne devait pas hésiter à lui parler. « Je n'ai pas envie de remettre le sujet sur le tapis mais... tu sais que je suis là aussi, n'importe où, n'importe quand. » lui assura-t-il gentiment, lui faisant comprendre entre les lignes que cela concernait la mort de Liam et tout ce qui avait un lien avec cette perte qu'elle devait traverser. « Je ne veux pas que tu te renfermes et affrontes ça toute seule... » termina-t-il, le regard sincère. Bien entendu, il sous-entendait qu'il voulait qu'elle lui fasse confiance et se tourne vers lui dès qu'elle se sentait mal. Mais il ne voulait pas se montrer trop proche dans ses dires, comme il avait pu le faire tout à l'heure. Il se contenta donc de rester plus général, espérant tout de même que Théodora comprendrait le sens sous-jacent de ses paroles. Car oui, il peinait à l'avouer mais, il voulait être celui qui l'aiderait à s'en sortir.

mais non c'est parfait et moi je t'ai fait un pavé qui ne fait rien avancer, pardon