Ce n’était pas souvent, mais il arrivait à Paris d’avoir soudain des envies de boire à s’en foutre la tête en l’air. Il avait trainé sans but avant apercevoir l’Awesome, toutes personnes à New York avaient déjà entendu parler de cet endroit, à moins d’être aveugle et sourd.
Au bout d’une heure et quelques tequila plus tard, Paris ne savait plus où il se trouvait et la fille à la chevelure de feu qui se trouvait près de lui semblait la personne idéale pour écouter son histoire de mec bourré. « Voyez, je suis né dans le Colorado, genre l’état dont tout le monde se fout et le truc c’est que là-bas les gamins se croient importants, surement pour oublier que leur pays se fichent complètement d’eux. Bref, quitte à être la victime de mon pays, je l’étais aussi pour les balèzes de ma classe, j’étais la tête de turc de tout le monde. Je me souviens de ce gamin, Harry, qui m’a dit un jour « Hey, dis donc, ta mère, elle a jamais eu des gosses normaux ? » Ok, je suis aussi une victime dans ma famille mais y’a des limites, je voulais le frapper et tout ce que j’ai réussi à faire c’est pleurer et aller me cacher dans les toilettes et ça a duré pendant tout mon enfance. C’est à ça que je devrais la résumer si on me le demandait. J’ai été maltraité aussi bien mentalement que physiquement, on m’a dit que j’étais surement gay parce que j’étais trop proche de ma mère, non mais sérieusement… » Sur ces mots, il détacha son regard de la rousse et commanda une nouvelle tequila.

Ashton était en train d'écouter les tribulations d'enfance d'un inconnu qui se trouvait assis à côté de lui. Elle trouvait ça un peu déplacé, d'abord parce que le fait que ses camarades pensent qu'il ai été gay ne concernait que lui, et surtout parce qu'elle ne pensait pas être d'humeur à écouter ça alors que de son côté, elle avait beaucoup à penser. C'est donc d'abord d'un ton moqueur qu'elle répondit. « Wow. » Alors que son employé servait une téquila à l'inconnu, la rousse se redressa sur son tabouret et se servit à l'abri des regards, un shot qu'elle but d'un coup sec. De l'eau, mais personne n'était obligé de le savoir. « Moi si je devais résumer ma vie, aujourd'hui, avec toi, je dirais que c'est d'abord des rencontres, des gens qui m'ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, où j'étais seule chez moi, et c'est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destinée. » Cette tirade terminée, elle décida de contre-attaquer avec son enfance à elle. « Moi j'suis née dans une famille heureuse, une famille unie, j'faisais des randonnées dans le désert et on regardait Battlestar Galactica comme si c'était une annonce du Président. C'était cool, j'dois bien l'avouer, j'ai une ribambelle de frères et soeurs à qui j'ai plus ou moins fait la misère, et j'voulais devenir pilote dans l'Air Force, comme mon père. Mais l'école, moi aussi c'était mon gros problème. Pas à cause des cons, à cause des cours, j'suis hyperactive alors impossible de se concentrer correctement pendant plus de dix minutes, au début ça a été l'enfer. » Elle leva son verre vide pour trinquer avec l'inconnu. « Si c'était ta question, ton enfance craint beaucoup plus que la mienne. Cheers ! »

A vrai dire Paris ne s’attendait pas du tout à ce que la fille à côté de lui réponde, généralement dans les bars, on laissait le mec bourré parler tout seul et il fût assez surprit de voir que ce n’était pas le cas pour tout le monde. En entendant son enfance, il finit par se rendre compte qu’il la regardait avec des yeux ronds, la bouche légèrement entre ouvert, bavant de jalousie d’une enfance comme la sienne. « Des randonnées dans le désert ? Un père pilote de la Air Force ? gosh, le méga rêve ! » Mais ce qu’il avait retenu le plus était « une famille heureuse », il aurait tout donné pour être un peu plus apprécié au sein du clan McDaniels. Il trinqua contre son verre vide, il rencontrait rarement des gens, encore moins dans des bars, mais parler avec des inconnus lui faisait du bien, même s’il devait avoir de l’alcool dans le sang, il se sentait comme Raj’ dans The Big Bang Theory avec son problème pour parler aux femmes, sauf que lui c’était un peu avec tout le monde. Il avala cul sec son verre et tourna de nouveau son regard vers la rousse « Moi c’est Paris, désolé pour le passage sur l’enfance, je raconte pas ce genre de chose d’habitude ».

Bien vite, l'inconnu répliqua en déclarant que son enfance avait dû être un rêve. C'était le cas, en fait, ça avait bien été la plus belle enfance qu'elle aurait pu avoir et elle aurait adoré pouvoir offrir la même à ses enfants. Les ballades, les brunchs du dimanche en famille, c'était la perfection à ses yeux. C'était surtout le réveil qui avait été brutal. « Plutôt pas mal, ouais. » se contenta-t-elle de répondre avec un petit sourire nostalgique. Dès qu'il eut bu son verre, le jeune homme se tourna vers elle et se présenta finalement. « Ashton. Aucun problème. » dit-elle avec un léger sourire en se tournant de moitié vers Paris pour le regarder. « Tu parles de ça parce que c'est défaitiste, je suis sûre qu'il y a eu des moments cool dans ton enfance. Tous les gosses vivent des moments cool. » reprit-elle en haussant les épaules, commandant cette fois-ci un coca à son employé.

Paris afficha un sourire sympathique « C’est pas facile de sortir de son enfance parfois. » Il reposa son verre vide sur le bar, décidant d’en rester là pour l’instant avec l’alcool. Après s’être présenté, il apprit que la jeune femme à ses côtés se prénommait Ashton « Enchanté ».
Il chercha un moment dans sa mémoire un moment cool dans son enfance, faisant alors une sorte de grimace, expression de visage qu’il avait quand il fouillait au fin fond de sa mémoire. « Les seules moments cool c’est les cours de cuisine de ma mère, c’est tout ce qui me vient en tête pour l’instant ». Il lâcha un petit rire et se sentit débile pour ce qu’il venait de dire. Il commanda un verre d’eau pour rafraichir son corps un peu trop surchauffé par l’alcool, bien que cela soit une mauvaise idée, l’eau faisait vomir, mais il courait vite et les toilettes n’étaient pas si loin, mais qu’importe, au pire il fera une galette sur le sol et ferait fuir Ashton. Le blond se tourna vers elle et vit soudain que son visage avait tout à coup changé d’expression « Hey… ça va ? ».

Ashton appuya sa première remarque concernant l'enfance d'un hochement de tête et sourit en voyant qu'il mettait autant de temps à trouver un moment heureux dans son enfance. Ashton, elle, n'avait qu'à plonger dans ses souvenirs n'importe quand jusqu'à ses dix-sept ans pour tomber sur quelque chose d'heureux qu'elle avait vécu. Finalement, il trouva et lui avoua aimer les cours de cuisine de sa mère. « Eh, c'est déjà... » Soudainement, ses doigts attirèrent son attention et elle fronça les sourcils en terminant sa phrase. « ... ça. » Non, non, une crise maintenant ? Elle n'en avait pas eu depuis des semaines ! Elle posa brusquement son verre sur le bar et prit le sac qu'elle avait toujours près d'elle pour en sortir des comprimés. La boite fit de la résistance mais malgré son infirmité, elle réussit à ouvrir la boîte. Elle fit glisser maladroitement quelques cachets dans la paume de sa main et, alors que Paris lui demandait si ça allait, elle hocha la tête et lui fit signe d'attendre, mettant les cachets dans sa bouche et faisant passer le tout avec le coca frais qui venait de lui être servi. Elle lui répondit dès qu'elle eut repris son souffle.« Oui, c'est juste... des tremblements, je suis habituée. » Triste erreur. Parce que ce n'était clairement pas son hyperactivité qui se manifestait.

Si ce n’était que des tremblements ça allait surement passer alors, il se rassura quand elle sortit une boite de cachet de son sac, si elle les avait toujours sur elle, c’était que ça devait arriver plus souvent que Paris ne pouvait le penser. Le blond voulu lui répondre quelque chose et se rendit soudain compte que son cerveau fonctionnait au ralenti « Espèr… » Wooooh what the fuck ? Il se sentait comme un gamin de 2 ans qui apprenait à parler. Il prit une profonde inspiration, se concentra un instant et réessaya « J’espère…… de… » Il poussa une sorte de grognement, il n’arrivait plus à former ses mots, il les avait en tête, mais ça ne voulait pas sortir. Paris essaya par les gestes, montrant Ashton du doigt puis levant son pouce vers le haut.
Il pensait que c’était juste l’alcool quand tout à coup le bruit des discussions autour de lui se firent de plus en plus lointaine, un léger bourdonnement recouvrant le tout, sans même réfléchir, il lança « Entend ?.... y’a…. bruit ». Il se sentit alors débile, parler comme un gamin le gênait vraiment, il aurait voulu se terrer six pied sous terre et ne jamais en ressortir. Faire autant d'efforts pour tenter de prononcer des mots le fatigua, il avait l'impression d'avoir prit cinquante ans en pleine face, et ce bruit, dieu que c'était agaçant.

Alors qu'elle venait tout juste d'avaler ses cachets et de répondre à Paris, celui-ci tenta à son tour de prononcer quelques mots. Un échec. Surprise, Ash se tourna de nouveau vers le jeune homme et lui lança un regard interrogatif. Elle suivit avec intérêt, en fronçant les sourcils, sa seconde tentative, mais elle fut tout aussi vaine. « Wow, c'est moi qui deviens folle ou c'est toi qui a trop bu ? » dit-elle en riant. Lorsqu'elle rejeta sa tête en arrière, un vertige se fit sentir et par réflexe, elle s'accrocha au bar, ce qui lui permit de ne pas tomber à la renverse. « Non, sérieux, j'ai pas bu quand même ?! » s'exclama-t-elle à l'intention de Paris qui semblait de son côté très perturbé lui aussi. Non, elle avait un coca entre les mains, et avant ça un shot... d'eau ? Et avant ? Elle soupira, elle se sentait soudainement complètement perdue, de quoi elle parlait déjà ?

Perdue dans ses pensées, elle fut interrompue par Paris qui tenta de nouveau de parler. Elle avait l'impression d'être Zorro, il était son Bernardo en train d'essayer de parler. Hein ? « De quoi, quel bruit, la musique ? » demanda-t-elle en fermant un oeil et en penchant la tête comme si ça l'aidait à mieux voir Paris ; c'était le cas, & le pire c'était qu'elle s'en rendait à peine compte.

A sa question rhétorique, Paris choisi la deuxième option, évidement qu’il avait trop bu, mais il garda un visage étonner, il s’était pris des cuites pire que ça et jamais il n’avait développé ce genre d’effet secondaire. Il abandonna l’idée de lui répondre, les mots ne voulaient pas sortir, il jura intérieurement. Il attrapa la main d’Ashton par pur réflexe pour la retenir quand elle la vit qu’elle faillit dégager de son tabouret. C’était quoi ce bordel ? Tout allait bien quelques minutes plus tôt et ils se retrouvaient soudainement à agir bizarrement. Le blond n’était pas parano, mais il pensa tout de suite au coup de la drogue mit dans son verre. Okay mec, tu regardes trop la télé. Il haussa les épaules à sa question, que pouvait-il en savoir ?
Le bourdonnement fût accompagné d’un léger sifflement qui lui tira une énième grimace, il ferma les yeux un instant, il avait envie de se foutre des baffes, il était surement en train de rêver et il était sûr qu’il allait se réveiller dans son lit, enroulé comme un rouleau de printemps dans sa couette. Mais quand il les rouvrit, Ashton était toujours en face de lui. « Nom… bourdldldl.. » Aaaaaaaaah stoooop ! Il fallait que ça s’arrête il allait devenir cinglé, Paris passa sa main sur son visage, puis regarda de nouveau la jeune femme, montrant du doigt son oreille et imitant le bourdonnement d’une guêpe.

C'était surréaliste, et surtout très désagréable. Les tremblements, elle pouvait gérer, elle en avait depuis qu'elle était toute petite et même si elle ne comprenait pas leur provenance, ça ne la faisait pas paniquer pour autant. Les vertiges, un peu moins, et son esprit si embrouillé et confus ! Paris la retint quand elle faillit tomber et il lui adressa quelques mots qui la laissa dubitative. « Quoi ?! » ne put-elle que lui répondre en plissant une nouvelle fois les yeux. Paris semblait réellement mal en point également, c'était comme si... ils avaient été drogués. Mais c'était impossible ! Elle était la putain de patronne de ce bar, c'était impossible.

Au bout d'un moment, Paris essaya de lui faire comprendre ce qui le perturbait, et elle mit un temps incommensurable à comprendre la signification de ses bzzzzzz maladroits. Elle secoua la tête plusieurs fois avant de la relever pour poser les yeux sur Paris. « Un endroit calme. Ok, euuuh... mon bureau. Je vais avoir besoin de toi. » fit-elle en tentant de ne pas rouler des yeux, faisant allusion à ses vertiges qui ne l'avaient pas quittée. D'ailleurs, une forte vague lui arriva et elle s'accrocha subitement de toutes ses forces au bar devant elle, écrasant son ventre de femme enceinte - qu'elle avait oublié - contre celui-ci en gémissant et en posant sa tête sur le bois frais. « Uuuungh.. Je pourrais jamais me lever... »

Il savait qu’elle ne le comprenait et pourtant il continuait d’essayer de se faire comprendre, têtu l’animal. Il finit finalement par déclarer forfait contre son cerveau en compote, il avait l’impression d’avoir fait un marathon de mathématique de le sentir fondre de seconde en seconde, Paris compatit alors pour les enfants en bas âge qui commençaient à parler, prononcer les mots devait être une vrai plaie.
Elle lui annonça alors que pour avoir un endroit calme ils devaient aller dans son bureau, il comprit alors qu’elle travaillait ici. Il la fixa un instant, elle semblait avoir des vertiges et fit très attention à ce qu’elle ne dégringole par de son tabouret, ce qui ne devrait pas arriver vu comment elle s’accrochait au bar. Quand elle lui dit qu’elle ne pourrait pas se lever, Paris se leva, et sans lui demander la permission, de toute façon, il ne pouvait pas, il passa le bras d’Ashton autour de son cou, et posa délicatement sa main sur sa hanche, l’emportant en direction du bureau dont elle lui indiquait le chemin au fur et à mesure qu’ils marchaient. Lentement mais surement, ils atteignirent l’endroit. Le jeune homme poussa la porte et alla aider la rousse à s’assoir à son bureau, il fit un rapide demi-tour pour fermer la porte. Un silence s’installa et sans demander encore une fois, il s’empara d’une feuille et d’un crayon, c’est alors que Paris se rendit compte que coucher les mots sur du papier était aussi difficile que de les prononcer. Sans réfléchir, il commença à dessiner qu’il ne pouvait pas parler et ce qu’il entendait, il était difficile d’expliquer pourquoi avec un simple dessin, mais au moins, il avait moins de problème pour s’expliquer comme ça vu qu’il le faisait depuis tout petit, il dessinait avant même de savoir parler. Paris poussa le dessin vers Ashton et planta son regard dans le sien.

Ashton tremblait de tout son corps et ça prenait des proportions que ça n'aurait normalement jamais dû prendre après avoir avalé l'un de ses cachets miracles. Certes, elle était enceinte et ça pouvait peut-être altérer un peu les choses, mais pas à ce point ! Son esprit papillonnait entre se demander où elle était & se demander ce qu'elle faisait là, ce qui était sensiblement la même chose bien qu'elle soit incapable, dans l'état actuel des choses, d'en établir exactement les différences et les similitudes. Bref, ça allait pas fort.

Sentant la poigne de Paris l'entourant pour la soutenir, elle se laissa faire comme une poupée et, une fois debout, dût fermer les yeux pour ne pas basculer en arrière à cause des vertiges qui la reprenaient. Et évidemment, tout le staff était tellement occupé dans le bar qu'aucun employé ne prêtait attention à cet inconnu qui transportait leur patronne mal en point dans son bureau ! Peu importait. Ashton se sentit simplement guidée jusqu'à la chaise de son bureau et s'y écrasa plus qu'elle ne s'y assit, tentant de garder l'engin statique alors qu'il n'y avait que sa perception qui faisait tout bouger. « Mais qu'est-ce que tu... » demanda-t-elle en entrouvrant les paupières sur Paris qui était en train de faire des dessins derrière la facture de champagne du mois. Elle allait protester mais le jeune homme lui mit le dessin sous les yeux en la regardant avec insistance. « Wah, tu dessine bien... » ne sut-elle que répondre, dubitative devant le schéma du jeune homme. « Mah qu'est-ce que c'est ?! On dirait une soucoupe... » Les aliens les attaquaient, c'était tout ce qu'elle pouvait déduire du dessin dans son état.

Il avait senti les tremblements en la portant, en fait, elle était pire qu’un vibro (Sorry xD ), mais il n’y avait tout simplement pas fait attention, le plus important était d’aller dans un endroit plus calme. Ils allaient apparemment aussi mal l’un que l’autre.
Une fois dans son bureau et assise, Paris avait attrapé le premier papier, dessinant alors ce qu’il ne pouvait dire et envoya la feuille du côté de la rousse. Le jeune homme laissa échapper un rire quand elle compara son dessin à une soucoupe. Personne n’avait jamais aussi mal interprété l’un de ses dessins, Paris se pencha pour regarder ce qu’il avait et se dit qu’elle devait être sérieusement atteinte pour voir une soucoupe sur ce qui était un visage. Il se cala de nouveau dans son siège et la regarda intensément. « Je… » Se concentrer sur chaque mot était un defi, ce qui d’ordinaire venait naturellement devenait un exercice sportif. « Peux…. pas », il leva les yeux au ciel, enfin, au plafond, un instant puis lâcha le dernier mot comme si c’était l’ultime mot de sa vie «… parler ! ».
Le blond poussa un long soupir de soulagement. Ce n’était pas vraiment une explication, car il pouvait parler, c’était juste les mots qui ne voulaient pas venir. Il continua de la regarder, Ashton avait une tête affreuse. Il passa une main dans ses cheveux tout en rejetant la tête en arrière, et remarqua alors quelques cheveux restés dans sa main. Tout le monde perdait ces cheveux, c’était indéniable, mais en perdre autant que lui d’un coup, il se posa des questions.. Symptôme étrange ? Paranoïa ? Paris fixa alors sa main, un air choqué sur le visage.

Ashton avait l'impression que sa tête était enserrée dans un étau et que ses pensées y étaient compressées tellement fort qu'elles finissaient par se confondre les unes avec les autres, rendant le fil de ses idées incompréhensible. C'était cependant au niveau de ses paroles que son nouvel ami semblait ne pas s'accorder, et il mit un temps incommensurable à lui faire comprendre qu'il n'arrivait pas à parler. Elle eut déjà du mal à le suivre dans la continuité de sa phrase et lorsqu'il eut fini, elle haussa les sourcils. « Oui, ça j'avais com-pris... » fit-elle, buchant sur la dernière syllabe lorsque sa lèvre s'étira brusquement sur sa joue dans un tic étrange. Elle fit les gros yeux, mais rien ne se passa. Elle soupira, toujours confuse, et se demanda si elle ne venait pas d'imaginer ce mouvement.

Lorsque son regard se fixa de nouveau sur Paris, sa bouche s'entrouvrit sous l'effet de la surprise et elle resta pantelante un instant avant de plisser les yeux. « Oh mon... » Paris perdait ses cheveux ! Elle cligna des paupières et tenta d'abord de se lever, sans succès. « Dude, what the fuck ? » (c'est mieux sans la traduction xD) s'exclama-t-elle avant de reprendre, sentant de nouveau sa lèvre bouger lorsqu'elle parlait. « Il faut t'emmener à l'hôpital ! » s'exclama-t-elle alors que, cette fois-ci, c'était les muscles des coins de ses yeux qui se mettaient à faire les fous.

Elle aurait pu lui dire avant qu’elle avait comprit, le couper dans sa phrase, ça lui aurait évité d’avoir le cerveau en bouilli à sortir quatre mots. Il aperçut un léger tic au niveau de sa lèvre quand elle prononça la dernière syllabe du mot. S’il n’avait pas autant préoccupé par ses problèmes, il en aurait probablement rit, même si ce tic s’ajoutait surement à sa liste de tremblement et vertige.
Il fût tout à coup tourner vers un autre problème : ses cheveux. Une petite touffe se trouvait dans sa main. Ses beaux cheveux blonds étaient tout simplement en train de se faire la malle, il ne comprenait plus rien à ce qui lui arrivait. Paris releva la tête quand elle dit « Oh non… » En l’espace de quelques secondes, il avait réussi à oublier la présence d’Ashton, bien trop focalisé sur ses petites mèches blondes. Elle proposa, enfin non, elle ordonna qu’il fallait qu’il aille à l’hôpital, le jeune homme la fixa un instant avant d’exploser de rire. Elle était incapable de se lever et elle faisait des choses étranges avec son visage quant à lui, il ne pouvait tout simplement pas parler, comment expliquer ça à un médecin ? Ils avaient l’air de deux cinglés, Ashton d’une droguée en manque, et lui d’un mec quasi sourd, muet qui sortait de chimiothérapie. Paris reprit son sérieux, et fit non de la tête. Il reprit sa feuille et dessina un hôpital, puis un peu plus loin deux bonhommes en train de marcher, faisant alors une grande croix sur les jambes d’Ashton pour lui faire comprendre qu’elle ne pouvait pas marcher. Sauf si elle appelait une ambulance.

Ashton devait probablement avoir basculé dans une autre dimension, parce qu'elle ne comprenait absolument pas ce qui était en train d'arriver. Et Paris qui riait ! Il était incapable de parler, avait des abeilles plein les oreilles et, le comble de tout, perdait ses cheveux, et il se tapait une barre ! Se rendant compte qu'elle n'arriverait jamais à se redresser et encore moins à se lever, Ashton se laissa retomber contre le dossier de son siège et ne rouvrit les yeux que lorsque Paris lui montra un nouveau dessin, qu'elle mit encore une nouvelle fois à comprendre. « Ok, d'accord, ok. » balbutia-t-elle avant que sa tête ne flanche dans un nouveau vertige et que son regard s'arrête finalement sur le bonnet que sa soeur avait laissé dans son bureau quelques jours auparavant. Elle s'en saisit avec difficulté et le jeta aveuglément à Paris. « Tiens, peut-être que ça les gardera en place. » jeta-t-elle avant de pouffer, effectivement ce n'était pas le meilleur moment pour faire de l'humour. « On disait quoi ? Ah oui. » Elle se saisit du combiné près d'elle et resta un instant à l'observer vibrer entre ses doigts à cause de ses tremblements. Lorsqu'elle reprit connexion avec la réalité, elle se rendit compte que ses tics faciaux reprenaient sans qu'elle ne puisse l'empêcher. Appeler une ambulance, appeler une ambulance. « Euh, c'est quoi le numéro ? » demanda-t-elle, penaude et confuse.

Ashton lui tendit un bonnet. Il resta perplexe un moment avant de le prendre et de le mettre sur sa tête, il devait avoir une bonne tête débile maintenant. Il sortit son portable pour se regarder dans le reflet de l’écran et explosa de rire une nouvelle fois. Mais ça pouvait lui passer l’envie de passer les mains dans ses cheveux, pourquoi pas.
Il reprit son sérieux devant les tremblements d’Ashton quand elle saisit le combiné, il n’y avait rien de drôle à rigoler des symptômes qu’ils avaient, après tout, ils ne savaient pas du tout ce qu’ils avaient et qui sait, ça pouvait vraiment être grave. Plus les minutes passaient plus les tics sur son visage s’accentuait, il lâcha une nouvelle fois un petit rire, il ne pouvait pas s’en empêcher, en même temps, il valait mieux en rire qu’en pleurer. Paris méritait une baffe dans ses moments-là.
Il écrivit les trois chiffres sur le papier. Il n’eut aucune difficulté à écrire neuf cent onze, et se réjouit de savoir qu’il pouvait dessiner et écrire des chiffres. Super, il irait super loin avec ça.
En attendant qu’elle finisse de passer l’appel, Paris en profita pour jeter un œil autour de lui, il avait vraiment envie de toucher à ses cheveux, menant un combat infernal contre ses mains qui avaient juste envie d’arracher le bonnet et de gratter sa tête.

Ashton mit un bon moment avant de comprendre que c'était le numéro des urgences que lui tendait Paris, et elle mit encore plus longtemps à le composer, trop tremblante pour toucher les touches qu'elle devait toucher et devait réitérer l'opération une bonne dizaine de fois pour enfin entendre le jingle du 911 dans le combiné [le 911 a un jingle ? x)] Au bout de quelques minutes, une voix humaine se fit entendre à l'autre bout du fil et Ashton fut prise de court un instant, ne sachant plus pourquoi elle appelait. « Euh... oui, bonjour. Euh... » Elle posa son coude sur son bureau pour que sa main soutienne sa tête et reprit ses esprits lorsque son regard tomba sur Paris, qui avait une tête hilarante avec son bonnet sur la tête. « Y'a un problème, ici. » ne sut-elle d'abord qu'expliquer. Lorsque l'homme lui demanda plus d'informations, elle cligna des yeux plusieurs fois convulsivement et soupira. « Ca va pas du tout, euh... Mon ami est en train de perdre ses cheveux, et il arrive pas à aligner deux mots, et il entend des bzzzzzz. C'est ça hein ? Bzzzzz. » fit-elle en levant les yeux vers Paris pour l'en tenir témoin. « Et moi euh, je tremble, je suis hyperactive mais c'est pas du tout ça, j'ai des vertiges, j'ai du mal à mettre euh, mes idées en ordre, et euh... » Mince, il y avait autre chose ! Pourquoi ne s'en souvenait-elle pas ? « Oh, oui ! Et je suis enceinte. » lâcha-t-elle lorsque sa main caressa son ventre et qu'elle heurta sa petite proéminence. « Hm... hm hm... à l'Awesome, c'est un bar sur Broadway... quoi ? ... d'accord, d'accord, oui, merci. » Ashton raccrocha finalement et lança un regard on ne peut plus sérieux à Paris. « Mec, on est en quarantaine. Ils vont envoyer une équipe mais apparemment ils sont débordés, ils ont dit d'allumer la télé pour plus d'infos. » Elle ouvrit son tiroir et resta pantelante un instant. « J'ai pas de télé... Merde. » fit-elle sans même percuter qu'elle avait un ordinateur devant elle et une télévision accordée aux caméras de surveillance au-dessus d'elle, au bout du bureau. Et puis pourquoi elle cherchait une télé dans son tiroir, de toute façon ?

Après un moment à la regarder galérer pour taper le numéro de téléphone, Paris fixa un point imaginaire sur le bureau, le bourdonnement dans ses oreilles était plus intense quand il ne se concentrait pas pour comprendre quelque chose. Il venait de se fermer complètement au monde qui l’entourait et le jeune homme eut soudain peur pour lui, incapable de parler, audition faible et sans cheveux sur le crâne, sa vie allait devenir un enfer si personne ne trouvait une solution rapidement.
Paris releva la tête, essayant d’entendre de nouveau la voix d’Ashton, hochant la tête pour confirmer les bzzz qu’il entendait. Le blond, futur chauve, resta inexpressif quand elle avoua être enceinte au téléphone, mais intérieurement il se senti vraiment mal pour elle et il espérait vraiment que les symptômes ne s’aggravent pas, il connaissait Ashton depuis vraiment très peu de temps, mais il éprouvait déjà beaucoup de sympathie pour elle. Et en y pensant, il était plutôt content de se trouver avec elle, aussi malade qu’il pouvait être, il tenait encore sur ses jambes et pouvant la retenir si elle chutait.
Il avait commencé à se balancer un peu sur sa chaise pour s’occuper, et failli se retrouver les quatre fers en l’air quand elle lui annonça qu’ils étaient en quarantaine, un son étrange sorti de sa bouche quand il voulut crier un « quoi ? ». Toujours sous le choc, il la regarda s’agiter autour de lui, pour avoir les idées confuses, son symptôme ne lui faisait pas défaut, il claqua des doigts pour la faire réagir et tapota l’ordinateur sur le bureau. Paris amena sa chaise alors à côté d’elle et regarda l’écran, il était incapable de taper quoique ce soit, il pouvait vous peindre une scène de la révolution française, mais était bien incapable d’écrire son alphabet.

Ashton était en train de se laisser à la panique mais même ça, elle était trop confuse pour s'en rendre compte. Elle avait du mal à mettre ses idées en place et il lui fallut un bon moment pour trouver quoi googler pour pouvoir regarder les dernières nouvelles de la journée. Finalement, elle joua la première vidéo en live à disposition, celle de CNN, et son regard s'y accrocha. Au début, elle ne fut pas sûre de comprendre, mais les paroles du reporter finirent pas s'ancrer dans son esprit. Une épidémie... des morts... Ashton eut un haut le coeur et un nouveau vertige la saisit, et elle posa une main sur son ventre en sentant son coeur se serrer.

Son regard dériva sur Paris mais elle ne fut pas sûre qu'il ai compris ce dont il retournait dans la vidéo. Puis une idée éclata dans son esprit et elle prit la parole. « Tu connais le langage des signes ? » demanda-t-elle à tout hasard : ce serait au moins un moyen de communiquer, bien que même si elle le parlait depuis très longtemps, elle n'était pas sûre de pouvoir mettre ses doigts et ses mains comme elle le voulait avec ses tremblements et ses vertiges. Son esprit sauta donc de cette idée à une autre et elle revint bien vite sur la dangerosité de ce qu'ils étaient en train de vivre. « Gars, on est grave dans la merde. Je suis trop jeune pour mourir moi, j'attends des jumeaux, je... » Elle ne savait même pas si elle parlait à Paris ou à elle-même, elle était totalement ailleurs à délirer et à paniquer.

Paris se leva pour se rapprocher de l’écran, posant une main sur le siège d’Ashton et se penchant en avant. Il avait peut-être un problème pour parler, mais ses yeux et ses oreilles étaient encore en parfait état de marche et il ne voulait pas perdre une miette de ce qui se disait dans la vidéo.
Au fur et à mesure que les images défilaient, la bouche du blond s’ouvrait de plus en plus. Des morts ? Soudainement il aurait voulu être assit avant que ses jambes ne se dérobent sous son poids. Il aurait bien voulu retourner s’asseoir, mais le jeune homme ne pouvait plus bouger, pour la première fois, il ressentait la peur de mourir et pour Ashton qui était enceinte, ça devait être encore pire.

Ashton lui demanda alors s’il connaissait le langage des signes. Ce n’était pas une mauvaise idée en soi, mais admettons qu’il le connaisse aurait-il seulement été capable de former les mots avec ses mains ? Paris n’en était si sûr. Il secoua puis baissa la tête pour regarder ses pieds. Il n’y avait rien à faire d’autre qu’attendre. Il hocha la tête pour confirmer qu’ils étaient dans la merde, et la fixa un moment durant sa mini tirade dans laquelle est avoua qu’elle attendait non pas un, mais deux bébés.
Paris se mordit la lèvre, il se mit à penser au fait que c’était peut-être lui qui avait été porteur du virus et qui lui avait refilé. Mais c’était impossible, leurs symptômes s’étaient déclenchés en même temps. Au final, il reprit sa feuille de papier et dessina deux bébés et réussit à écrire tant bien que mal « Name ? » au-dessus. Il n’y avait rien d’autre à faire que papoter de toute façon.

Ashton ne pouvait pas mourir, c'était impossible : elle allait rentrer chez elle ce soir, en bonne santé, c'était... God, et si elle faisait partie des quelques cas trop atteints, et si sa grossesse décuplait ses symptômes ? La jeune femme, prise de panique, fut confortée dans cette idée lorsque son oeil gauche se mit à cligner frénétiquement, ne pensant même pas que ça ne pouvait être dû qu'à la panique.

A l'évidence, Paris ne s'y connaissait vraiment pas en langage des signes ; tant pis, elle n'était même pas sûre d'avoir pu communiquer comme ça de toute façon. Bien qu'elle pensait cette connaissance acquise, elle se retrouvait désormais dans un grand brouillard où elle n'était plus sûr de savoir même épeler son propre prénom. Ca n'empêcha cependant pas son nouvel ami de se remettre à dessiner avant d'écrire maladroitement "name". Ashton réfléchit un instant avant de faire le rapport avec les bébés, majoritairement parce qu'elle n'avait une nouvelle fois pas du tout compris le dessin du jeune homme, et haussa finalement les épaules. « Euh, je sais pas trop, on en a pas vraiment parlé et puis, on connaît pas les sexes. » Elle réfléchit, mais c'était une véritable épreuve. « Pour une fille, peut-être... Rose. Pour ma mère, elle s'appelle Roslyn. » expliqua-t-elle, surprise que dans tout ce brouillard cette idée d'appeler son enfant d'après sa mère reste aussi intacte.

Ne pouvant finalement pas se sortir cette idée de la tête, elle releva un regard vers Paris. « ... Tu crois qu'on va mourir ? » demanda-t-elle en lui lançant un regard paniqué. « Ce serait glauque... Enfin, no offense hein, t'es sympa et tout, mais je te connais à peine, c'est vraiment pas dans ces conditions que je pensais rendre l'âme tu vois... » continua-t-elle, se mettant à partir dans son délire alors qu'elle se faisait violence pour contenir ses tremblements.

Détourner une conversation, même ça il n’en était pas capable. Il avait posé une question grâce à un dessin, mais restons réaliste, aucun des deux n’étaient capable de tenir une conversation, Ashton perdait quasiment la tête et Paris ne pouvait rien dire. Il leva le pouce avec un sourire d’idiot, et s’infligea mentalement une baffe sur tête.
Pour réponse à sa question, Paris haussa les épaules. Le blond n’était pas devin, il y avait peut-être eu des morts à cause de symptôme plus grave, Paris s’estimait chanceux, perdre ses cheveux, devenir muet en quelque sorte et ce bourdonnement qui continuait, il ne voyait pas comment il pouvait mourir. Par contre dans le cas d’Ashton, ses tremblements et ses vertiges pouvaient la mettre en danger n’importe quand, sauf si elle restait assise sur sa chaise.
Il laissa échapper un éclat de rire, il n’avait aucune raison de se vexer pour ce qu’elle venait dire, après tout, lui non plus ne s’imaginait pas sa mort ainsi. Par des gestes, il lui fit comprendre que c’était réciproque. En bougeant son poignet, il remarqua alors qu’il lui manquait quelque chose, il remonta la manche de sa chemise, mais il avait disparu. Paris se leva d’un bond et se dirigea d’un pas rapide vers la porte, mais il s’arrêta, la main sur la poignée. Un son étrange sorti de sa bouche et qui ne voulait rien dire d’autre que « Fait chier ! ». Il avait surement dût glisser de son poignet quand il aidé Ashton à se lever et l’emmener dans le bureau. En apparence il s’agissait un bracelet tout simple, le truc fait main que l’on peut trouver pour un dollar dans certaines boutiques, mais pour Paris il voulait dire bien plus, c’était leur promesse à Romy et à lui quand ils avaient quitté l’hôpital.