En zappant la veille à la télé, Bonnie était tombée sur une émission qui avait attiré son attention. Le sujet était à propos des enfants, en foyer d’accueil ou non, adoptés ou non, maltraités. Cela n’aurait pas dû interpeller la jeune femme et pourtant… Il faisait directement écho à sa propre vie. Ou en tout cas à celle de sa fille. Celle-ci avait à présent un an et demi et vivait depuis sa naissance avec un couple en apparence bien sous tous rapports dans le New Jersey. Les parents avaient été soigneusement choisis par Pablo et Bonnie. Ils voulaient le meilleur pour leur fille comme c’était précisément pour cette raison qu’ils la mettaient à l’adoption. Ils pensaient avoir trouvé le couple parfait et pourtant… Bien mal leur en avait pris… Suite à une demande de la brune, l’ancien couple avait entrepris un petit voyage dans le New Jersey. Ils voulaient simplement voir Sophia, s’assurer qu’elle allait bien. Bonnie avait toujours regretté de l’avoir abandonnée et elle s’était dit qu’elle souffrirait peut-être moins en la voyant. Elle avait juste besoin d’être rassurée et well… Cette visite avait eu l’effet inverse. Ils avaient rencontré par « hasard » la baby-sitter de la petite dans un par et avaient discuté avec elle et ils avaient appris des choses assez… effrayantes. Apparemment les parents n’étaient pas si attentionnés et doux qu’ils en avaient l’air. La jeune fille ne l’avait pas exactement dit comme ça mais ils la maltraitaient en somme. Il n’en avait pas fallu plus à Bonnie pour se mette en tête de sortir sa fille de là et de la récupérer. Sophia ne pouvait pas rester chez eux et elle ne pouvait pas aller chez quelqu’un d’autre non plus, Bonnie ne referait pas la même erreur et ne laisserait personne d’autre la toucher.

La jeune femme avait déjà contacté un avocat pour savoir quelles étaient ses possibilités. Elle s’était bien sûr renseignée de son côté mais elle préférait être sûre de tout. Puis grâce à cette émission, et son intervenante plus particulièrement, une certaine Meeka-Luz Salvoni, elle s’était dit que cette femme pourrait lui être utile également. Comme elle était spécialisée dans les droits de l’enfant. Un deuxième avocat ne pourrait pas lui être de trop… Puis peut-être que celle-ci pourrait… veiller sur Sophia comme elle n’était pas en mesure de le faire elle-même. Bonnie avait immédiatement appelé son cabinet pour prendre rendez-vous, précisant que c’était assez urgent. Malheureusement, elle n’avait pas réussi à en obtenir un tout de suite. Qu’à cela ne tienne, comme elle refusait qu’on lui dise non, et surtout pas sur un sujet important, elle s’était mise en tête de forcer cette rencontre. Elle attendait donc Mademoiselle Salvoni de pied ferme, à la sortie de son cabinet. Elle ne tarda pas à l’apercevoir et dès qu’elle passa vers elle, Bonnie se plaça devant elle pour lui barrer la route. « Meeka-Luz Salvoni ? » Elle n’avait aucun doute sur le fait que c’était elle bien sûr. « Je suis désolée de vous déranger comme ça mais je n’ai pas pu avoir de rendez-vous et j’ai un problème assez urgent que je dois régler tout de suite. Ou le plus rapidement possible en tout cas et je vais être claire tout de suite, je n’ai pas envie d’aller voir quelqu’un d’autre, c’est de vous dont j’ai besoin. »

Bonnie n’avait pas hésité une seule seconde avant d’aller rendre visite à cette avocate qu’elle avait vue à la télévision. Le sujet de l’émission sur laquelle elle intervenait avait immédiatement interpellé l’américaine, il faisait directement écho à sa propre vie et elle s’était dit que du coup, cette Mademoiselle Salvoni serait très bien placée pour l’aider. Bonnie n’avait pas encore fait part à Pablo de son désir d’engager un avocat. Ils étaient encore sous le choc et ils n’avaient pas tellement parlé de ce que cela impliquait par rapport à eux et à leur fille, et c’était une décision qui devait se prendre après avoir été murement réfléchie. Or, la jeune femme était encore sous le choc et le coup de la colère, de la culpabilité, de l’incompréhension… Elle avait déjà contacté une autre avocate, pas forcément spécialisée dans les droits de l’enfance. Puis un avis serait mieux que deux, et plus d’aide ne pourrait pas être de refus. Elle aurait tout le temps d’en parler à Pablo après.

La priorité était Sophia et Bonnie ne laisserait rien l’arrêter. Elle ne se laisserait pas dire non, elle insisterait jusqu’à se faire virer par la sécurité… Justement, arrivée au cabinet où travaillait la jeune femme qu’elle désirait rencontrer, elle se vit refuser un rendez-vous immédiat. Elle devait attendre plusieurs et c’était impensable, impossible… Elle décida donc d’attendre l’avocate et de forcer la rencontre. Après avoir un peu attendu, Meeka-Luz ne tarda pas à apparaitre dans son champ de vision. Loin de se laisser refroidir par la perspective de paraitre malpolie et très envahissante, Bonnie la suivit et la rattrapa une fois arrivées dehors. Elle s’excusa alors pour la surprendre comme ça avant de lui expliquer qu’elle avait besoin d’elle et que c’était urgent. « Ce n’est pas grave, vous m’avez juste prise au dépourvue… Je dois me rendre dans le café d’en face pour prendre de quoi être de nouveau opérationnelle, vous n’avez qu’à m’attendre devant mon bureau, j’arrive tout de suite. » Bonnie fut quelque peu surprise de se voir dire oui si rapidement. Surprise mais contente malgré tout. Elle hocha alors la tête, les lèvres pincées – elle n’arrivait pas à faire disparaitre sa peur et se détresse de ses traits. « Merci, merci infiniment. » Elle regarda la jeune femme s’éloigna avant d’entrer à nouveau dans le cabinet.

La jeune américaine n’eut pas à attendre bien longtemps : en effet, Meeka-Luz revint quelques minutes à peine plus tard, ne lui laissant pas le temps de trouver le temps long. Elle la fit entrer dans son bureau et Bonnie s’installa et garda le silence jusqu’à ce que son interlocutrice ne prenne finalement la parole. « Je vous écoute. Que se passe-t-il de si urgent, Madame... ? » « Fitzgerald » l’informa-t-elle en fixant malgré elle le bloc-notes ou elle allait écrire toutes les informations concernant son « problème ». « C’est à propos de ma… fille » commença-t-elle d’une voix hésitante, ne sachant pas si elle pouvait encore considérer Sophia comme sa fille. « Sophia. Pour faire court, je l’ai faite adopter à sa naissance, il y a plus d’un an et demi et je viens de découvrir que ses nouveaux parents la maltraitaient. Et même si je sais que je n’ai plus de droit sur elle, je ne peux pas rester sans rien faire. » Une boule s’était à nouveau formée dans sa gorge, elle n’arrivait vraiment pas à rester détachée quand elle en parlait. Elle s’en voulait tellement, elle avait personnellement choisi ce couple ! « Je ne sais pas quoi faire alors j’espérais que vous pourriez m’aider… Je vous ai vu dans cette émission hier et je me suis dit que vous seriez la personne la plus indiquée pour m’aider. »