« Mh ...Dio è buono ... » Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Valentina n'était pas en train de déguster le délicieux veau marengo de Pascal, son beau-père. L’italienne se prélassait au soleil, allongée à moitié nue sur le sable brûlant d'une immense plage déserte, face à une mer bleu turquoise. Ce panorama lui rappelait son enfance, lorsqu'elle sortait avec sa mère pour profiter de la mer Tyrrhénienne, à quelques minutes seulement de leur maison. Souvenirs. Une légère brise effleurait sa peau au teint hâlé, l'eau venait chatouiller ses orteils, ses doigts s'enfonçaient profondément dans le sable brûlant jusqu'à ce qu'ils ne disparaissent entièrement. Elle voulait rester dans cet endroit paradisiaque indéfiniment pour profiter de ce climat méditerranéen qui n'existait pas dans son appartement New-yorkais. Chaleur, soleil, eau à plus de vingt-cinq degrés. Que demander de plus ? La brune s'étira longuement pour ensuite épousseter le sable qui recouvrait ses épaules dénudées. Tout-à-coup, une goutte vint perler le long d'une de ses joues, puis une autre. La pluie faisait-elle son apparition ? « Bwrwwhwr » Quel était ce bruit étrange ? Un orage se préparait-il pour accompagner la pluie ? « Bwrwwhwr wfff bhwrrr » Valentina porta ses mains à son visage. Berk, quelle était cette substance visqueuse qui suintait de ses joues. La jeune femme finit par ouvrir les yeux, faisant face au visage bouffit de Garett qui venait de lui baver dessus pendant qu'elle dormait. « Merda ! Tipo di stronzo ! » Heureusement que cet animal ne comprenait pas ce qu'elle disait. Elle la poussa du canapé, il retomba sur le tapis après avoir heurté la table basse. Un bruit sourd lui fit comprendre que le Bouledogue français était bien tombé par terre. Sur ses pattes ? Plutôt sur son gros derrière. Tandis qu'elle s'essuyait le visage avec un essuie-tout, son regard se posa sur une horloge digitale accrochée sur un mur. Ses chiffres rouges indiquaient quatre heures passées de l'après-midi. L'italienne se leva d'un bond de son confortable perchoir pour se ruer dans sa chambre. Le mariage ! Elle l'avait totalement oublié. Désormais elle comprenait pourquoi aucune de ses amies ne l'avaient prises pour témoin lors de leur mariage. C'était le jour-j, elles s'y étaient préparées, elles en avaient parlé tous les jours depuis deux mois. Comment avait-elle pu omettre cet évènement ? Valentina voyait déjà le visage marqué par la colère d'une de ses plus proches amies, lui reprochant son manque de ponctualité et n'écoutant même pas son semblant d'excuse. En parlant d'excuse, la demoiselle réfléchissait déjà à une histoire en même temps qu'elle se préparait.

La sicilienne fouillait dans son sac-à-main, à la recherche de son rouge-à-lèvres préféré. « Vous pouvez accélérer un peu ? Je vais être en retard » Demanda-t-elle au chauffeur du taxi tout en se remaquillant. Bon concrètement elle l'était déjà -en retard- mais elle ne voulait pas passer pour une personne négligente. « Vous êtes marrante mademoiselle ! Vous ne voyez pas qu'on est dans un bouchon ? » Rétorqua-t-il sur un ton qui ne plaisait pas du tout à la jeune femme. Un rapide coup d’œil à sa montre remonta la pression, Valentina sentait qu'elle ne pouvait pas attendre plus longtemps. Elle n'était plus tellement loin du lieu de réception, à quelques minutes seulement à pieds. L'italienne glissa quelques dollars pour le conducteur avec un peu de pourboire pour ensuite s'échapper du véhicule et partit en courant, en escarpins, avec son carton d'invitation dans une main et son sac dans l'autre.

Quand elle se pointa à la cérémonie, quasiment toute la famille et les amis des mariés étaient déjà installés. Aïe aïe ! Une dernière retouche de maquillage puis elle s'avança discrètement près du prêtre. Dieu merci rien n'avait encore commencé. La mariée n'avait pas fait son apparition mais le futur époux de cette dernière attendait devant l'autel, l'impatience se lisait sur son visage. Valentina poussa un profond soupir de soulagement. Quoi ? C'est une blague ? Qui voilà ? A quelques pas du marié se trouvait son ancien meilleur ami, Kwang-Sun; ils ne s'étaient plus parlés depuis des lustres à cause d'une stupide histoire de cœur. L'italienne ne rebroussa pas chemin, même si son esprit lui dictait le contraire. Elle se plaça à côté de lui, sans lui adresser un moindre regard. Susceptible ? Légèrement. Un long silence s'en suivit entre les deux adultes, accompagné par les murmures des invités en fond sonore. « Où étais-tu ? Tu as vu l'heure qu'il est ? » Chuchota le futur marié en sa direction. Que pouvait-elle lui dire sans avoir l'air idiote ? Qu'elle avait fait une sieste suite à la nuit blanche qu'elle avait passé parce que sa fiancée voulait être rassurée, que finalement elle ne s'était pas réveillée ? « Bouchons » Rétorqua-t-elle sans quitter les invités des yeux. Elle ne voulait pas croiser son regard, à ce dindon coincé du cul qui n'arrêtait pas de s'en prendre à elle. La jeune femme n'avait même pas salué son ami asiatique, ce n'était pas faute d'avoir essayé ... En fait si.

Malgré son arrivée de dernière minute et les retrouvailles tendues avec Kwang-Sun, Valentina pu profiter de la cérémonie avec une certaine décontraction. Son visage s'était illuminé dès l'arrivée de son amie, radieuse dans sa magnifique robe blanche, suivie par une ribambelle de demoiselles d'honneur dans leur robe couleur ivoire. Elle gratifia la mariée d'un sourire rassurant et n'hésita pas à pointer un discret pouce en l'air en signe de satisfaction. Oui tout était magnifique, le couple avait bien dépensé son argent pour la journée qui sera probablement la plus importante de leur vie -avant la séparation, bien entendu-. La sicilienne se plaça à côté du second témoin, l'asiatique aux cheveux bleus, en attendant que la cérémonie se termine. Bon il fallait l'avouer, ces longues tirades relatant les obligations du mariage étaient d'un chiant; tellement que la jeune témoin ne pouvait s'empêcher de se retourner pour bailler silencieusement. Vivement le buffet, pensait-elle. Plus d'une heure passa pendant laquelle les discours s'étaient enchaînés, les époux avaient échangé leurs vœux, leurs alliances et leur baiser final -qui fut accompagné par une salve d'applaudissements ainsi que par des cris de joie-; tout le monde se rendit au Palm House pour continuer -ou plutôt commencer- la grande fête. Valentina avait posé un nombre incalculable de question à son amie pour avoir des renseignements sur ladite fête. Peut-être était-ce parce qu'elle ne voulait pas qu'elle intervienne dans leurs choix ? Ou souhaitait-elle garder le secret par peur de la critique ? La seule chose qu'on avait bien voulu lui dire, c'était qu'elle ne serait pas déçue. Pas très rassurant.

La salle était immense. Elle ne put s'empêcher d'être impressionnée par la délicate et raffinée présentation des lieux; elle crut comprendre en captant une conversation dans la foule des invités que les belles-mères n'étaient occupées de ça. Chapeau bas mesdames ! Et elle ne sera pas au bout de ses surprises. Valentina s'enfonça dans la verrière, zigzagant entre les tables drapées de blanc, à la recherche de son étiquette. « Non ... Toujours pas ... Sûrement la table d'à côté » Murmurait-elle tout en examinant les morceaux de papier. La jolie méditerranéenne tomba sur celle de l'autre témoin et à son grand soulagement, elle ne faisait pas partie de sa table, néanmoins elle découvrit qu'elle était assise derrière lui, à quelques centimètres de sa chaise. Bon au moins elle n'aura pas à lui faire face, espérons qu'on ne l'oblige pas à danser avec lui. Quoique dans ses souvenirs, le coréen dansait plutôt bien. « Hm ... » Valentina n'était pas à la table des mariés car ces derniers étaient entourés par leurs parents respectifs, elle partageait plutôt la sienne avec leurs frères et sœurs qu'elle connaissait plutôt bien. Finalement elle n'était pas mal tombée. Enfin, c'est ce qu'elle croyait. « Valentina ! » Lança une voix féminine derrière elle. Des bras vinrent soudain lui ceindre les épaules, elle découvrit devant ses yeux une paire de mains dont l'un des doigts revêtait une magnifique alliance en or blanc, la tête de son amie vint se coller contre sa joue et elle sentit son souffle mentholé lui chatouiller l'oreille. « Alors, qu'en penses-tu ? » La sicilienne n'hésita pas un instant pour lui répondre. « Vos alliances sont vraiment belles, vous les avez bien choisis » Même de dos, la jeune femme pouvait sentir que son amie sourirait. « Bientôt ton tour ? » Valentina n'eut pas le temps de répondre à la boutade de la mariée car cette dernière s'éloigna pour aller saluer les invités. Elle entendit un bruit de chaise derrière elle.