La lumière du soleil me fait mal aux yeux. Pourtant, j'ai fermé les rideaux . Poussant un grognement, je me tourne et me retourne sans arrêts dans mon lit pendant cinq bonnes minutes, désirant retrouver le sommeil mais tout simplement incapable. J'ai bu un peu beaucoup hier soir. Pas le courage de sortir et d'aller en soirée, non. Juste des bouteilles et moi dans mon appartement. Oui je sais, boire chez soi, tout seul comme un miséreux, c'est pitoyable, mais vous savez quoi ? Je vous emmerde. Sérieux, si j'ai envie de passer mes journées à rien foutre, ça me regarde. J'ai soupiré en comprenant que non, je ne vais pas réussir à me rendormir. Tourner la tête vers le réveil m'apprend qu'on est déjà dans le milieu de l'après-midi. Ouais, déjà. Je me suis gratté la tête dans un mouvement lent, pas très bien réveillé. J'ai l'impression qu'un avion s'est crashé dans ma tête. Les minutes ont défilé tandis que je cherche à trouver le courage de me lever. Je dois voir Sephora aujourd'hui, c'est vrai. Je n'ai aucune excuse pour ne pas y aller, à part celle d'être un connard. Et puis j'ai envie de la voir, ça fait tellement longtemps. Les choses sont devenues vraiment compliquées ces derniers temps. Après une éternité, je réussis enfin à me redresser. L'impression d'être sur un bateau mais ça va, comme gueule de bois j'ai connu pire. Seulement voilà, elle est dans ma tête. Elle est dans ma tête quand j'ouvre les yeux le matin et quand je les referme au milieu de la nuit. Je sais pas comment faire pour ne pas penser à elle. J'ai toujours l'impression qu'elle est là, quelque part, dans un coin de ma tête alors qu'en réalité ... En réalité tout un océan nous sépare. Me dire ça me donne envie de crever. Pour ce que je fais de mes journées, ça ne changerait pas grand chose. Ensuite, je me souviens la façon dont on s'est quittés et je suis obligé de constater que je ne peux pas me plaindre. C'est de ma faute après tout, si elle est partie en pensant que j'étais un enfoiré de première. J'ai plus qu'à vivre avec, tout en vivant sans elle.

J'ai fini par quitter mon lit après de longues minutes à y être resté en train de comater. Direction la douche, histoire que Sephora ne prenne pas peur quand je vais arriver. Depuis qu'Azylis est retournée en Ukraine tout semble différent alors que je sais que c'est pas le cas. Tout a perdu son intérêt. Je laisse couler l'eau brûlante sur ma peau un long moment, sans réagir, appuyé contre le mur carrelé de la cabine de douche. J'ai mal au coeur, pas seulement à cause de l'alcool que j'ai ingurgité hier soir. Le réveil est assez brutal. Prendre une bonne douche a toujours été un bon moyen pour me dessouler. Là encore, c'est efficace. Je ressors de la douche, une serviette enroulée autour de la taille en me disant que passer un peu de temps avec Sephora, ce qui n'est pas arrivé depuis trop longtemps, va être sympa. Ca va m'empêcher au fait que ma vie a pris une tournure merdique depuis plus d'un an maintenant. Je soupire en me foutant des claques mentales. Sois pas un mec qui passe son temps à se plaindre vieux. Non ce n'est pas ce que je fais, la plupart du temps je garde tout pour moi et des fois, ça ressort, c'est tout. J'enfile un jean bleu foncé, un sweat et prends ma veste qui est mise n'importe comment sur le canapé. Je sais pas comment j'ai fait pour me réveiller à temps pour aller au café, j'avais oublié de mettre le réveil hier soir. Une chance. Avant de partir, je jette un coup d'oeil dans le miroir de l'entrée pour voir de quoi j'ai l'air. La casse est limité, même si on peut deviner que j'ai quand même un peu de mal en ce moment. J'ai pris la voiture pour aller dans le Queens, pas d'humeur à prendre le métro, pourtant ça m'aurait permis de prendre l'air. Le trajet dure quelques minutes de trop à mon goût. Si ça continue je vais être en retard. Je me souviens du message que j'ai laissé il y a un mois quand Sephora a accouché. Je me souviens être allé la voir ensuite, mais étant trop fatiguée, ça n'a pas duré très longtemps. Une fraction de seconde, je ne voulais pas la réveiller. Un mois déjà. C'est avec cette pensée que je me gare à quelques mètres de café où elle a fixé notre rendez-vous. C'est impression comme des fois, les choses s'enchaînent d'une telle façon qu'elles réussissent à séparer des gens qui sont pourtant proches. La vie dans toute sa connerie. Les mains dans les poches, les clefs à la main, j'ai franchi le seuil du café, sourire aux lèvres malgré tout ce que je viens de vous dire. Mon regard tombe rapidement sur Sephora tandis que me pieds me guident jusqu'à elle et notre table. « Hey Alec ! Comment tu vas aujourd’hui ? » lance-t-elle en me voyant arriver. Honnêtement, ça fait du bien de sourire. « Hey ! » ai-je fait en m'asseyant en face d'elle, détendu, avant de répondre à sa question. « Ca va plutôt pas mal ... et toi ? Comment vont les petits ? » ai-je demandé prudemment. C'est étrange de lui demander ça. Seph' a toute une vie de famille maintenant, même si je n'en connais pas vraiment les détails, vu que ça fait longtemps qu'on ne s'est pas croisés. Ca ne m'empêche pas de savoir le plus gros des problèmes concernant ses enfants ... Seulement commencer tout de suite la discussion par les problèmes ... « Ca me fait plaisir de te voir en tout cas, ça faisait trop longtemps. » ai-je dit sincère avant de reprendre. « On commande ou t'as déjà pris un truc ? »

Passer trop de temps sans voir des amis proches ne devraient pas être possible et pourtant s’était bien ce qu’il s’était passé entre la jeune avocate et le blondinet. En même temps, la vie de Sephora était un beau désastre en ce moment alors elle n’avait pas forcément envie d’enquiquiner tout le monde avec ses problèmes. Cependant, il était aussi concevable que ses amis aient aussi des problèmes sur lesquels ils voulaient se confier… Elle préférait donc quand même tenter de renouer le plus rapidement possible avec ses amis qui lui manquaient après cet accouchement qui avait changé sa vie, dans un sens négatif pour le moment… Mais elle n’en doutait pas, tout deviendrait rapidement positif et elle espérait que dans son couple tout se résoudrait aussi. Pour le moment, elle ne pouvait pas savoir, la seule chose qu’elle pouvait faire s’était de profiter de ce moment avec le blondinet et vider son sac tout en prenant l’avis du jeune homme sur la situation même si n’étant jamais passé par la paternité, pas encore, il aurait surement du mal à la conseiller pour quoique ce soit. Si le goût à sourire avait disparu chez elle depuis plusieurs semaines, lorsqu’elle vit Alec, il se dessina automatiquement sur ses lèvres. « Ca va plutôt pas mal aussi pour moi ma foi ! Ca va effectivement mieux maintenant que tu es là ! Le plaisir est partagé de passer un peu de temps avec toi parce que ça faisait vraiment trop longtemps ! » La jeune femme préférait éviter de plombait l’ambiance directement avec l’état critique des petits. Ils auraient le temps d’en parler après et puis le « ca va pas mal » de son ami lui laissait aussi penser qu’il avait des choses à cracher au bassinet alors la conversation promettait de ne pas être des plus courtes. « Je prendrais bien un petit un petit cappuccino vanille et toi ? » Elle s’était adressée alternativement à son ami et au serveur pour lui passer sa commande et attendait maintenant que le beau blond en face de même. Lorsque ce fut chose faite, il reporta son attention sur la brunette qui se décida à répondre à la question qu’elle avait volontairement omise quelques minutes plus tôt dans la conversation. « Sinon… Je n’ai pas encore récupéré les petits comme tu peux le voir… Ils sont maintenant viables, enfin c’est ce que les médecins veulent bien me laisser croire mais ils ne savent pas encore s’ils s’en sortiront sans aucune séquelle ! » La jeune femme sourit à la fin de sa phrase, s’était une manière de se rassurer comme elle pouvait, de penser qu’elle n’était pas une mauvaise mère et pourtant s’était tout l’inverse dans sa tête. Mais la jeune avocate ne voulait pas plomber l’ambiance de suite avec les petits alors elle préféra enchainer directement et de manière un peu détourner sur ce pourquoi elle avait fait venir son ami. « Enfin… Je crois qu’une petite demoiselle irait beaucoup mieux si elle avait un parrain… Si tu vois ce que je veux dire ! » Ce n’était pas la demande de parrainage la plus explicite de la terre mais c’était bien ce qui lui donnait tout son charme !

Un certain temps avait passé depuis la dernière fois que Sephora et moi nous étions vus, autant dire une éternité avec tout ce qui s'est passé dans nos vies récemment. Quand j'entre dans l'établissement et que je la trouve déjà installée à une table, un sourire apparaît par automatisme sur mon visage. Je m'installe en face d'elle tandis que nous échangeons les politesses d'usage quand deux personnes qui s'apprécient ne se sont pas vues depuis longtemps. « Ça va plutôt pas mal aussi pour moi ma foi ! Ça va effectivement mieux maintenant que tu es là ! Le plaisir est partagé de passer un peu de temps avec toi parce que ça faisait vraiment trop longtemps ! » répond Sephora. On dit que parfois, la vie sépare les gens. Ça a failli être le cas pour nous j'imagine, avec tous les changements dans sa vie dernièrement surtout. J'aurais aimé être présent physiquement d'ailleurs, pour la soutenir un maximum mais bon ... Ça n'est pas arrivé et puis quand j'y pense, je ne sais pas vraiment si j'aurais été le plus parfait des soutiens. Ces derniers temps j'ai d'ailleurs été loin du meilleur des amis. Alors oui quand Sephora confirme que ça fait lui fait vraiment plaisir de me voir, ça me du bien. Je doute qu'Azylis dise la même chose qu'elle quand elle reviendra d'Ukraine. Si elle revient. En tout les cas, en entendant les mots "vraiment trop longtemps" je ne peux m'empêcher de hocher la tête. « Oui beaucoup trop longtemps, faut qu'on évite de faire ça trop souvent d'ailleurs. » ai-je souri. Après tout on était proches avant tout ça, la perdre tout d'un coup de vue a été vraiment étrange. En tout cas j'ai forcément remarqué qu'elle n'a pas répondue à ma seconde question qui concerne ses enfants, ce qui veut forcément dire de mauvaises choses pour le moment. Bien sûr je n'ai rien dit. Je peux manquer parfois de délicatesse mais là ... ça serait beaucoup trop gros. Et puis je doute que Sephora est complètement gobé mon "ça va pas trop mal" d'il y a quelques secondes, comme je n'ai pas vraiment cru le sien. Puis, je lui demande si elle a commandé et le serveur apparaît au même moment. Elle commande un cappuccino vanille et en en ayant soudain envie aussi, je lance : « La même chose. » avant que le serveur reparte après avoir pris notre commande. Une fois cela fait, on reporte notre attention l'un sur l'autre et je sens soudain les sujets sérieux arriver. « Sinon… Je n’ai pas encore récupéré les petits comme tu peux le voir… Ils sont maintenant viables, enfin c’est ce que les médecins veulent bien me laisser croire mais ils ne savent pas encore s’ils s’en sortiront sans aucune séquelle ! » dit-elle avec un très léger sourire à la fin dont j'identifie sans mal la nature. Je l'utilise aussi parfois quand je dois raconter ce genre de chose, par exemple la mort de Julian. Pour moi ça veut en quelque sorte dire "mais tout va bien, faites pas attention". Je ne peux pas imaginer ce qu'elle traverse actuellement, n'étant pas du tout dans le truc de la paternité vu que je suis déjà à peine capable de m'occuper de moi-même. Mais la souffrance je connais, surtout quand ça concerne un être cher. « Je suis sur qu' ils iront bien à la fin de tout ça ... Ils ont une maman qui est forte, alors ils le sont aussi. Et toi tu sais que t'as pas à traverser ça toute seule ? » ai-je fait très sérieusement. Qui a cru que je pouvais être si diplomatique hein ? Ça m'arrive, avec les gens qui me connaissent bien, ceux à qui je tiens. Ces gens ont le droit au vrai moi, si je peux dire ça comme ça. « Enfin… Je crois qu’une petite demoiselle irait beaucoup mieux si elle avait un parrain… Si tu vois ce que je veux dire !» enchaîne Sephora. Je mets quelques secondes à comprendre ce que cette phrase veut dire. Son changement de ton me surprend sur le coup, tout me surprend parce que ... Qu'est-ce qu'elle vient de dire ? « Attends ... Tu veux que je sois le parrain de .... Je ... Wow ... Je serais honoré. Honnêtement je suis pas le meilleur avec les petits mais ... je ... ferais au mieux si t'es sure de toi. » ai-je répondu avec un sourire légèrement hébété. C'est pas le genre de chose qu'on me demande tous les jours alors ... C'est sûre que je m'attendais pas à ça mais vraiment, même si je suis dans une mauvaise période, je ne peux pas dire non.