Son cœur battait à tout rompre dans sa cage thoracique, comme à chaque fois qu’elle s’apprêtait à faire quelque chose d’illégale tout en sachant qu’elle avait, en réalité, le droit de le faire. Elle avait tout préparé la veille, si ce n’était pas depuis le jour où elle s’était rendue compte qu’elle ne pouvait pas entre dans le bureau du Général de la base de Fort Hamilton en plein jour. Appeler le centre des opérations – qui se trouvait à Los Angeles – aurait pu lui offrir un laisser-passer, mais si l’Australienne devait être en infiltration elle tenait à y être jusqu’au bout. Ainsi, après une journée de torture à courir, grimper, ramper et tout ce qui allait avec l’entraînement, elle rentra chez elle et se prépara à repartir aussi tard que possible en direction de la base militaire. Garée non loin des grilles désormais fermées, elle regarda le dernier garde partir et sortit de l’habitable de son véhicule, prenant appuie contre ce dernier tandis qu’elle vérifiait qu’elle avait tout son nécessaire sur elle. Travailler avec Elijah lui avait au moins appris quelques petits choses comme le fait d’escalader des murs, des grilles ou encore de crocheter des serrures, tout ce que Payson s’apprêtait à faire lorsqu’elle gagna le grillage et s’aida des prises qu’elle avait repéré ces derniers jours. Une fois réceptionnée de l’autre côté, la jeune femme se dirigea droit vers le bâtiment où se trouvait le bureau du Général non sans vérifier à plusieurs reprises que personne n’était dans les parages, on est jamais trop prudent. La porte de l’immeuble était la plus simple à crochetée, chose qu’elle avait su deviner par simple observation tout en sautant sur place comme une andouille dans la journée. La pire serait sans le moindre doute celle du bureau en lui-même, mais pour le moment Payson se contentait d’avancer à pas de loup dans le couloir pour gagner l’escalier qu’elle monta quatre à quatre en ayant eu l’intelligence de chausser des ballerines et non pas des chaussures à talons. Arrivée au troisième étage, elle due se plaquer contre un mur pour ne pas tomber sur l’un des vigiles – également soldat – qui faisait son petit tour et une fois le faisceau de sa lampe torche ayant disparu, l’Australienne gagna la porte du bureau au petit trot. Devant cette dernière elle s’accroupit de sorte à être au niveau de la serrure et sortit de la poche de son jean le nécessaire pour parvenir à ouvrir la porte tout en priant intérieurement que personne ne débarque à l’improviste. Le petit déclic qui parvint à ses oreilles lui tira un sourire tandis qu’elle se relevait pour appuyer sur la poignée de la porte qui s’ouvrit, lui ouvrant grand les bras pour entrer à l’intérieur et se diriger vers l’armoire qui renfermait les dossiers des soldats de la base et autres paperasses qui pourraient l’intéresser le tout en oubliant de refermer la porte derrière elle …

Si Payson était curieuse depuis son plus jeune âge, les derniers mois qu’elle avait vécus auprès de son cousin ou comme agent l’avait d’autant plus poussé à mettre son nez partout. Elle aimait obtenir des réponses aux questions qu’elle se posait mais, malheureusement, elle ne s’y prenait pas toujours de la meilleure façon, allant jusqu’à se mettre la loi à dos à la différence qu’à présent la loi était de son côté, du moins en quelque sorte. Elle était en infiltration ce qui signifiait que si elle se faisait attraper la main dans le sac rien ne lui garantissait que ses supérieurs joueraient des pieds et des mains pour la sortir d’affaire quand bien même savait-elle que Henrietta ferait tout pour l’aider ne supportant pas qu’il arrive quoi que ce soit à ses agents. Toutefois, ce soir Payson avait été imprudente sans même s’en rendre compte et cela ne lui ressemblait absolument pas. L’Australienne n’aimait pas laisser les choses au hasard et elle avait prévu de s’introduire dans les bureaux du Général depuis quelques jours déjà prévoyant presque chacun de ses pas à l’avance, oubliant visiblement de compter de refermer les portes derrière elle. Cependant, la jeune femme était bien trop concentrée sur la mission qu’elle s’était donnée pour s’en rendre compte. Elle était entrée dans le bureau à pas de loup son regard balayant la pièce à la recherche d’une armoire qui pourrait contenir ce qu’elle recherchait. Malgré l’obscurité ambiante, elle n’eut aucun mal à se diriger vers elle et une fois devant elle sortit de la poche arrière de son pantalon sa petite lampe torche qu’elle alluma et maintint entre ses lèvres tandis qu’elle crochetait la serrure de l’armoire pour ensuite mettre son nez dans les divers dossiers qu’elle contenait. Payson était tant concentrée dans ses trouvailles qu’elle n’entendit pas les bruits de pas qui se dirigeaient droit en direction de la pièce où elle se trouvait et elle continua donc de fouiller tranquillement chaque dossier qu’elle trouvait. « Est-ce que t'aurais perdu la tête ? » La surprise fut-elle que le cœur de la jeune femme manqua un battement tandis qu’elle fit un bond d’un bon mètre avant de se tourner en direction de la porte du bureau, une main sur le cœur et le regard posé en direction d’Enzo. « Bon Dieu ! » Lâcha-t-elle afin d’exprimer le fait qu’il venait de lui faire une peur bleue, mais déjà l’Italien enchaînait, peu ravi de la retrouver là. « Qu'est-ce tu fiches là ? Peu importe ce que tu cherches, t'aurais pu me le demander ! Si on nous trouve là, on est finis ! » La jeune femme arqua un sourcil – bien qu’elle doutait que ça soit visible dans le noir – et se pencha en direction du sol pour reprendre la lampe torche qu’elle avait fait tomber. « Aurais-tu peur que l’on s’imagine de choses à notre sujet ? » Plaisanta-t-elle dans l’espoir de le détendre même si elle comprenait parfaitement sa crainte. « Fais pas cette tête, si je prends ce risque c’est parce que tu n’y as pas accès. » Dit-elle en désignant d’un mouvement de la tête l’armoire à sa droite. « Et toi ? Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu me suis ? Je te manquais ? » S’il y avait bien une chose qui n’avait pas changé ces derniers mois la concernant c’était son ironie et son assurance même s’il s’agissait le plus souvent d’un mécanisme de défense. Sans rien ajouter d’autre, la jeune femme se pencha à nouveau au-dessus de dossier qu’elle lut en diagonale, éclairée à l’aide de sa lampe.

Si elle devait avoir des ennuis, personne ne tomberait avec elle, c’était la promesse qu’elle se faisait à chaque fois qu’elle acceptait une mission et pourtant, à chaque fois quelqu’un finissait pas tomber avec elle, qu’elle le veuille ou non. Une infiltration impliquait le plus souvent le fait de nouer des liens complexes avec des personnes tout en leur mentant sur sa véritable identité, ce que la jeune femme avait fait au cours de ces dernières missions qui bien que peu nombreuses avaient duré longtemps. A chaque fois il y avait eu une personne dont elle avait dû se rapprocher, une personne à laquelle elle avait dû mentir pour le bien de la mission et même si c’était pour son travail, l’Australienne s’en sentait malade à tous les coups. Toutefois, pour celle-ci elle ne comptait pas réitérer les mêmes erreurs et le fait qu’Enzo sache d’ores et déjà qui elle était réellement était un grand plus pour lui bien qu’elle craignait que ça soit la raison principale qui pourrait le pousser à tomber avec elle si jamais la jeune femme se faisait attraper. Néanmoins, ce soir-là Payson n’avait pas imaginé un seul instant que l’Italien se trouverait dans les parages et encore moins qui lui mettrait la main dessus en lui faisait une peur si incroyable que son cœur avait cessé de battre pendant une fraction de seconde. Cependant, ces derniers mois l’Australienne avait appris à ne pratiquement jamais laisser transparaitre ses émotions, raison pour laquelle elle enchaîna presqu’aussitôt sur son habituel sarcasme. « Oui c'est ça, t'as tout compris ! J'ai surtout peur de me faire chasser à coup de pied dans le derrière par le Général ! » Un petit sourire amusé étira les lèvres de Payson bien qu’il n’y ait strictement rien de drôle dans la situation, mais elle trouvait touchant le fait qu’Enzo soit autant impliqué dans son travail et, de toute manière, elle ferait toujours en sorte qu’il ne soit pas touché par ce qu’elle allait faire durant sa mission, ce qu’elle était déjà en train de faire d’ailleurs. « Dépêche-toi qu'on puisse sortir d'ici au lieu de te demander si tu me plais ou pas ! » La jeune femme leva le nez du dossier qu’elle était en train de feuilleter en arquant un sourcil. Son sourire ne fit que s’imposer encore plus sur ses lèvres alors qu’elle mourait presque d’envie de lui demander clairement si c’était le cas ou non, mais Payson jugea qu’elle n’avait pas le temps et repartit dans ses fouilles. « Si on se fait prendre je te... » Enzo ne put finir sa phrase et déjà Payson avait lâché le dossier qu’elle tenait entre les mains et s’était rapprochée très rapidement de l’instructeur lorsqu’elle avait entendu les pas se rapprocher d’eux. Le raclement de gorge du garde raisonna quelque peu dans la pièce tandis que, près d’Enzo, la jeune femme tournait la tête vers lui. « Soldat... on... » Mais, de nouveau l’Italien ne put prononcer le moindre mot. Via le regard qu’ils s’étaient échangés une poignée de secondes avant il lui avait fait comprendre qu’elle avait intérêt de trouver une bonne excuse à fournir, voilà qui était fait mais pas de la manière dont les deux hommes auraient pu s’y attendre. Sans mot dire, l’Australienne s’était littéralement jetée aux lèvres d’Enzo, les gardant contre les siennes au cours de secondes qui durent paraître interminables au garde. « On cherchait un endroit tranquille et la porte était ouverte. » Mentit-elle sans le moindre remord en mordillant sa lèvre inférieure tout en restant presque collée à l’Italien. « Visiblement ce n’était pas un bon choix. » Une petite moue déçue se dessina sur son visage et, attrapant la main d’Enzo, elle l’entraîna avec elle en direction du garde et de la sortie du bureau. « Pardon … ça reste entre nous ? » Demanda-t-elle au soldat qui la regardait bouche bée, n’ayant pas eu la moindre occasion d’en placer une. Il finit tout de même par acquiescer d’un bref mouvement de la tête, sourcils froncés comme pour leur faire remarquer de ne plus recommencer et Payson n’attendit pas plus longtemps pour entraîner l’Italien avec elle, dévalant les escaliers avant de pouvoir ralentir sa course lorsqu’elle fut sûre d’être tranquille. « Tu vois, si tu m’avais pas fait perdre quelques secondes, je ne me serais pas fait attraper … Bref, ton bureau il est où ? Je préfère ne pas faire sortir ce dossier de la base. » Aussitôt le dossier placé dans la conversation, elle le sortit de sous son haut. S’il y avait autre chose que son cousin lui avait appris c’était bien son aptitude à voler tout et n’importe quoi sans se faire remarquer, comme ce soir avec le dossier qu’elle tenait entre les mains.

La situation l’amusait comme le démontrait le petit sourire qui ne se délogeait plus de ses lèvres. Elle était devenue bien plus taquine que par le passé, sans doute parce que l’Australienne voyait là un moyen d’échapper aux épreuves de la vie. Elle se devait de faire en sorte que tout lui passe au-dessus de la tête même si ce n’était pas une chose aisée, mais elle s’y appliquait parce, finalement, elle n’avait pas réellement d’autres choix. Arizona l’avait appris à ses dépens et jouer comme elle le faisait avait été l’un des meilleurs moyens pour elle de mettre les cibles de son cousin dans sa poche. Certes, ce n’était pas quelque chose dont elle était extrêmement fière – elle ne l’était pas du tout – mais au moins elle avait pu apprendre à voir la vie sous un autre angle, lui permettant ainsi de profiter de cette dernière ou tout du moins des petites choses qu’elle lui offrait. Néanmoins, elle n’avait pas voulu créer le moindre souci à l’Italien car le fait est qu’elle l’appréciait réellement beaucoup. Au-delà de l’aide qu’Enzo lui apportait pour cette mission, il était un jeune homme qu’elle aimait beaucoup, qui la faisait sourire avec sa pointe de maladresse et qui, clairement, ne la laissait pas indifférente. Il faisait partie de ce type d’hommes qui pouvait facilement la faire craquer, ceux auxquels elle s’attachait trop facilement, tout du moins par le passé puisque désormais l’Océanienne s’efforçait d’éviter tout attachement, d’autant plus lorsque ce dernier finissait par avoir un rapport avec ses missions et son métier. Son regard toujours posé sur l’Italien tandis qu’elle continuait de brandir le dossier qu’elle avait fièrement « emprunté », elle attendit sagement la réponse d’Enzo sans être capable de faire disparaître son sourire amusé. « Au-dessus. Suis-moi. » Aussitôt dit, aussitôt fait. L’Australienne se laissa alors guider par le jeune homme jusqu’au bureau de ce dernier, pénétrant à l’intérieur de la pièce qu’elle détailla avec une légère moue pour faire de nouveau face à Enzo, ce dernier verrouillant la porte du bureau, laissant le temps à Arizona de vouloir lancer une réplique mais le jeune homme la doubla et prit la parole avant elle. « Petit 1. Si on serait tombé sur quelqu'un d'autre qu'Harry, on serait mort à l'heure qu'il est. Petit 2. T'aurais pu trouver une autre chose que... tu vois, comme excuse ! Et Petit 3. Tu t'introduis plus jamais seul où que ça soit sans m'avoir prévenu avant. » L’un des sourcils de la jeune femme s’arqua et son sourire se fit d’autant plus présent. Oui, elle trouvait la situation amusante, ainsi que la gêne qui s’emparait d’Enzo dès qu’il essayait de parler du baiser qu’ils avaient échangé pour échapper au problème « Harry » qui les avait surpris dans le bureau du Général. « Arrête de me sourire comme ça... » Arizona se pinça les lèvres pour tenter de dissimuler son sourire, mais ce fut plus difficile qu’elle ne l’imagina si bien qu’elle vit le fait que l’Italien détourne son regard vers le dossier comme une délivrance. « Qu'est-ce tu cherches ? » Le regard de la jeune femme également porté en direction du dossier, elle redressa la tête, fit quelques pas vers le bureau d’Enzo et prit place sur ce dernier tout en ouvrant le dossier devant elle. « Des indices Watson ! » Commença-t-elle en relevant brièvement les yeux vers Enzo avant de replonger dans sa lecture. Lui faisant ensuite signe de s’approcher d’elle, Arizona pencha le dossier de sorte à ce qu’il puisse le consulter également. « Par exemple … Cet officier a fait quelques récents voyages en direction d’Hawaï, j’aimerais bien savoir pourquoi parce que s’il est surveillé pour ses déplacements c’est que ça ne devait pas être pour une Lune de Miel. » Lâcha-t-elle en redressant la tête vers le militaire, s’éloignant de quelques centimètres pour ne pas provoquer une nouvelle gêne chez le jeune homme. « Je suis une fouineuse Enzo, toutes les informations sont bonnes à prendre mais ce n’était pas mon intention de t’attirer des problèmes. » S’excusa-t-elle plus sincère et sérieuse qu’auparavant, son regard ne lâchant plus celui de l’Italien comme pour appuyer ses paroles.