Deux heures et demie. Tout ce temps de préparation pour aller s’emmerder à un speed dating parce que son père n’avait rien trouvé de mieux que de l’y inscrire ! Et évidemment, Maureen n’avait aucun autre choix que celui de s’y pointer, ou bien les répercussions seraient bibliques, avait-il précisé. L’irlandaise avait plutôt envie de se pendre en se tirant une balle dans le pied, et ce fut sans doute la raison qui la poussa à rendre une petite visite au pub O’Connor, qu’elle n’avait que trop peu honoré de sa présence à son goût ces derniers temps. Une telle ola l’accueillit qu’elle offrit son sourire le plus éclatant et ravi. Ce n’était pas tant parce que Maureen était le parrain de la Mafia irlandaise qu’elle recevait de tels honneurs, mais aussi parce qu’elle faisait partie d’un gigantesque clan et que tout le monde la connaissait et la respectait. « Ma parole mais tu t’es habillée pour flanquer une crise cardiaque à tous les mâles de New York ? » lança sa tante et mère de Shaun avant de ne faire éclater de rire la jolie blonde. Un silence presque mortel s’en suivi alors que tout le monde se trouvait littéralement pendu aux lèvres de la demoiselle. « Et non même pas ! Ordre paternelle : se rendre à un speed-dating pour se faire féconder, ô joie suprême ! Alors puisque j’ai autant envie d’y aller que de me flanquer une bastos dans le pied, je me suis dit que de m’émouvoir à grands coups de vodka avant d’y aller pouvait être l’idée du siècle… » Sa tante lui servit aussitôt un shooter qu’elle vida cul sec, comme pour la consoler de cet ordre pourri. Autant aller se pendre tout de suite mais au moins, elle reçut de très nombreux compliments sur sa tenue et sa beauté par quelques clients du pub… voilà qui faisait plaisir !

« C’est un peu l’idée cousin » l’accueillit Maureen non sans amabilité avant que son expression frôle la glaciation alors qu’elle voyait que malheureusement, où qu’elle aille, Sheamus serait toujours là pour la ramener à la tristesse de sa situation : elle possédait des sentiments extrêmement puissants mais ce n’était même pas la peine d’y penser. De toute façon, il ne serait jamais capable de se battre pour, n’est-ce pas ? « Ton cerveau est peut-être ultra lent mais c’est justement le contraire que je vise : avoir tellement de réponses que je vais crouler dessus et avoir quinze plans d’avance à la fin de la soirée » lança-t-elle sans aucune douceur car après tout, ce n’était pas comme si elle avait le choix. Et puis merde, il n’avait pas son mot à dire, elle mettait le décolleté pigeonnant qu’elle voulait, c’était une grande fille ! « Pourquoi tu ne vas pas cuver ailleurs pour me laisser m’émouvoir en paix avant de faire le grand saut en plein enfer ? » Rien que le fait de savoir qu’il lui fallait tomber enceinte à toute vitesse juste parce qu’il s’agissait de la nouvelle lubie de son paternel lui donnait une indicible envie de vomir. « Tantine, j’en veux bien au moins trois autres, je ne veux pas voir le fond de ce verre ! » Maureen n’avait pas grand temps à accorder à son clan d’irlandais préféré, mais elle n’était pas fâchée d’avoir fait le détour. Même si elle ignorait Sheamus et ses remarques pourries, ou tout du moins essayait-elle de l’ignorer.

« Ben dans ce cas là pourquoi tu viens m’emmerder ? Continue à l’écouter en te pochtronant, que ça me fasse des vacances ! » Ce n’était pas tant que Maureen n’ait pas envie de céder mais plutôt que ce soir était le plus mauvais soir qui soit pour lui taper une crise de jalousie. Sheamus pouvait se contenter d’être le dernier des O’Malley, il n’avait pas grand-chose à perdre, mais si l’irlandaise s’amusait à refuser la requête de son père… elle voyait d’ici les conséquences. Qu’importe ce qu’il pouvait bien penser, elle devait le faire, point barre, et quelque chose lui disait que ce moment censé être agréable dans le pub O’Connor risquait fort d’être écourté car elle était déjà agacée d’être là. « Nouvelle lubie paternelle » reprit-elle avec amertume tout en s’envoyant simultanément les trois shooters cul sec. Une chance qu’elle ait une résistance aussi surhumaine que celle de Sheamus à l’alcool sinon elle se serait déjà étalée par terre. « Qu’est-ce que ça peut te foutre, hum ? En théorie, tu n’aurais même pas dû être au courant et puis merde, tu n’as pas revendiqué ce que tu voulais la dernière fois alors tu sais quoi ? Va chier O’Malley, je fais ce que je veux de mon cul et puisque t’en as pas voulu, viens pas m’emmerder ! Tantine je te dis à dans la semaine, j’ai une mission à accomplir ! Je passerai sûrement un soir » conclut-elle avant de ne fusiller Sheamus du regard et de sortir en saluant sa foule avec plaisir pour mieux s’engouffrer dans la nuit noire new yorkaise. Mission : trouver un potentiel reproducteur, ô joie ! Autant dire qu’elle avait à peine mis un pied dans la salle de réception qu’elle voulait déjà se pendre, et ce fut encore pire une fois assise, même si tous ses attributs féminins n’en n’était que plus mis en valeur. Maureen était la plus jolie plante de la soirée et pouvait sentir d’ici les regards disons… intéressés du troupeau de mâle n’attendant qu’une chose : le gong du commencement.

Malgré tout ce que Maureen avait pu prier, rien ne sembla empêcher ce maudit Sheamus de s’asseoir juste en face d’elle, comme s’il avait un radar à la place du cerveau et qu’il trouvait toujours le moyen de la retrouver juste pour l’emmerder. « Et moi j’ai le droit de te foutre un coup de genou si tu dégages pas de là sur le champ ! » vociféra-t-elle aussi discrètement qu’elle le put, incapable néanmoins de conserver une expression impassible ou même douce tant il lui tapait sur le système quelque chose de formidable. « C’est dingue… il existe quelque chose comme une bonne centaine de clubs diverses à New York mais non, tu choisis un speed-dating, et comme par hasard le même que le mien ! Qu’est-ce qu’il faut que je fasse pour que tu arrêtes définitivement de m’emmerder ?! Non parce que dis le de suite, qu’on en finisse et que je puisse tranquillement souffrir cette soirée pourrie sans que tu ne viennes en prime me la rendre encore plus insupportable ! » Maureen aurait cru qu’avec leur discussion sérieuse Sheamus changerait son fusil d’épaule, qu’il comprendrait ses sentiments et prendrait un risque mais non. Comme quoi, ses sentiments à lui ne possédaient aucune force et ce n’était donc pas la peine de s’y attarder davantage… pas alors que dans l’histoire, elle risquait le bien-être de son frère et de sa nièce. « Va te taper la reproductrice de ton choix ailleurs, et surtout épargne-moi les détails ! Je n’ai pas envie de connaître tes pétasses ou même si tu sauras la féconder en long, en large et en travers. J’ai mon propre business sur le feu alors viens pas te plaindre et dégage ! Je n’aime pas me répéter et tu n’as aucune raison d’être ici. »

« C’est toi qui est en manque pour tout ramener au sexe ! Ma parole, la seule chose qui m’agace, c’est toi, toi et toujours toi !! Merde tu t’es barré le premier, et t’en as que pour ta foutue mission alors arrête de jouer à la girouette et tiens-toi en à ce que tu as dit ! » Maureen prit une grande inspiration avant de ne prendre une gorgée d’eau, déplorant le fait que sa gorge soit déjà si sèche alors qu’elle avait à peine aligné trois mots. Cette soirée commençait sérieusement à lui peser et si elle ne faisait pas vite quelque chose, elle allait prendre le premier innocent lui tombant sous la main pour le saigner et ainsi passer ses nerfs de façon plus intelligente qu’à s’engrainer une fois encore avec Sheamus. A la longue, même l’irlandaise trouvait cela fatiguant et pourtant, dieu sait qu’elle aimait s’opposer à autrui et obtenir le point final dans n’importe quelle joute verbale. « Mon cul m’appartient à moi et à moi seule. Et je ne joue pas je te signale ! Je suis les ordres même si ça m’emmerde prodigieusement et que j’ai autre chose à foutre ! Mais continue à jouer la carte de la vulgarité, je t’en prie. De toute façon tu ne sais faire que ça, t’envoyer en l’air ! Mais dès qu’on te refuse ton petit susucre, y’a plus personne ! » Maureen n’avait aucune envie de tomber enceinte de quelqu’un d’autre, mais de là à réussir à lui faire comprendre qu’elle aurait voulu porter ses enfants et emmerder cette foutue tradition… il y avait une limite qu’elle ne pouvait pas franchir, même elle. « Je ne vais prendre aucun espèce de plaisir à me taper un connard que je pourrais briser en deux, t’es content ? Maintenant fous-moi la paix ! » céda-t-elle finalement, en désespoir de cause. De toute façon, causer sentiment était impossible avec Sheamus, et l’irlandaise ne s’y risquait pas car elle ne souhaitait surtout pas être raillée.

Il valait mieux que Maureen ne réponde rien, pour l’instant du moins, sinon elle risquait de péter tout bonnement une durite. Certes, cela faisait dix ans et peut-être qu’aux yeux de Sheamus il y avait prescription mais il n’empêche qu’elle s’était sentie abandonnée alors qu’elle possédait de la volonté pour dix, qu’elle l’aimait plus que sa propre vie et qu’elle n’avait rien pu faire de ce trop plein d’amour qu’il lui avait fait ressentir pour mieux lui tourner le dos. Elle était censée être la plus jeune, pourtant ! Il faut croire que la maturité n’est pas la même d’un individu à l’autre. Mais Maureen pensait néanmoins être enfin débarrassée de ce maudit blond hantant pourtant son cœur alors qu’il l’avait envoyée chier, mais tandis qu’elle essayait – non sans mal, il faut bien admettre – de se concentrer sur son interlocuteur, Sheamus n’hésita pas à poursuivre son petit laïus en cherchant à la culpabiliser pour probablement la faire céder. « Ce que tu veux c’est un marathon pour te prouver que ta virilité est la meilleure de tout l’ouest des USA mais moi j’attends un peu plus que ça, hors c’est tout ce que tu m’offres je te signale ! Etonne-toi maintenant que je me plaigne ou que je te repousse de toutes mes forces parce que je n’ai pas envie d’être simplement une petite poupée avec laquelle tu vas jouer cinq minutes pour mieux te lasser. C’est peut-être ta façon de faire mais ce n’est pas la mienne ! Et pour ta gouverne, j’étais peut-être encore plus une gosse il y a dix ans, mais j’aurais donné ma vie pour toi s’il avait fallut. Comme quoi, ce n’est pas la personne que l’on pense qui est prêt à faire de vrais sacrifices ! » Maureen prit une grande inspiration avant de s’excuser auprès de son interlocuteur tandis qu’elle n’en pensait pas un mot… la preuve, elle croisait les jambes ! « Retourne à ta grognasse insipide et fous-moi la paix O’Malley ! Après tout tu l’as dit toi-même : tu as ta mission… et bien j’ai la mienne et tu m’empêches de la mener à bien ! » L’irlandaise tourna à nouveau la tête vers l’homme en face d’elle, lui offrant un sourire éclatant bien que non sincère tout en passant ses mains sous la table pour les triturer en signe d’extraordinaire colère.

« Mon caractère de merde te conchie ! » grogna-t-elle à son tour car quoi qu’elle fasse, Sheamus finissait toujours par la déranger dans sa conversation. Maureen se leva donc, éjectant la nénette insipide aux trois chats de la place pour la mettre à celle qu’elle occupait précédemment afin de s’asseoir en face de cet irlandais qui lui tapait sur le système au moins aussi fortement qu’il n’occupait ses pensées sentimentalement parlant. Si seulement la jolie blonde avait su quelle était la véritable mission de son vis-à-vis, sûrement lui aurait-elle coupé les bijoux de famille pour les donner à bouffer au premier SDF du coin. Mais en attendant, elle était bien obligée d’admettre qu’il ne la laissait pas indifférente et que l’ignorer n’était pas une solution en soi. « C’est vrai que je suis censée être devin et que le grand poète O’Malley est tellement facilement déchiffrable que je devais absolument comprendre qu’il s’agissait de paroles tendres !! Merde je t’ai rouvert mon cœur l’autre jour, et pourtant, tu n’as pas plus changé ton fusil d’épaule, tu gardais le même discours qui me donne envie de t’arracher ta virilité pour la balancer je ne sais pas où mais très loin pour me calmer les nerfs ! Je n’ai jamais pensé que tu n’avais pas morflé, que tu ne souffrais pas ou que tout ça était simple mais d’un autre côté tu acceptes aussi ta condition puisque tu ne vas pas contre ! Et me sors pas cette putain de tradition sinon je jure que je commets un meurtre… je reste calée sur le passé parce que tu ne me montres rien d’autre. Quand tu m’as vue tu m’as agressée direct alors j’ai répliqué et pourtant, je t’ai quand même accueilli chez moi et là encore ce n’est pas une question de tradition à la con mais parce que je ne voulais pas que tu sois dans la rue ! Tu me prends pour quelqu’un avec un caractère de merde et sans aucun cœur mais jusqu’ici, celui qui a fait le moins preuve de cœur en s’attardant juste sur mon cul… c’est toi. » Maureen avait la respiration haletante, comme si elle s’était retrouvée dix ans en apnée et qu’elle sortait enfin de son mutisme. « Mon frère aîné a perdu la vue et mon père le considère comme un boulet, toutes les excuses sont bonnes pour en faire une cible… c’est ça mon deal. J’accède à ces caprices pourris et il le laisse tranquille. Je ne sais même pas pourquoi je te dis ça, comme si t’en avais quelque chose à secouer… »

Sheamus pouvait se vanter d’avoir définitivement coupé le sifflet de Maureen car pour la première fois de la soirée, elle n’osa rien répondre, se contentant de l’écouter jusqu’au bout sans l’interrompre, et non sans noter à quel point ce simple geste qu’il avait eu lui avait arraché un long frisson particulièrement agréable. L’irlandaise s’était même surprise à regretter l’absence de sa main contre la sienne, même si elle n’en soufflait mot, mais son expression parlait hélas pour elle. L’émotion que l’on pouvait y lire la prenait aux tripes, ne lui laissant aucun répit alors qu’elle ne faisait que constater à nouveau à quel point ses sentiments pour lui n’avaient pas bougé. Pire, ils s’en étaient trouvés renforcés. « Shea… arrête de t’imposer des choses, tu ne peux pas les vouloir tout simplement sans qu’il n’y ait un enfoiré pour te dicter ta conduite ? Peut-être que je m’avance mais je ne pense pas que tu veuilles fonder une famille ou tout du moins pas de cette manière. » D’un côté Maureen avait envie de lui hurler qu’elle était d’accord, qu’elle prendrait ce qu’il lui offrirait et de l’autre, elle refusait de lui imposer un nouveau chapitre d’esclavage parce qu’elle avait l’impression qu’il n’avait jamais été que ça. « Ne va pas me faire dire ce que je n’ai pas dit ça fait belle lurette que j’avais rêvé de ça avec toi, tu as juste flanqué un caillou dans mon rêve de princesse et si tu te fous de ma gueule, j’te bouffe la langue ! » Maureen fronçait les sourcils, serrait les poings, avant de ne se lever pour mieux se placer contre ses genoux, semblant avoir besoin d’une proximité avec lui autant que d’oxygène pour respirer et vivre. « J’ai pas envie que tu n’aies des pétasses dans ta vie ou que tu fécondes un autre ovule que le mien… mais merde Shea, c’est pas censé être une obligation ! C’est pas comme ça que ça marche normalement !! M’en fous, je trouverais un autre moyen, une fécondation in vitro ou un autre bordel du style… »

C’était bien ça le problème. Si Maureen acceptait sa proposition, jamais Sheamus ne pourrait revendiquer cette paternité et ils devraient tous deux mentir jusqu’à ce que mort s’en suive. Personne ne devrait rien savoir à moins qu’ils ne veuillent risquer gros… « Mais tu supporterais ça ? Je veux dire… être près de nous mais sans jamais pouvoir dire que c’est ton gosse ? » s’interrogea Maureen sans pour autant quitter ses genoux. Maintenant qu’elle s’y était installée, hors de question que de s’en éloigner… ceci étant elle ne le repoussait pas. Elle aurait simplement aimé qu’il ait le choix et l’opportunité de pouvoir vivre à ses côtés sans qu’aucune autre inconnue ne se mêle à leur équation parfaite. Finalement, elle ne put s’empêcher de s’emparer furieusement de ses lèvres, se foutant bien des spectateurs, du cadre dans lequel ils se trouvaient ou même du fait que leurs anciens interlocuteurs soient complètement verts qu’ils se soient mutuellement choisis sans même faire attention au gong ou à l’ordre de passage… « Sois pas « cet » homme. Sois mon homme » reprit-elle avant de ne se relever pour prendre ses mains et l’embarquer à l’extérieur, loin de cette vaste fumisterie pour mieux siffler bruyamment un taxi à l’aide de ses doigts. « Ecoute. J’ai un caractère de merde et sûrement le métier le moins facile pour une relation personnelle mais toi et moi on est comme un aimant depuis trop d’années et j’en ai ras le cul de cavaler. Je ne te repousse pas, Shea. J’aurais vécu assez longtemps pour que tu me fasses une déclaration ! Ca mériterait que je me la fasse tatouer parce que je risque pas de l’entendre à nouveau ! Ceci étant… avoue quand je suis rentrée dans le pub tu as direct voulu m’arracher ma robe, hein ? Je crois qu’on pourrait faire un essai ce soir… » Ce n’était pas la déclaration la plus romantique mais Maureen ne savait pas l’être plus que Sheamus… même si elle avait parlé avec son cœur tout de même.

Maureen avait pleinement conscience quant à elle qu’à l’avenir, Sheamus risquait de devenir cinglé face à cette situation. Quoi qu’il en dise et n’en pense, il restait un foutu fier irlandais et ne pas pouvoir hurler sa fierté au monde entier, surtout si elle concernait son enfant, risquait de lui peser plus assurément qu’autre chose. Mais l’irlandaise tut immédiatement cette prédiction, espérant presque se tromper car de toute évidence, ils n’avaient pas le choix… pour vivre heureux vivons cachés comme dit l’autre. « Je crois que je commence à te connaître sur le bout des doigts même si… sur le moment ce n’est pas l’option qui m’a frappée en premier ! Tu trouves toujours le moyen de me faire chier au pire moment, t’es quand même impayable O’Malley… mais oui, c’était un peu l’idée. A moins que tu n’aies un autre plan en tête ? » Oh Maureen se disait intérieurement qu’il n’avait pas intérêt à en avoir un autre parce qu’elle tuerait toutes les excuses qu’il pourrait avoir, et de sang froid en prime, sans l’ombre d’un remord. Elle n’était pas connue pour sa délicatesse de ce côté-là. « Et avant que tu ne me sortes une nouvelle connerie non, mon cul n’est pas un endroit à tatouer alors oublie illico presto ! » Par chance, ils arrivaient devant son immeuble, et Maureen paya le taxi dans un silence presque religieux avant de ne faire monter Sheamus chez elle… bien que cette fois-ci, alors qu’ils pénétraient dans son antre, l’ambiance était très différente. « Je sais que tu adores le canapé mais on va dire qu’exceptionnellement je vais te laisser une toute petite place sur mon lit. Mais alors vraiment petite, sinon j’te dégage avec les pieds. » ironisa Maureen non sans jouer avec le ruban qui maintenait sa robe en place tandis qu’elle marchait d’un pas félin dans son salon après avoir ôté ses chaussures.

Maureen éclata volontiers de rire rien qu’à se souvenir de leur première nuit ensemble, après laquelle elle avait effectivement retrouvé Sheamus en train de se tenir un nez en sang. « Oh ça va j’me suis fait pardonner espèce de sale rancunier de mes deux ! Tu vas voir si tu oses me balancer sur le plancher, tu vas bouffer du canapé jusqu’à ce que mort s’en suive ! » Sans doute que l’ex-femme de l’irlandais était la douceur incarné qui ne l’aurait jamais menacé à moins d’avoir un sacré coup dans le nez, mais il ne fallait jamais oublier que Maureen se trouvait être une femme dans un milieu particulièrement machiste et masculin jusqu’aux bouts des ongles. Elle devait se battre sans arrêt pour conserver sa place, quitte à couper quelques têtes çà et là mais si elle était légèrement plus douce une fois en couple, cela n’enlevait rien à sa hargne quand elle s’y mettait. « J’adore prendre toute la place… d’une parce que ça t’emmerde donc c’est triplement jouissif, mais aussi parce que t’es une vrai bouillotte et que je me gèle tout le temps le cul la nuit. » Maureen avait été si souvent torturée dans sa jeunesse à cause des ennemis de son père qu’elle n’arrivait plus à avoir un sommeil paisible. D’où le fait qu’elle remue beaucoup, pique toutes les couvertures et tutti quanti. « Chiche » le défia-t-elle alors qu’elle faisait toujours tournoyer son ruban, se passant légèrement sa dentition parfaite contre sa lèvre inférieure pour la mordiller, non sans le provoquer en touchant ses endroits bien précis de sa propre anatomie sans même le lâcher du regard. « Je suis bien meilleure que le scotch, fais-moi confiance… mais pour l’instant j’ai toujours ma robe sur moi, je sais pas ce que tu fous ! »

« Frigide ? Espèce d’enfoiré, tu vas bouffer du canapé c’est moi qui te le dis ! Vais m’acheter une bouillotte en forme de canard, tiens ! » maugréa Maureen avait d’être projetée sur le mur d’en face, retrouvant avec un infini plaisir l’empressement et la violence de Sheamus qui l’avait tant fait vibrer auparavant. Les dix ans semblaient s’amoindrir dans son esprit alors qu’il déchirait littéralement ses vêtements, mettant sa peau à nue dans le but de torturer le moindre de ses sens, comme s’il voulait prendre les rennes en lui prouvant que rien n’avait changé entre eux, qu’il était toujours l’homme de la situation et elle, la femme prête à recevoir ses intentions. Peu à peu, Maureen se sentit fondre et se perdre entre les bras de son irlandais jusqu’à ce qu’elle ne se décide enfin à répliquer. Sournoisement, elle le plaqua à son tour contre le mur d’en face, sans douceur aucune, utilisant son agilité quand Sheamus utilisait sa force. Elle arracha littéralement sa chemise, dont tous les boutons s’échouèrent contre son parquet avant de ne faire voler sa ceinture sans aucune douceur. Bientôt, il se retrouva aussi nu qu’elle, à la merci de ses mains exigeantes et prêtes à partir à la conquête de sa virilité dressée et offerte pour elles. « T’es pas mal non plus nu comme un nouveau-né » ajouta-t-elle avec malice avant de ne reprendre ses lèvres avec fureur, n’écartant jamais son corps semblant bien frêle à côté de la montagne de muscles qu’il représentait. Sournoisement, tout en occupant ses lèvres des siennes, Maureen commençait à lui prodiguer une caresse qu’elle savait irrésistible, jouant avec ses nerfs, attendant avec impatience le moment où il craquerait…

Effectivement, possible que Maureen soit tentée de venir chercher une source de chaleur en pleine nuit et aille jusqu’à le suivre sur le canapé, mais ce serait sûrement plus inconscient qu’autre chose. Surtout que ce n’était pas qu’une question de chaleur, la présence de Sheamus rendait ses nuits nettement plus calmes qu’en temps normal où elle enchaînait les cauchemars avec désespoir. « Je suis ta garce, nuance » reprit-elle avec insolence tandis qu’il la mettait à son tour au supplice, jouant avec son désir comme un illusionniste jouerait avec un volontaire pris au hasard dans une salle. A ce jeu, son irlandais n’était pas le dernier des derniers, bien au contraire, et pouvait même être qualifié d’artiste. Mais ce fut le premier cependant à céder, la soulevant comme si elle n’était pas plus lourde qu’une plume afin de l’allonger et de mettre un terme à cette odieuse torture à laquelle ils s’étaient autant soumis l’un que l’autre. Maureen écarta d’elle-même les cuisses afin de les lier autour de ses hanches tandis qu’il la faisait sienne d’un long et ample coup de rein. Si Sheamus la désirait avec une sorte de désespoir non dissimulé, la jolie blonde lui fournissait toujours plus de marge de manœuvre comme si elle en réclamait plus, toujours plus. Il lui avait tant manqué pendant ces dix années qu’elle voulait être sienne au même titre qu’il devenait sien, et ce dans tous les sens du terme. Mais bientôt, son désir de domination reprit le dessus et elle n’hésita pas à inverser les rôles, le chevauchant avec passion et fureur car rien n’était suffisamment puissant à ses yeux, et rien ne serait jamais meilleur. « Shea… » murmura-t-elle tandis que les fameux trois mots manquèrent de dépasser ses lèvres au moment où elle parvenait au paroxysme de son plaisir. Elle n’hésita pas à clore leurs lèvres pour étouffer leur dernier cri avant de ne se blottir presque tendrement dans ses bras. Le calme d’après tempête…