Aloysia avait bien en tête de fêter sa démission aujourd'hui. En quel honneur? Et bien tout simplement parce que l'organisation de mariage, c'en était fini pour elle, du moins pour l'instant. Grace à Shanti, la jeune femme avait maintenant un pied à Broadway et venait d'être engagée comme danseuse dans une comédie musicale. Même si le stress était bel et bien présent, Loys avait l'impression de nager en plein rêve et était surexcitée à l'idée de commencer les répétitions dés lundi. L'époque ou elle dansait avec son groupe en critiquant les ballets et compagnie semblaient révolue, la jeune femme reconnaissant à présent les qualités de l'un comme de l'autre. Soit, elle avait un contrat à Broadway pour les neuf prochains mois, elle voulait fêter cela tant qu'elle le pouvait, peut-être se prendre la dernière cuite de sa vie avant un bon moment puisqu'elle était quelqu'un de très sérieux à ce niveau. Il était hors de questions qu'elle sorte et boive sans se contrôler si elle avait répétitions le lendemain. En arrivant à l'Awesome, elle grimaçait en voyant l'air négatif que prenait Ashton : Aaron ne bossait donc pas aujourd'hui. Il y a de cela quelques mois, Aloysia connaissait son horaire sur e bout des doigts puisqu'ils vivaient ensembles, il lui rappelait chaque semaine ses jours de boulot. Depuis qu'une certaine Zoé était entrée dans sa vie, c'est à peine si elle ne devait pas prendre rendez-vous avec son frère pour espérer le croiser. Malgré un long soupire, Aloysia était sincèrement heureuse pour lui, il le méritait, même si elle ne pouvait s'empêcher de jalouser le temps qu'ils passaient ensembles.

Elle s'installait donc à une table, en attendant l'arrivée de Jay et de sa soeur qui les rejoindrait, si elle sortait de salle d'opération du moins. Tamsin était bien souvent retenue à l’hôpital et elle la plaignait sincèrement, mais ça la passionnait, c'était l'essentiel. Quand à Jay, leur relation était assez spéciale mais lui faisait beaucoup de bien et surtout beaucoup rire. Ils étaient tout deux très proches, très tactiles au point de les penser en couple alors qu'il n'y avait jamais rien eut entre eux. Son ami ne tardait d'ailleurs pas à arriver et ne voyant pas Tamsin arrivé, ils finissaient par commander à manger sans l'attendre, sans doute qu'elle avait été retenue. Complètement perdue dans la conversation, Loys se taisait rarement et continuait d'exposer tous les points positifs que comportaient ce nouveau job. C'était ça aussi de sortir avec Aloysia, supporter son énergie à tout rompre, son débit de parole incontrôlable et la calmer par moment lorsqu'elle s'emportait trop. Elle n'avait jamais été définie comme hyperactive, sa mère restait persuadée qu'elle l'était malgré tout, alors que dans la tête de la jeune femme, elle profitait simplement de chaque minute.

Entre ses arguments, ce que lui racontait Lucas et sa concentration pour ne rien renversé à table, elle n'avait même pas remarqué qu'il y avait plus d'agitation qu'à l'habitude dans le bar. Après tout ce n'était pas rare qu'une bagarre éclate, que les gens se mettent à chanter ou autre, le bruit n'avait rien d'anormal et ne l'empêchait pas de continuer de parler, jusqu'à ce que Jay lui montre du doigt l'autre bout de la salle. Coupée dans son élan, Loys se taisait quelques minutes pour observer le groupe qui s'était mit à danser, non sans un large sourire aux lèvres. S'il y a bien une personne qui ne râlerait pas de ce vacarme, c'était bien elle, elle était plutôt motivée à les rejoindre même s'il en était hors de question, tout le monde la connaissait ici. Ce sourire amusé s’effaçait dés qu'elle posa son regard sur lui, le seul à qui elle avait réellement tenu et qui l'avait presque tuée sans s'en rendre compte. Elle ne pouvait s'empêcher de le dévisager tout en priant pour qu'il quitte les lieux au plus vite. Au lieu de cela, il lui murmurait un "félicitations" sans pour autant bouger de sa place, simple mot qui la mettait hors d'elle. Lucas l'avait larguée devant le reste du groupe qui lui avait ensuite tourné le dos, il l'avait quitté pour un concours, sans le moindre mot et à présent, c'était à croire qu'ils inversaient les rôles. Il l'avait mise au plus bas une fois, il était hors de question qu'elle lui montre à quel point il était douloureux de le revoir après autant de temps. Prenant une bonne inspiration, elle lui adressait un sourire radieux accompagné d'un « MER-CI » qu'elle concluait d'un clin d'oeil avant de se tourner à nouveau vers Jay pour lui accorder toute son attention. Cette soirée était bien trop belle pour qu'il ne la lui gâche par sa simple présence, même s'il n'était pas facile d'oublier qu'il se trouvait à quelques mètres d'elle.

Aloysia avait reporté toute son attention sur Jay et se concentrait pour ne pas perdre un seul de ses mots, ce qui n'avait rien de facile quand l'unique personne à qui elle arrivait à penser était Lucas. Son "félicitations" l'avait tellement agacée qu'elle hésitait un instant à s'excuser auprès de Jay pour aller lui balancer tout ce qu'elle avait sur le coeur. Ça lui ferait le plus grand bien, le nombre de fois ou elle avait espéré pouvoir lui dire le fond de sa pensée... Pourtant, elle avait toujours tout gardé pour elle, refusant d'admettre qu'elle avait souffert de sa faute. Vu la facilité avec laquelle il avait rompu avec elle, la jeune femme était de toute façon persuadée que ses mots ne pouvaient pas l'atteindre, elle avait été sa copine du moment, rien de plus. Puis il y en avait eut d'autres, surement pas mal d'autres, elle ne voulait même pas le savoir, il était libre, ça ne la regardait pas. « T'as écouté un mot de ce que je viens de te dire? » Sortant de ses pensées, elle observait Jay en affichant un sourire sur d'elle et en hochant la tête. Elle admettre ses tords? Jamais. Et puis, elle ne voulait pas à devoir répondre à un interogatoire sur ce qui la perturbait tant si elle admettait ne pas avoir entendu un seul mot de son flot de paroles.

Elle finissait par réussir à oublier Lucas quelques minutes en reprenant sa soirée comme si de rien était. C'était loin d'être facile, surtout en vue de la discrétion du groupe, mais elle s'en sortait. Après tout elle avait des choses bien plus positives en tête, comme ce contrat qui était d'ailleurs la raison de sa venue ici ce soir : fêter cela! Jay finissait par la quitter quelques minutes, ce qui la fit automatiquement sortir son I-Phone pour rester occupée durant son absence, un moyen efficace de ne pas vérifier ce que faisait son ex petit ami. Qu'elle le veuille ou non, la réponse venait à elle, alors qu'elle levait son regard incrédule vers lui. Il se moquait d'elle, totalement.Elle ne pouvait que rire nerveusement à ses premières paroles, c'était plus fort qu'elle, Lucas devait se foutre d'elle, il plaisantait là, c'était le monde à l'envers, il n'y avait aucun doute la dessus. « Très heureuse, comme tu vois je nage dans le bonheur, ma vie n'a jamais été aussi parfaite! » Le pire était que ce soit à moitié vrai. Professionnellement parlant, elle allait pour la première fois exercé une profession qui la passionnait réellement. Loys avait apprécié être organisatrice de mariage, c'était attractif et très différent d'un couple à l'autre, elle n'avait réellement pas à se plaindre de sa carrière, mais si elle pouvait gagner sa vie en dansant, c'était parfait. « Je n'ai pas perdu de temps, non effectivement... après tout ça ne fait que trois ans que tu m'as larguée comme une moins que rien, j'aurais peut-être du t'attendre encore quelques années, sait-on jamais que tu changes d'avis et que le grand et parfait Lucas Johnson veuille de moi... » Son ton était on ne peut plus ironique, et elle reprenait encore un peu plus amère de plus belle pour être certaine qu'il ne puisse pas placer le moindre mot, il avait voulu son avis, il pouvait l'avoir et en faire ce qu'il voulait. « Je te rappelle qui est le connard qui m'a largué pour un putin de concours? Qui s'en tapait déjà une autre la semaine suivante comme si je n'avais jamais existé? » Haussant un sourcil, elle l'observait en attendant des répondre, même si elle ne s'attendait même pas à ce qu'il se justifie la dessus, il n'en avait clairement rien eut à faire d'elle. « Tes reproches, merci mais au revoir, va les sortir à une autre... » Une autre qui était peut-être responsable de leur rupture. Si monsieur ne vivait que pour la danse, ce n'était pas le cas de tout le monde et même si sur le coup Aloysia l'avait regretté, aujourd'hui elle se disait que cela lui avait simplement ouvert les yeux sur qui il était vraiment. Sa famille avait toujours compté beaucoup pour elle et même si les disputes avec sa mère s’enchaînaient, elle se devait d'être là l'un des jours les plus importants de sa vie. Même si elle savait que ce concours avait aussi beaucoup d'importance pour le groupe, ils n'avaient pas échoués, Loys n'avait raté que la première manche et avait contribué à leur victoire ensuite, pensant que cela suffirait, mais elle s'était bien trompée là dessus.

Aloysia n'avait jamais cherché à ce que Lucas soit en contacte avec sa famille, la danse en étant la cause principale. Petite, Aloysia avait été inscrite en danse classique, en pointe et compagnie, tout ce qui ferait d'elle une parfaite danseuse d'opéra pour suivre les traces de sa mère. Lorsqu'elle s'était tourné vers d'autres disciplines, sa maman l'avait très mal vécut et s'en était pas mal pris à elle, regrettant que sa fille ose à ce point la déshonoré. Avec le temps, même si la pullule restait difficile à avaler, elle n'avait eut d'autres choix que d'accepter que ses filles ne suivraient pas ses pas - Tamsin ayant abandonné complètement quand à elle. Son groupe était un peu la cerise sur la gâteau, la goûte d'eau qui faisait débordé le vase. Elle détestait le fait que sa fille se contente de "danses sauvages avec un groupe de délinquants" alors qu'elle pouvait briller sur scène. Aloysia avait entendu ce refrain bien assez souvent, et cela finissait toujours sur des cris et des larmes, puisque la jeune femme ne supportait pas qu'on s'en prenne à son groupe, qui n'avait rien de délinquants. Le jour du concours, elle avait su qu'elle ne pouvait pas déraper une nouvelle fois, que sa mère ne lui pardonnerait pas d'être absente dans un moment aussi important, alors que les choses commençaient à aller mieux entre elles, Loys avait donc fait son choix.

Aloysia agitait la tête négativement, exaspérée par ses paroles. Il parlait sans savoir, il ignorait tout d'elle et de ce qu'elle pensait. Le simple fait qu'il puisse le penser la mettait totalement hors d'elle. « Tu parles mais tu n'en sais rien... tu ne m'as jamais posé la question, t'étais ce qu'il y avait de plus important après ma famille, je n'ai pas envisagé une seule seconde de te quitter, je n'ai jamais pensé que tu pourrais me quitter non plus parce que j'avais l'impression que la danse passait après nous. Mais c'était l'inverse pour toi. » Lorsqu'elle avait choisi de rater la première partie du concours, Loys avait su qu'il allait lui en vouloir énormément, mais pas une seconde elle ne s'était dit que cela pouvait signer la fin de leur couple, surtout pas après une victoire. « J'ai fait passé ma mère une seule fois avant le groupe, c'était important pour elle, je pouvais pas la lâcher encore une fois... C'était évident que vous alliez passer le premier tour les doigts dans le nez, vous n'aviez pas besoin de moi, alors qu'elle avait besoin de moi ! » Aloysia fit une légère pause avant de hausser les épaules, lassée de s'expliquer sur cette soirée. « Peu importe de toute façon, c'est fait et bien loin derrière nous maintenant. » Elle s’efforçait de ne jamais repenser à cette soirée qui avait ressemblé de près à l'enfer. Elle avait non seulement perdu le groupe, Lucas lui avait carrément briser le coeur alors qu'il était le seul avec qui elle avait laissé tomber ses barrières, et elle s'était retrouvée à l’hôpital, privée de danse pour plusieurs mois après son accident. Si au début c'est sa rupture qui avait été la plus douloureuse, à présent, elle retenait surtout sa bêtise qui avait faillit la tuer.

Il lui parlait à présent de sa non-relation, alors qu'elle savait parfaitement qu'il avait été quelques semaines avec une des filles du groupe. Le fait qu'il lui mente ne l'étonnait même pas, elle n'en voyait tout simplement pas l’intérêt. « Tu es resté quelques semaines avec ta petite nouvelle, n'essaye pas de me dire que ce n'était que professionnel. Certaines personnes se sont fait un plaisir de me dire que tu étais déjà passé à autre chose... Ils pensaient me faire du mal, ils n'avaient juste pas compris qu'il n'y avait pas moyen de faire pire. » Pire que lui, impossible. Il l'avait assommée lorsqu'il l'avait quittée sans un mot et ce n'était pas le fait qu'il aie une petite amie qui pouvait lui faire encore plus de mal. Ça l'avait énervée mais pas blessée, elle l'était déjà bien avant ça. Quand à ses relations à elle, il n'y avait eut qu'Enzo durant une semaine à Londres, on ne pouvait même pas qualifier leur histoire de "relation" et personne. Elle préférait ne même pas se justifier, ça lui aurait fait bien trop plaisir de savoir qu'il n'y avait eut personne d'autres que lui durant ces trois années. « C'est il y a trois ans qu'il fallait regretter... Tu pensais quoi Lucas? Te rendre compte soudainement que dans la vie il n'y a pas que la danse, que les gens ont des priorités et des personnes qui comptent sur eux, en dehors du groupe? Que j'allais comprendre que tu aies pu tout arrêter et recommencer tête baissée? » Elle marquait une pause, prenant le temps de respirer calmement pour se calmer et se forcer à ravaler ses larmes, il était hors de questions qu'elle montre que cette histoire la touchait toujours autant. « T'as bien fait de te lever, ça fait plaisir de savoir que tu as mis trois ans avant d'y repenser... » Elle y repensait presque chaque jour et savoir qu'il n'avait commencé à regretter leur relation qu'après autant de temps la blessait. Si ça avait été son but en venant lui parlé, il avait gagné, une seconde fois. Prenant son iphone posé sur la table ainsi que son sac, Aloysia ne pensait même plus à Jay qui trouverait la table vide en revenant, elle avait besoin de sortir, d'un peu d'air. Elle prit soin de ne pas le bousculer en le dépassant, histoire qu'il n'y voit pas une nouvelle agression de sa part, avant de prendre la direction de la sortie.