Jusqu’à aujourd’hui, je n’avais jamais remarque qu’il y avait une tâche au plafond de ma chambre. C’était sûrement un détail sans importance pour beaucoup de gens et ça l’aurait sûrement été pour moi avant mais à présent, je la voyais comme le résumé de ma minable vie qui n’avait été rien d’autres que souffrance et douleur. J’exagérais, sans aucun doute, mais dans mon état je n’étais pas en mesure de m’en rendre compte. Il était 15.00 et j’étais toujours sur mon lit à admirer le plafond de ma chambre. J’essayais de me lever mais ça tanguait vraiment trop autour de moi, j’avais la tête qui tournait et une envie atroce de pleurer. J’avais trop bu la vieille, c’était un fait mais je m’étais sentie si bien l’espace de quelques heures. Mais c’était fini et j’étais redevenu la même avec un mal de tête carabinée en plus.

Je fini par me lever doucement et me dirigeais vers la cuisine, le chat me regarda d’un air furieux, il boudait depuis mon retour de Bogota : il n’avait pas apprécié que je le laisse seul l’espace de deux ridicules semaines. Pourtant, Mila s’était occupé de lui. Je repensais à mon voyage dans mon pays, parce que, que je le veuille ou non, la Colombie était mon pays. Partir m’étais venue comme ça, j’avais tellement besoin de fuir la douleur que je ressentais. Les congés que m’avait forcé à prendre mon patron pour que je puisse retrouver mon si joli sourire m’avait ôtée toute attache ici. Alors, j’avais cassé ma tirelire et je m’étais envolée vers mon pays natal. Durant les premiers jours, j’avais été heureuse et bien mais mon chagrin m’avait rattrapé, on ne fuie pas ses choses là.

*FLASH BACK*
J’entrais dans la petite cuisine surchauffée, en vérité, il n’y avait pas de chauffage mais le four allumé suffisait à cuire toute la pièce. M amère était affairée à couper des tomates. Elle ne remarqua pas que j’entrais, je m’assis à la table et la regardais. Il fallait que je lui parle, depuis que j’étais arrivée, je ne cessais de repousser le moment où je devrais lui dire que j’avais rompu avec Casey mais ça n’était plus possible. Elle se retourna et me vit.

-Ah Esperenza, je ne t’avais pas entendue.
-Ce n’est rien, rien du tout.
-Que se pasa Esperenza ? Tu n’sa pas l’air vraiment heureuse depuis quelques jours.

On était arrivées au moment fatidique, celui où je devais lui dire. Ce n’était pas évident, ma mère avait nourrie tant d’espoir à propos de Casey et je n’étais pas non plus sûre de vouloir en parler maintenant. Toutefois, je ne pouvais pas le lui annoncer par téléphone. Elle me regardait attentivement et je me rendis compte que pour une fois, ma mère était vraiment disponible pour m’écouter. J’éclatais en sanglot.

Il me fallut une bonne demi-heure pour me calmer, ma mère s’était assise à mes côtés et me serrais dans ses bras comme lorsque j’étais enfant, je me sentais protégée dans ses bras et je voulais y rester. Mais elle me relâcha et me regarda dans les yeux. J’ouvris la bouche mais elle me fit taire.

-Ne dis rien ma Espe… Ce sont des choses qui arrivent tu sais et tu ne dois surtout culpabiliser pour ça à mon égard. Je sais que je te mets la pression mais je veux simplement que tu sois heureuse ma chérie.
-Mama… Je ne sais pas si tu as compris mais...
-Tu n’es plus avec ton petit ami, je ne vois vraiment pas d’autres raisons qui pourraient mettre une jeune fille comme ti dans cet état. Allez pleures ma Espe, pleures si ça te fait du bien.

Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais proche de ma mère et je me remis à pleurer. Ce soir-là, quand je me couchai, elle s’assit près de moi et chanta la berceuse qu’elle avait inventée pour moi lorsque j’étais enfant. Je m’endormis dans ses bras.
*FIN DU FLASH BACK*

Ce moment-là, je ne l’oublierais jamais car je n’avais jamais été aussi proche de ma mère. Grâce à elle, j’avais enfin extériorisé mon chagrin et cela m’avait soulagé l’espace d’une journée. Mais la vie avait repris son cours et j’avais de nouveau ressenti le besoin de fuir. Fin du voyage.

Maintenant que j’étais de retour chez moi, je n’avais rien d’autres à faire que boire : je ne reprenais le travail que dans 15 jours, je ne voulais voir personne et la vie même de mes amis m’indifférait à part celle de Lewis et celle de Mila. J’ouvris le placard de a cuisine et ne trouvais pas ce que je recherchais, je pris alors mon blouson et descendit à la superette du quartier.

Il faisait froid dehors e j’allais aussi vite que je pus avec mon cerveau embrumée pour me retrouver à l’abri. Je renversais un certain nombre de piéton mais arrivait indemne au magasin. Sans hésiter, je fonçais vers le rayon que je voulais et m’arrêtais devant les boissons… Je regardais un moment le whisky puis la vodka puis pris deux bouteilles de chaque et me dirigeai vers la caisse.

Le chemin jusqu’à la caisse me paru interminable et pourtant, elle était tout près. Je manquais de peu de me prendre une petite vieille qui, après m’avoir lancé un regard furibard, retourna à son panier. Je failli également renversé une colonne de conserve à petit pois. Je m’arrêtai un moment devant et la regarda d’un air suspicieux, ces choses-là ne devraient pas exister, c’était beaucoup trop dangereux pour les gens comme moi. Enfin, après avoir empêché de justesse ma bouteille de whisky de tomber, je me retrouvais à la caisse derrière un bonhomme qui parlait fort et râlait pour un bon de réduction qu’il n’avait pas eu parce qu’il n’avait pas lu correctement le papier.

C’était un fait, je ne supportais plus rien ni personne. Je soupirais et patientais difficilement derrière l’homme, il n’avait qu’à pas l’acheté sa boîte de pâté, se serait bien mieux pour lui quoiqu’il n’étai plus vraiment à ça après. C’est alors qu’un raclement de gorge me fit sursauter. Je me retournais vivement et regardait la personne qui se trouvait derrière moi. C’était un homme qui devait avoir dans mes âges. Il était pas mal du tout et avait les mains vides. Je cherchais donc à comprendre ce qu’il faisait dans la queue. Il se mit alors à parler et je dus faire tous les efforts du monde pour ne pas l’envoyer boulé.

-Hum oui, je vais effectivement prendre les deux. Ca te poses un problème ?

Visiblement, mes efforts n’avaient pas fait grand effet parce que mon ton était lus qu’agressif. Je soupirais et respirais un coup. Je ne pouvais décidément pas m’en prendre comme ça aux gens que je ne connaissais pas, j’étais quelqu’un de civilisée ou du moins, je l’étais il n’y a pas si longtemps. Je me forçais à lui faire un sourire poli qui bien que très crispé n’en restait pas moins sincère.

-J’en ai besoin d’une pour ce soir et de l’autre pour… ce soir. Mais je peux partager.

Mes paroles me surprirent moi-même, je venais de lui proposer de venir boire avec moi enfin, la demande n’était pas formulée comme ça mais c’était clairement ce que je voulais dire. Etais-je devenue complètement folle ? C’était fort possible car la pensée qui me traversa l’esprit après cette demande fut que je pourrais lui demander ce qu’il pensait de ma tâche au plafond s’il venait boire avec moi. Evidemment, je n’avais pas l’intention de boire dehors, je ne voulais pas mourir congelée quoique ça aurait pu être une mort préférable à certaines autres qui existaient. Je secouais la tête, je divaguais vraiment là, il était temps que je reboive un coup.

J’étais encore trop hébétée par la stupidité de mon invitation pour entendre ce que mon interlocuteur me dit ensuite. Je compris juste les mots dernière et problème et je ne parvenais pas à leur donner un sens. Je posais mes bouteilles sur le tapis déroulant en haussant les épaules. Qu’est-ce que cela pouvait me changer de savoir ce qu’il avait dit exactement ? Ce n’était qu’un inconnu, un inconnu que je venais d’inviter pour partager ma boisson mais un inconnu.

Lorsqu’il me tendit un billet je le regardais surprise. Il y avait là de quoi payer les deux bouteilles et j’avais peur que ce ne soit pas très clair pour lui : je l’avais invité à boire avec moi certes mais le fait était que c’était avant tout moi qui buvais. En plus de ça, cela signifiait qu’il m’accompagnait et je n’avais pas imaginé qu’il puisse accepter. C’était peut-être un psychopathe, un quelconque fou qui voulait tuer les premières venues. Cette pensée ne m’horrifia pas le moins du monde. S’il décidait de me tuer je ne voulais qu’une chose : qu’il le fasse rapidement.

Le pauvre mec qui était devant moi compris enfin à quel point il était con ou du moins il se persuada que la caissière l’était et il partit. Je pus donc enfin payé. La caissière, une jeune brune très aimable que je connaissais un peu car c’était toujours dans cette supérette que je faisais mes courses, me fit un sourire aimable et me salua poliment. Cependant je vis dans son regard qu’elle était pressée de finir sa journée et qu’elle en avait marre des clients. Elle me fit penser à moi quelques mois plus tôt quand mes journées au restaurant touchaient à leurs fins. Je voulu lui dire de se méfier, que sa vie pourrait basculer en moins de temps qu’elle ne pouvait le croire mais je me tus pensant que cela ne servais qu’elle me prenne elle aussi pour une folle.

Je sortis du commerce et le froid me saisit de nouveau, ça ne devrait pas être permis de frigorifier ainsi les gens. Du coin de l’œil, je vis que l’homme me suivait toujours, en silence ce qui m’allait très bien. Je ne voulais pas parler, je voulais juste rentrer chez moi et boire. Boire pour oublier et me sentir mieux. Je savais qu’à long terme ça n’était pas une solution envisageable, j’avais déjà beaucoup entendue parler de l’alcoolisme et de ses conséquences mais je n’arriver pas à faire autrement. L’inconnu se lassa de garder le silence et parla. Il ne dit pas grand-chose mais j’eus des envies de meurtre.

-S’il n’y avait que la journée qui avait été mauvaise, ce serait merveilleux…

Je traversais la place juste en face de chez moi et arrivais devant mon immeuble. Je me dit alors que je devais peut-être lui dire qu’on allait chez moi ou du moins que moi j’y allais et que s’il voulait boire avec moi n’avait pas d’autres choix que de venir aussi. J’essayais de me souvenir dans quel état j’avais laissé mon appartement mais n’y parvenais pas. Je finis par hausser les épaules et me tournais vers lui.

-Il caille dehors et j’habite juste ici. Tu n’as qu’à venir…

Mon geste devenait machinal, prendre une bouteille puis la jeter, je ne voulais pas penser, c’était trop dur et trop douloureux. Relever la tête et voir ce que faisait l’inconnu, ça aussi c’était trop dur. Les larmes coulaient toujours et tandis que je continuais à jeter les bouteilles j’essayais de chasser la question qui me hantait : comment avais-je pu en arriver là ? Je repensais au temps qui avait passé et à avant, lorsque j’étais arrivée à NY, que j’étais simplement heureuse d’être là où je pensais avoir ma place. Et puis à mes relations sentimentales, toutes différentes dans lesquelles deux seules comptaient. Les deux seules personnes qui comptaient vraiment dans mon cœur : Casey et Apollon que j’avais tout les deux largués. L’un à cause d’une autre fille, l’autre pour me protéger, le résultat était le même, ils n’étaient plus là et moi j’avais mal. Pourtant, je n’arrivais pas à regretter ce que j’avais fait, pas un seul instant je n’avais douté de mes choix et j’avais du faire au mieux pour moi-même si le mieux me paraissait terrible en ce moment même. Je me rendais compte que pour la première fois depuis ma rupture avec Casey, j’avais l’esprit clair et des pensées à peu près cohérentes, je ne savais pas ce qui s’était passé dans cette journée qui est pu faire ça, peut-être le froid ou la tâche au plafond ou l’absurdité de ma conduite de la journée quoiqu’il en soit, je voyais les choses sous un angle différent. J’avais mal, certes, mais je pensais que je pouvais surmonter cette épreuve. Pourtant je ne me voilais pas la face, je savais très bien que demain je ne penserais plus ainsi et qu’il me faudrait moins de deux jours pour à nouveau me ruer à la supérette acheté de la boisson. J’avais besoin d’aide c’était un fait mais j’avais envie de croire que je pouvais y arriver.

- Si tu pouvais éviter de devenir un psychopathe aujourd’hui ça m’arrangerait, demain si tu veux mais pas maintenant.

Pour la première fois depuis longtemps, je souris le plus naturellement du monde, sans me forcer. Après avoir jeté la dernière bouteille je contemplais le spectacle de l’appartement. C’était mieux, sans les bouteilles on avait l’impression de rentrer seulement dans un appartement négligé ce qui avait toujours été le cas du mien, pas dans celui d’une cinglée alcoolique. Je soupirais et regardais vraiment pour la première fois l’inconnu. Il était debout dans ce qu’on aurait pu appeler le hall d’entrée mais qui n’était au fait qu’une partie du salon et semblait au prise dans d’intense réflexion. Je me demandais pourquoi il n’était pas partie, pourquoi il n’avait pas pris ses jambes à son cou ?

- Merci… Je t’offre les bouteilles même si c’est toi qui les as payées… Dis, je peux te demander pourquoi tu n’est pas parti… l’inconnu.

Je me dirigeais vers la cuisine et en sortit deux verres et une brique de jus d’orange qui n’étais pas encore ouverte. Je pris aussi un paquet de chips et retournais au salon. Il était toujours debout au même endroit, je lui adressais un sourire timide et lui montrait mon butin.

- Ce n’est peut-être pas aussi attirant qu’une bouteille d’alcool mais bon, tu peux toujours rester si tu veux. Au fait, je m’appelles Esperenza… enfin Espe me suffira.

Je me rendais bien compte que mon brusque changement d’attitude devait être pour lui aussi déroutant que mon comportement d’avant, j’avais toujours été comme ça. Mon regard se reposa machinalement sur le plafond et je vis la tâche, ce n’était peut-être pas un symbole si noir que ça.

La tâche au plafond m’obsédait toujours autant, je me demandais comment elle était arrivée là et depuis combien de temps elle y était. Je ne me souvenais pas l’avoir vu le jour de mon emménagement pourtant si elle y avait été, je l’aurais vu, c’était obligé, un tâche aussi grosse. Quoique non au fait, elle n’était pas grosse mais l’endroit où elle était placée se remarquait si bien qu’elle sautait aux yeux. Donc elle était récente ?

Je quittais des yeux la tâche regardait l’inconnu, Nath… Il semblait plus à l’aise à présent et j’en déduisit que je lui avait rappelé un quelconque mauvais moment ce qui expliquerait pourquoi i était habituer à ce genre de décoration d’intérieur. Il avait ainsi une bonne raison lui aussi d’être sorti aujourd’hui pour acheter une bouteille à Brooklyn ? C’était étrange, il n’avait vraiment pas l’air de quelqu’un qui connaissait le quartier, encore moins celui de quelqu’un qui y habitait. Je l’aurais plutôt vu vivre en plein cœur de Manhattan.

- Hum, je vois… Je n’y suis pas vraiment habitué moi mais disons que ces derniers temps, je me laisse un peu allée.
Ca, c’est une tâche. Je me demandes bien d’ailleurs comment elle est arrivée là.

C’était une manière atténuée de dire que je pétais complètement les plombs et que je ne savais plus quoi faire. Je chassais cette pensée et me dirigeais vers le canapé. Là aussi, l’endroit était quelque peu encombré par de vieux sachets de chips vides et des vêtements un peu partout, je dégageais un peu le tout pour que Nath puisse lui aussi s’asseoir. Je regardais ensuite autour de moi, j’avais du perde on chat dans le désordre de l’appartement, d’habitude il dormait toujours sur le canapé ou dans mon lit ou encore il mangeait. Hors, il n’était ni dans le salon, ni la cuisine et encore moins dans ma chambre.

-Je suis en train de me dire que j’ai du perdre mon chat dans le bordel de l’appartement, c’est triste. Enfin bon, je suis tranquille, je suis sûr que lui me retrouvera sans problème quand il aura faim.
Alors Nath, qu’es-ce qui peut bien t’amener à Brooklyn parce que tu n’a vraiment pas l’ir d’être un habitué du quartier ?

En prononçant ces paroles, je posais les deux verres sur la table pour servir le jus d’orange que je versais en partie à côté. Ca n’avait rien d’étonnant quand on me connaissait, je passais ma vie à casser des choses, à en renverser, à me blesser. D’ailleurs, cela faisait longtemps que je n’avais pas fini à l’hôpital ce qui était surprenant quand on savais que la dernière fis que j’y avis été, c’était parce que je m’étais cogné dans un placard de la cuisine, assez fort pour avoir besoin de point de suture évidemment. Quand j’y pensais bien, c’était sûrement pour ça que mon appartement était rarement rangé, rangé était terriblement dangereux et périlleux pour moi et en plus de ça, dès que je rangeais, je ne trouvais plus mes affaires, je devais les chercher deux fois plus que lorsque mon appartement était en bazar.

Heureuse d’avoir trouvé des bonnes raisons m’empêchant d’appeler Phoenix ou Mila l’aide le lendemain pour ranger mon appartement, j’allais chercher une éponge et nettoyais rapidement ce que j’avais renversé. Au fait le plus étonnant, c’est que malgré ma maladresse j’étais serveuse dans un restaurant chinois et ce n’était pas tout les jours que mon patron remplaçait les vaisselles.

-Tu peux servir, c’est dangereux quand c’est moi qui le fait.

Nathaniel était différent des autres, je n’aurais pas su dire exactement pourquoi mais c’était un fait indéniable. Peut-être était-ce simplement que j’avais une vision différente des choses depuis quelques semaines, peut-être était-ce juste parce que j’avais changé. Parce que oui j’avais changée, ça aussi c’était un fait, mais je ne savais pas jusqu’à quel point ni si ces changements avaient eu lieu dans le bon sens. Et puis il y avait cette tâche, ce détail insignifiant qui me perturbait autant. Plus tard, lorsque je me souviendrais de cette étrange journée je l’appellerais sûrement la journée à la tâche mais en attendant je ne pouvais m’empêcher de la regarder à intervalle régulier comme si elle allait disparaître comme ça, comme elle était apparue. Mes pensées tournaient et retournaient dans ma tête sans grande continuité entre elle, j’étais perturber par autre chose. Pour la première fois depuis des semaines, je me sentais en paix avec moi-même et en sécurité. Je ne connaissais pas Nathaniel et pourtant, c’était la première personne avec qui j’étais bien et sincère depuis que ma vie était sens dessus dessous. Je savais que je pouvais lui parler et j’étais sûre que la même certitude c’était ancrée en lui, comme si un accord tacite avait été passé entre nous.
Au moment où Nathaniel me dit qu’il était sûr que mon chat allait réapparaître, je vis la tête de ce dernier sortir de sous une chaise et fixé mon invité d’un œil méfiant, même le chat avait plus de jugeote que moi aujourd’hui, s’il avait été humain, je suis sûr qu’il ne l’aurait pas invité ici alors qu’il ne le connaissait pas mais c’était un chat alors la question ne se posait pas. J’écoutais Nath me parlé de ce qu’il faisait à Brooklyn tandis que mon chat le surveillait toujours du coin de l’œil. Moi, j’étais heureuse, j’avais retrouvé un peu de mon intuition et je me demandais pourquoi je passais mon temps à me souler alors que je me rendais compte que je n’en avais pas besoin pour aller bien.

-Ca peut paraitre étrange mais je te comprends. Il y a quelques années, j’ai ressenti ça, j’habitais en Colombie car c’est là que j’ai grandi, je faisais des études qui ne m’intéressaient pas plus que ça, j’étais étouffée par ma famille et je ne voulais rien d’autre que de la liberté. C’est pour ça que je suis venue à New-York, je voulais voyager et j’aurais du continuer mais mes finances ne me l’ont pas permis. Enfin, ça n’as pas d’importance, je suis bien ici ou du moins je l’étais… Je ne m’imagine pas refaire un truc comme ça, c’était fou comme idée.

Je me souvins du trajet jusqu’à New York, j’avais pris ma voiture bien que ça aurait été sûrement plus simple d’y aller en avion mais je ne voulais pas me séparer de cette dernière. Le trajet avait été particulièrement long et galère et je n’avais jamais été aussi contente d’arrivée à un endroit. En même temps New York était une ville exceptionnelle. Je ne crois pas que j’aurais pu faire la majorité des rencontres que j’avais faite ailleurs. Cette ville était magique et j’avais eu un peu trop tendance à l’oublier depuis quelques temps.

-Me voilà démasquer, moi qui voulais rester incognito. Que veux-tu, c’est moi la psychopathe, je te suis depuis des semaines et j’attendais de te parler pour que tu ranges mon appart’. Tu ne sais pas à quel point c’est dangereux le rangement.

Nath semblait réellement impressionné parce que j’avais fait et je ne pus réprimer mon sourire en repensant à la fois où j’étais tombée en panne de batterie et où j’avais du m’arrêter dormir dans un motel tout droit sortit d’un film d’horreur. Pour ceux qui me connaissait, cette histoire en disait long sur moi, je n’avais jamais été une aventurière ou du moins à chaque fois que je m’y étais essayé cela avait mal fini, et ils avaient beaucoup de mal à me voir seule traversait plusieurs pays au volant d’une voiture. La nouvelle de mon départ avait causé de nombreuses crises de nerfs chez m amère, elle ne comprenait pas que je ne prenne pas l’avion et encore moins que je parte. Elle ne m’avait jamais vraiment comprise de toute façon, l’autre jour, c’était la première fois et je sentais que ça ne se reproduirait pas de sitôt. C’était comme ça, on était trop différente toutes les deux : elle était chaleureuse, aimante, étouffante, elle aimait palabrer sur les autres et aimaient menés sa loi. Par certains côtés, j’étais comme elle, exubérante à l a limite d’être pénible, joyeuse, sociable, sauf que contrairement à elle j’avais besoin de liberté et de solitude, parfois. Du moins c’est ce que j’étais, je changeais tellement, je n’étais plus ni exubérante ni joyeuse juste morne, triste et vide et je détestais me retrouver seule, je détester cet appart’ où j’étais tout le temps, je voulais prendre un chien. Oui, un chien !!! Il me tiendrait compagnie, à défaut d’un mec, et il s’entendrait merveilleusement bien avec le chat ! Ce serait le rêve.

Nath se resservit à boire, tout à fait agilement, et je souris de nouveau. J’avais du mal à l’imaginer lui aussi en aventurier amis je supposais que si je pouvais le faire, c’était à la portée de n’importe qui. Toutefois, Nath m’avait l’air beaucoup trop posé et réfléchi pour partir comme ça du jour au lendemain, il avait des attaches ici, certes moi aussi j’en avais là-bas mais c’était différent.

-Je pense que tu devrais écouter ce que te dictes ton cœur. Ca peut paraître bidon comme conseil mais tu ne peux pas passer à côté d’une aventure pour des causes comme l’argent ou les études, tu n’as qu’une vie…

Une seule vie… C’était ça, lorsqu’on était jeune on profitait, on faisait la fête, on vivait à cent à l’heure et un beau jour on se levait et on se rendait compte qu’on avait loupé un truc important. C’est ce que ma mère avait toujours cherchée à m’expliquer et je ne le comprenais que maintenant. Evidemment, je n’étais pas vieille, j’avais à peine 26 ans, mais e me sentais usée comme une vieille et je trouvais ça stupide. J’avais envie d’en parler à Nath mais je ne savais pas vraiment comment amener la conversation dessus, on se connaissait à peine et aborder des sujets aussi personnelles étaient délicats.

-Si un jour tu as envie de visiter la Colombie dis le moi, je te conseillerais les bons endroits et les mauvais. Leurs hôpitaux sont excellents en tout cas, crois-en une femme d’expérience.
Je… non rien laisses tomber.

Je pris mon verre et but une gorgée de jus d’orange. C’était vraiment étrange comme situation et plus j’y pensais moins je comprenais ce qui se passais. Nath me sortit de mes pensées en jouant le jeu sur ce que j’avais dit à propos du rangement. Lorsqu’il parla du chat, j’éclatais de rire.

-Je te verrais plutôt en Tarzan qu’en Indiana Jones. De toute manière, si tu comptes sur mes sous, tu n’iras pas plus loin que… disons le bronx. Tu aimerais jouer les aventuriers là-bas ? Et je lâcherais le chat sur toi, il servirait de panthère.

Nath réfléchissait trop, je le voyais bien en même temps je n’avais rien à dire moi qui était tellement déraisonnable. Je pensais qu’il aurait fallu une sorte de juste milieu entre les deux, un juste milieu que j’étais incapable d’atteindre : j’avais beau avoir dit un peu plus tô, ou peut-être l’avais-je juste pensé, que je n’était pas prête à repartir, il n’en restait pas moins que si j’étais partie en Colombie il y a quelques semaines c’était pour fuir. J’étais incapable d’affronter les choses et j’avais choisi la Colombie comme j’aurais pu décider d’aller en Italie ou en Espagne. Je chassais ces pensées et me concentrais sur ce que Nath disait. Il parlait du fait qu’il m’emmènerait avec lui si il allait en Colombie et je ne pus m’empêcher de sourire en entendant que ça serait plus sûr comme ça. Il semblait d’être rendu compte de son erreur et rectifia ce qu’il venait de dire. J’éclatais de rire.

-En effet, j’ai des doutes sur le fait que ce soit plus sûr avec moi mais si au fait, imagines que tu te casses une jambe, grâce à moi tu pourras aller dans le meilleur des hôpitaux du pays. Même si il y a plus de chance que ça soit moi qui me casse une jambe.

Mon chat avait toujours un regard terrifiant, enfin je supposais que c’est ce que le chat voulait qu’il soit. Je lui fis signe de venir et il sauta sur mes genoux. Je le caressais et il se mit à ronronner sans pour autant lâcher Nath du regard. Je comprenais ce qu’il voulait dire lorsqu’il disait qu’il préférait une panthère. Quoique je pensais qu’une fois qu’il serait face à la panthère en question, il regretterait énormément le chat car, Gus n’avait rien d’un fauve. Ce n’était qu’un chat d’appartement qui occupait ses journées à dormir, manger, dormir, manger et encore dormir. D’ailleurs, je me demandais ce qu’il faisait le plus dans un journée manger ou dormir ?

-Oui, une panthère, mais c’est que si tu ne dépasses pas le Bronx, ça risque d’être difficile à trouver. En tout cas, rassures-toi, je doute que le chat apprécie une course poursuite, il ne sait que dormir et manger.

J’esquissais un sourire puis tournais mon regard vers la fenêtre, j’étais de bonne humeur… ou du moins je faisais tout pour l’être. Néanmoins, il n’en restait pas moins que j’allais mal et que j’avais besoin de parler. Je regardais le verre de jus d’orange vide, le paquet de chips qui n’était pas ouvert puis Nath. Il me regardait, ou plus exactement, il m’interrogeait du regard, comme s’il avait compris sans que j’ouvre la bouche ce que je ressentais et ce que je désirais. Il m’invitait à lui parler, à lui ouvrir mon cœur et je ne savais pas quoi faire à ce propos. C’est vrai que j’avais voulu lui parler à peine quelques minutes plus tôt mais je ne connaissais pas Nath. Je ne le connaissais pas pourtant j’avais la sensation d’être en confiance avec lui et je pensais que Nath pourrait bientôt faire partie des personnes à qui je me confiais, à mes amis. Je le regardais toujours puis soupirais.

-J’ai l’impression d’être dans un trou Nath, un trou noir et si profond que je n’en distingue pas la sortie. Il fait sombre, très sombre et je ne distingue plus la lumière. Pourtant avant, tout n’était pas comme ça. J’étais heureuse, joyeuse et j’avais la vie devant moi. Maintenant, il est partie et moi je me sens vieille, usée et fatiguée…

Je l’écoutais, je l’écoutais très attentivement et mettait toutes les forces qui étaient en mon pouvoir pour le croire. Oui, je voulais sincèrement le croire mais ce n’était pas si simple ou peut-être que ça l’était mais que je ne le voyais pas tellement je compliquait tout. Dans les deux cas, cela revenait au même, je ne parvenais pas le croire. Je regrettais presque les plaisanteries échangées tout à l’heure, à ce moment là je pouvais feindre et encore je n’étais même pas sûre que c’était ce que j’avais fait feindre. Mais l’heure n’était plus au rire et aux conversations légères. Je ne savais pas quoi dire et je me levais et me dirigeai vers la fenêtre du salon. Au dehors, je voyais une femme qui promenait son chien, un gamin qui faisait du skate, une voiture qui roulait trop vite et Mila qui rentrait chez elle. Eux étaient là, bien présents mais il n’était pas les seuls, d’autres personnes étaient là, des personnes que j’étais la seule à voir. Il y avait Apollon et son sourire, mystérieux et craquant, il me faisait fondre et pourtant, il m’avait suffit d’un rêve pour me séparer de lui, un simple et unique rêve qui avait décidé de tout le reste d’une vie. Je voyais aussi Casey, Casey qui me tenait par la taille, Casey qui m’embrassait, Casey qui me serrait dans ses bars, je pouvais presque sentir son cœur, sa chaleur alors qu’il était loin. Derrière lui je voyais cette blondasse de Cloé avec ses airs de propriétaire, elle me disait il est à moi et elle avaii.t raison, d’une certaine manière il ne m’avait jamais appartenu mais à présent il n’était plus à personne, ni à moi, ni à Cloé puisqu’elle était morte, un accident de voiture, je ne l’avais pas pleurer qui aurais-je été pour faire une telle hypocrisie. Je n’avais pas non plus été heureuse, la mort est quelque chose que je ne souhaite à personne même à mes pires ennemies. Je voyais aussi Jawon avec qui j’étais toujours amie et Shabella qui elle aussi était amoureuse en amour.

Je lâchais la fenêtre du regard pour me tourner de nouveau vers Nath qui était là et qui me regardait, je me demandais ce qu’il pouvait bien penser : de moi, de ce qui l’entourait… Je me demandais qui il était aussi, car pour moi il était quelqu’un de bien, mon sauveur mais j’étais certaine qu’il ne se limitait pas à ça, il était être un genre de superman avec se difficultés à lui aussi.

-Tu sais Nath, je meurs d’envie de te croire, vraiment… Mais il faut que je complique tout, je suis comme ça. Je n’arrive pas à voir les choses de cette manière même si je sais qu’il ne tient qu’à moi de le faire. Je me tus puis souriais. Je ne sais pas si tu te rends compte mais tu viens de me comparer à un appartement… Quoique la tâche au plafond pourrait correspondre à ma connerie.

J’attrapais le paquet de chips et l’ouvrit pour en prendre une poignée. J’avais parlé de moi, un peu et je n’étais pas sûre de vouloir entrer plus dans les détails. Ce n’était pas le fait que ce soit Nath en face de moi, Nath que j’avais rencontré pour la première fois il y a quelques heures. Au contraire, il était le premier à qui je parlais de ça. Non, c’était le fait que je n’aimais pas parler de moi ou plutôt le fait que je n’aimais pas parlé de moi quand il s’agissait d’évoquer des choses difficiles.

-Mais je sais que tu as raison, c’est évident… C’est dingue que la première personne à qui je parle réellement de ça soit quelqu’un que je ne connais que depuis deux heures tout au plus.