Une conversation passionnante avec Louise durait depuis des heures au téléphone et Morgana sautillait en débardeur et culotte dans son salon tout en riant aux éclats comme une gamine. « Pourquoi tu radines pas histoire que tu me montres toute cette lingerie ? Faut que tu me donnes la carte de visite de ta créatrice !! » Sauf que ce charmant intermède fut bientôt coupée par une arrivée impromptue, dont la jolie monégasque ne connaissait pas encore l’origine mais qui n’allait pas manquer de lui faire passer l’une des pires journées de son existence. « Louisie j’te rappelle dans cinq minutes, j’ai du monde à la porte ! Bisouuuuus !! » Morgana eut tôt fait d’ouvrir et qu’elle ne fut pas sa surprise que de voir Dillon en mode visite surprise sur son pallier. « Tiens donc, tu snobes tes rendez-vous maintenant ! Ton garde du corps a dû trop mal t’habituer, faudrait que tu trouves quelqu’un avec trois fois plus de poigne ! » Sauf que la tête d’enterrement de Dillon la força à le faire entrer et à ôter d’un même temps ce petit sourire amusé qu’elle avait pourtant depuis son réveil. Quelque chose clochait, elle ne savait simplement pas quoi et diable… elle détestait devoir attendre pour obtenir ce qui semblait être une information de la plus haute importance ! « Merde Dillon j’aime pas ça, dis-moi de quoi il retourne et ce sera comme si on arrachait un pansement rapidement, sans anesthésie okay ? » Morgana déglutit avec difficulté, ne s’attendant aucunement à la foudre qui allait lui tomber sur la tête. Le choc serait rude. Plus rude encore que tout ce qu’elle avait hélas imaginé… « Parle bordel ! Faut que j’te sorte les vers du nez ?? »

Une porte dans la gueule. Voilà ce que venait de se prendre Morgana. Qu’était-elle censée faire au juste ? Se réjouir de le voir la quitter pour cette nénette dont elle n’avait jamais entendu parler et qui apparaissait un beau jour, alors que Dillon se trouvait en lice pour un poste de sénateur ? Jamais. Elle avait sa fierté, et c’était la seule chose qu’il était incapable de lui prendre. Pendant quelques secondes, la jolie monégasque leva la main et l’approcha violemment du visage de Dillon, ne s’arrêtant qu’à quelques millimètres. « Non, tu ne mérites même pas le peu d’énergie dont j’aurais besoin pour te massacrer. Ce serait trop facile ! » Morgana avait envie de hurler sa haine, comment avait-elle pu se faire avoir comme une pareille débutante ? C’était rageant, révoltant ! Il ne valait mieux pas qu’elle tombe sur cette nénette parce qu’enceinte ou pas, elle ne serait sûrement pas capable de se retenir de lui refaire le portrait. « Une nénette avec qui tu as couché une fois revient pile poil quand tu veux obtenir un poste de sénateur et ça ne te parait pas louche ? Tu es encore plus naïf que ce que je pensais. Mais ma foi, c’est ta vie pas la mienne. » Inutile de chercher à le blesser, Morgana refusait de s’abaisser à une telle déchéance et c’est pourquoi elle prit cela de façon plus froide et impassible que jamais. Elle s’énerverait plus tard, même si en l’occurrence, elle n’avait même plus son métier pour l’aider à se calmer depuis son accident et son passage à l’hosto. En prime, sa main ne s’était toujours pas remise. « Désolé ? Pas autant que moi. Considère-moi informée ! Maintenant dégage. Je meurs direct si je recroise ta route un jour. DÉGAGE DE CHEZ MOI WOLF ! Parce que s’il faut que je t’éjecte, tu risques d’avoir du mal à t’asseoir pendant très, très longtemps. »

Morgana s’arrangea pour ne surtout pas le regarder sinon elle allait exploser littéralement et ce ne serait pas beau à voir. Elle avait l’impression que le monde s’ouvrait sous ses pieds, qu’elle allait tomber mais que la chute mettait particulièrement de temps à arriver. Du temps et de la souffrance. Pourtant merde, elle n’avait jamais demandé tout ça, Dillon l’avait incitée à revenir vers lui en se fâchant avec son père et avec le recul, elle regrettait ô combien d’avoir eu la stupidité de revenir. Si elle ne l’avait pas fait, ils n’en seraient pas là, à se déchirer littéralement. D’autant que l’américain s’énervait mais ne voulait pas passer cette putain de porte, il ne voulait pas la laisser exploser une bonne fois pour toute à l’abri des regards et surtout du sien… hors de question qu’elle ne se montre faible devant lui. « Parce que tu crois que je ne connais pas l’abandon ? Que ma vie est parfaite et que je n’ai jamais été prise pour un paillasson ? Merde Dillon !! Tu ne sais rien de moi, tu ne connais pas ma vie alors ne te pose pas en victime pitié ! Ca va, j’ai compris le message, tu vas sauver ce gosse, vive toi ! Si j’ai cinq minutes j’me déguise en pompom girl pour te soutenir qu’on en cause plus ! » C’était la première fois que Morgana hurlait son plus lourd secret à demi mot aussi facilement. Cela ne fit hélas que la rendre plus amère, surtout qu’il n’hésita pas une seconde à combler la distance entre eux pour l’embrasser avec passion. Ce baiser fut davantage du poison pour elle parce qu’il ne faisait que raviver la flamme, encore et encore, sans lui laisser de répit pour reprendre sa respiration. « Justement, tu t’en sors beau prince, tu me laisses avec ce fameux « ça » et tu te barres, alors ne compte pas sur moi pour te féliciter pour ta bravoure à la con parce que tu peux te la carrer dans l’oignon ! YA RIEN DE NOBLE ! C’est toi que tu as perdu. C’est con hein ? Tu vois j’aurais mieux fait de sauter du haut d’un pont le soir où je suis venu de trouver dans ce foutu bar à la con ! »

« Vous savez que vous me faites chier Wolf ? » Telles avaient été les dernières paroles à Wolf père, venu lui apporter un dossier de la plus haute importance alors que Morgana s’alcoolisait joyeusement dans le premier pub qu’elle avait trouvé. Louise l’accompagnait, bien qu’elle ne buvait pas la moindre goutte, souhaitant simplement être certaine que sa meilleure amie ne ferait pas de connerie. Elle était chargée par Nicolas de la surveiller et de la ramener chez elle, sans oublier de veiller sur elle jusqu’à ce qu’il ne prenne le relais. Ils se relayaient ainsi depuis deux bonnes semaines, alors que la monégasque venait de connaître sa première sale rupture et qu’elle touchait littéralement le fond. Fallait-il qu’elle ait effectivement un dossier en béton armé pour se pointer à la mairie de New York où Dillon s’apprêtait à faire une connerie monumentale… « Si quelqu’un a quelque chose à dire, qu’il le dise maintenant ! » « Moi ! Parce que elle c’est une bitch qui ouvre ses cuisses à tous les connards venus… mais ça on savait déjà, et l’abruti qui veut faire la connerie de lier son âme damnée à cette fameuse bitch, c’est mon mien à moi ! » s’exclama-t-elle soudainement, suivie de près par Louise qui voulait la soutenir même physiquement alors qu’elle se débattait. Alcoolisée, oui, mais Morgana avait tout de même les idées suffisamment claires pour débiter un discours qui allait, sans nul doute, faire le meilleur effet. Elle prit sa place au Maire, qu’elle incita à s’asseoir ailleurs pour le temps de son discours tandis qu’elle faisait diffuser la petite vidéo transmise par nul autre que le père de Dillon où Gaby énonçait son plan au vrai père de l’enfant : le coup des cheveux, du test de paternité falsifié, le pactole fameux qu’elle pourrait réclamer pour son gosse… tout. Autant dire que Morgana ne se lassait pas de le voir et qu’elle n’interrompit aucunement la vidéo, surtout pas alors que l’assemblée venait de plonger dans un silence aussi mortel que peu étonnant. « Voilà ! Bitch, bitch, bitch. En plus Gaby sérieux, comment t’as pu te taper cette escalope de thon alors que t’as limite un dieu à côté de toi ? Sérieux son cul il devrait le faire expertiser et assurer tellement bah… c’est de la bonne marchandise de luxe ! Bref, je m’égare. Je m’oppose à ce mariage caca et pis… » Morgana était soudainement devenue pâle, blême même et dû quitter soudainement l’estrade en vue d’aller rendre ses tripes sur… nulle autre que Gaby et sa belle robe blanche sûrement hors de prix. Le pire ? C’est qu’elle éclata de rire aussitôt ! « Voilà tout le dossier Wolf fils ! Tu peux faire ce que tu veux avec, te le carrer dans l’oignon si ça te chante, j’ai fais ma BA en t’évitant une connerie. Louisie on est parties ! » Certes, la jeune femme n’était pas du tout dans son état normal et eut probablement la pire gueule de bois de la création le lendemain, mais elle n’oubliait en rien sa petite scénette et encore moins l’effet qu’elle avait eut auprès de l’assemblée. Mais ce qui la désolait réellement, c’est qu’elle soit devant l’immeuble de Dillon, comme une âme en peine. Elle était venue en moto mais fut incapable de démarrer après un long moment à observer la lumière allumée s’échappant de sa fenêtre. Une crampe extrêmement douloureuse dans la main la fit descendre de son véhicule et, énervée, elle se mit à longer la rue à pied, en désespoir de cause. « Morgana, t’es vraiment mais alors vraiment trop conne ma fille ! »

Et merde, il l’avait vue ! Morgana grogna aussi discrètement qu’elle le put avant de lui donner du sourire narquois sans aucun remord. Même si elle lui avait sauvé la mise, la petite scénette dans son propre appartement lui restait envers et toujours en travers de la gorge, rien à faire. Elle n’émit pas le moindre son supplémentaire que déjà, il reprenait la parole, lui arrachant un haussement de sourcils d’étonnement car de tous ceux qui avaient été à ça de se faire avoir comme un bleu, Wolf fils était de loin le plus culotté de tous. « Peur ? Le jour où j’aurais peur, les poules auront des Nike et des tutus roses à pois verts ! Je n’ai pas peur, je n’ai pas envie de me salir mes belles bottes en pénétrant une zone de non droit. » Ne pas comprendre par là qu’il lui était interdit de côtoyer Wolf, après tout la jolie brunette s’estimait totalement libre de ses différents mouvements mais elle n’avait plutôt pas envie de ramper comme un bon petit toutou obéissant. A ses yeux, la messe était dite : il était venu à son domicile pour rompre, il n’y avait donc rien d’autre de précis à ajouter. « Je ne suis encore là que parce que je ne peux pas utiliser ma moto, rien de plus, rien de moins. Faut pas rêver sa vie ! Même si j’avoue que dans le genre conte de fées, jean et basket… tu l’as gâtée ta bitch. Elle s’est remise de son humiliation d’ailleurs ? » Dans le fond, Morgana s’en foutait mais alors totalement… seulement elle ne voulait pas lui demander à lui comment il allait. Ca, c’était au dessus de ses forces, son orgueil ne s’en remettrait pas. « Tu devrais surveiller ton chien, il va se carapater sinon. Et sympa ton Manoir… bref. Pas tout ça mais je suis pas rendue en mode petons alors autant s’y mettre. A plus ! » Et elle avait déjà tourné les talons. La vérité, c’est qu’elle ne savait pas du tout comment réagir face à cette situation merdique.

« Haha, dis celui que rien ne touche jamais ! Tu peux me jeter la pierre, t’es pire que moi j’te signale… c’est pas toi qui te serait flanqué en mode commando pour empêcher un pauvre naïf d’épouser une gourde manipulatrice ! » Dillon avait beaucoup de qualités mais l’altruisme avait du mal à en faire partie, ou du moins il cachait tellement bien son jeu qu’il était improbable de pouvoir s’en apercevoir. Mais il avait gagné néanmoins un round : Morgana s’était aussitôt retournée et, si elle ne faisait pas de pas vers lui par principe, elle ne bougeait plus, demeurant bras croisés et tâchant d’être aussi impassible que possible. « Ca va, j’étais là je plaide coupable, merde ! » grogna-t-elle car elle se maudissait bien assez d’être venue jusqu’ici sans même savoir pourquoi. Il n’y avait plus rien à dire, pourtant. Il l’avait larguée, elle l’avait empêchée de faire une grosse connerie et voilà, le discours devait être clos. Du moins l’avait-elle espéré jusqu’à ce que Dillon ne reprenne la parole et ne lui fasse froncer les sourcils, la tentant de foncer dans le tas à son tour bien qu’elle y aurait mis une touche physique nettement plus… brutale à sa place. Déformation professionnelle doublée d’un caractère de chien, sans nul doute. « Ouais, t’as été réglo, vive toi ! Sincèrement j’applaudis des quatre mains… métaphoriquement parlant parce que j’ai pas deux secondes à perdre pour ça. Mais si tu es okay avec toi-même, tant mieux, bravo, félicitations ! Ca ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de mépris dans ton geste, et ça ne me fait pas mieux vivre la chose. Tu veux la vérité ? Fort bien. Ca me dézingue. J’ai même particulièrement bisouté ma bouteille dernièrement mais ce n’est pas parce que tu me plais Wolf. » Sûrement allait-elle se maudire jusqu’au prochain millénaire mais tant pis. « Tu ne me plais pas je t’aime. Et j’espère que t’as bien ouvert tes aises gourdes parce que je ne le redirais plus jamais. Comme tu dis si bien : c’est ça la différence entre toi et moi. T’es pas juste un beau cul musclé. »

« De cauchemarder ? » s’étrangla soudainement Morgana, peinant à croire ce qu’elle venait juste d’entendre. Rien que par sa première phrase, ce fut au tour de la monégasque de se prendre un uppercut en pleine poire. Elle recula d’un pas, tentant d’écouter la suite sans avoir l’irrépressible envie de fuir mais ce n’était pas gagné. « Un coup de bluff ? Un deal ? Non Morgana ne t’énerve pas tu risque de le regretter… » se murmura-t-elle à elle-même avant de ne se souvenir des interminables exercices de yoga auxquels elle s’adonnait très régulièrement lorsqu’elle était encore championne de Kung-Fu. « Je ne te savais pas extralucide et prédicateur d’avenir ? Tu ne sais pas ce qui va se passer demain et moi non plus ! C’est ça ce qu’on appelle l’imprévu mais effectivement, tout bien réfléchi peut-être qu’il n’y a pas de place pour moi. Oublie ce que j’ai dis, ça vaut mieux. » Cette fois-ci, Morgana ne pouvait pas rester, elle enchaîna sur un pas particulièrement rapide pour mieux remonter la rue de Dillon, la colère et la peur au ventre, jusqu’à ce que son portable ne se mette à vibrer dans sa poche. L’espace d’un instant, elle ne put s’empêcher de craindre qu’il s’agisse de l’américain, mais par chance c’était son père. Enfin chance… Morgana mit le téléphone sur haut parleur, sans savoir pourquoi, et la nouvelle qu’il lui apprit ne fut que l’assommer plus encore. « Je ne veux pas repartir à Monaco et encore moins faire partie de leur famille royale à la con ! Caroline de Monaco ou pas elle n’a plus été ma mère à partir du moment où elle m’a abandonnée à la maternité ! » « Sauf qu’elle a beaucoup de relations. Elle t’obligera, surtout que tu n’as jamais été naturalisée… le seul moyen de la contrecarrer ce serait d’épouser un américain, je ne vois pas d’autre solution. Écoute demain, tu vas venir manger avec moi et on en parlera, d’accord ? Ne te torture pas trop, je refuse de te laisser repartir avec cette femme. » Le visage de Morgana était marqué par la nouvelle, son masque étant temporairement tombé alors qu’elle se laissait glisser contre le tronc d’un arbre, dans un parc tout près du manoir de Dillon. Se marier avec un américain ? Mais ils voulaient tous sa mort ! Qui plus est, elle ne voulait pas partir, elle avait sa vie ici désormais… la brunette était perdue. Pour la première fois de sa vie, elle ne savait pas du tout quoi faire. C’était vraiment une grande première !

Autant dire que pendant les quelques minutes où elle pensa être seule, Morgana ne put s’empêcher de broyer du noir. Ce n’était pourtant pas son genre, pas alors qu’elle restait quelqu’un de profondément positif mais vraiment, c’était la goutte faisant déborder la potiche. Tout d’abord sa blessure par balle l’empêchait de bosser du fait des nombreux tremblements de sa main, et maintenant ça… c’était trop demandé que de vivre simplement en paix dans ce foutu pays ? Dieu sait qu’elle ne demandait jamais rien à personne et qu’elle se démerdait seule. Ce qui la tuait d’autant plus, c’est que son père ait dû endurer le fait de revoir cette affreuse femme lui ayant tout pris. Cela tuait plus assurément Morgana que tout le reste, y compris la perspective de devoir épouser quelqu’un alors qu’elle n’en n’avait strictement aucune envie. Alors autant dire qu’entendre la voix de Dillon manqua de lui faire lâcher son téléphone tandis qu’elle se relevait, incrédule, espérant presque avoir mal entendu. Il voulait quoi ? « Tu ne veux pas m’épouser tu dis que je ne suis qu’une chieuse ! » s’exclama-t-elle, en guise de dernier rempart pour sa fierté. C’était stupide car effectivement, épouser Dillon était le plan parfait pour éviter de devoir retourner à Monaco et d’être obligée d’apprendre à être une Lady. « Tadaaa tu as en face de toi une princesse de Monaco ! La classe hein ! » reprit-elle avec amertume alors qu’elle baissait progressivement le regard, ne parvenant décidément pas à encaisser le fait que sa mère lui cherche encore des noises après l’avoir abandonnée à la naissance. « Tu vas comprendre quand que tu pourrais être éboueur j’en aurais rien à cirer ? La position dans la société ç’a peut-être une grande importance pour toi mais pas pour moi ! J’ai l’impression de profiter de toi et je ne veux pas. Putain j’peux pas l’avaler cette fois… c’est vraiment trop demandé d’avoir la paix ! Tu te rends compte que tu vas te visser à un boulet, Dillon Wolf ? J’en ai un paquet, de casseroles… »

Accepter de l’épouser, il en avait de bonnes lui ! Dillon Wolf était tout et son contraire, la glace et le feu, le jour et la nuit, le mariage puis l’absence totale de devoirs conjugaux… Morgana ne parvenait plus à dépatouiller les degrés de son caractère et à cet instant précis, alors que le couperet de la guillotine marquait encore sa nuque suite au coup de fil de son père, son hésitation n’aurait pas pu être plus évidente. Oh ce n’était pas tant qu’elle n’aimait pas le futur sénateur, bien au contraire, elle était bien plus sérieuse au niveau de ses sentiments qu’il ne devait l’être de son côté… mais là, la jolie brunette ne pouvait pas s’empêcher de le croire contraint de lui proposer cette solution. Il n’était plus seulement question d’égo cette fois-ci, mais plutôt d’accepter que l’éminent Dillon Wolf ne visse son existence à la sienne. « Je suis garde du corps parce que ma mère m’a abandonnée à la naissance, pour moi j’ai toujours été fille de garde du corps et c’est ma fierté, la fierté familiale même ! Je ne suis pas une Grimaldi… je n’ai jamais voulu l’être et je ne sais pas pourquoi un beau jour elle se découvre des envies d’être ma mère ! Je ne suis pas une princesse. Et justement, je ne veux pas être enchaînée dans un beau palais où le protocole et la richesse vont me rendre aigrie. » Morgana déglutit avec difficulté avant que le monologue de Dillon ne finisse par se frayer un chemin dans son cerveau. Si elle continuait à le repousser, machinalement, elle le perdrait, c’était une certitude. « Ca, ça veut dire que j’ai intérêt à passer à la casserole, c’est ça ? » ironisa-t-elle avant d’éclater subitement de rire, se déchargeant de toute cette pression s’étant glisser insidieusement dans ses veines pour mieux reprendre un souffle plus normal. « T’es complètement timbré, Dillon Wolf ! Oui je t’ai avoué mes sentiments mais s’ils ne sont pas réciproques, pourquoi t’enchaîner à moi, hein ? Je ne t’ai rien demandé. Et pourtant je vais te dire oui. » Chieuse ? A peine ! Mais il adorait ça…

« Mon père est effondré et je n’ai pas envie non plus de lui demander encore davantage alors que je lui dois tant déjà. » Dillon avait peut-être une relation déplorable avec son paternel – notamment à cause de la jolie brunette, d’ailleurs – mais ce n’était aucunement le cas de Morgana, puisque son père était son roc, sa seule famille en dehors de Louise et de Nicolas. Dillon était différent, il ne s’attachait jamais à personne, aussi n’était-il pas surprenant qu’elle s’étonne de sa proposition. S’il y avait bien une personne au monde qu’elle n’aurait jamais imaginée mariée, c’était bien lui… « Crois-moi, un cul comme le mien, c’est comme le tien, c’est introuvable, aussi exceptionnel qu’un scotch trente ans d’âge. Pour ça qu’on a déglingué les rideaux dans ton bureau si tu suis mon raisonnement. » Pour sûr, ils s’entendaient à merveille au lit et l’américain avait laissé un goût de reviens-y sur ses lèvres, aussi était-il comme un parcours du combattant de résister à la tentation… mais pas à celle de dire oui. « Oui comme je VAIS te faire chier pour le restant de tes jours ouaip ! Mais tu adores ça sinon tu n’aurais pas pris le risque de te visser à moi, pas vrai ? Tu adores que je te résistes, avoue… » Morgana haussa un sourcil, ne sachant pas si elle était censée lui sauter au cou pour le remercier de cette opportunité qu’il lui offrait de rester sur le sol américain… et pourtant c’est limite si elle ne lui devait pas la vie. « Je t’en dois une… même plusieurs » avoua-t-elle prudemment. Il ne s’agirait pas de massacrer sa fierté au passage non plus, même si ses sentiments étaient on ne peut plus vivaces.

« Je vais plutôt lui envoyer un message parce que si je l’appelle… demain matin on y est encore ! » expliqua Morgana qui ne manqua pas de s’exécuter tout en expliquant à son père qu’elle lui donnerait tous les détails lors de leur déjeuner du lendemain. Sans savoir pourquoi, un sourire niais peuplait désormais ses lèvres alors que les paroles de l’américain tournaient en boucle dans son esprit. Qu’importe que Dillon ne soit pas un poète sur les bords, elle n’en n’avait cure. La jolie brunette n’était pas quelqu’un de foncièrement romantique, c’était même plutôt l’inverse qui se produisait à vrai dire. Voilà pourquoi elle éclata de rire lorsqu’il s’excusa de ne pas lui offrir un palace parce qu’il n’avait pas eu le temps de s’atteler aux travaux… il avait vraiment cru qu’elle n’était rien d’autre qu’une lady ou quoi ? « J’ai une tête à avoir une manucure que j’ai peur de faire péter ? Sérieusement Dillon ! Tu es peut-être habitué aux quatre étoiles mais pas moi… j’ai déjà dormi par terre sur un parquet parce qu’on construisait une baraque avec nos mimines mon père et moi. » Morgana haussa les épaules avant de l’attirer à elle pour s’emparer à son tour de ses lèvres, de cette même manière sulfureuse dont elle avait usé avant qu’ils ne se donnent furieusement l’un à l’autre dans le bureau du milliardaire. « Je crois que je m’en fous des grands discours, je n’y ai jamais cru et puis… les mots peuvent mentir, tu es un futur politicien darling ! La seule chose que j’attends de toi c’est que tu n’ailles pas voir ailleurs… parce que ton ex-femme a peut-être juste décampé mais moi j’ai la vengeance aussi furieuse que mon chevauchement sur tes reins, pour te donner une image facile à retenir. Je ne te promets pas non plus de ne pas être une emmerdeuse finie… ça fait trop partie de mon charme mais tu peux compter sur moi pour te soutenir par compte. A tout moment. Même si j’ai envie de t’étrangler les trois quart du temps. Applaudit : tu as une femme à domicile et qui a oublié d’être juste une triple abrutie ! »

« T’es pas un gosse de riche c’est juste un emmerdeur pour moi » énonça-t-elle subitement, car elle ne savait pas comment prendre différemment sa confession. Après tout, elle avait tellement de mal à l’imaginer en homme sympathique et romantique qu’il était impossible pour elle de réagir autrement… mais ça ne voulait pas dire qu’elle n’allait pas essayer et que faire des efforts ne faisait pas partie de son vocabulaire. Morgana appréciait tout particulièrement qu’il cherche à la détromper sur l’avis qu’elle avait bien pu se faire sur lui, quelque part, c’était une marque de confiance et cela lui faisait plaisir. Peut-être n’était-il pas définitivement bon à jeter par la fenêtre… « M’enfin si tu ne baisses jamais la garde et que tu te contentes de te conduire comme un enfoiré même avec moi… putain ça promet » reprit-elle avant de ne hausser les épaules comme si en dépit de ce qu’elle venait de dire, ce n’était pas le plus important. « Tu sais, personnellement j’ai jamais eu de diplôme, comme tu le sais ma mère est connue dans le monde entier et pourtant elle s’est comportée comme une biatch avec nous. Mon père est un grand garde du corps, le meilleur dans sa profession, et c’est vraiment objectif ce que je dis… mais il s’est pris une balle et depuis, c’est comme s’il n’existait plus. Peut-être que si ça se trouve, mes tremblements à la main me feront subir la même chose mais tu sais quoi ? Je m’en tape. J’ai déjà été championne alors je peux réussir. Mais ne crois pas que je ne sache pas ce que « problème de fric » signifie. Je le sais même mieux que quiconque d’autre de ton entourage. » Loin d’elle l’envie de se plaindre. C’était sa croix et elle la portait seule, point barre.