26 avril, 14h03 En me levant ce matin, je restai plusieurs minutes nez contre la fenêtre, émerveillée. Il faisait si beau ! Depuis ce glacial hiver que j'avais passé à New York, j'étais toujours autant réjouie par le beau temps. Le soleil était, pour moi, signe de bonne humeur pour toute la journée ! Je finis par réussir à m'éloigner de la fenêtre pour filer à la douche. Je sortis de la salle de bain une petite dizaine de minutes plus tard. Je m'habillai d'un short en cuir noir ainsi qu'une marinière bleue et blanche. Après quelques instants d'hésitations, je sortis une paire de chaussettes blanches puis mes converses rouges et les enfilai. Je me brossai ensuite les cheveux. C'était bien d'avoir les cheveux longs, mais parfois je regrettai l'époque de mes dix-huit ans, lorsque je les avais fait couper. J'entrais à l'université et j'allais épouser Ian, j'avais eu envie de changement. Je passais moins de temps à me démêler les cheveux... Je n'avais jamais fait recouper mes cheveux aussi courts, je les avais laissés repousser pour pouvoir me refaire des couettes. Je partis dans la cuisine prendre un jus d'orange. Pas la peine de manger plus, il était onze heures, j'allais bientôt déjeuner. J'avais beaucoup dormi... pourtant je ne m'étais pas couchée si tard que ça. J'avais éteint la télévision à vingt-trois heures trente, mon passionnant reportage sur le fonctionnement du cœur terminé. Je n'avais rien appris, mais les animations numériques étaient bien faites et m'avait donné envie de rester sur cette chaîne jusqu'à la fin du programme. Avant de sortir de l'appartement, je partis chercher mon sac à main et enfilai tout de même une petite veste, rose pâle. Je l'avais acheté dans la boutique de sweet lolita que j'avais trouvée lors de ma journée shopping avec Naoki mais ne l'avait pas encore mise. Plusieurs dizaines de minutes après, j'arrivai dans le Queens. J'avais proposé à Bailey de déjeuner avec lui ce samedi. Il avait aussitôt accepté et avait proposé que l'on se rejoigne dans le restaurant italien à côté de chez lui. Ce qui tombait bien, car c'était près de mon point de rendez-vous avec Cheyenne, à treize heures trente. J'avais hâte de la revoir... ça faisait un bail que je ne l'avais pas revue en vrai ! Je m'étais liée d'amitié avec elle durant le semestre que j'avais fait à l'université. Depuis, nous continuions à nous parler grâce aux nouvelles technologies, mais rien ne vaut des retrouvailles dans la vrai vie ! En raison du beau temps, il était prévu que l'on se retrouve à Jacob Riis Park. N'ayant pas pris de petit déjeuner, je commençais à avoir faim... si bien qu'au moment de commander, je pris une énorme pizza. Lorsque je la vis arriver, j'en bavais rien qu'à l'idée de la manger. Cependant j'eus les yeux plus gros que le ventre et heureusement que Bailey était là pour m'aider à la finir... bon, d'accord, je l'avais supplié de le faire, mais je n'aimais pas gâcher de la nourriture... surtout quand c'est si bon. Il y avait aussi le fait que je voulais une glace italienne après, mais aussi que je m'inquiète un peu quand je vois comment Bailey est épais. Toujours est-il qu'après manger, le ventre bien rempli, nous nous sommes quittés. Lui partit à son travail, et moi rejoindre Cheyenne. J'étais en retard, il était quatorze heures. J'avais une demie-heure de retard... voilà ce que c'était de partir dans de passionnantes discussions, on ne voit plus le temps passer... « Sa-luuuuuuut ! », m'écriai-je en lui faisant un grand signe de la main et avec mon grand sourire sur les lèvres. « Désolée de t'avoir fait attendre... je déjeunais avec mon cousin, je n'ai pas vu le temps passer... tu vas bien ? Nyaah, ça fait un siècle depuis la dernière fois ! » Un bon paquet d'années en tous cas !

« Salut ma belle ! Qu'est-ce que je suis contente de te revoir ! » Je souris en passant ma main dans mes cheveux. « Pareil pour moi ! Oh, ça me fait bizarre de te revoir... », dis-je, menton dans la main et en hochant légèrement la tête. Je relevai le regard vers elle. « C'est surtout que je n'ai pas revu de gens que je connais de Marseille depuis, nyah... depuis que je suis partie à New York en fait. Ah nan... en fait non, j'ai retrouvé quelqu'un à New York que je connaissais d'avant... » Ian. J'étais tombée dessus un beau soir, nous avions tous les deux la même personne à tuer. Ce manipulateur qui en fait, ne m'avait probablement jamais aimé. Et si, en fait... non. Je doutais qu'il m'ait dit qu'il avait quelqu'un d'autre dans sa vie juste pour que je ne le suive pas dans sa cavale et que je me mette en danger. Pff. S'il m'avait dit ça, aujourd'hui encore je serais persuadée qu'il m'avait vraiment aimé. Comme Baptiste l'avait fait et comme Naoki le faisait ! M'enfin bon, inutile de repenser à lui, il n'en valait pas la peine d'abord ! « Ca va très bien et toi ? Pas de souci pour le retard, je viens d'arriver moi aussi, d'ailleurs ça doit se voir ! » Je baissai légèrement la tête, essayant de trouver pourquoi elle disait que ça devait se voir. Ah, oui... elle était un peu décoiffée. Oh, pas tant que ça... juste un peu. « Moi aussi ça va bien... j'ai juste un peu mal au ventre, j'ai trop mangé... mais j'avais tellement faim ! Nyah, tu aurais vu ma pizza ! Je n'en n'avais jamais vu d'aussi grandes... qu'est-ce qu'elle était bonne. Et que dire de ma glace italienne à la vanille ! Deux vraies merveilles. Ah, pardon, je m'égare... », dis-je avant de rire, un peu gênée. Je fouillai rapidement dans mon sac, puis relevai la tête. « Je pensais avoir une brosse, pour si tu voulais te recoiffer, mais j'ai dû la laisser chez moi... de toutes façons, tu n'es pas beaucoup décoiffée. Et tu as toujours d'aussi beau cheveux !! », m'écriai-je joyeusement. Un beau brun et leur ondulation me donnait envie. J'avais toujours trouvé que Cheyenne avait de magnifiques cheveux. J'avais toujours eu envie de les avoir d'ondulés. Comme Cheyenne et comme Bailey ! Pourquoi la génétique ne m'avait pas fait hérité des boucles de ma grand-mère ? Ce n'était pas juste, nyah... En voyant mon amie s'asseoir sur la pelouse, je l'imitai. Sauf que, plutôt que de me laisser tomber délicatement ou de me baisser, je me laissai tomber sur le ventre, en me faisant un peu mal puis roulai sur le dos. « Alors, alors, dis-moi, quoi de nouveau depuis touuuuuuuut ce temps ? », questionnai-je en me redressant et en souriant. « Parce que bon, on a pas mal parlé sur internet et tout, mais on n'a jamais vraiment abordé ce sujet en fait ! », réalisai-je.

« La chance ! Je n'ai pas retrouvé d'amis que j'avais du lycée ni de la fac, malheureusement. Sauf toi ! » Je souris faiblement. La chance... même si au début, j'étais vraiment heureuse d'avoir retrouver mon amour, au bout de plusieurs mois, tout avait déraillé... « J'aurais préféré ne pas le retrouver... », soupirai-je, avant d'ajouter : « En tous cas, c'est vraiment cool d'avoir pu se retrouver ! C'est... nyahtique ! », assurai-je en hochant vivement la tête et en souriant. Je ne savais pas si Cheyenne se souvenait ou non de ma petite expression favorite et de l'adjectif qui en découlait, mais au moins comme ça, ça le lui rappellera peut-être. J'abordai ensuite mon merveilleux repas italien. « Tu me donneras l'adresse ? Il faudra que j'y aille absolument !  » Je sortis la carte de visite que j'avais prise sur la table à côté de la caisse de ma poche et la lui tendit. « Tu as de la chance que je prenne toujours une carte de visite des endroits où je vais ! J'ai pris la plus grande taille de pizza qu'il y avait, c'était excellent et copieux. Leurs pâtes ont l'air excellentes, et comme pour les pizzas tu as différentes tailles. Y en a pour toutes les faims ! », déclarai-je en riant doucement. Ce midi, c'était la première fois que j'y avais déjeuné. Avant, on avait déjà été prendre une glace avec Bailey, mais c'était tout. Nyah, je ne l'avais même pas remercié d'avoir payé ! Bah oui, il n'était pas obligé, surtout que c'était moi qui avait proposé d'aller manger ensemble... « Je te remercie du compliment, je t'avoue que je ne comprends pas pourquoi vous êtes si nombreux à aimer mes cheveux, je les trouve on ne peut plus normaux, d'ailleurs, je pense souvent à les faire couper ! » Horrifiée, j'attrapai Cheyenne par les épaules, mon es yeux écarquillés la fixant. « Ne fais jamais ça ! Non seulement ça serait de l'inconscience, mais en plus je suis sûre que comme moi, tu le regretteras. » Je ne pensais pas qu'elle se faisait souvent des couettes comme celles que j'avais l'habitude de me faire, mais j'étais sûre qu'elle risquerait de regretter sa longueur passée, pour une raison ou une autre. Peu après, je m'étalai sur l'herbe, avant de m'asseoir. « Oh, tout un tas de petites choses sans grande importance au premier abord mais qui finalement en ont une ! Déjà, plus le temps passe et moi Kaliska, ma jumelle, me donne de nouvelles. Heureusement que Jackson est là sans quoi je me croirais presque fille unique. C'est dingue d'être plus proche d'un frère adoptif que d'une soeur jumelle quand même ! Et puis sinon, toujours la galère pour trouver un emploi stable, je cumule les contrats de pigistes, j'ai d'ailleurs failli me faire virer la semaine dernière à cause d'un PDG prétentieux auquel j'ai eu le malheur de dire ces quatre vérités. » Je hochais la tête tout en l'écoutant. C'était vrai, Cheyenne avait elle aussi une sœur jumelle ! Je l'avais presque oublié dites-donc. « Tu as eu raison, faut pas se laisser faire par son patron ! » Enfin, y a juste dans le domaine du crime organisé où il faut mieux obéir. Évidemment. « C'est vrai que c'est surprenant que tu ne sois plus proche de ta jumelle. Ça me fait penser à Ian et Edouard, son frère jumeau, je t'ai déjà parlé d'eux, non ? Je crois que tu as connu Ian, il venait toujours me chercher après mes cours. Ils étaient hypers proches. Pas comme toi et Kaliska d'après ce que tu me dis. » J'avais toujours trouvé ça trop mignons, à quel point des vrais jumeaux ou vraies jumelles peuvent être proches... je ne sais pas si j'aurais bien aimé avoir une jumelle. Deux Billy, ça m'aurait sûrement fait bizarre ! Ça doit faire drôle, de voir son double à côté de soi. En plus, c'est la galère pour les proches de les reconnaître ! Je m'étais fait avoir, et ça avait été la cause du plus grand malentendu de ma vie...

« Oui, je me souviens très bien de lui ! D'ailleurs tu as eu de ses nouvelles récemment ? Je ne sais pas du tout ce qu'ils sont devenus depuis que je suis partie... » De ses nouvelles ? Oui, et pas des meilleures. L'un s'était sacrifié pour sauver la vie de l'autre, et ce dernier m'avait quitté en me disant qu'il avait rencontré une autre femme avec faire sa vie et que c'était pour cette raison qu'il refusait que je l'accompagne dans sa cavale. Il m'avait fait croire qu'il m'aimait sans doutes pour pouvoir profiter de la richesse de ma famille, et moi, comme j'étais follement amoureuse pour la première fois de ma vie, je n'y avais vu que du feu. J'avais du mal à croire qu'il s'était ainsi joué de moi. À notre mariage, il semblait si sincère. J'avais même vu des larmes dans ses yeux, ces larmes étaient-elles feintes ? De toutes façons, notre relation en 2013 était étrange. On était à nouveau proches mais sans réellement l'être. Nous allions à vau-l'eau, notre relation avait été gâchée par son mensonge, de toutes façons. J'avais du mal à imaginer qu'il avait pu me manipuler ainsi. Ian avait beau avoir laisser tomber son ex enceinte pour moi, c'était quelqu'un de bien, très attaché à sa famille, au point d'avoir mal tourné juste pour pouvoir les aider. Je trouvais ça tellement triste... Enfin bon, il ne fallait pas que je repense à tout ça, j'allais me plomber le moral et ça tomberait vraiment mal, j'étais si heureuse d'enfin retrouver Cheyenne en chair et en os ! Il allait d'ailleurs falloir que je trouve quoi lui répondre. Je ne pouvais pas lui dire la vérité, tout de même ! Et puis, aussi et surtout, je n'avais pas envie de m'attarder davantage sur son cas, à ce breton que j'avais tant aimé. De toutes façons, je n'avais plus de sentiments envers lui. J'étais passée à autre chose, et ce grâce à Naoki qui m'avait sauvée du suicide. « Oh, non. Pas de nouvelles depuis longtemps. On était en couple mais ça n'a pas longtemps marché tout compte fait. Et on a perdu contact. Mais bon, maintenant je suis à nouveau en couple, avec mon premier amour. » Premier amour... je disais souvent de Naoki qu'il était mon premier amour, mais c'était faux, en réalité. Mon premier amour, ça datait de la primaire, c'était Baptiste. J'aimerai bien avoir de ses nouvelles, d'ailleurs... on ne s'était pas revus depuis si longtemps... depuis mon départ à New York, c'est-à-dire 2010. Ça faisait beaucoup de temps, tout de même !

« Je devrais essayer de reprendre contact avec lui, ce serait sûrement sympa de se retrouver après tout ce temps ! Ca y est, je vais organiser des retrouvailles avec toutes mes anciennes connaissances ! » J'essayai, mais ne réussis pas à retenir un petit rire nerveux. Essayer de retrouver Ian ? Elle allait se retrouver face à un profil facebook non mis à jour depuis le 12 juillet 2010. En allant voir celui d'Edouard pour essayer de retrouver Ian, à un profil facebook non mis à jour depuis le 1er juillet 2010. Seuls ceux du reste des Kazuka avaient été mis à jour plus récemment. Mais mieux valait qu'elle n'aille pas leur demander des nouvelles. Même si ça datait à présent, ce n'était pas facile pour son frères et ses sœurs de parler de Ian. Et dire qu'ils ne sauront jamais la vérité... « Et bien, nyah, ça pourrait être une bonne idée oui... c'est toujours bien de retrouver d'anciennes connaissances... mais je ne suis pas sûre que tu réussiras à le retrouver, lui... » Je n'avais pas la moindre idée du pays dans lequel il avait bien pu fuir. Sûrement quelque part d'improbable, histoire de ne pas risquer d'être retrouvé et de pouvoir vivre bien tranquillement avec sa nouvelle petite amie... J'aurais pourtant aimé pouvoir vivre avec Ian jusqu'à la fin. On s'était tout de suite bien entendus et nos quelques disputes étaient toujours causées par un choix qui risquait d'avoir des conséquences néfastes pour l'autre. Comme lorsque j'avais décidé que moi aussi j'allais dealer de la drogue et que lui avait décidé de se suicider à la période suivant celle où je sortais avec Lopez, l'un de ses ennemis. Adolescente, je n'avais pas vraiment conscience du mal que ce genre de chose peut faire, il faut croire.... même si je me souvenais encore d'à quel point j'avais eu mal lorsque je l'ai vu embrasser ma meilleure ami d'enfance. Enfin bon. Tout ça était passé, j'avais retrouvé Naoki maintenant et j'en étais très heureuse... « Le principal c'est que tu sois avec celui qui te convient vraiment et que vous puissiez profiter de la vie ensemble ! » Je hochais joyeusement la tête. Je ne voyais vraiment pas la moindre ombre au tableau, rien ne pourrait se faire se terminer le chapitre de ma nouvelle vie avec Naoki. « Entièrement d'accord ! Et toi, tu as quelqu'un avec qui partager ta vie ? », demandai-je d'un ton enjoué, comme toujours.

© Fiche de Hollow Bastion sur Bazzart

« Oh, avec les nouvelles technologies de maintenant, ce n'est pas bien compliqué de retrouver quelqu'un ! Depuis quand tu n'as pas de nouvelles de lui et de sa famille ? Qu'est-ce que disaient les dernières nouvelles ? » Pour être honnête, ça faisait vraiment longtemps que je n'avais plus eu de nouvelles des Kazuka... Un an. Lorsque j'avais eu ma mère au téléphone pour le Nouvel An, je lui avais juste demandé de leur dire bonne année de ma part. Tandis que je réfléchissais, j'avais le menton dans la main. Je finis par soupirer puis gonfler légèrement les joues, mimique habituelle chez moi. Ce que disait les dernières nouvelles n'était pas très réjouissant. La petite dernière était toujours en dépression depuis la mort de celui qu'elle croyait être Ian. Malo et Misa allaient bien, Soazig s'inquiétait de ne plus avoir de nouvelles de son fils aîné, partis à New York pour veiller à ce que j'aille bien. Je ne pouvais pas répondre ça. « Nyah, tu n'as pas tort. Et bien, ça fait un an. Un peu plus, sûrement. Ça ne disait pas grand chose d'inhabituel... » D'un côté, ce n'était pas tout à fait faux. Pauvre Saeko, quand même... en dépression à son âge, je trouvais ça vraiment triste et j'espérais qu'elle allait bientôt s'en sortir. « Eh non, je n'ai que le célibat pour compagnie, ou Casper si tu préfères ! Ce n'est pas dans mes projets de me mettre en couple, sûrement parce que je n'ai pas encore trouvé chaussure à mon pied... Je dois dire que j'ai l'impression que je ne suis pas faite pour ça... J'ai connu un garçon avec qui je suis restée plusieurs années mais j'ai fini par rompre l'année dernière, il ne me convenait pas... Et puis, en toute sincérité, j'ai déjà une présence masculine, certes d'une autre nature, mais qui me suffit parfaitement, c'est celle de mon frère... » Oh... je voyais. Je hochai la tête tout en l'écoutant, chose que je faisais souvent. « C'est sûr qu'il vaut mieux être seule que mal accompagnée. Je peux comprendre que ton frère te suffise en tant que présence masculine, pour être honnête, je crois que si je n'avais pas retrouvé mon premier petit ami, enfin, second que j'ai vraiment aimé, la présence de mon cousin me suffirait sûrement. Il est un peu étrange parfois mais adorable. Je ne sais plus si je t'en ai déjà parlé... on a souvent parlé de tout et rien, donc bon... Il s'appelle Bailey, ça te dit quelque chose ? » Je ne me souvenais plus si j'en avais déjà parlé à Cheyenne. Comme je venais de le dire, on avait tellement parlé toutes les deux ! « On ne se voyait pas souvent avant, donc peut-être que je ne t'ai jamais rien dit sur lui en fait. », réalisai-je.

« Ca fait longtemps quand même ! Si ça allait la dernière fois, c'est déjà une bonne nouvelle mais je ne sais pas si ça va être si facile que ça pour retrouver Ian du coup... » Je levai la tête, faisant mine de réfléchir sérieusement. C'était facile à faire, il me suffisait d'arborer mon air concentré, lèvres légèrement rentrées, regard vers le haut. Je finis par retrouver un expression neutre et hochai lentement la tête. Même si j'essayais de retrouver cet idiot, je n'étais même pas sûre que je réussirais, même si contrairement à Cheyenne – enfin, d'après moi – j'avais des contacts calés dans le piratage informatique qui pourraient peut-être trouvé avec quelle identité mon mari se retrouvait désormais. Devoir changer d'identité devait tout de même être perturbant, au début. « Et bien en tous cas si tu arrives à le retrouver, préviens-moi ! », prévins-je joyeusement, avec mon grand sourire. Je me ferais un plaisir de lui faire regretter de s'être ainsi joué de moi et de m'avoir annoncé son départ par téléphone. Ça pourrait être drôle de le frapper en hurlant ce que j'avais sur le cœur. Mais bon, de l'eau avait coulé sous les ponts. J'étais très heureuse avec Naoki, ça pourrait être pire. Je n'aimais pas la solitude. « Bailey ? Non, son nom ne me dit rien... C'est vraiment génial de pouvoir compter sur sa famille en tout cas, tout le monde n'a pas cette chance. Si je te dis que je n'ai pas vu ma soeur jumelle depuis 10 mois et que j'ai très souvent de ses nouvelles par nos parents à moins que je l'appelle directement, tu me crois ? On est pourtant de vraies jumelles... Au début ça me faisait de la peine mais j'ai fini par prendre mon parti et Jackson comble parfaitement ce manque...  » Je souris à ses paroles. Ma famille était importante pour moi. La preuve, je vivais avec ma cousine... Mauvais exemple. J'avais retrouvée April chez moi, un beau soir. Ce n'était pas par choix qu'on vivait ensemble, mais tout compte fait j'en étais heureuse. « Elle vit loin ? C'est vrai que la distance, c'est vraiment pas pratique pour entretenir des relations... Ma meilleure amie d'enfance a déménagé pendant mon adolescence, on a plus ou moins perdu contact... J'aurais aimé avoir un frère ou une sœur, mais à la place j'ai longtemps vécu avec ma cousine. Encore aujourd'hui, on vit ensemble. Je m'occupe d'elle comme si c'était ma petite sœur, mais bon, ce n'est pas ma sœur... C'est drôle, j'ai l'impression que je ne suis pourtant pas fille unique, que ce soit avec April ou Bailey. Il est plus vieux que moi pourtant parfois j'ai l'impression d'agir en grande sœur. Il est un peu étrange... Il est horriblement sarcastique, ce qui à force est dur à supporter, et avant il était policier. Maintenant il est fossoyeur. Je sais pas trop pourquoi il a changé de métier, on ne se voyait vraiment pas beaucoup avant... » J'avais une famille vraiment particulière à mes yeux, mais au moins, ça empêchait la routine...

« Oui, elle s'est installée à Londres depuis plusieurs années déjà. Elle a toujours eu un caractère spécial et j'ai toujours été plus proche de Jackson que d'elle, aussi étonnant que cela puisse paraître. Elle, d'ailleurs, elle n'a jamais porté une grande affection à notre frère et je la soupçonne d'ailleurs d'être jalouse de notre relation à tous les deux... » Un caractère un peu spécial ? Je lançai un regard interrogatif à Cheyenne, tête légèrement penchée vers la gauche. Je crois que j'avais un peu l'habitude des personnes aux caractères spéciaux, avec April et Bailey... « Je ne me souvenais pas que tu étais si bien entourée ! En tous les cas, tu as bien de la chance, profites-en, la famille c'est vraiment quelque chose d'unique ! J'aimerais bien pouvoir garder le contact avec une cousine ou un cousin mais je ne les connais pas du tout, je ne sais même pas combien j'en ai ni où ils vivent. Heureusement que j'ai Jackson, il comble tous ces manques, vraiment, je ne sais pas ce que serais sans lui... » Je posai ma tête dans l'herbe. Je trouvais ça un peu étrange, quand même, ce que Cheyenne disait à propos de Jackson. Oui, je disais que je la comprenais et que si je n'avais pas Naoki, la présence de Bailey me suffirait en tant que présence masculine, mais bon... le relation de Cheyenne et Jackson semblait être bien plus ! Tant mieux pour eux, s'ils s'entendaient bien ! « Oui, j'ai de la chance ! Et bien, essaie de les contacter ? À l'époque je n'étais pas entourée de la même façon, ça doit être pour ça que tu ne t'en souviens pas. Mon cousin et ma cousine n'était pas avec moi. Par contre, j'avais ma belle-famille. C'est vrai que la famille, c'est bien, mais parfois, j'ai l'impression qu'à force de devoir jouer le rôle de l'aînée, je vais craquer... », ajoutai-je avec un léger sourire en coin. J'aimais ma famille, ce fait était indéniable, mais c'était vrai que n'avoir personne pour s'occuper de moi, je trouvais ça dommage. Mais bon. Ce n'était pas grave, j'avais l'habitude. Et puis j'avais Naoki pour s'occuper de moi ! Pas de grand frère ni de cousin plus âgé dont je n'avais pas à me soucier, mais le meilleur des petits amis. Ce qui était selon moi bien mieux.

« Oh tu sais, pas besoin d'être l'aînée de la famille pour avoir toutes les responsabilités ! J'ai 6 ans de moins que Jackson et je suis très souvent sur son dos, il fait vraiment des bêtises dignes d'un gamin des fois, du coup je passe mon temps à le réprimander. Par exemple, il fume beaucoup trop et consomme bien trop de café... » Ce n'était pas grand chose, ça... Enfin, je comprenais ce que voulait dire Cheyenne. Même ce genre de chose, à force, ça pouvait énerver. Je tournai ma tête et regardai quelques instants mon amie, avant de répondre. « Mieux vaut que ce soit de la cigarette et du café plutôt que de la drogue et de l'alcool, non ? » L'après-midi où j'avais retrouvé par hasard Bailey, dans un bar avec un verre de saké pour seul compagnie, j'avais remarqué ses cernes et son regard quelque peu ailleurs. Je n'avais pas pu m'empêcher de revoir en lui ces drogués à qui je vendais la marchandise. Je reposai mon regard vers le ciel. Le soleil m'aveuglait, je me retrouvai rapidement contrainte de fermer les yeux. Je soupirai longuement. La chaleur était tellement agréable, et ce soleil ! Depuis le temps que je l'attendais... le beau temps me rendait tout le temps joyeuse. « Je t'envie. J'aimerai ne pas à avoir à surveiller mon cousin pour empêcher une tentative de suicide. », ajoutai-je avec une pointe de tristesse. Lorsque j'avais dit à mon oncle que j'avais retrouvé Bailey et que j'en étais fort heureuse, il m'avait demandé de bien prendre soin de lui... Roméo m'avait à ce moment-là dit que son fils avait fait plusieurs tentatives de suicide et qu'il avait des problèmes de dépression. Je m'inquiétais aussi énormément pour April, qui m'avait avoué qu'elle était schizophrène. Je soufflai sur la mèche de cheveux venue se placer sur mon nez. C'était bien d'être entourée comme je l'étais, mais ça avait aussi des côtés moins joyeux... « Enfin bon, mis à part pour ça, et le fait que ça implique que je suis la seule capable de les surveiller, c'est vrai que c'est bien la famille. », assurai-je. C'était vrai.

« Pour une personne dans un état de santé normal, c'est vrai que c'est préférable à la drogue et l'alcool, mais dans l'état de Jackson, ça revient exactement au même... Il m'a avoué, par la force des choses, il y a peu de temps, qu'il avait une insuffisance rénale grave, du coup, tout ça ne fait qu'endommager davantage ses reins, surtout qu'il néglige de se faire soigner, j'ai comme l'impression qu'il s'en fout d'y rester en gros. » Ah. C'était sûr que dans ce cas... ce n'était pas tout à fait pareil, en effet. C'était triste tout de même d'entendre ça. Il se ficherait d'y rester alors qu'il avait une adorable sœur qui prennait soin de lui ? Oui, c'était triste. Après avoir un peu parlé avec Bailey quand on s'était retrouvé, j'avais réussi sans grand mal à le convaincre de ne pas reprendre un second verre d'alcool. Enfin, second, rien ne me disait qu'il n'en n'avait déjà pas bu d'autres avant que j'arrive. Il allait se ruiner la santé, à force... « Je te comprends, ma belle, ils nous font involontairement souffrir nous aussi... Depuis que je sais ça pour Jackson je n'arrête pas de me faire de souci, surtout quand il n'est pas en ma présence et que je ne peux pas le surveiller, il n'a personne pour prendre la relève et lui empêcher de se détruire davantage, dans ce cas, il ne me reste plus qu'à espérer qu'il ait un déclic et qu'il se reprenne en main avant qu'il ne soit vraiment trop tard... » Ils nous font aussi souffrir, oui, enfin bon. « En ce qui me concerne, je sais que Bailey et April souffrent bien plus que moi... » J'avais failli dire bien plus que j'avais pu souffrir, mais je m'étais souvenue de tout ce que j'avais eu à endurer à cause de Ian entre autres... et je m'étais aussi souvenue que j'avais la chance d'être en bonne santé – physique et mentale. Roméo m'avait aussi dit que lors de la dernière thérapie psychologique de son fils, il avait été découvert qu'il souffrait de trouble de la personnalité borderline. Lorsque les sarcasmes de Bailey commençaient à m'agacer, je m'efforçais de ne rien répondre de méchant pour ne pas qu'il le prenne au sérieux et se retrouve à tenter de se tuer en croyant que j'allais l'abandonner. Et April, ma pauvre April... la schizophrénie est une maladie qui, d'aussi loin que je me souvienne, m'a toujours foutu la trouille.

« C'est difficile dans cette situation de garder un peu de temps et de force pour penser à soi... » Nyaaah... C'est qu'elle était bien inquiète la Cheyenne. J'avais envie de lui dire qu'il avait sûrement une raison pour agir ainsi et que, s'il s'obstinait à se taire de cette façon, ça serait à elle de la découvrir, mais je préférais dire autre chose. Quelque chose du genre... « Ah, mais il ne faut pas se laisser abattre de cette façon voyons ! », annonçai-je joyeusement en lui donnant une tape amicale sur le bras. Je me relevai d'un bond et me postai devant elle, devant ses pieds, mains sur les hanches et un grand sourire aux lèvres. « Qu'est-ce qui pourrait te changer un peu les idées, dis-moi ? », interrogeai-je. Je savais à quel point parfois, un petit tracas pouvant sembler insignifiant aux yeux des autres pouvait être dur à supporter pour la personne qui avait à le subir... J'aurais bien aimé avoir quelqu'un pour me remonter le moral quand j'avais eu des soucis. J'avais tendance à être moi aussi triste quand les autres étaient tristes. Je n'aimais pas voir les gens que j'aimais être malheureux. C'était entre autre pour ça que je voulais voir Bailey le plus souvent possible, pour essayer de lui remonter le moral. Il avait toujours l'air heureux, mais vu ce que son père m'avait dit je me doutais qu'il faisait semblant d'aller bien. Ça devait être dur à vivre. Très difficile. Je feignais parfois la bonne humeur, avant. Mais la majorité du temps, je n'essayais pas de cacher ma tristesse. J'aurais aimé avoir de l'aider pendant ces deux ans où j'ai cru Ian mort. Malheureusement, je n'en n'avais pas beaucoup. Il y avait bien Allison, mais à part elle personne. Puis, quand j'ai appris la vérité et que je me suis sentie encore plus mal, April est arrivée. Encore après, j'ai cru que j'allais pouvoir vivre à nouveau heureuse avec lui. Il m'a eu, je me suis sentie encore plus mal et là, je n'avais vraiment plus personne. Jusqu'à ce que la chance me sourie et que je retrouve Naoki. Je m'étais laissée allée, je voulais mourir, il m'avait sauvée et montré à quel point la vie pouvait être belle lorsque l'on était deux. Lorsque l'on était deux, à s'aimer sans avoir à se poser de questions, la vie était vraiment belle. C'était peut-être de ça dont avaient besoin Cheyenne et Bailey ? Mais oui, dans ce cas... Je n'avais qu'à les présenter ! Comme ça, peut-être qu'ils finiront en couple et seront tous les deux heureux, peut-être que Cheyenne arrêtera de souffrir autant car son frère ne veut pas lui dire pourquoi il néglige sa santé. C'était une bonne idée, non ?