Pablo le savait. Dès l’instant où il avait reposé ses lèvres sur celle de Bonnie pour la première fois, il avait su que ça ne durerait pas. Quelque chose s’était brisé entre eux lorsqu’il l’avait quittée il y a quelques mois, et même s’il éprouvait toujours des sentiments pour elle, il ne croyait plus vraiment en « eux ». Leur histoire aurait put être belle, mais le comportement de la jeune femme l’avait fait fuir une première fois. Puis il y avait eut cette soirée à l’Awesome. Cette soirée durant laquelle Bonnie avait voulu se venger, mais s’était très vite prise à son propre jeu. A cet instant, ils s‘étaient retrouvés unis comme avant, comme s’ils ne s’étaient jamais quitté. Et ce semblant de renouveau dura bien plus longtemps qu’un soir… Seulement voilà, puisque Pablo n’avait visiblement pas le droit d’être heureux avec Bonnie une bonne fois pour toute, il avait découvert qu’elle l’utilisait, littéralement. La jeune femme ne pouvait pas avoir l’homme qu’elle convoitait, alors elle s’était rabattue sur le jeune pilote qui avait pourtant cru dur comme fer qu’elle était devenue une personne fréquentable. Mais il s’était définitivement trompé. Bonnie était toujours cette peste manipulatrice et provocatrice qu’il avait quitté quelques mois plus tôt tant elle était insupportable. Maintenant tout était fini. Pour toujours. Il avait été assez bête pour se reprendre dans ses filets une seconde fois, mais il avait su en tirer des leçons. Plus jamais il ne laisserait Bonnie l’approcher. Elle était bien trop dangereuse pour lui.

La découverte du stratagème de la jeune femme était encore fraîche, et quoi qu’il en dise, Pablo avait du mal à la digérer. Mais il n’était pas seul. En toutes circonstances, il avait quelqu’un sur qui compter, son amie, sa confidente, en quelque sorte. Et bien sûr, il s’agissait d’Aladiah. Ils se comprenaient et ils s’appréciaient énormément, bien au-delà de leur simple relation professionnelle. Il n’était donc pas étonnant d’apprendre qu’en ce soir de février, Pablo se préparait à sortir pour rendre visiter à son amie. Malgré son visage fermé et son air sévère, le jeune homme était plutôt content et surtout soulagé de pouvoir partager cette soirée avec Aladiah. Il attrapa son blouson, ses clés, et prit la direction du garage dans lequel il avait pour habitude de garer son bolide lorsqu’il était chez lui.

En une dizaine de minutes à peine (le dépassement des limitations de vitesse aidant), Pablo atteignit la rue dans laquelle Aladiah habitait. Il gravit les escaliers deux par deux jusqu’à se présenter devant la porte d’entrée de son appartement. Là, il sonna et attendit patiemment que la jeune femme vienne lui ouvrir.

Une nouvelle soirée se préparait dans son appartement, tristement vide. Comme chaque fois, Aladiah réalisait l'impact de ses mots avec Elias, comment une simple phrase pouvait briser un lien si fort. Elle prit son portable pour savoir comment il allait et s'il comptait rentrer bientôt, sauf que sa seule réponse fut le répondeur, comme toujours. Elle commençait d'ailleurs à se demander s'il n'avait pas changer de numéro pour ne plus entendre parler d'elle. Comment pouvait-il lui donner un rein, et puis disparaitre pour une simple histoire de sentiments? Elle avait réellement du mal à le comprendre et lui en voulait autant à lui qu'à elle. « C'est moi... pour la centième fois. T'es un abrutit Elias ! Est-ce que pourrais au moins me faire savoir que tu es en vie, que tout va bien? C'est pas comme si tu venais d'avoir une grosse opération mais c'est tout comme, alors ça me rassurerait vraiment de savoir... » Un bip l’interrompait, signalant la fin de son message. Poussant un long soupire, elle lançait son portable sur le lit avant de donner un coup de point dans le mur, suivit d'un AÏE. Elle était ridicule, elle n'allait pas se faire de mal pour lui. Tôt ou tard, il réaliserait qu'il avait fait une erreur et il reviendrait comme si de rien était.

Finalement, elle passait un appel pour se faire livré avant d'aller s'installer devant son ordinateur. Quand elle ne savait pas quoi faire, elle s'occupait de la façon la plus logique qui soit, en se tenant au courant des nouveaux sportifs ou des nouvelles équipes nécessitant un sponsor. Il lui en fallait toujours plus, quelque chose qu'elle tenait sans aucun doute de son père, même si ces contrats actuels suffisaient amplement à l'entreprise. A peine sa recherche commencée, elle entendait la sonnette raisonner dans l'appartement. Rapide la livraison! Elle se levait donc, prenant son porte feuille au passage pour aller ouvrir la porte. S'il voulait la surprendre, il avait réussit. « Pablo?! Tu t'es reconvertit en livreur ? » Elle lui adressait un sourire avant de s'écarter pour le laisser entrer. Magnifique, elle portait un pantalon de training large et un simple t-shirt, si elle avait su qu'il passerait, Aladiah aurait clairement fait un effort vestimentaire. « Rentre, je t'en prie! Tu tombes bien, je viens de commander chinois, si ça te tente... » Machinalement elle passait ses mains dans ses cheveux, comme si cela pouvait suffire à ce qu'elle paraisse bien coiffée, à défaut d'avoir une tenue convenable. Se dirigeant dans le salon, elle refermait son laptop, pour le déposer sur la table basse. « Ça m'fait plaisir de te voir... » Aladiah lui adressait un sourire, avant de s'installer dans le fauteuil, l'invitant à en faire de même. Même s'ils appréciaient passer du temps ensembles, leurs métiers respectifs ne leur permettaient pas de le faire régulièrement. Soit, la joie passée de le voir, elle remarquait que le visage de son ami ne semblait pas aussi ravi que le sien. Avec une petite moue, elle préférait s'assurer d'emblée que tout allait bien. « Tout va bien? Tu n'as pas bonne mine...»

La première des réactions de Pablo lorsque la porte s’ouvrit fut l’incompréhension. Qu’est-ce que sa présence pouvait bien avoir à voir avec celle d’un livreur ?! Les yeux écarquillés, il finit tout de même pas répondre au sourire que lui offrait Aladiah, et entra qu’elle s’écarte pour pénétrer à son tour dans l’appartement. Même s’il ne venait pas souvent, le jeune homme aimait beaucoup cet endroit. Mais quelque chose lui disait que la présence d’Aladiah n’y était pas étrangère. En effet, lorsqu’il venait, il ne le faisait pas pour la déco ni pour l’ambiance qui régnait dans l’appartement, mais il le faisait pour elle. Pour la voir. Pour l’entendre parler de leur passion commune, et pour parler avec elle comme il pouvait le faire avec ses amis du milieu. Mais ce soir, il n’était pas venu ici dans cette optique ou du moins, pas directement. Son seul motif était de la voir, et de se changer les idées après ce que Bonnie lui avait (encore) fait subir.

Pablo remarqua rapidement la tenue un peu particulière de son amie, et cela n’eut pour seul effet que de le faire sourire un peu plus. Il avait tellement l’habitude de la voir bien habillée et pomponnée qu’il n’avait pas pu passer à côté de ce pantalon de jogging. Mais il ne pouvait pas lui en vouloir, sa visite à l’improviste avait aidé ! Et puis il ne trouvait pas ça désagréable ni même gênant, au contraire. Aucun doute n’était permis, ce soir ils ne parleraient pas « boulot ». « Tu tombes bien, je viens de commander chinois, si ça te tente... » Alors que le jeune homme enlevait sa veste pour la poser sur la première chaise qu’il avait croisée, il se retourna en haussant les épaules et en affichant une mine satisfaite. « Hm… Pourquoi pas ! Une proposition pareille, ça ne se refuse pas ! » répondit-il en s’efforçant d’avoir l’air enjoué. Mais bien sûr, son esprit était actuellement occupé par tout autre chose, et il n’avait de cesse de se torturer en ce disant qu’il avait tout simplement été stupide de croire que son histoire avec Bonnie pouvait repartir. Pourtant, Pablo était plutôt du genre volage, qui n’accordait pas beaucoup d’importance aux relations sentimentales, et qui préférait de loin s’amuser avec ses conquêtes d’un soir pour s’en séparer le lendemain. Il s’arrangeait en général pour trouver des filles sur la même longueur d’onde que lui, histoire de ne pas briser trop de cœurs. Mais avec Bonnie, c’était différent. Elle avait été sa seule véritable petite amie, et elle restait encore aujourd’hui la seule fille pour qui le cœur du latino chavirait. Mais c’était bel et bien fini, et il s’était fait avoir… une fois de plus.

« Tout va bien? Tu n'as pas bonne mine...» En s’installant à son tour dans le fauteuil, Pablo commença par acquiescer, tentant comme à son habitude de cacher ce qu’il en pensait réellement. « Oui oui, ça va ! Et toi alors ? » Néanmoins, le jeune pilote se rendit vite compte de son manque de crédibilité et afficha instantanément un sourire amer. Visiblement, Aladiah le connaissait bien mieux qu’il ne le pensait. « Ok… C’est Bonnie. Elle m’a… On a… Enfin, c’est compliqué. »

En voyant le regard de Pablo se poser sur sa tenue et surtout ce petit sourire se dessiner sur ses lèvres, elle levait les yeux au ciel, regrettant une bonne fois pour toute de ne pas être toujours irréprochable. Elle était en même temps supposée passé une soirée totalement seule avec pour seul ami l'ordinateur, quoi que la télé les aurait sans doute rejoint, pas de quoi lui donner envie d'être bien sur elle. « Tu oublieras cette image de moi en jogging quand je te reçois au bureau, on est bien d'accord? » Elle avait pris ce petit ton autoritaire qu'elle ne pouvait cacher quand elle parlait boulot, mais en terminant sur une pointe d'humour. N'empêche qu'il restait un de ses clients les plus importants et que ce n'était pas super professionnel, même si elle se doutait bien qu'il n'était pas devant sa porte à cette heure pour parler boulot.

« Hm… Pourquoi pas ! Une proposition pareille, ça ne se refuse pas ! » Magnifique, la soirée s'annonçait finalement un peu plus divertissante puisqu'il ne comptait pas s'échapper dans les 5 minutes qui allait suivre. Au point ou elle en était dans son renom à sa grâce habituelle, elle croisait les jambes dans le fauteuil, pour se retrouver en position "indienne", tournée vers Pablo. « Oui oui, ça va ! Et toi alors ? » Elle était peut-être blonde, mais elle n'en était pas idiote pour autant. Pas avec lui en tout cas, la première chose qui se voyait sur son visage ce soir c'était que ça n'allait pas, contrairement à ce qu'il prétendait. « Cet appartement est tristement vide mais ça va! » Elias lui manquait vraiment, surtout lorsqu'elle rentrait du boulot. Aladiah n'avait jamais eut l'occasion de vivre seule, alors forcément ça faisait un grand vide. Même si on père était peu présent, ils avaient de nombreux employés, sa nourrice et surtout son monstre de frère, ensuite il y avait eut Elias et ils ne s'étaient jamais séparés. Elle avait vu grand en achetant cet appartement, assez grand pour qu'ils puissent être ensembles sans se marcher dessus, pour qu'elle puisse invité une dizaine d'amis sans qu'ils ne soit l'un sur l'autre. Au final, elle n'avait pas ces dix amis et elle ne l'avait même plus lui, ne lui restait que la décoration qui lui plaisait quand même. « Ok… C’est Bonnie. Elle m’a… On a… Enfin, c’est compliqué. » Reportant son attention sur Pablo au lieu de l'appartement, elle lui adressait un petit sourire de compassion, tout en étant intérieurement satisfaite d'avoir vu juste : ça n'allait pas. Enfin, ça n'avait rien de drôle pour lui. « J'ai l'impression qu'à chaque fois que ça ne va pas, c'est à cause d'elle... Elle t'a quoi ? » Aladiah ignorait tout de cette femme mais ne rien savoir suffisait à ne pas l'apprécier. Allie attendait maintenant que Pablo se confesse, ne pouvant pas faire grand chose de plus pour lui qu'écouter, du moins pas tant qu'elle n'en savait pas un peu plus.

« Tu oublieras cette image de moi en jogging quand je te reçois au bureau, on est bien d'accord? » Malgré l’état d’esprit dans lequel Pablo se trouvait, et son humeur peu encline à plaisanter, la phrase d’Aladiah réussit à lui arracher un petit rire. Voilà exactement la raison pour laquelle il aimait venir la voir quand ça n’allait pas. Quoi qu’il arrive, la jeune femme trouvait toujours le moyen de lui redonner le sourire. « Euh… ça va être dur, je ne peux rien te promettre ! Mais j’essaierai… » ajouta-t-il sur le ton de la plaisanterie. De toute façon, même lorsqu’ils étaient sérieux, leur relation avait toujours dépassé le cadre du travail. Leur passion commune et leur bon feeling dès leur première rencontre avaient fait de ces deux là de véritables amis, avant d’être des associés. Et plus si affinités… Du côté de Pablo du moins, cette relation avait toujours été teintée d’une pointe de frustration. Dès la première seconde où il avait croisé Aladiah, il n’avait voulu qu’une chose : la mettre dans son lit. Mais leur relation professionnelle autant que leur amitié avait soudainement tout remis en question, et depuis, il s’efforçait d’effacer ce désir de son esprit. De plus, il restait persuadé que la jeune femme ne partageait pas spécialement son point de vue. Alors il se taisait, et se contentait d’être cet ami sur qui Aladiah pouvait compter en cas de pépin, et inversement.

« J'ai l'impression qu'à chaque fois que ça ne va pas, c'est à cause d'elle... Elle t'a quoi ? » Sur ce point-là, elle n’avait pas tout à fait tort, et pour cause. Bonnie était bel et bien l’une des rares personnes à pouvoir agir de la sorte sur l’humeur du latino. Pablo baissa les yeux, comme s’il avait honte de ce qui lui arrivait. Depuis qu’il avait compris que Bonnie l’avait mené en bateau, il se maudissait intérieurement d’avoir pu la croire. Etait-il stupide à ce point pour se prendre dans ses filets une deuxième fois ? Visiblement oui. Le jeune homme se racla la gorge, mal à l’aise, mais tenta d’enchaîner sans trop perdre la face devant Aladiah. « Elle m’a… largué ? Manipulé ? Ridiculisé ? Encore… » Il laissa échapper un long soupir avant de relever la tête pour planter son regard désespéré dans celui de son amie. « Comment j’ai pu être aussi bête ? Je la connais assez bien pourtant ! Mais tout semblait parfait cette fois… et ça l’était, vraiment ! Mais… j’étais juste une compensation pour elle. Parce que le mec après qui elle court ne veut pas d’elle. » C’était la triste histoire de leur « couple ». Pathétique. Les mâchoires du latino se serrèrent, tant par regrets que par colère et ses yeux se détournèrent une nouvelle fois d’Aladiah pour se perdre dans le vide.

« Euh… ça va être dur, je ne peux rien te promettre ! Mais j’essaierai… » Allie roulait des yeux, tout en gardant son sourire. Quand il la verrait perchée sur ses dix centimètres de talons, une jupe noire parfaitement lissée et la veste qui allait avec, il oublierait ce training, c'était évident. Une autre tenue lui venait en tête pour lui faire définitivement oublié celle-ci, malheureusement elle n'aurait sans doute jamais l'occasion de lui la faire découvrir. A cette simple idée, elle affichait un sourire qu'elle balayait rapidement pour reprendre un air plus neutre. Il se tenait devant elle avec un visage qui frôlait l'enterrement, comment elle pouvait avoir ce genre d'idée? La palme d'or de la pire amie lui revenait ce soir, même si elle était la seule à s'en rendre compte.

« Elle m’a… largué ? Manipulé ? Ridiculisé ? Encore… » Bonnie devait sincèrement manqué de bon sens pour se foutre de lui. La rupture en soit n'était pas un drame, cela pouvait arrivé à n'importe qui et au fond, Allie ignorait quel genre de petit ami il était, donc elle ne pouvait pas vraiment juger. En revanche, la description qu'il lui en faisait la renvoyait à une garce, surtout si par ridiculisé il entendait trompé. Ce n'était pas tout à fait l'image qu'Allie avait d'elle, mais il faut dire qu'elles parlaient peu toutes les deux, se croisant simplement en compagnie de Pablo. « Comment j’ai pu être aussi bête ? Je la connais assez bien pourtant ! Mais tout semblait parfait cette fois… et ça l’était, vraiment ! Mais… j’étais juste une compensation pour elle. Parce que le mec après qui elle court ne veut pas d’elle. » Aïe, effectivement cela faisait mal à admettre. Si Aladiah était une bonne oreille, elle avait beaucoup de mal à trouver les bonnes phrases lorsqu'il s'agissait de consoler ou rassurer et cherchait à présent ces mots. Edwin en avait fais les frais en pleine tentative de suicide, même si visiblement ses phrases tordues avaient quand même fini par le rassurer. « Tu sais l'expression "l'amour rend aveugle" n'est pas apparue pour rien... t'as pas à t'en vouloir d'être tombé dans le panneau, elle ne sait pas ce qu'elle rate. » Mais encore? Aladiah grimaçait d'ailleurs légèrement en constatant que ses phrases ne voulaient pas dire grand chose, du moins qu'elles n'allaient pas le réconforter. Elle s'osait à poser sa main sur celle de Pablo, comme si ce simple geste pouvait effacer sa tristesse, sa colère. « On apprend tous de nos erreurs... T'es un mec bien et tu finiras par trouver la bonne personne. Et quand ce sera le cas, tu zapperas cette garce en 30 secondes! » Si la brunette entendait se discours, elle lui arracherait sans doute les yeux sur le champs. Allie avait toujours pris soin de se montrer souriante et sympa avec elle, pour éviter que qui que ce soit ne devine son attirance pour Pablo. A présent qu'ils n'étaient plus ensembles, elle n'avait aucun intérêt à se la jouer bonne copine, Bonnie n'était plus que la garce qui lui avait briser le coeur, pour la seconde fois.

Pablo était à la fois honteux de devoir avouer tout ça à Aladiah, et soulagé de trouver une oreille assez attentive pour l’écouter. En temps normal, il ne partageait pas ses états d’âme de cette façon, mais avec elle c’était différent. Avec elle, il se permettait des choses qu’il n’aurait même pas imaginé avec d’autres filles. Plus qu’une relation professionnelle, elle était une de ses seules vraies amies, et c’est précisément une des raisons pour lesquelles elle n’avait pas fini dans son lit. Mais à cet instant, la seule fille à laquelle il pensait, c’était Bonnie. Et curieusement, il n’arrivait pas à mettre de nom sur ce qu’il ressentait. Bien sûr, la colère était le premier sentiment qui lui venait à l’esprit mais il y avait quelque chose d’autre. Quelque chose de plus fort encore, et qu’il avait toujours ressenti pour elle. Ces sentiments qu’il se refusait désormais à éprouver et qui pourtant étaient toujours là, quoi qu’il arrive. Mais l’équation était simple : il n’avait pas le droit de l’aimer. « Tu sais l'expression "l'amour rend aveugle" n'est pas apparue pour rien... t'as pas à t'en vouloir d'être tombé dans le panneau, elle ne sait pas ce qu'elle rate. » Pablo ne put s’empêcher de relever brusquement ses yeux vers Aladiah. Avait-elle vraiment prononcé le mot « amour » ? Oh, et après tout pourquoi pas… Pourquoi continuer à se mentir puisque c’était bel et bien ce qui avait uni Pablo et Bonnie, du moins pendant quelques temps. En acceptant ce fait, le jeune pilote laissa sa tête retomber en soufflant désespérément. C’est à ce moment-là qu’il sentit la main d’Aladiah se poser délicatement sur la sienne. L’air de rien, elle continua à parler alors que les yeux du latino étaient rivés sur leurs mains.

« On apprend tous de nos erreurs... T'es un mec bien et tu finiras par trouver la bonne personne. Et quand ce sera le cas, tu zapperas cette garce en 30 secondes! » Surpris par tant d’audace et d’agressivité, Pablo se surprit à rire, discrètement. Lees mots d’Aladiah n’étaient peut-être pas parfaitement choisis pour lui remonter le moral, mais ils avaient l’avantage d’être drôles. A bien y réfléchir, elle n’aurait pas eut besoin de dire quoi que ce soit pour réconforter Pablo, sa seule présence lui était amplement suffisante. Mais si en plus elle parvenait à le faire sourire, c’était toujours ça de prit. Instinctivement, le jeune homme referma sa main sur celle d’Aladiah pour les joindre, alors qu’il relevait la tête et plantait son regard dans le sien. « C’est pas que je cherche la bonne personne, enfin… j’en sais rien. Mais avec elle c’était spécial. Enfin tu sais… » Lui qui était plutôt du genre à enchainer les relations d’un soir, il n’avait encore jamais tenu un discours pareil. C’est en se rendant compte de ça qu’il se tut, reconsidérant rapidement ce qu’il venait de dire. Et une nouvelle fois, il laissa échapper un petit rire, néanmoins plus amer. « C’est ridicule. Désolé… » Cependant, derrière son sourire forcé on pouvait toujours deviner la peine et la colère qui l’étreignaient. Pablo avait vaguement l’impression d’être pitoyable et ça l’insupportait, mais la situation dans laquelle Bonnie l’avait mis ne l’aidait pas vraiment à faire bonne figure.

En voyant la réaction du jeune pilote, Aladiah se confirmait à elle-même qu'elle n'était pas douée pour les discours. Il soupirait longuement mais elle ne pensait pas vraiment se tromper : s'il n'en avait rien à faire de Bonnie, il ne serait sans doute pas dans cet état aujourd'hui. Allie le connaissait suffisamment pour savoir que, comme elle, il ne se confiait jamais sur sa vie sentimentale, parce que ce n'était pas le plus important dans la vie. Ce n'était peut-être pas le grand amour de sa vie, mais d'une manière ou d'une autre, elle l'avait blessé preuve qu'il tenait sincèrement à elle. Dommage que cela ne semble pas réciproque. Sans être une grande fan de Bonnie, Alie n'avait rien contre le couple et avait espéré sincèrement qu'elle puisse le rendre heureux, mais c'était apparemment mission impossible. L'autre option était donc de l'aider à passer à autre chose, mais elle n'avait franchement pas de solution pour ça.

Elle finissait par lui décrocher un petit sourire, mieux un petit rire, sans être certaine que ce soit positive. Oui, elle se l'imaginait tout aussi bien se lever et lui hurler dessus pour sa façon de juger Bonnie. Elle l'avait blessé mais ça n’effaçait pas ce qu'il ressentait pour elle! Allie s'en prenait à Elias depuis son départ, l'insultant haut et fort mais il était hors de question que quelqu'un d'autre qu'elle se permette de le juger. « C’est pas que je cherche la bonne personne, enfin… j’en sais rien. Mais avec elle c’était spécial. Enfin tu sais… » Sans chercher, elle vous tombait dessus par moment et vous obligeait à vous rendre à l'évidence. « C’est ridicule. Désolé… » Oh que oui ça l'était, c'est qu'elle voulait lui répondre pour le faire sourire un petit peu plus sauf que vu la situation, elle ne savait pas vraiment si les "blagues" étaient les bienvenues dans la conversation. « Tu t'excuses de quoi? C'est pas ridicule... Mais t'y as cru, c'est normal que tu sois déçu. » Aladiah pataugeait pour trouver ses mots, cette attirance n'aidant pas vraiment. Par chance, la sonnette raisonnait dans l'appartement, ce qui lui permettait de glisser sa main hors de la sienne et de s'échapper quelques secondes. De retour au salon, elle posait les plats commandés une vingtaine de minutes plus tôt, avant de reprendre place. « Je suis désolée, je suis plutôt douée pour écouter mais pour conseiller, surtout sur ce sujet, je suis à la ramasse! J'aimerais vraiment t'aider mais j'avoue que je ne sais pas quoi faire ou dire, à part sur je reste persuadée que tu trouveras la bonne... Tu l'as peut-être même déjà trouvée mais t'es bien trop pré-occupé par Bonnie pour la voir pour l'instant! » Et tout cela sans le moindre sous entendu, Allie ne pensait pas être cette personne puisqu'ils avaient toujours entretenu une amitié sincère. Jamais un geste déplacé, elle savait la place qu'il lui accordait, celle d'une amie, et ça lui convenait parfaitement. Après ce joli petit discours, elle se disait qu'il allait finalement partir, histoire de trouver une personne qui serait capable de l'aider, chose qu'elle ne pouvait pas faire. Les sentiments et elle n'avaient jamais été les meilleurs amis du monde...

La situation devenait peu à peu franchement pathétique. A vrai dire, pour Pablo elle l’était déjà avant même qu’il ne débarque chez Aladiah, mais cette fois il avait l’impression d’avoir atteint des sommets. Mais ce qui l’agaçait le plus, c’est qu’il était tout bonnement incapable de faire autrement, de ne plus penser à ça, d’oublier Bonnie une bonne fois pour toute. Même si c’était la meilleure et la seule chose qu’il lui restait à faire, cette prouesse semblait au-dessus de ses moyens. Plus il y réfléchissait et moins il comprenait pourquoi il avait atterri chez Aladiah. Certes, elle était son amie, et il pouvait compter sur elle quoi qu’il arrive. Mais en général, il ne se « servait » jamais de ses amis quand ça n’allait pas. Au contraire, il préférait rester seul et refermé sur lui-même, attendant simplement que ça passe. Cette fois c’était différent, Pablo semblait chercher du soutien auprès d’elle, preuve qu’il avait vraiment le moral au plus bas, quoi qu’il en dise.

Pablo haussa les épaules d’un air désespéré. Pour y croire, il y avait cru ! D’où sa douleur aujourd’hui. C’est à ce moment-là que la sonnette retentit. La jeune femme se releva brusquement et après quelques minutes, revint les bras chargés, déposant ses victuailles sur la table. Alors qu’Aladiah s’excusait de ne pas être particulièrement douée pour lui remonter le moral, le jeune pilote ouvrit la bouche pour la rassurait sur ce fait. Même si elle ne savait pas trouver les mots, sa présence était bien suffisante. Mais au dernier moment il se ravisa, et se tut, un peu interdit devant ce qu’il venait d’entendre. Déjà trouvée ? Trop occupée par Bonnie pour la voir ? Dans sa tête, tout sonnait comme si la jeune femme avait parfaitement compris son petit jeu. Etait-il possible qu’Aladiah sache quelle attirance il avait pour elle ? Pouvait-il même espérer qu’elle soit réciproque. Visiblement non, puisque la jeune femme ne sembla pas être chiffonnée par son discours. Sans même s’en rendre compte, Pablo avait braqué sur elle des yeux pleins d’espoir, qu’il s’empressa de baisser lorsqu’il réalisa à quel point il devait être étrange. Comme pour se justifier, bien que très maladroitement, il articula : « Hm.. oui, peut-être… je sais pas. » Crétin ! Si avec ça elle ne l’avait pas capté, elle ne le ferait définitivement plus ! Elle avait déjà assez d’ennuis comme ça avec Elias, elle n’avait vraiment pas besoin qu’il vienne s’ajouter à tout ça. Du moins, c’est ce que Pablo pensa en reconsidérant la situation. Comme s’il avait été seul dans la pièce, il secoua la tête en se maudissant intérieurement. Ses yeux tombèrent alors sur l’étalage de plats chinois devant eux et, comme pour changer au plus vite de conversation et d’idées, il enchaina : « Je… pff j’aurai du apporter quelque chose au lieu de m’inviter comme ça… Je te devrai une invitation… » Un petit sourire étira ses lèvres alors qu’il tournait la tête pour reporter son regard sur Aladiah. Ce faisant, son sourire s’effaça peu à peu, et son regard se fit plus intense. Même en essayant de toutes ses forces, le jeune pilote était à présent incapable d’effacer de son esprit le fait qu’éventuellement, il n’était pas le seul à ressentir une certaine attirance pour l’autre. Maintenant qu’il était « libéré » de Bonnie, il se surprenait à voir les choses tout autrement, même celles auxquelles il s’était interdit de penser depuis toujours.

Elle n'avait pas cherché à faire le moindre sous entendus, en revanche ses pensées se bousculaient tour à tour. Allie faisait de son mieux pour les chasser une par une mais surtout pour garder un visage neutre, qui ne la trahissait pas. A se demander comment elle pouvait penser à cela alors qu'il se confiait à elle sur ses peines de coeur. A la fois, il fallait être honnête, rare était les moments qu'elle passait avec lui sans se dire que sans ce contrat entre eux, peut-être bien qu'il leur serait permis d'avoir autre chose. Le contrat était pourtant bel et bien là et elle y tenait, sans doute plus qu'à ce qu'ils pouvaient avoir d'autres dans ses pensées. Elle était talentueuse pour gérer ses relations professionnelles, pas sentimentale, cela suffisait à la conforter dans le choix qu'elle avait fait, qui revenait simplement à se taire.

Malgré ses efforts à parler sur un ton neutre, amical, Pablo l'observait étrangement, surpris ce qui la mettait plutôt mal à l'aise. Peut-être que c'était simplement son discours qui l'étonnait ou le gênait... « Hm.. oui, peut-être… je sais pas. » Elle ne s'était pourtant sincèrement pas envisagée comme "la bonne" mais l'air qu'avait pris Pablo la tracassait. Un instant, elle s'autorisait à espérer, les yeux brillants et fixés sur lui, avant de s'obliger à détourner le regard, fixant ses mains. Elle était idiote et à moitié grillée, ce qui avait le don de la mettre en colère contre elle même, qui se gérait si bien en général. Allie reportait finalement son attention sur lui, inutile d'ajouter une couche en agissant de manière assez étrange, elle s'était déjà bien assez enfoncée comme cela. « Enfin j'dis ça... mais je me trompe peut-être, j'en sais rien. » Elle haussait les épaules, la carte de L'innocence n'était pas encore sortie aujourd'hui, et c'était la meilleure qu'elle avait en réserve pour l'instant. Allie retrouvait retrouvait son sourire en l'entendant changer de sujet, quelle excellente idée. « Non, t'inquiètes... et puis il y en a largement assez pour deux, je commande toujours des tonnes et je jette la moitié. » Parce qu'elle était indécise, ou plutôt aimait gouter à tout, résultat elle en arrivait parfois à se commander trois plats pour elle seule, juste pour en manger une petite part de chaque. Il lui arrivait à de rare occasion de penser aux personnes qui crevaient de faim, à elle qui jetait la nourriture par les fenêtres... mais elle se rappelait rapidement que sa commande ne changerait pas grand chose à leur misère, malheureusement. Elle réalisait quand même que sa réponse sonnait surtout comme un grand "non" et s'empressait donc de récupérer son "erreur". « Mais bon... tu peux quand même m'inviter! » Elle lui adressait un sourire, accompagné d'un clin d'oeil. Elle était nulle en comédie mais autant se la jouer décontracté, les clins d'oeil, ça marchait toujours pas mal dans le genre " on est les meilleurs potes ", non?

Les allusions d’Aladiah l’avaient troublé, indéniablement. Et pourtant, il ne savait même pas s’il s’agissait en effet d’allusions, ou simplement de sa propre imagination qui s’emballait un peu trop lorsqu’il se trouvait aux côtés de la jeune femme. Quoi qu’il en soit, il sentit le besoin imminent de changer de sujet, de dériver vers une autre conversation un peu moins glissante, et qui le mettrait moins mal à l’aise que celle-ci. Et le premier sujet qu’il trouva fut évidemment leur repas, puisque celui-ci trônait devant eux depuis quelques minutes déjà. Ca devait bien être la première fois que le latino était aussi gêné devant son amie, et ceux même s’il avait toujours ressenti cette espèce de tension entre eux. A chaque fois qu’ils se voyaient, que ce soit pour des raisons professionnelles ou non, Pablo ne pouvait s’empêcher d’imaginer ce qu’ils auraient pu être sans ce contrat qui les liait. En même temps, sans ce contrat-là ils ne se seraient probablement jamais rencontrés, alors le fait d’être amis était toujours mieux que rien. Mais quand même… Le discours qu’Alie avait tenu faisait remonter à la surface tout un tas de doutes et de possibilités que le jeune homme s’efforçait de cacher depuis qu’il l’avait rencontrée.

« Mais bon... tu peux quand même m'inviter! » Une fois de plus, Pablo sortit brusquement de ses pensées sans trop comprendre ce qu’il lui arrivait. Il posa un regard interrogateur sur sa voisine, avant de percuter et de répondre précipitamment. « Oh ! Oui oui, bien sûr ! Tu peux venir quand tu veux tu sais ! Je suis libre maintenant… » Curieusement, le latino avait rapidement reprit goût au fait de refuser des invitations, sous prétexte qu’il voulait passer du temps avec Bonnie, seul à seul avec elle dans son appartement. Et pourtant, cette période n’avait été qu’éphémère. Brusquement il s’était de nouveau retrouvé seul, à sortir quasiment tous les soirs pour oublier sa peine, souvent dans les bras d’une autre. Se rendant compte qu’il plongeait une nouvelle fois dans des pensées négatives, Pablo s’enfonça un peu plus dans le canapé en soupirant. Il enfouit alors son visage sous le chapeau qu’il n’avait même pas prit la peine de retirer en rentrant, et resta là les bras ballants, complètement immobile à côté d’Aladiah. Ce chapeau… c’était précisément celui que Bonnie lui avait offert il y a quelques temps. Tout ça parce qu’elle le trouvait sexy lorsqu’il portait un chapeau. Pour lui plaire, il avait donc prit l’habitude d’en porter un presque à chaque fois qu’il sortait de chez lui. Complètement dépité, et parlant depuis l’intérieur dudit chapeau, Pablo s’adressa à son amie d’une voix étouffée : « Désolé. Je ne suis pas de très bonne compagnie je crois, je… je peux peut-être repasser à un autre moment… » Il se tut en sentant que sa voix était sur le point de dérailler, et serra les mâchoires tout en continuant de se dissimuler sous son chapeau.

Le voir aussi mal à l'aise qu'elle ne l'était, voir plus, la rassurait un petit peu. Il était peut-être simplement moins doué pour cacher ses émotions alors qu'elle avait des années d'entrainements lorsqu'ils 'agissait de garder un visage neutre, impartial. Allie avait toujours détesté le fait qu'on puisse lire en elle comme dans un ivre ouvert, elle ne supportait pas qu'on devine ce qu'elle ressentait et avait pris l'habitude de ne pas laisse transparaître ses émotions. La seule personne avec qui il était inutile de faire un effort pour rester neutre était Elias, puisque ses efforts tombaient toujours à l'eau, il la connaissait bien assez pour deviner ce qu'elle ressentait. Aujourd'hui, elle s'était piégée toute seule, oubliant un peu cette comédie mais elle s'était rapidement reprise, ce que Pablo mettait du temps à faire. La question était de savoir d'ou venait ce gêne et maintenant qu'elle l'avait perçu, elle mourrait d'envie de savoir. Si au fond il pensait la même chose qu'elle? Du moins qu'il avait les mêmes envies? Ils perdaient tous les deux leur temps à tourner autour du pot, là... mais s ce n'était pas le cas, elle se prendrait une bonne gifle et n'oserait plus le regarder dans les yeux, elle allait donc la boucler. Après tout, il lui parlait là de Bonnie et n'avait donc aucune raison de penser à elle d'une manière ou d'une autre.

« Désolé. Je ne suis pas de très bonne compagnie je crois, je… je peux peut-être repasser à un autre moment… » Tout en l'observant se cacher derrière ce chapeau, elle s'était perdue dans ses pensées et revenait à présent à la réalité. « C'est pas grave, je suis pas beaucoup plus joyeuse! Je propose qu'après ça on se fasse un bon pot de glace... je pourrais aussi lancer " the notebook " mais l'idée de pleurer toutes les larmes de mon corps à côté de toi ne me tente pas vraiment, donc on oublie! J'ai tous les fast & furious, au pire... » Mauvaise idée. Peu importe le film, elle n'avait pas envie de s'installer à côté de lui et les plonger dans le silence le plus complet. Même s'ils se concentraient sur le film, elle finirait par angoisser et balancer tout ce qu'elle avait sur le coeur, comme toujours. Aladiah n'avait jamais aimé le silence, même dans les moments ou il était requis, et trouvait toujours quelque chose à dire pour le combler, intéressant ou non. « Si ça te fais du bien d'en parler, ne te prive pas... et si c'est pas le cas, tu peux aussi me dire comment tu envisages cette nouvelle saison? » Elle ne rêvait pas de l'entendre parler de Bonnie encore et encore, des sentiments qu'il pouvait avoir pour elle, mais si c'était ce dont il avait besoin, elle serait là. Prenant son chapeau histoire de voir son visage à nouveau, elle le balançait à l'autre bout du canapé en haussant les épaules. « Parler à un chapeau me stresse ! Et il est de très mauvais gout si tu veux mon avis! » S'il ne le voulait pas, il l'avait quand même, le tout accompagné d'un grand sourire pour que sa petite remarque passe mieux.

« C'est pas grave, je suis pas beaucoup plus joyeuse! Je propose qu'après ça on se fasse un bon pot de glace... je pourrais aussi lancer " the notebook " mais l'idée de pleurer toutes les larmes de mon corps à côté de toi ne me tente pas vraiment, donc on oublie! J'ai tous les fast & furious, au pire... » Une fois de plus, et contre toute attente, la jeune femme parvint à lui arracher un sourire. Mais cette dernière ne le vit même pas, puisque Pablo était toujours caché derrière son précieux chapeau. Sans s’en défaire, il répondit avec une minuscule pointe d’enthousiasme dans la voix : « Moi ça ne me dérange pas si tu veux pleurer, mais oui, à choisir je préfèrerai quand même regarder les fast & furious ! » Un film, c’était la solution parfaite. Pablo ne serait alors pas obligé de parler, il aurait même l’obligation de se taire et c’était mieux comme ça. Concentré sur le téléviseur, il oublierait peut-être même ce pour quoi il était là ! Et de cette façon, il ne croiserait pas le regard d’Aladiah. C’était une occasion de moins de craquer et de commettre l’irréparable, cette chose dont il avait tellement envie mais qui briserait leur amitié à coup sûr. Il avait beau lutter, le jeune pilote se sentait de plus en plus fébrile sur ce point là, et puis un dérapage était si vite arrivé…

Sans que Pablo ne saisisse exactement pourquoi, Aladiah reprit la parole en revenant sur son éventuel besoin de parler… ou pas. La deuxième alternative qu’elle lui proposait était de parler de sa saison. Quoi qu’il en soit, le jeune pilote n’avait envie de parler ni de l’une, ni de l’autre. S’il était là, ce n’était certainement pas pour se mettre à parler de son boulot, même s’il le considérait davantage comme une passion. Ce soir, c’est son AMIE Aladiah qu’il était venu retrouver, et non pas sa patronne. « Non ça va, il n’y a pas grand-chose à dire de toute façon… Et pour ce qui est de la saison… il est trop tôt pour en juger. »

Lorsque la jeune femme lui ôta son chapeau de force, Pablo sursauta puis essaya de le récupérer, en vain. En un clin d’œil, ce dernier avait atterri à l’autre bout du canapé sans qu’il ne puisse rien faire, et en plus du reste, Aladiah s’était permit de le critiquer. « Hé ! Mais c’est elle qui me l’a… » Réalisant ce qu’il était en train de dire, le jeune homme se tut et baissa les yeux. Un long et profond soupir s’échappa de sa bouche avant qu’il ne reprenne : « Ok, t’as raison… Il est peut-être pas si beau que ça… » S’il voulait oublier Bonnie pour de bon, ça commencerait peut-être par là. A contrecœur, le latino tira donc un trait sur ce chapeau que son ex-petite amie aimait tant, et tenta de faire bonne figure en esquissant un semblant de sourire. « Bon… tu le mets ce film ? »

Le pot de glace était devenue son meilleur ami depuis l'absence d'Elias, même si elle prenait soin de ne pas exagérer. Allie tenait à sa ligne et si elle passait sa soirée à manger, elle prenait le temps d'éliminer dés le lendemain à la salle de sport ou par un footing. « Moi ça ne me dérange pas si tu veux pleurer, mais oui, à choisir je préfèrerai quand même regarder les fast & furious ! » Aladiah agitait la tête de droit à gauche, c'était un refus catégorique. Elle détestait déjà cet aspect d'elle même, d'être aussi émotive devant de la fiction, elle n'allait pas en plus s'exposer, et puis elle connaissait le film par coeur. Les Fast & Furious aussi, mais soit, il y avait de l'action, pas de larmes et surtout Paul Walker. Ne sachant plus vraiment ce qu'elle pouvait lui dire à propos de Bonnie, elle avait préféré choisir cette alternative, avant qu'il ne remarque cette petite pointe de jalousie qu'elle avait bien du mal à dissimuler.

Après sa proposition de film, Aladiah en venait au sujet dans lequel elle se sentait le plus à l'aise : le boulot. Et sa passion pour la Fomule 1 entre autre. « Non ça va, il n’y a pas grand-chose à dire de toute façon… Et pour ce qui est de la saison… il est trop tôt pour en juger. » Ça c'était fait. Elle était visiblement la seule motivée à en parler, dommage, elle n'avait pas encore eut l'occasion de lancer une satyre contre Vettel cette année, de faire une poupée vaudou à l'effigie d'Hamilton ou simplement de relater son admiration pour Räikkönen. Dieu que c'était bon de l'avoir à nouveau en course! Malheureusement, en dehors de Pablo, ses contacts n'étaient pas réellement passionnés, ils ignoraient même de qui elle pouvait bien parler. « Ok, chef. » Haussant les épaules, elle préférait ne même plus faire de commentaire sur le boulot, même si la PDG qui était en elle avait envie de lui dire qu'il avait tout intérêt à avoir des résultats cette année, puisque sa voix ne le faisait pas réellement passé pour quelqu'un de motivé. Allie savait néanmoins que c'était juste son moral au plus bas prud’homie mais qu'une fois sur la piste, il se donnerait à fond.

C'était elle qui lui avait offert... et alors? « Raison de plus pour le retirer! » D'accord, elle commençait légèrement à être agacée de l'entendre parler de Bonnie mais elle continuait de prendre sur elle pour garder le sourire. Malgré tout, elle aimait autant ne pas continuer la soirée en parlant à un mur, donc s'il pouvait éviter de se cacher derrière, c'était mieux. « Bon… tu le mets ce film ? » Allie se levait du fauteuil pour ouvrir l'armoire à DVDs dans lequel se trouvait le coffret complet. Elle sortait le premier qu'elle pleuvait dans le lecteur. C'était dans celui là que Paul était le plus sexy et bien que c'était aussi celui qu'elle avait vu le plus souvent, elle continuait de le regarder. « Tu sais c'était une proposition comme ça, histoire de ne pas tomber dans la dépression, je m'en fou du film... » S'il voulait continuer à parler ça lui allait plus ou moins aussi, elle ne broncherait pas. « Enfin on peut le regarder quand même. » Ajoutait-elle, si sa proposition était tentante pour lui, ça lui allait aussi, le silence l'empêcherait de dire ou faire une connerie.

L’envie que Pablo avait de craquer et de simplement envoyer valser toutes ses considérations sur le fait qu’Aladiah soit sa patronne grandissant, il préférait qu’ils se terrent tous les deux dans le silence. S’il ne croisait pas son regard, tout devrait bien se passer, et l’obscurité allait l’aider. C’est pour cette raison qu’il pressa la jeune femme pour qu’elle mette en route ce maudit film, ce qu’elle fit immédiatement d’ailleurs. Mais, comme si quelque chose la freinait encore, elle tenta de retarder l’échéance, mettant la retenue de Pablo à rude épreuve. « Tu sais c'était une proposition comme ça, histoire de ne pas tomber dans la dépression, je m'en fou du film... » A vrai dire, il s’en fichait pas mal lui aussi, mais comment lui expliquer que c’était le seule moyen qu’il avait trouvé pour éviter de lui sauter dessus ? « Je sais… Moi aussi. Mais si on veut éviter la dépression justement, on doit se changer les idées, faire autre chose hm ? » A l’entendre, on devinait aisément qu’il essayait de se convaincre lui-même. Et le regard quasi-implorant qu’il ajouta à cela sembla avoir raison des réticences de la jeune femme. « Enfin on peut le regarder quand même. » Avec un sourire voilé, mais néanmoins digne d’un gamin de quatre ans, Pablo lui signifia qu’elle avait choisit la bonne option. S’installant un peu plus confortablement dans le canapé, il lança un dernier regard à son chapeau qui gisait à côté de lui, et attendit qu’Allie s’occupe de leur DVD.

Lorsqu’elle effleura son bras en venant s’asseoir, Pablo frissonna. Et comme pour faire diversion, il se racla la gorge en fixant le poste de télévision devant eux. C’est donc en silence que les deux jeunes gens laissèrent le film commencer. Mais le latino avait beau essayer, il ne parvenait pas à se concentrer sur l’écran. La seule chose qui attirait son attention en ce moment, c’était sa voisine. Et sans même la regarder, il sentait une sorte de tension entre eux, qu’il devinait être réciproque. Pourquoi fallait-il que ça leur arrive à eux ? Pablo aurait pu avoir tout un tas d’autres filles mais non, depuis longtemps son esprit l’avait voulu elle. Dans un sens, c’était injuste. En effet, le jeune pilote avait toujours en tête qu’il n’avait rien le droit de tenter avec Aladiah puisqu’elle était sa supérieure mais aussi et surtout : son amie. Mais cette proximité entre eux ainsi que le silence le rendaient fou, et sans pouvoir se retenir le latino glissa une main sur la cuisse de sa voisine. Aussitôt, il tourna la tête vers elle et planta ses yeux dans ceux d’Aladiah en attendant une quelconque réaction. Mais plus elle tardait à venir, plus leurs deux visages se rapprochaient, jusqu’à sentir le souffle de l’autre sur sa propre peau. Pablo craquait, il en était conscient, mais rien ne semblait en mesure de pouvoir le raisonner et l’arrêter.

« Je sais… Moi aussi. Mais si on veut éviter la dépression justement, on doit se changer les idées, faire autre chose hm ? » Elle devait bien admettre que sa théorie était assez vraie. Allie aurait aimé avoir un élément pour contre-attaqué et avoir une bien meilleure raison que celle-ci, mais elle n'en avait pas, pas à dévoiler en tout cas. Ce n'était pas la dépression qu'elle cherchait à éviter - elle était devenue sa meilleure amie depuis des mois - mais lui, ce qui en soit n'avait rien de facile lorsqu'il se trouvait à quelques centimètres d'elle. Si au moins la situation était inversée, il lui aurait été possible de prétexter une urgence et fuir, mais elle ne pouvait pas décemment le mettre à la porte de son appartement.

Le DVD enclenché, elle se contentait de le rejoindre dans le fauteuil, pinçant légèrement les lèvres lorsque son bras effleurait le sien. Ferme là Allie et ignore ça. C'était ce qu'il y avait de mieux à faire et en quoi était-ce censé être étrange? Combien de fois l'avait-elle pris dans ses bras sans la moindre hésitation, elle n'allait pas se tourmenté parce que son bras avait par malheur touché celui de son ami. Elle s'écartait néanmoins discrètement d'un petit centimètre dés le début du film afin qu'il n'y aie aucun contact entre leurs peaux. Ca ne l'aidait pas autant qu'elle ne l'avait espéré mais c'était un petit soulagement malgré tout. Plongés dans le silence, elle ouvris à deux reprises la bouche pour finalement la refermé sans qu'un son n'en soit sortit. Pablo était plongé dans le film, ça l'aidait bien à ne pas paraître totalement ridicule... et elle n'avait rien à dire, rien qui puisse supprimer cette tension installée dans le peu d'espace disponible entre eux.

Toujours torturée avec ses pensées, Aladiah sursautait à moitié en sentant la main de Pablo se poser sur sa cuisse et se retournait vivement vers lui. Il l'a sortait de ses pensées, mais pour y ajouter un peu plus de piment, de problèmes aussi. Pas le temps de réfléchir, son visage n'était plus qu'à quelques millimètres du sien, alors qu'elle posait une main sur la joue de Pablo comme si c'était tout à fait naturel. Allie s'était arrêtée une fraction de seconde pour l'observer, pour avoir la confirmation qu'il voulait exactement la même chose qu'elle à ce moment précis, même si son geste ne laissait pas de place au doute. Elle finissait par effleurer ses lèvres avant de transformer cela en un baiser passionné, qui lui brulait les lèvres, bien que toujours hésitante. Allie avait tout fait pour lutter, mais e geste avait été celui de trop, rendant totalement impossible sa retenue. Maintenant qu'elle y avait gouté, elle ne réfléchissait plus aux conséquences et regrettait plutôt d'avoir tenté de lutter si longtemps. Marquant une pause qui lui permettait de reprendre rapidement son souffle, elle vérifiait à nouveau que son 'ami' n'était déjà pas envahi de regrets avant de prendre à nouveau possession de ses lèvres, bien plus assurée cette fois-ci. Elle culpabiliserait demain, pour l'instant Aladiah tenait juste à savourer chaque seconde.

Pablo pouvait-il croire ce qui était en train de se passer ? Lui qui s’était pendant longtemps retenu se retrouvait maintenant en face d’un Aladiah plus entreprenante que lui… C’est du moins l’impression qu’elle lui donnait. Après tout, même s’il les avait considérablement rapprochés, ce n’est pas le latino qui l’avait embrassée en premier. S’il s’était écoulé quelques secondes de plus, c’est ce qui se serait produit, évidemment. Mais en attendant, la jeune femme avait clairement prit les devant, et Pablo ne s’en plaignait pas, bien au contraire. La main qu’elle avait posée sur sa joue voulait tout dire, et sans pouvoir s’en empêcher le jeune pilote esquissa un petit sourire, comme pour la rassurer. Leur premier baiser fut à la fois tendre et passionné. Ils avaient attendu ce moment depuis si longtemps… Cet instant sonnait dans l’esprit de Pablo comme une délivrance, la concrétisation de ce dont il avait souvent rêvé mais qu’il ne s’était encore jamais autorisé à dévoiler devant Allie.

La jeune femme mit un court terme à leur baiser, ce qui laissa le latino quelque peu perplexe sur le coup. Regrettait-elle déjà son geste ? Cet instant de rêve était-il déjà terminé ? Fallait-il se réveiller ? Pablo posa sur elle un regard à la fois hésitant et rassurant, qui suffit apparemment à apporter à Aladiah les réponses qu’elle cherchait. Aussitôt, elle repartit à l’assaut des lèvres du latino qui se laissa faire, une nouvelle fois. L’investissement et l’audace de la jeune femme étaient tels que Pablo n’eut plus aucune hésitation ni aucune retenue. Il laissa alors ses mains se balader dans le dos d’Allie tout en prolongeant leur baiser. Petit à petit, il prenait le dessus, se laissant emporter par la fougue dont elle avait su faire preuve avant lui. Le latino se redressa alors sur le canapé et s’approcha au plus près d’Aladiah, laissant habilement glisser ses lèvres le long de son cou. Il mettait toute son application dans ces baisers tant attendus, qu’il espérait rendre inoubliables. Délicatement, le jeune femme fit basculer son amie en arrière afin de l’allonger sur le canapé, puis repartit à l’assaut de ses lèvres sans perdre plus de temps. Une de ses mains fila se perdre dans la longue chevelure blonde d’Aladiah tandis que l’autre redessinait les courbes de ses hanches. D’aussi loin qu’il se souvienne il n’avait jamais été aussi proche d’elle, et cette proximité lui plaisait terriblement. Elle était belle, plus que jamais. Et pour une fois, il n’avait plus peur de déraper puisque c’est elle qui avait flanché la première.

Après une longue série de baisers plus passionnés les uns que les autres, Pablo se décida à glisser une de ses mains sous le haut d’Aladiah. Il en profita d’ailleurs pour le remonter un peu, sans pour autant se détacher des lèvres de la jeune femme. Le film qui continuait derrière eux n’avait alors plus aucune importance. La télévision pouvait bien tourner toute seule, rien ni personne ne viendrait troubler ce moment hors du temps.