Sephora & Leroy

Son cœur se serra dans sa poitrine et sa mâchoire se crispa bien malgré lui. Il avait mal au cœur de la voir réagir ainsi, mal au cœur pour cette toute petite poupée qui ne comprenait pas ce qui se passait dans sa vie ces derniers temps. D’une famille heureuse qui s’apprêtait à fêter un heureux évènement elle se retrouvait bien seule. Lui ? Il faisait tout pour combler ce vide et tentait de faire en sorte que la petite fille ne pense pas trop au départ de ses parents, mais c’était bien la première fois qu’il était confronté à ce genre de situation. Kalea avait dû tenter de comprendre la raison pour laquelle le ventre de sa mère avait retrouvé une apparence normale sans que son petit frère soit là. Elle avait dû tenter de comprendre les raisons des disputes de ses parents, puis la raison qui avait poussé son père à partir sans jamais y parvenir. Aujourd’hui, il savait que la petite essayait de comprendre pour quelles raisons sa mère était partie la forçant à vivre chez son oncle. Leroy savait … c’était sans doute ça le pire, le fait de savoir mais de ne pas pouvoir l’informer parce qu’elle était bien trop petite pour comprendre que sa mère l’avait confié à son oncle pour sa sécurité parce qu’elle devait traquer son père biologique qui avait découvert qu’elle n’était pas morte comme elle avait pu le faire croire ces dernières années. C’était à l’agent de s’occuper de Kalea à la fois parce que le père de l’enfant avait pris la fuite sans donner le moindre signe de vie depuis bientôt trois mois, mais aussi parce qu’Emilie-Jane avait décidé qu’en cas de problème son frère aîné serait celui qui serait en charge de l’enfant. Quelque part ça l’entraînait à son futur rôle et Lennie-Jane l’épaulait beaucoup avec la petite fille, mais il aurait tant aimé que ça se fasse dans d’autre circonstance afin qu’il n’ait pas à s’inquiéter à la fois du bien-être de sa nièce et de la survie de sa petite sœur.

Chaque jour il faisait bonne figure cependant il savait que ses plus proches amis, que sa petite-amie, devinaient aisément que ce n’était qu’un masque qu’il revêtait pour tenir le coup et pour ne pas inquiéter sa nièce. Leroy avait probablement besoin de souffler de remettre ses idées en place afin de savoir exactement comment agir et réagir à cette situation, toutefois il ne s’en donnait pas le temps tout simplement parce qu’il n’avait pas le droit de baisser les bras ne serait-ce qu’une journée. Il s’occupait au mieux de sa nièce tout en jonglant avec son travail, sa couverture et sa vie de couple à laquelle il tenait plus que tout. Il était certes épuisé, mais il tenait parce qu’à ses yeux il n’avait pas le choix, il ne pouvait pas faillir à sa tâche comme il l’avait fait quelques années auparavant avec sa sœur. Seulement, la vie semblait avoir un drôle d’humour ces derniers temps et afin de lui donner un coup de plus sur la tête, le père de Kalea était revenue dans l’espoir de récupérer sa fille, ce que Leroy refusait catégoriquement. Certes, il était son père mais ce n’était pas ce qui l’avait empêché de fuir à la première dispute, à la première peur pour sa vie et l’agent refusait que sa nièce parte vivre avec un homme tel que lui. Il avait dès lors commencé à ressembler divers faits et monté un dossier comme il l’aurait fait avec une quelconque affaire, sauf que celle-ci le touchait de près. Il refusait de le laisser gagner et puisque sa sœur avait jugé qu’il serait celui qui obtiendrait la garde – même que temporaire – de Kalia en cas de problème, il comptait bien faire que ça reste ainsi et ce même s’il devait passer devant le tribunal. Ce fut d’ailleurs le seul choix que son beau-frère lui laissa et Leroy avait fini par prendre rendez-vous avec une avocate afin de préparer un probable procès même s’il lui avait sans doute mâché le travail, les manies d’être agent de la CIA.

Bien qu’il se soit levé tôt en s’assurant de ne pas réveiller sa nièce, cette dernière dormait d’un sommeil tellement léger qu’elle ne tarda pas à le rejoindre dans la cuisine où il fut forcé de s’occuper à la fois d’elle et de lui. Le petit-déjeuner se passa dans un silence quasi religieux jusqu’à ce qu’il la mette devant des dessins animés le temps de se préparer, de s’assurer de n’oublier aucun papiers jusqu’à ce que James, l’un de ses collègues, arrive pour se charger de surveiller la petite. Emilie-Jane étant un agent d’Interpole mais également une personne bénéficiant d’une protection des témoins, dès qu’elle avait dû repartir en mission et traquer son père, sa fille avait immédiatement bénéficié des mêmes protections et se devait d’être en présence d’un agent dès que Leroy n’était pas prêt d’elle. Seulement, lorsque l’agent s’apprêta à partir, la petite se précipita hors du canapé et s’accrocha à sa jambe pour lui faire comprendre de ne pas partir, lui arrachant une grimace de douleur. Tout d’abord silencieux, le jeune homme s’agenouilla de sorte à être un tant soit peu à sa hauteur et lui adressa un sourire qu’il voulait rassurant. « Ça va aller Lia … j’en ai juste pour quelques heures et après on ira faire un tour tous les deux, d’accord ? ». L’enfant le regarda droit dans les yeux et eut un moment d’hésitation avant d’opiner du chef et de se décrocher de sa jambe. Cette image lui resta en tête durant tout le trajet le menant au cabinet où il avait rendez-vous. Il ne supportait pas de voir des enfants aussi mal, surtout lorsque ces derniers n’avaient rien demandé et qu’ils auraient dû encore baigner dans une totale innocence. Leroy voulait la protéger du monde extérieur, de la dure vie que menait sa mère et lui-même mais c’était si difficile, cependant il allait s’efforcer de l’aider au maximum et ça commençait par empêcher son père de partir avec elle, raison pour laquelle il était à présent assis dans la salle d’attente du cabinet.