Ce matin-là, je me réveillai avec à nouveau avec la bouche sèche, mal à la tête et j'en passe. J'avais la marque de la table sur la joue et la bouteille d'alcool vidée à moitié encore dans la main. Pourquoi est-ce que je m'entêtais à boire comme ça presque tous les soirs ? Au bout de presque onze mois, je voyais bien que ça ne changeait rien, je n'arrivais pas à oublier, à oublier Sun Hi. Penser à oublier par tous les moyens, non, pas elle. Jamais je ne pourrais l'oublier. Ce que je voulais oublier, c'était ce que mon père lui avait fait. Ce qu'il lui avait fait à elle mais aussi ce qu'il m'avait fait. Au delà d'avoir manigancé tout ça, je le détestais parce qu'il me faisait vivre dans la crainte qu'il ne débarque d'un jour à l'autre. Si jamais l'idée de me ramener à Séoul de force pour que je reprenne son entreprise lui venait à l'esprit, il n'aurait pas de mal à trouver, comme je vivais dans l'appartement que ma mère avait acheté dans NoHo lorsqu'elle y avait vécu, de ses vingt-deux ans à ses vingt-quatre ans. Famille tellement aisée que lorsqu'elle est partie pour Séoul elle n'a même pas eu besoin de le vendre... Si un jour l'idée lui venait, il n'aurait qu'à demander l'adresse à ma mère ou bien tout simplement à la faire chercher par sa secrétaire... je crois que je commence à devenir parano, moi. Il était tellement occupé à penser à son entreprise qu'il n'aurait pas l'idée ! Je me demandai quelle tête qu'il ferait s'il me voyait avec ma teinture rose. Peut être qu'il en ferait une attaque. Ça ne me dérangerait pas, c'était peut être pas sympa de penser ça, mais lui, est-ce qu'une seule fois dans sa misérable vie il avait agi de façon sympathique à mon égard ? Oui, une fois. La fois où il m'a offert du chocolat. Ça partait d'une bonne intention, c'est bien ça le pire. Même pas foutu d'être au courant des allergies de son fils. Une fois mon mal de tête plus ou moins passé -plus moins que plus- je me levai et parti vers la salle de bain. Prendre une douche me réveillera sûrement. Je restai une vingtaine de minutes sous l'eau, jusqu'à être bien réveillé. Je mit quelques minutes avant de trouver quoi mettre, et finit par opter pour le jean que j'avais mis la veille, un tee-shirt blanc et une veste kaki. Je mis ensuite mon alliance et les bijoux que j'ai l'habitude de mettre tous les jours et partis dans la cuisine me préparer du thé, histoire d'avoir quelque chose dans le ventre. Tandis que l'eau chauffait, je partis dans le salon chercher le manga que je lisais hier après-midi. Le marque page indiquait qu'il n'y avait plus rien à lire... Pourquoi est-ce que lire un manga est si rapide ? J'avais lu tant de manga que je finissais par finir un tome en moins d'une heure. Je soupirai, mis ma veste ainsi que mes lunettes de soleil malgré le fait que je doutais en avoir besoin. Quelques temps plus tard, j'arrivai dans Midtown, peu loin d'une librairie que j'avais remarqué quelques temps auparavant. Il était treize heures trente. Dans cette librairie, il y avait quelques mangas, mais vu la vitesse où je les lisais, je préférai me diriger vers le rayon des romans. A tout hasard, je partis vers les romans policiers. Il y avait une autre personne dans ce rayon. Non ? Je m'en approchai et lui tapotai l'épaule. « Nam-Kyu ? » Pas possible. « Qu'est-ce que tu fais à New York, vieux ? », demandai-je en coréen. Je m'attendais à tout sauf à le revoir ici...