Comme après chaque journée de travail, Caleb était exténué. Et pourtant, la journée était bien loin d’être terminée pour lui. En effet, depuis que Nolan vivait avec lui, le militaire ne pouvait plus compter sur le temps qu’il passait chez lui pour se reposer. Mais bien sûr, il ne s’en plaignait pas. Le bonheur que son fils lui prodiguait valait bien toute la fatigue du monde. Même s’il avait parfois l’impression que les jours duraient au moins quarante-huit heures, Caleb n’avait jamais regretté la décision qui l’avait poussé à s’occuper de son fils. Et le fait qu’à présent, Loan semblait prendre conscience des responsabilités qui lui incombaient en tant que mère ne faisait que renforcer le sentiment de satisfaction qu’il ressentait. Peu à peu, Nolan se retrouvait entouré d’une famille qui, même si elle était peu conventionnelle, était là pour l’aimer et lui apporter toute l’affection dont il avait besoin. Et pour cela, le petit garçon pouvait aussi compter sur sa tante, Salem. Dès qu’elle en avait l’occasion, la jeune femme le couvrait de cadeaux et elle ne rechignait jamais à l’accueillir chez elle, comme elle l’avait d’ailleurs fait aujourd’hui pendant que Caleb travaillait. Ce dernier était donc censé aller récupérer Nolan en fin d’après-midi mais avant ça, il décida de faire un crochet par son appartement, histoire de se changer et de prendre une petite douche. Après tout, Salem était tellement heureuse de garder son neveu,, et Nolan tellement réticent à l’idée de partir à chaque fois que son père venait le chercher… Il pouvait bien les laisser entre eux encore quelques minutes.

Mais à peine arrivé chez lui, le militaire n’ayant même pas eu le temps de retirer son uniforme entendit la sonnette retentir dans l’entrée. Intrigué, et quasiment persuadé qu’il s’agissait encore d’un vendeur qui faisait du porte-à-porte, le jeune homme se dirigea donc vers le couloir. Et quelle ne fut pas sa surprise lorsque ses yeux se posèrent sur… Athena. Cette fille qui avait longtemps partagé une relation si particulière avec lui. A la limite entre l’amitié profonde et le véritable coup de cœur. Mais désormais, c’était une toute autre relation qui les liait puisque la jeune femme était en couple avec un autre. Alors, Caleb avait du faire une croix sur les petits plus qu’ils s’accordaient quand ils étaient tous les deux, et se contentait désormais d’une relation des plus platoniques, reposant uniquement sur une amitié sincère. Au premier coup d’œil, le militaire remarqua que quelque chose clochait, mais il se garda bien de le faire remarquer. Au lieu de ça, il adressa un large sourire à Athena dont les yeux étaient décidément bien plus brillants que d’ordinaire. « Salut ! Désolée de débarquer comme ça... je dois te parler, tu es seul? » demanda-t-elle d’un ton qui fit instantanément disparaitre le sourire de Caleb. « Hey, euh… c’est rien, t’inquiètes pas ! Entre… Nolan n’est pas là. » balbutia-t-il alors en s’effaçant devant Athena pour la laisser entrer dans l’appartement. Comme à chaque fois qu’il la croisait, il lui offrit une étreinte des plus amicales, qu’il fit durer un peu plus longtemps que d’ordinaire en devinant qu’elle en avait besoin. Puis il se recula, et posa un regard rempli d’inquiétude sur elle : « Est-ce que ça va ? Tu n’as pas l’air dans ton assiette… ».

Le fait que Caleb aie élevé son fils seul et que celui-ci soit très bien la rassurait un petit peu, c'était la preuve qu'avec la volonté, même si elle n'avait personne, son bébé obtiendrait tout ce qu'il désirait. Elle se jurait de l'aimer pour deux si son père devait se faire absent. Elle ne pensait pas que Caleb l'abandonnerait, mais sachant qu'il était pratiquement improbable qu'il soit le père, ça ne l'aidait pas vraiment à se sentir mieux. Il serait là oui, mais pas non plus pour l'enfant d'un autre, il ne fallait pas exagérer... et c'est sans doute la réaction que risquait d'avoir son petit ami, ô joie. L'espace de quelques secondes, elle fut rassurée par le sourire que lui adressait Caleb en la découvrant, mais la réalité la rattrapait rapidement. Ce n'était pas une simple visite de courtoisie, Athena devait garder à l'esprit qu'il devait absolument savoir tant qu'elle s'en sentait capable. « Hey, euh… c’est rien, t’inquiètes pas ! Entre… Nolan n’est pas là. » Elle lui adressait un sourire, rassurée que son petit garçon ne soit pas là puisqu'elle ne tenait pas à devoir lui annoncer en tournant autour du pot pour qu'il soit le seul à comprendre. Entrant dans l'appartement, elle restait contre Caleb quelques instants, appréciant le fait de se sentir complètement en sécurité dans les bras du jeune homme. « Est-ce que ça va ? Tu n’as pas l’air dans ton assiette… » Elle eut une brève secousse, début d'un rire nerveux qu'elle rejetait finalement, ce n'était pas le moment d'en rire mais ses nerfs étaient soumis à rude épreuve depuis deux jours. C'était le moins qu'on puisse dire, elle n'était pas dans son assiette entre le stress et son estomac en feu, elle se sentait même au plus mal et pourtant heureuse à chaque fois qu'elle pensait au bébé en éliminant les complications de son esprit.

Marchant vers le milieu du salon comme si ces pas allaient lui permettre de se détendre, la géorgienne tournait à nouveau les taons pour faire face à son ami. Sur le coup, elle regrettait presque de ne pas avoir continué sa relation avec lui avec qui tout semblait si simple - jusque maintenant - et ce malgré le bonheur qu'Aaron lui apportait. « Promets-moi de rester calme parce que je pleure pour un rien et je n'ai franchement pas envie de le faire devant toi... » La dernière chose dont elle avait besoin était Caleb qui lui hurlait dessus même s'il en avait tous les droits. « On a peut-être un soucis... moi en tout cas c'est certain. » dit-elle, croquant automatiquement ses doigts nerveusement en détournant le regard. Elle allait tout gâcher dans leur relation, Athena le savait. Prenant une bonne inspiration, elle captait à nouveau le regard de Caleb et lançait dans un souffle, sans réfléchir « Je suis enceinte. ». La jeune femme lui adressait un sourire désolée, baissant les yeux de suite pour ne pas à voir sa réaction et les pensées qui allaient lui traverser l'esprit suite à cette annonce. Elle détestait le décevoir et ne voulait rien voir de négatif dans ses expressions, hors il était impossible qu'il saute de joie, ce qui était logique. Si elle était à sa place, elle ne prendrait en rien cette nouvelle comme quelque chose de positif, c'était un fait, ce qui ne lui laissait aucune justification à donner puisqu'elle le (les) comprenait.

Caleb avait beau être ravi de voir Athena chez lui, il eut le désagréable sentiment que la suite allait beaucoup moins lui plaire. D’ailleurs, à peine arrivée, la jeune femme avait planté le décor en lui annonçant qu’elle devait lui parler de quelque chose. Et d’expérience, le militaire savait que ce genre d’entrée en matière n’augurait rien de bon. C’est donc avec une certaine forme d’appréhension que Caleb prit Athena dans ses bras, se voulant rassurant sans même savoir pourquoi il avait besoin de l’être. Presque aussitôt, la jeune femme fila vers le salon et en constatant qu’elle faisait les cent pas dans la pièce, l’inquiétude de Caleb ne fit qu’augmenter d’un cran. Il referma alors la porte d’entrée en fronçant les sourcils puis se retourna vers elle pour la rejoindre. « Promets-moi de rester calme parce que je pleure pour un rien et je n'ai franchement pas envie de le faire devant toi... » Sans qu’il ne puisse vraiment les contrôler, les yeux du jeune homme s’écarquillèrent sous le coup de la surprise. Il ne savait toujours pas à quoi s’attendre, mais devinait déjà sans mal que ce qu’elle avait à lui dire était sérieux. Et Athena lui en apporta la confirmation presque immédiatement : « On a peut-être un soucis... moi en tout cas c'est certain. »

Une fois de plus, Caleb aurait voulu se montrer rassurant mais la curiosité qu’elle avait éveillé chez lui prenant le dessus, il resta silencieux, dans l’attente de l’aveu qu’elle était venue lui faire. Et autant dire que question aveu, le militaire ne fut pas déçu ! « Je suis enceinte. » lâcha finalement Athena, laissant son interlocuteur complètement bouche bée. Avant même qu’il ait pu assimiler l’information, les yeux de la jeune femme s’étaient baissé et il lui était désormais impossible de capter son regard. Il aurait voulu pouvoir y lire une pointe d’humour, y deviner une plaisanterie mais c’était bel et bien tout le contraire qui transparaissait dans le comportement d’Athena. Alors, Caleb secoua la tête et tenta d’articuler le plus clairement possible : « Euh… je… wow ! » Il passa une de ses mains sur son visage pour s’assurer qu’il n’était pas en train de rêver. Car cette situation avait pour lui un petit gout de déjà vu : quelques semaines seulement auparavant, Loan lui avait elle aussi annoncé sa grossesse dans ce même appartement. Et Caleb se serait volontiers passé de ce genre d’annonces à répétition. « T… tu veux dire que je… que c’est à cause de… moi ? » Comme si le ciel lui tombait sur la tête, Caleb était sonné, incapable de réfléchir clairement à ce que l’annonce d’Athena impliquait. Quoi qu’il en soit, il ne s’énerverait pas, pour une seule et bonne raison : il était peut-être autant coupable qu’elle dans l’histoire.

C’est donc en conservant un calme admirable que le militaire s’approcha d’Athena pour poser une main sur son épaule, et ainsi l’inciter à le regarder dans les yeux. « Est-ce qu’il est au courant ? Est-ce que… est-ce que tu es sûre ? » En effet, sa grossesse tombait au pire moment, juste quand la jeune femme trouvait un peu de stabilité en se mettant en couple avec Aaron. Dans un sens, Caleb la plaignait. Mais avant toute chose, le jeune homme voulait savoir quel rôle il jouait vraiment là-dedans. Ce n’est qu’après ça qu’il pourrait analyser la situation, et être véritablement utile à Athena, que ce soit pour la soutenir ou la consoler.

Le pire dans cette inquiétude était qu'Athena espèrait sincèrement qu'il soit le père. Tout aurait voulu qu'Aaron le soit, que sa vie ne soit pas complètement fichue auprès de son premier amour qu'elle aimait toujours à ce jour, et pourtant... elle ne le sentait pas bien du tout. Le fait qu'elle l'espère venait peut-être tout simplement du fait que Caleb était déjà papa, qu'il savait s'y prendre avec les enfants et qu'il risquait donc d'être le moins paniqué des trois. Toujours est-il qu'Athena aurait aimé disparaître six pieds sous terre pour ne pas avoir à leur annoncer la nouvelle et surtout à assumer ce qui allait en découler. « Euh… je… wow ! » L'avocate comprenait qu'elle l'avait prit complètement de court et n'osait relever la tête pour découvrir si ce wow était juste inattendu ou s'il y avait autre chose, comme de la colère. Elle méritait tellement qu'il s'énerve sur elle... et pourtant elle détestait l'idée qu'il puisse le faire. Si Caleb - Aaron ou Jallil - s'énervait, il en avait tous les droits et à part se taire et assumer les remarques et les conséquences de ses actes, la géorgienne ne pourrait rien faire. Pour quelqu'un qui détestait avoir tord, c'était plutôt inconfortable comme situation, même si encore une fois, elle savait parfaitement qu'elle me méritait. « T… tu veux dire que je… que c’est à cause de… moi ? » Malgré elle, elle ne put s'empêcher d'avoir u léger sourire, qui par chance ne devait pas se voir vu qu'elle avait toujours la tête baissée. Aussi dramatique que soit la situation, ce n'était pas à cause de l'un deux mais grâce à l'un deux qu'elle allait être maman. C'était inattendu, inapproprié et dans un moment très mal choisi, mais au fond d'elle, la jeune femme ne pouvait nier la joie qui l'habitait depuis qu'elle l'avait appris. Cette joie était juste masquée par ses craintes pour l'instant.

« Est-ce qu’il est au courant ? Est-ce que… est-ce que tu es sûre ? » Relevant la tête, Athena fronçait légèrement les sourcils, ne comprenant pas de suite de qui il voulait parler. Il lui fallut quelques secondes pour en arriver à Aaron, ses yeux se remplissant de larmes à l'instant même alors qu'elle agitait la tête négativement. Elle ne voulait même pas imaginer la tournure que sa vie allait prendre une fois que lui saurait. « Je ne sais pas du tout Caleb... Je suis tellement désolée... » Prenant une bonne inspiration, l'avocate levait à nouveau les yeux au ciel comme si les réponses allaient en tomber. « Tu te souviens de mes inquiétudes sur le fait de ne pas franchir les barrières? C'était à propos de ça... il n'y avait pas que toi, je voulais savoir si tu voyais notre relation comme exclusive ou pas parce que je culpabilisais... » Elle ne pouvait pas admettre d'un coup qu'elle l'avait "trompé" à deux reprises, surtout qu'elle n'avait finalement pas eut de réponse à sa question, préférant profiter de cette soirée parfaite plutôt que d'aller plus loin dans leur conversation. « On a toujours pris toutes les précautions, mais c'est jamais à 100% sur... Je suis désolée de t’inquiéter avec ça, il y a de grandes chances que tu ne sois pas concerné mais j'avais besoin d'en parler à quelqu'un. Et que tu ne le découvres pas par quelqu'un d'autre. » Surtout ça, car malheureusement, son ventre avait déjà pris une légère forme arrondie ce qui était tout à fait normal d'après sa gynécologue, un corps n'étant pas un autre. Certaines femmes pouvaient le cacher jusqu'à 5 mois, d'autres se retrouvaient dés le premier mois avec des formes... Histoire de payer ses erreurs, elle faisait bien évidemment partie de la seconde catégorie. « Aaron va me tuer... si tu veux le faire, fais toi plaisir, je suis certaine que tu feras ça vite pour abréger mes souffrances. » Ironisait-elle, tout en sachant qu'il n'y avait rien de drôle dans cette situation, tant pour elle que pour lui.

Caleb était totalement sonné par la révélation que venait de lui faire Athena et pourtant, il s’efforçait de ne rien montrer. Si elle était venue chez lui en premier, c’était bien parce qu’elle attendait un peu de soutien, et pas une myriade de remontrances ! Et puis de toute façon, s’il s’avérait qu’elle était véritablement enceinte et qu’il était le père de l’enfant, il aurait autant de torts qu’elle dans l’histoire. Il ne servait donc à rien de s’emporter avant d’en savoir plus. C’est donc d’un ton qui eut du mal à cacher sa fébrilité que le militaire demanda plus de détails, plus s’explications afin d’y voir un peu plus clair. « Je ne sais pas du tout Caleb... Je suis tellement désolée... » murmura-t-elle alors que le jeune homme pouvait très clairement voir ses yeux s’emplir de larmes. Cette simple image suffisait à lui serrer le cœur, et sans vraiment le vouloir, une expression de désolation prit place sur son visage, alors qu’Athena semblait vouloir continuer ses explications, aussi douloureuses soient-elles. « Tu te souviens de mes inquiétudes sur le fait de ne pas franchir les barrières? C'était à propos de ça... il n'y avait pas que toi, je voulais savoir si tu voyais notre relation comme exclusive ou pas parce que je culpabilisais... » Tout à coup, tout s‘éclairait dans l’esprit de Caleb. Il comprenait à présent toutes les inquiétudes qu’elle avait pu avoir par le passé, et se trouvait soudain particulièrement stupide de ne pas avoir pu lui répondre. A vrai dire, ils n’étaient jamais vraiment sortis ensemble à proprement parler. Alors le fait qu’elle ait vu d’autres hommes pendant leur relation, même s’il n’accueillait pas la nouvelle avec une grande joie, ne le dérangeait pas outre mesure. Lui-même ne lui avait pas totalement été fidèle puisqu’il avait couché à plusieurs reprises avec Tayla. Alors, il voulut la rassurer sur ce point (mieux valait tard que jamais), mais elle enchaina sans vraiment lui en laisser le temps en lui assurant qu’il y avait très peu de chances pour qu’il soit le père biologique de cet enfant.

Caleb était bien conscient d’avoir prit toutes les précautions nécessaires, mais comme elle venait de le lui rappeler, rien n’était jamais sûr à 100 %. Une légère vague d’angoisse vint alors l’envahir, alors qu’Athena se mettait à ironiser sur son propre sort. La détresse qu’elle ressentait était telle que Caleb pouvait la ressentir à distance. Aussi, il lâcha un dernier soupir avant de s’avancer brusquement vers elle. Il n’allait pas la tuer, non. Juste la prendre dans ses bras et la serrer très fort contre lui pour lui prouver qu’il était là, et qu’elle pouvait entièrement se reposer sur lui si elle en avait besoin. « Hey… T’en fais pas, j’ai pas l’intention de te tuer… Au contraire, je veux être là pour toi, même si je ne suis pas le père de cet enfant… » souffla-t-il en fermant les paupières quelques instants. Le simple fait de prononcer le mot « père » une nouvelle fois avait beau le faire frissonner, il était assez grand pour faire fasse à ses responsabilités sans flancher. « Tu as bien fait de venir ici en premier… » lâcha-t-il en la serrant un peu plus contre lui. « Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas, d’accord ? Est-ce que… est-ce que tu vas faire des tests ? Je veux dire, avant d’en parler à Aaron ? »